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31/05/2016 | FRANCE | N°15NC00233

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 31 mai 2016, 15NC00233


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI Quercus a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision du 23 mai 2013 par laquelle le président du conseil général de la Meuse, agissant sur délégation de l'agence nationale de l'habitat, a rejeté son recours gracieux tendant à ce qu'il retire la décision du 19 novembre 2012 décidant le retrait des subventions qui lui avaient été accordées pour des travaux de réhabilitation d'un immeuble situé 2, rue du Château Bas à Commercy et ordonnant le reversement de l'acompte déj

à versé.

Par un jugement n° 1301719 du 2 décembre 2014, le tribunal administrati...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI Quercus a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision du 23 mai 2013 par laquelle le président du conseil général de la Meuse, agissant sur délégation de l'agence nationale de l'habitat, a rejeté son recours gracieux tendant à ce qu'il retire la décision du 19 novembre 2012 décidant le retrait des subventions qui lui avaient été accordées pour des travaux de réhabilitation d'un immeuble situé 2, rue du Château Bas à Commercy et ordonnant le reversement de l'acompte déjà versé.

Par un jugement n° 1301719 du 2 décembre 2014, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 3 février 2015, la SCI Quercus, représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 2 décembre 2014 ;

2°) d'annuler la décision du 23 mai 2013 ;

3°) de mettre à la charge de l'agence nationale de l'habitat une somme de 900 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les modifications apportées aux travaux d'isolation et d'installation de chauffage ont été acceptées par l'agence nationale de l'habitat qui a versé un acompte sur le montant de la subvention après une visite des lieux réalisée par le comité meusien d'amélioration de l'habitat (CMAL) ;

- les travaux réalisés bénéficient à tous les occupants de l'immeuble ;

- les modifications apportées en cours de travaux par rapport au projet se justifient non par une volonté d'économie mais par des motifs techniques ;

- l'entreprise Multi Services à qui les travaux avaient été confiés a été placée en liquidation judiciaire en septembre 2011, obligeant la SCI à recourir à d'autres prestataires, ce qui explique les écarts entre les devis initiaux établis par cette société et les travaux réalisés ;

- elle a transmis les devis tels qu'ils lui ont été présentés sans volonté de frauder ; les différences entre les factures et les travaux réalisés résultent des modifications acceptées de fait lors de la visite du 5 juillet 2010 et du non-respect par l'entreprise Multi services de ses engagements.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 octobre 2015, l'agence nationale de l'habitat (ANAH) conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la SCI Quercus sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la SCI Quercus s'était engagée à réaliser les travaux de rénovation conformément au projet présenté dans sa demande de subvention et ne l'a pas avisée des modifications apportées au projet présenté ;

- le centre meusien d'amélioration du logement qui aurait visité les lieux avant le versement de l'acompte, n'était pas mandaté par l'agence pour approuver les modifications et ne l'a pas informée de ces dernières ;

- l'acompte sur le montant de la subvention a été versé au vu des factures intermédiaires présentées par la requérante ;

- la requérante ne conteste pas sérieusement la non-conformité des travaux d'isolation, de chauffage et de réalisation de salle de bains au projet initial et l'absence de réalisation des travaux de finition ;

- elle a également méconnu l'engagement selon lequel le logement devait répondre à l'obligation de décence ;

- en certifiant, pour le paiement du solde de la subvention, que les travaux avaient été réalisés conformément aux engagements pris, la SCI Quercus a commis une fausse déclaration en vue d'obtenir le versement de la subvention.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Kohler, premier conseiller,

- les conclusions de M. Laubriat, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., substituant MeA..., représentant l'ANAH.

1. Considérant que la SCI Quercus relève appel du jugement du 2 décembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 23 mai 2013 par laquelle le président du conseil général de la Meuse a rejeté son recours gracieux dirigé contre la décision du 19 novembre 2012 par laquelle cette autorité a décidé le retrait des subventions qui lui avaient été accordées pour des travaux de réhabilitation d'un immeuble situé 2, rue du Château Bas à Commercy et le reversement de l'acompte déjà versé ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 321-2 du code de la construction et de l'habitation dans sa version applicable : " Dans le cadre de sa mission définie à l'article L. 321-1, l'agence apporte son aide financière sous forme de subventions aux bénéficiaires mentionnés aux articles R. 321-12 (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 321-12 du même code dans sa version applicable : " I.-L'agence peut accorder des subventions : /1° Aux propriétaires ou à tout autre titulaire d'un droit réel conférant l'usage des locaux pour des logements qu'ils donnent à bail ou, dans des conditions fixées par le règlement général de l'agence, qu'ils mettent à disposition d'autrui et qui sont occupés dans les conditions prévues à l'article R. 321-20 ; (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 321-18 du même code : " La décision d'octroi de subvention mentionne les caractéristiques principales du projet, le montant de la subvention, les conditions de son versement et les dispositions relatives à son reversement éventuel ainsi que le comptable assignataire. (...) /La subvention est versée, sur déclaration d'achèvement de l'opération, après vérification de la conformité des opérations réalisées avec les caractéristiques du projet sur lesquelles la décision d'attribution a été fondée. La subvention est versée sur présentation des justificatifs précisés par le règlement général de l'agence, en particulier des factures des entreprises, sauf cas exceptionnels dus, notamment, à la défaillance de l'entreprise chargée des travaux. (...) / Dans le cas où les travaux ne sont pas engagés dans ce délai ou si la décision d'attribution de la subvention est retirée ou annulée, l'avance déjà perçue donne lieu à remboursement dans les conditions prévues à l'article R. 321-21 " ; qu'aux termes de l'article R. 321-21 du même code : " I. - En ce qui concerne les aides versées par l'agence : (...) / Le retrait de l'aide versée par l'agence est prononcé et le reversement des sommes perçues exigé s'il s'avère que celle-ci a été obtenue à la suite de fausses déclarations ou de manoeuvres frauduleuses " ;

