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27/04/2017 | FRANCE | N°16NC00185

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 27 avril 2017, 16NC00185


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'Earl de la Voie Lactée a demandé au tribunal administratif de Nancy de condamner la commune de Montigny-sur-Chiers à lui verser la somme de 74 746 euros en réparation de préjudices subis.

Par un jugement n° 1500459 du 31 décembre 2015, le tribunal administratif de Nancy a partiellement fait droit à sa demande et condamné la commune à verser à l'Earl de la Voie Lactée la somme de 9 000 euros tous intérêts légaux confondus.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistr

ée le 2 février 2016 sous le n° 16NC00185 et des mémoires enregistrés les 20 septembre, 5 et 24 o...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'Earl de la Voie Lactée a demandé au tribunal administratif de Nancy de condamner la commune de Montigny-sur-Chiers à lui verser la somme de 74 746 euros en réparation de préjudices subis.

Par un jugement n° 1500459 du 31 décembre 2015, le tribunal administratif de Nancy a partiellement fait droit à sa demande et condamné la commune à verser à l'Earl de la Voie Lactée la somme de 9 000 euros tous intérêts légaux confondus.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 2 février 2016 sous le n° 16NC00185 et des mémoires enregistrés les 20 septembre, 5 et 24 octobre et 2 décembre 2016, 30 janvier 2017 et 16 mars 2017, l'Earl de la Voie Lactée, représentée par la Selas Cabinet Devarenne Associés, demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 1500459 du 31 décembre 2015 du tribunal administratif de Nancy ;

2°) de condamner la commune de Montigny-sur-Chiers à lui verser la totalité de la somme de 74 746 euros assortie des intérêts à compter du 25 octobre 2011 ;

3°) de condamner la commune de Montigny-sur-Chiers à lui verser une somme de 442,24 euros au titre des frais d'huissier ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Montigny-sur-Chiers une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

L'Earl de la Voie Lactée soutient que :

- le tribunal a jugé à bon droit que la décision du 6 juin 2008 portant péremption de son permis de construire était fautive, le tribunal administratif de Nancy l'ayant annulée pour un motif de légalité interne, de nature à lui couvrir à un droit à indemnisation de ses préjudices ;

- le préjudice en lien direct avec cette faute s'établit non pas à la somme de 9 000 euros allouée par le tribunal, mais à la somme de 48 866,34 euros au titre de la perte de subvention, de 10 000,00 euros au titre de l'indemnité pour l'obligation de remplacer les matériaux détériorés et du fait du surcoût de la construction, de 3 573,00 euros à titre d'indemnité en raison des coûts du nettoyage du chantier et de 10 000,00 euros à titre d'indemnité du fait du retard dans la construction interrompue environ trois années et de 306,68 euros à titre de remboursement du coût du procès-verbal de constat d'huissier du 17 mai 2011 soit une somme totale de 72 746,02 euros.

Par des mémoires en défense enregistrés les 18 juillet 2016, 14 octobre, 21 novembre et 16 décembre 2016 et les 16 et 21 mars 2017, la commune de Montigny-sur-Chiers, représentée par MeA..., conclut :

1°) au rejet de la requête de l'Earl de la Voie Lactée ;

2°) à l'annulation du jugement en tant qu'il a condamné la commune de Montigny-sur-Chiers à verser à l'Earl une somme globale de 9 000 euros ;

3°) au rejet de la demande de l'Earl de la Voie Lactée ;

4°) à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de l'Earl de la Voie Lactée au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune soutient que :

- les préjudices dont il est demandé réparation ne sont pas en lien direct et certain avec la faute commise par la commune de Montigny-sur-Chiers ;

- l'Earl de la Voie Lactée a déjà bénéficié de subventions pour les travaux concernés par la demande indemnitaire pour un montant de 2042,63 euros et 3268,14 euros respectivement versés par le conseil général et la direction des territoires.

Vu les pièces produites par le préfet de Meurthe-et-Moselle le 6 mars 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Un mémoire présenté pour l'Earl de la Voie Lactée a été enregistré le 27 mars 2017 après clôture de l'instruction et n'a pas été communiqué.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Richard, premier conseiller,

- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,

- et les observations de Me B...pour l'EARL de la Voie Lactée, ainsi que celles de Me D...pour la commune de Montigny-sur-Chiers.

Considérant ce qui suit :

1. M.C..., puis l'Earl de la Voie Lactée dont M. C...est devenu exploitant, ont bénéficié de subventions de la part de l'Etat, de l'Agence de l'eau, du conseil général de Meurthe-et-Moselle et du conseil régional de Lorraine afin de procéder à la mise aux normes de cette exploitation agricole.

2. L'Earl de la Voie Lactée n'ayant pas été en mesure de respecter ses engagements dans le délai imparti initialement, le préfet de Meurthe-et-Moselle, par un arrêté du 28 mars 2006, a prorogé le délai d'achèvement des travaux jusqu'au 8 décembre 2008. Par un arrêté en date du 9 mai 2006, le maire de la commune de Montigny-sur-Chiers a accordé un permis de construire à l'Earl de la Voie Lactée en vue de la construction d'une fumière, d'un bâtiment de stockage de matériel et d'une fosse couverte mais par une décision du 6 juin 2008, le maire a déclaré la péremption de ce permis de construire en estimant que les travaux n'avaient pas commencé dans le délai de validité du permis de construire. Par un jugement en date du 7 décembre 2010, devenu définitif, le tribunal administratif de Nancy a annulé cette dernière décision.

