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09/03/2017 | FRANCE | N°16NC00609

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 09 mars 2017, 16NC00609


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G...A...a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 17 octobre 2014 par lequel le préfet de l'Aube a autorisé l'EARL des Malots à exploiter 64 hectares, 30 ares et 54 centiares de terres situées sur le territoire des communes de Bouy-sur-Orvin, Soligny-les-Etangs, Trainel et Fontenay-de-Bossery.

Par un jugement n° 1402466 du 16 février 2016, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé l'arrêté attaqué.

Procédure devant la cour :



Par une requête enregistrée le 8 avril 2016, l'EARL des Malots, représentée par Me H...,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G...A...a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 17 octobre 2014 par lequel le préfet de l'Aube a autorisé l'EARL des Malots à exploiter 64 hectares, 30 ares et 54 centiares de terres situées sur le territoire des communes de Bouy-sur-Orvin, Soligny-les-Etangs, Trainel et Fontenay-de-Bossery.

Par un jugement n° 1402466 du 16 février 2016, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé l'arrêté attaqué.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 8 avril 2016, l'EARL des Malots, représentée par Me H..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1042466 du 16 février 2016 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;

2°) de rejeter la demande de M.A... ;

3°) de mettre à la charge de M. A...une somme de 2 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

L'EARL des Malots soutient que :

- le jugement est irrégulier au regard de l'article R. 741-2 du code de justice administrative dès lors que le tribunal n'a pas correctement analysé, dans ses visas, la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité pour agir de M. A...au nom de l'indivision et à agir seul en justice en qualité de propriétaire indivis ;

- le jugement est irrégulier en ce qu'il est insuffisamment motivé dans sa réponse au moyen relatif à l'absence de qualité pour agir de M.A... ; par ailleurs, le tribunal n'a pas répondu à son moyen de défense relatif au caractère inopérant du moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté préfectoral ;

- la contestation en justice d'une autorisation d'exploiter portant sur un bien indivis ne saurait être engagée par un propriétaire indivis agissant seul ;

- l'autorisation d'exploiter ne fait pas grief à M.A..., qui ne dispose d'aucun titre pour exploiter les parcelles en cause et ne soutient pas avoir présenté une demande d'autorisation concurrente ;

- le défaut de motivation de la décision n'a eu aucune influence sur son sens et n'a pas privé les personnes intéressées d'une garantie ; en outre, le préfet était tenu de délivrer l'autorisation, de sorte que cette irrégularité ne peut être retenue ; enfin, la décision est suffisamment motivée.

Par un mémoire, enregistré le 20 septembre 2016, le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt demande à la cour de faire droit à la requête de l'EARL des Malots en annulant le jugement attaqué et en rejetant la demande de M. A...devant le tribunal ; il demande également que soit mise à la charge de M. A...une somme de 1 428 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Le ministre soutient que :

- l'arrêté préfectoral litigieux est suffisamment motivé ;

- les dispositions de l'article L. 331-3 du code rural et de la pêche maritime n'ont pas été méconnues.

L'instruction a été close le 26 septembre 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil,

- le code rural et de la pêche maritime,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Rees, premier conseiller,

- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., substituant Me F...pour l'EARL des Malots.

Considérant ce qui suit :

1. L'EARL des Malots, a sollicité le 15 juillet 2014 du préfet de l'Aube l'autorisation d'exploiter 64 hectares, 30 ares et 54 centiares de terres situées sur le territoire des communes de Bouy-sur-Orvin, Soligny-les-Etangs, Trainel et Fontenay-de-Bossery, appartenant en indivision à Mme E...D...et MM. C...A...et G...A.... Par un arrêté du 17 octobre 2014, le préfet de l'Aube lui a délivré l'autorisation.

2. M. G...A...a contesté cette décision devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne.

3. L'EARL des Malots relève appel du jugement du 16 février 2016 par lequel le tribunal a prononcé l'annulation de l'arrêté litigieux.

Sur la régularité du jugement :

4. L'EARL des Malots fait, en premier lieu, valoir que le tribunal a méconnu les exigences de l'article R. 741-2 du code de justice administrative, en vertu duquel le jugement doit contenir notamment l'analyse des conclusions et mémoires, dès lors qu'il n'a pas correctement analysé dans ses visas la fin de non-recevoir qu'elle avait soulevée, tirée du défaut de qualité pour agir de M. A...au nom de l'indivision.

5. Il ressort toutefois des termes du jugement que le tribunal a mentionné dans ses visas les moyens tirés de ce que " le requérant n'a pas intérêt à agir au nom de l'indivision " et de ce qu'il " n'a pas intérêt à agir en qualité de propriétaire indivis ". Bien qu'il ait, de manière impropre, utilisé la notion d'intérêt pour agir au sujet de la capacité pour agir de M. A... au nom de l'indivision, il ne s'est pas mépris sur la distinction à opérer entre les deux causes d'irrecevabilité invoquées par la requérante devant lui. En outre, il a respecté cette distinction en examinant de manière séparée les deux moyens dans le considérant n°2 du jugement. Par conséquent, l'irrégularité invoquée n'est pas établie.

6. L'EARL des Malots soutient en deuxième lieu, que le tribunal n'a pas suffisamment motivé sa réponse à sa fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité pour agir de M. A...au nom de l'indivision, notamment en ce qu'il n'a pas qualifié l'action de ce dernier.

