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09/02/2017 | FRANCE | N°16NC00597

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 09 février 2017, 16NC00597


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 6 novembre 2015 par lequel le préfet du Territoire de Belfort lui a fait obligation de quitter le territoire sans délai et fixé le pays de destination en cas d'exécution d'office de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 1501988 du 22 mars 2016, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée le 11 avril 2016 sous le n° 16N

C00597, M.B..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1501988...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 6 novembre 2015 par lequel le préfet du Territoire de Belfort lui a fait obligation de quitter le territoire sans délai et fixé le pays de destination en cas d'exécution d'office de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 1501988 du 22 mars 2016, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée le 11 avril 2016 sous le n° 16NC00597, M.B..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1501988 du 22 mars 2016 du tribunal administratif de Besançon ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Territoire de Belfort du 6 novembre 2015 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application de l'article 37 de la loi sur l'aide juridique.

M. B...soutient que :

- c'est à tort que le tribunal a rejeté sa requête comme tardive ;

- la décision du préfet porte une atteinte excessive à son droit à une vie familiale normale dès lors qu'il vit en couple et envisage de fonder une famille ;

- le préfet a commis une erreur de fait en estimant qu'il n'avait aucune adresse ni attache en France.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 septembre 2016, le préfet du Territoire de Belfort conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevé par le requérant n'est fondé.

II. Par une requête, enregistrée le 13 juillet 2016 sous le n° 16NC01486, M.B..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1501988 du 22 mars 2016 du tribunal administratif de Besançon ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Territoire de Belfort du 6 novembre 2015 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application de l'article 37 de la loi sur l'aide juridique.

M. B...soutient que :

- c'est à tort que le tribunal a rejeté sa requête comme tardive ;

- la décision du préfet porte une atteinte excessive à son droit à une vie familiale normale dès lors qu'il vit en couple et envisage de fonder une famille ;

- le préfet a commis une erreur de fait en estimant qu'il n'avait aucune adresse ni attache en France.

En application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative, le président de la 1ère chambre a, par ordonnance du 18 octobre 2016, décidé qu'il n'y avait pas lieu d'instruire cette requête.

M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 juillet 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Rees, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... B..., ressortissant algérien né le 27 février 1992, est entré irrégulièrement en France le 24 octobre 2015. Par un arrêté du 6 novembre 2015, le préfet du Territoire de Belfort lui a fait obligation de quitter le territoire sans délai et a fixé le pays de destination en cas d'exécution d'office de la mesure d'éloignement.

2. Par deux requêtes distinctes, enregistrées sous les nos 16NC00597 et 16NC01486, M. B... relève appel du jugement du 22 mars 2016 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

3. Les deux requêtes susvisées sont parfaitement identiques et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par un même arrêt.

Sur la régularité du jugement contesté :

4. Le tribunal a rejeté la demande de M. B...comme irrecevable au motif qu'elle avait été enregistrée à son greffe après que le délai de recours fixé par le II de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile eût expiré.

5. En vertu des dispositions du II de l'article L. 512-1 de ce code, ainsi que de ses articles R. 776-2 et R. 776-5, l'étranger faisant l'objet d'une obligation de quitter le territoire sans délai qui lui est notifiée par voie administrative dispose d'un délai de 48 heures, qui court à compter de cette notification et n'est susceptible d'aucune prorogation, pour saisir le tribunal administratif de son éventuelle contestation. Toutefois, cette notification ne lui est opposable qu'à la condition d'être régulière. Tel n'est pas le cas lorsqu'elle comporte une ambiguïté de nature à induire en erreur le destinataire quant aux voies et délais de recours qui lui sont ouverts pour contester la décision et à faire ainsi obstacle à l'exercice de son droit à un recours contentieux effectif.

6. En l'espèce, l'information sur les voies et délais de recours, annexée à l'arrêté litigieux, mentionne la possibilité de former un recours gracieux ou un recours hiérarchique dans un délai de deux mois, ainsi que la possibilité de présenter un recours contentieux dans un délai de 48 heures, et précise que le recours juridictionnel n'est pas prorogé par la présentation préalable d'un recours administratif. Toutefois, le procès-verbal de notification de l'arrêté, dressé le 6 novembre 2015 à 18 heures 45, mentionne quant à lui qu'il a été indiqué à l'intéressé qu'il " peut contester la légalité de l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et former un recours qui doit être enregistré au greffe du TA de Besançon ". La contradiction entre cette information et celle figurant dans le document annexé à l'arrêté est de nature à avoir induit en erreur M. B...sur le délai dont il disposait pour présenter un recours contentieux. Dans ces conditions, la notification par voie administrative n'a pas pu faire courir le délai de recours contentieux contre l'arrêté litigieux.