3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que les subventions conditionnelles accordées par l'ANAH ne créent de droits au profit de leurs bénéficiaires que pour autant que ceux-ci justifient, après l'achèvement des travaux et dans le délai imparti, que les conditions imposées lors de l'attribution de l'aide se trouvent effectivement réalisées ; que la subvention peut être retirée et donner lieu, le cas échéant, à un ordre de reversement en cas de fausse déclaration ou de manoeuvre frauduleuse de son bénéficiaire ;

4. Considérant qu'en l'espèce, la SCI Quercus a présenté le 31 mars 2009 auprès de la délégation locale de l'ANAH une demande d'aide financière en vue de la réalisation de travaux de réhabilitation de douze appartements conventionnés dans un immeuble situé 2, rue du Château Bas à Commercy ; que l'octroi de cette subvention était notamment subordonné à l'engagement par la SCI Quercus de faire réaliser les travaux conformément au projet présenté ; que par une décision du 16 juillet 2010, le président du conseil général de la Meuse a décidé d'attribuer une subvention d'un montant de 132 833 euros à la SCI Quercus lui précisant que " toute modification envisagée sur la nature, les conditions de réalisation des travaux (...) devra être immédiatement portée à la connaissance de sa délégation. Elle pourrait remettre en cause l'attribution de la subvention. De même, toute fausse déclaration ou tout renseignement erroné ou frauduleux ne pourra qu'entraîner l'annulation de cette subvention " ; que, par une décision du 16 août 2010, la SCI Quercus a perçu un acompte de 92 983 euros sur le montant de cette subvention ;

5. Considérant que, pour décider le retrait de la subvention et ordonner le reversement de l'acompte déjà accordé à la SCI Quercus, le président du conseil général de la Meuse s'est notamment fondé sur un rapport établi le 24 mai 2012 par le responsable de la délégation locale de l'ANAH qui a mis en évidence que les travaux réalisés pour six des douze appartements ne correspondaient pas aux travaux facturés par l'entreprise Multiservices ; que la SCI Quercus, qui ne conteste pas les écarts relevés par l'ANAH dans son rapport, se borne à soutenir que la configuration de certains appartements rendait impossible l'installation d'une baignoire et que les modifications apportées aux travaux d'isolation et de chauffage seraient justifiées dès lors que la solution d'une isolation extérieure serait plus efficace et que le chauffage électrique permettrait une plus grande souplesse d'utilisation, sans contester les différences relevées entre les factures et les travaux effectivement réalisés ; que si la SCI Quercus soutient que les modifications apportées au projet auraient été approuvées par l'ANAH qui a accepté le versement d'un acompte, après une visite effectuée le 5 juillet 2010 par le centre meusien d'amélioration de l'habitat, il ne résulte pas de l'instruction que l'ANAH aurait mandaté cet organisme afin de vérifier la conformité des travaux au projet initial ; qu'enfin, la circonstance que la SCI Quercus se serait heurtée à des difficultés au cours de l'exécution des travaux, en raison notamment du placement de l'entreprise Multi Services en liquidation judiciaire, l'obligeant à recourir à d'autres prestataires, est sans incidence sur l'absence de concordance entre les factures présentées et les travaux réalisés ; que la circonstance selon laquelle les travaux de finition seraient depuis lors terminés est également sans emport ; qu'il résulte de ce qui précède que la SCI Quercus, qui a sollicité le 28 décembre 2011 le paiement du solde de la subvention sur la base de factures ne correspondant pas aux travaux effectivement réalisés, doit ainsi être regardée comme ayant tenté d'obtenir le versement d'une subvention sur le fondement d'une fausse déclaration ; que, par suite, en décidant de retirer la subvention qui avait été accordée à la SCI Quercus, le président du conseil général de la Meuse, n'a pas entaché ses décisions d'une erreur manifeste d'appréciation ; que l'ANAH pouvait également légalement ordonner le remboursement de l'acompte versé ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SCI Quercus n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande ;

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'ANAH, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la SCI Quercus demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la SCI Quercus une somme de 1 500 euros à verser à l'ANAH sur le fondement des mêmes dispositions ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SCI Quercus est rejetée.

Article 2 : La SCI Quercus versera à l'agence nationale de l'habitat une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Quercus et à l'agence nationale de l'habitat.

Copie en sera adressée au département de la Meuse.

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N° 15NC00233


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC00233
Date de la décision : 31/05/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

38-03 Logement. Aides financières au logement.


Composition du Tribunal
Président : M. TREAND
Rapporteur ?: Mme Julie KOHLER
Rapporteur public ?: M. LAUBRIAT
Avocat(s) : TERZIC

Origine de la décision
Date de l'import : 17/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-05-31;15nc00233 ?
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