7. Au point 2 du jugement, le tribunal a indiqué : " l'EARL des Malots soutient que M. A...n'a pas qualité ni intérêt pour agir dès lors qu'il est propriétaire indivis et qu'il n'agit pas au nom de l'indivision ; que toutefois, la présente requête par laquelle le requérant demande l'annulation d'une autorisation d'exploiter ne constitue ni un acte d'administration ni d'un acte de disposition des parcelles litigieuses ; que, dès lors, l'EARL des Malots n'est pas fondée à soutenir que M. A... n'a pas qualité pour agir en tant que propriétaire indivis ".

8. Le tribunal a ainsi énoncé le motif qu'il a retenu d'une manière suffisamment complète et précise pour permettre de le comprendre et de le discuter utilement. Par conséquent, cette deuxième irrégularité alléguée n'est pas établie.

9. En dernier lieu, l'EARL des Malots soutient que le tribunal n'a pas répondu à son moyen de défense relatif au caractère inopérant du moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté préfectoral.

10. Mais l'EARL des Malots a, ce faisant, seulement fait valoir une argumentation quant à la portée du moyen soulevé par M.A..., sans soulever un moyen distinct de ce dernier. Le tribunal n'était pas tenu de répondre expressément à cette argumentation et il n'a donc pas entaché son jugement d'irrégularité en s'abstenant de le faire.

11. Il résulte de ce qui précède que l'EARL des Malots n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué est irrégulier.

Sur le bien-fondé du jugement :

12. En premier lieu, l'EARL des Malots soutient que c'est à tort que le tribunal a admis la recevabilité de la demande présentée par M.A....

13. Ainsi que le fait valoir l'EARL des Malots, les dispositions des articles 815-2 et 815-3 du code civil ne permettent pas à M. A...d'agir au nom de l'indivision, dès lors qu'il ne justifie pas de l'accord des autres indivisaires et que la décision attaquée ne porte pas atteinte à la conservation des biens qui en font l'objet.

14. Toutefois, M. A...justifie, en sa seule qualité de propriétaire indivis des terres concernées par l'autorisation d'exploiter accordée par l'arrêté attaqué, d'un intérêt lui donnant qualité pour agir devant le juge de l'excès de pouvoir contre cette autorisation d'exploiter portant sur lesdites terres.

15. En second lieu, l'EARL des Malots et le ministre font valoir que le moyen tiré du défaut de motivation est inopérant dès lors que le préfet était tenu de délivrer l'autorisation sollicitée, qu'il manque en fait dès lors que l'arrêté attaqué est suffisamment motivé et que, enfin, le défaut de motivation de la décision n'a eu aucune influence sur son sens et n'a pas privé les personnes intéressées d'une garantie.

16. Aux termes de l'article R. 331-6 du code rural et de la pêche maritime : " [...] II. - La décision d'autorisation ou de refus d'exploiter prise par le préfet doit être motivée au regard des critères énumérés à l'article L. 331-3. / [...] ". Si le préfet, qui doit, en vertu de ces dispositions, motiver sa décision, ne saurait être tenu de se prononcer expressément sur chacun des éléments dont lesdites dispositions prescrivent de tenir compte, il lui incombe toutefois de préciser de manière suffisante ceux d'entre eux qui constituent, au vu de l'espèce, les fondements de sa décision.

17. Tout d'abord, le préfet n'est pas en situation de compétence liée pour délivrer une autorisation d'exploitation agricole dès lors que l'examen de la demande le conduit nécessairement à porter une appréciation sur la situation du demandeur. Par conséquent, l'insuffisance de motivation de sa décision est de nature à l'entacher d'illégalité.

18. Ensuite, le préfet s'est borné, dans son arrêté, à relever l'absence de demande concurrente et à indiquer que " le projet ne méconnaît ni les orientations du schéma directeur départemental des structures agricoles de l'Aube, ni les prescriptions du code rural et de la pêche maritime ". Cette affirmation sommaire, dépourvue de toute précision quant aux raisons qui la fondent, ne suffit pas à satisfaire à l'obligation de motivation résultant des dispositions de l'article R. 331-6 précité.

19. Enfin, le défaut de motivation constituant un vice de forme et non de procédure, l'EARL des Malots ne peut pas utilement soutenir que cette insuffisance de motivation de la décision attaquée n'a eu aucune influence sur son sens et n'a pas privé les personnes intéressées d'une garantie, ces circonstances étant sans incidence sur les conséquences qui s'attachent à une illégalité tenant en une insuffisance de motivation.

20. Il résulte de tout ce qui précède que l'EARL des Malots n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé l'arrêté litigieux. Ses conclusions à fin d'annulation ainsi que, par voie de conséquence, de rejet de la demande de M. A...et d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, dès lors, être rejetées. Les conclusions du ministre tendant à l'application de ces dispositions doivent également être rejetées, dès lors que M. A...n'est pas la partie perdante à la présente instance.

Par ces motifs,

D E C I D E :

Article 1er : La requête présentée par l'EARL des Malots est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'EARL des Malots, au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt et à M. G...A....

Copie en sera adressée au préfet de l'Aube.

4

16NC00609


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16NC00609
Date de la décision : 09/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

03-03-03 Agriculture et forêts. Exploitations agricoles. Cumuls et contrôle des structures.


Composition du Tribunal
Président : M. MESLAY
Rapporteur ?: M. Philippe REES
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : LE PETIT LEBON

Origine de la décision
Date de l'import : 21/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-03-09;16nc00609 ?
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