7. Dès lors, la demande de M.B..., enregistrée le 16 décembre 2015 au greffe du tribunal administratif, ne peut être regardée comme tardive. Le jugement attaqué, qui l'a regardée comme telle, doit donc être annulé.

8. En conséquence de cette annulation, il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande que M. B...avait présentée devant le tribunal administratif de Besançon.

Sur la légalité de l'arrêté du 6 novembre 2015 :

9. M. B...soutient en premier lieu que le préfet a commis une erreur de fait en estimant qu'il n'avait ni domicile ni attache familiale en France.

10. Toutefois, ces informations résultent de ses propres déclarations, retranscrites dans le procès-verbal de son audition dressé le 6 novembre 2015 à 15 heures 15. En outre, le requérant n'apporte aucun élément concret qui soit de nature à les remettre en cause. S'il affirme vivre en couple avec MlleD..., de nationalité française, il n'établit ni même n'allègue que cette vie de couple serait antérieure à la date de l'arrêté attaqué et l'attestation établie par Mlle D...le 16 décembre 2015 ne l'indique pas non plus. M. B... n'établit pas davantage qu'il possédait une adresse fixe en France à la date du 6 novembre 2015.

11. L'erreur de fait alléguée n'est ainsi pas établie.

12. M. B...soutient en deuxième lieu que le préfet a porté une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Il invoque à cet égard son intégration en France, sa vie de couple avec MlleD..., avec laquelle il réside et entend fonder une famille, le dossier de mariage qu'ils ont déposé le 26 mars 2016 et la grossesse de Mlle D..., enceinte de 19 semaines au 11 avril 2016, date d'enregistrement de la requête n° 16NC00597.

13. Toutefois, ainsi qu'il a été dit au point 11, la réalité de la vie de couple alléguée n'est pas établie à la date de l'arrêté litigieux. L'existence même de la relation invoquée ne l'est pas davantage puisqu'à la date du 6 novembre 2015, M. B...ne se trouvait en France que depuis deux semaines et déclarait n'y avoir aucune attache et vouloir se rendre en Allemagne. Ainsi, à supposer même établies les affirmations de M. B...quant à son projet de mariage avec Mlle D...et à la grossesse de cette dernière, il ne peut utilement se prévaloir de ces attaches familiales nées postérieurement à la date de l'arrêté attaqué.

14. Dès lors qu'à cette date, le requérant était célibataire, sans enfant à charge, présent sur le territoire français depuis seulement deux semaines et non dépourvu d'attaches dans son pays d'origine, où il avait résidé jusqu'à l'âge de 23 ans, il n'est pas fondé à soutenir qu'en l'obligeant à quitter sans délai le territoire français, le préfet a porté une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale.

15. En troisième lieu, en se bornant à faire valoir des raisons humanitaires ainsi que ses craintes en cas de retour dans son pays d'origine, sans préciser autrement ces affirmations et sans apporter le moindre élément pour les étayer, M. B...ne met pas la cour à même d'apprécier l'incidence qu'elles pourraient avoir sur la légalité de l'arrêté attaqué.

16. Il résulte de ce qui précède que la demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif, tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 novembre 2015 par lequel le préfet du Territoire de Belfort lui a fait obligation de quitter le territoire sans délai et fixé le pays de destination en cas d'exécution d'office de la mesure d'éloignement, ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, ne peuvent qu'être rejetées.

Par ces motifs,

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1501988 du 22 mars 2016 du tribunal administratif de Besançon est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. C...B...devant le tribunal administratif de Besançon est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de M. C...B...tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Territoire de Belfort.

5

N° 16NC00597-16NC01486


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16NC00597
Date de la décision : 09/02/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MESLAY
Rapporteur ?: M. Philippe REES
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : CUNY

Origine de la décision
Date de l'import : 21/02/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-02-09;16nc00597 ?
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