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05/07/2016 | FRANCE | N°15NC02537

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 05 juillet 2016, 15NC02537


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 7 août 2015 par lequel le préfet de la Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être renvoyé.

Par un jugement n° 1501761 du 24 novembre 2015, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une

requête enregistrée le 24 décembre 2015, M. A..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 7 août 2015 par lequel le préfet de la Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être renvoyé.

Par un jugement n° 1501761 du 24 novembre 2015, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 24 décembre 2015, M. A..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 24 novembre 2015 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 7 août 2015 pris à son encontre par le préfet de la Marne ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Marne de lui délivrer une carte de séjour temporaire assorti d'une autorisation de travail, à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient :

S'agissant de la décision de refus de titre de séjour, que :

- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que le préfet ne pouvait rejeter sa demande sur l'unique classement sans suite de son dossier par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi et qu'il justifie d'expériences professionnelles ;

- elle méconnaît la circulaire du 28 novembre 2012 ;

- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français, que :

- cette décision est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour les mêmes motifs que ceux précédemment exposés ;

- elle méconnaît la circulaire du 28 novembre 2012 ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

S'agissant de la décision fixant le pays de destination, que :

- cette décision est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 avril 2016, le préfet de la Marne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Michel, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M. A..., ressortissant camerounais né le 29 octobre 1980, a déclaré être entré en France le 2 octobre 2007 ; que sa demande du 10 mars 2009 tendant à la délivrance d'un titre de séjour en qualité de salarié a été rejeté par un arrêté du 7 avril 2009 ; que l'intéressé a sollicité le 3 mars 2014 son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en se prévalant d'un contrat de travail avec la " SARL Inno Multi Services " ; que par un arrêté du 13 août 2014, le préfet de la Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français, qui a été annulé par un jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 2 décembre 2014 ; que M. A... a sollicité au mois de mars 2015 le réexamen de sa demande d'admission exceptionnelle au séjour en se prévalant d'un contrat de travail et de ses attaches familiales sur le territoire français ; que par un arrêté du 7 août 2015, le préfet de la Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être renvoyé ; que M. A... relève appel du jugement du 24 novembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la décision de refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-10 du même code : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : / 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail. / Pour l'exercice d'une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national par l'autorité administrative, après consultation des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives, l'étranger se voit délivrer cette carte sans que lui soit opposable la situation de l'emploi sur le fondement du même article L. 341-2 (...) " ;

3. Considérant, d'une part, qu'en présence d'une demande de régularisation présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " ; que, dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ou d'un contrat de travail ne saurait être regardé, par principe, comme attestant par là-même des motifs exceptionnels exigés par la loi ; qu'il appartient en effet à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger, ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour ; que, d'autre part, le dispositif de régularisation institué à l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'a pas pour objet de dispenser l'étranger, avant qu'il ne commence à exercer une activité professionnelle, d'obtenir l'autorisation de travail exigée par le 2° de l'article L. 5221-2 du code du travail auquel renvoie l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, toutefois, la procédure permettant d'obtenir une carte de séjour pour motif exceptionnel est distincte de celle de l'article L. 5221-2, de sorte qu'il n'est pas nécessaire que l'autorisation de travail soit délivrée préalablement à ce qu'il soit statué sur la délivrance de la carte de séjour temporaire ;

4. Considérant que M. A... a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en se prévalant d'un contrat de travail à temps complet en qualité de chef d'équipe en bâtiment avec la société " K Net Entreprise " ; qu'il ressort des pièces du dossier et notamment des termes de la décision en litige qu'après consultation la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, le préfet de la Marne, contrairement à ce que soutient le requérant, a apprécié si la demande de M. A... répondait à des considérations humanitaires ou se justifiait au regard de motifs exceptionnels, en prenant en compte l'absence de justification par l'intéressé de qualifications et d'une expérience utile en vue d'occuper l'emploi pour lequel il a fourni un contrat de travail, ainsi que ses conditions de séjour en France et les éléments de sa vie privée et familiale ; qu'en outre, il ressort des pièces du dossier que si M. A... justifie avoir travaillé en qualité de chef d'équipe en bâtiment au sein de la société " JMA Bâtiment " et en qualité d'agent de service au sein de la société " K Net Entreprise ", le préfet de la Marne n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en considérant que ces éléments ne constituaient pas des motifs humanitaires ou exceptionnels au sens des dispositions précitées ; que, par ailleurs, M. A... ne peut utilement se prévaloir des orientations générales de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière ;

5. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

6. Considérant que M. A... soutient qu'il dispose d'attaches fortes en France où il réside depuis sept ans, qu'il a divorcé le 20 janvier 2011 et qu'il vit maintenant en concubinage avec un ressortissante étrangère titulaire d'une carte de résident ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. A... ne justifie pas, par des documents suffisamment probants, vivre de manière continue en France depuis le 2 octobre 2007 ; qu'en outre, s'il soutient vivre en concubinage depuis 2008 avec Mme K., la continuité de cette relation, qui d'ailleurs n'a pas été portée à la connaissance du préfet par l'intéressé et qui est contestée par ce dernier, n'est pas justifiée par le requérant qui ne produit aucune pièce, alors qu'il ressort des pièces du dossier que les courriers qui lui sont adressés mentionnent une adresse distincte de celle qu'il a déclaré avec sa compagne ; que, par ailleurs, M. A... n'établit pas qu'il ne pourrait pas poursuivre une vie privée et familiale normale dans son pays d'origine avec son fils, né le 8 avril 2006 d'une précédente relation, et où réside notamment deux de ses enfants ; que, par suite, dans les circonstances de l'espèce, la décision de refus de séjour en litige n'a pas porté au droit de M. A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, dès lors, le moyen tiré de l'inexacte application des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

Sur les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination :

7. Considérant, en premier lieu, que le requérant ne peut utilement se prévaloir à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français du moyen tiré de l'erreur manifeste dans l'application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

8. Considérant, en deuxième lieu, que pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 4 et 5 du présent arrêt, les moyens tirés de la méconnaissance de la circulaire du 28 novembre 2012 et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés ;

9. Considérant, en dernier lieu, que M. A... n'établit pas l'illégalité des décisions du préfet de la Marne refusant de lui délivrer un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français ; que, dès lors, les moyens tiré de l'exception d'illégalité de ces décisions doivent être écartés ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Marne.

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N° 15NC02537


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC02537
Date de la décision : 05/07/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: M. Alexis MICHEL
Rapporteur public ?: M. LAUBRIAT
Avocat(s) : E.I.R.L. SABRINA TCHAMBAZ

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-07-05;15nc02537 ?
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