3. L'Earl de la Voie Lactée a demandé à la commune l'indemnisation des préjudices résultant de l'illégalité de cette décision. Par le jugement du 31 décembre 2015, le tribunal administratif de Nancy a condamné la commune de Montigny-sur-Chiers à verser à l'Earl de la Voie Lactée une somme de 9000 euros en réparation des préjudices subis. L'Earl requérante relève appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas fait droit à l'intégralité de sa demande indemnitaire portant sur la somme de 74 746 euros. La commune de Montigny-sur-Chiers forme un appel incident tendant à l'annulation du jugement en tant qu'elle a été condamnée à verser la somme de 9 000 euros à l'Earl de la Voie Lactée.

I. Sur la demande indemnitaire :

4. Il est constant que l'arrêté du maire de Montigny-sur-Chiers du 6 juin 2008, constatant la péremption du permis de construire accordé à l'Earl de la Voie Lactée le 9 mai 2008, a été annulé au motif que le permis de construire délivré à l'Earl n'était pas périmé. L'illégalité de cette décision du 6 juin 2008 constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la commune de Montigny-sur-Chiers, pour autant qu'il en soit résulté un préjudice direct et certain pour l'Earl requérante.

En ce qui concerne le préjudice résultant de la perte de subventions :

5. Il résulte de l'instruction que l'Earl de la Voie Lactée a bénéficié de diverses subventions de la part de l'Etat, de l'agence de l'eau, du département de la Meurthe-et-Moselle et de la région Lorraine dont le versement était subordonné, sous le contrôle effectué par les services de l'Etat, à la réalisation régulière des travaux subventionnés avant le 8 décembre 2008.

6. L'Earl de la Voie Lactée soutient que c'est à tort que le tribunal a estimé que le lien de causalité entre le non versement des subventions et l'arrêté du 6 juin 2008 portant péremption de son permis de construire n'était pas établi.

7. La demande indemnitaire de l'Earl de la Voie Lactée est motivée par le fait que les travaux, dont l'achèvement conditionnait le versement des subventions accordées pour la mise aux normes de son exploitation, n'ont pu être réalisés entre le 6 juin 2008 et la date limite fixée pour leur exécution le 8 décembre 2008, compte tenu de l'intervention illégale de l'arrêté pris par le maire de Montigny-sur-Chiers et constatant la péremption de son permis de construire.

8. Il résulte de l'instruction, notamment du recours gracieux du 4 juillet 2008 formé par M. C... à l'encontre de l'arrêté portant péremption de son permis de construire ainsi que des factures d'achat de matériaux et de ciment produites ayant donné lieu au versement d'acomptes sur les subventions à verser, que l'Earl de la Voie Lactée avait entamé des travaux dans le cadre de la mise aux normes requise pour son exploitation.

9. L'Earl de la Voie Lactée se borne à indiquer, pour justifier du lien de causalité entre la perte du bénéfice des subventions et la décision de péremption de son permis, que par une lettre du 28 mars 2006, les services de l'Etat lui avaient rappelé que le délai pour la réalisation des travaux était fixé au 8 décembre 2008 et que par une lettre du 9 février 2009, il a été constaté le dépassement de ce délai.

10. Il résulte toutefois de l'instruction, notamment des décisions de prorogation des subventions et d'un courrier de l'agence de l'eau du 7 mars 2008, la commune de Montigny-sur-Chiers n'étant pas sérieusement contredite sur ce point par l'Earl de la Voie Lactée, que M. C... ne disposait pas des moyens et n'avait pas justifié de son intention de préfinancer les travaux, pour lesquels 40% du montant restait en tout état de cause à sa charge, dans un délai lui permettant d'achever la réalisation du projet de mise aux normes pour lequel les subventions avaient été accordées, le seuil de 40% du montant des travaux n'ayant pas été atteint au 7 mars 2008, soit, respectivement, plus de quatre et six ans après l'octroi de ces subventions à l'Earl de la Voie Lactée et à M.C....

11. L'Earl de la Voie Lactée ne produit d'ailleurs aucun élément précis de nature à expliquer que le délai avec lequel elle a réalisé, courant 2013, 2014 et 2015, les travaux poursuivant la mise aux normes qui avait justifié l'octroi des subventions litigieuses, ne trouve son origine que dans l'absence du financement externe spécifiquement lié à la perte du bénéfice des subventions en cause courant 2009.

12. Il résulte d'ailleurs de l'instruction que l'Earl de la Voie Lactée a attendu le 6 décembre 2008 pour s'enquérir, auprès des services de la direction départementale de l'équipement et de l'agriculture chargée de son dossier de subventionnement, de la manière de reporter la date limite prévue pour l'achèvement des travaux alors même qu'au 6 juin 2008, soit sept mois seulement avant l'échéance et alors que les travaux n'étaient que partiellement engagés, le maire constatait la péremption de son permis de construire.

13. Il résulte également de l'instruction qu'à la suite de l'arrêté municipal constatant la péremption de son permis de construire, l'Earl de la Voie Lactée n'a pas envisagé de solliciter la délivrance d'un nouveau permis de construire, sur la base de son précédent dossier de demande portant sur les mêmes travaux, afin de pouvoir poursuivre régulièrement les travaux interrompus, compte tenu de la décision du 6 juin 2008.

14. L'Earl de la Voie Lactée ne justifie pas non plus que les difficultés à réaliser un projet conforme au dossier de demande de subvention, condition du versement des subventions accordées, ne résulteraient que de la péremption illégale de son permis de construire. Les travaux de mise aux normes pour lesquels les subventions avaient été accordées et que l'Earl de la Voie Lactée devait réaliser avant le 8 décembre 2008 ne portaient pas uniquement sur des travaux visés par le permis de construire, permis dont l'exécution n'a pu être poursuivie après l'arrêté illégal du maire de Montigny-sur-Chiers. Il résulte de l'instruction et des factures produites par l'Earl de la Voie Lactée que celle-ci a notamment bénéficié de subventions en vue de réaliser un plan d'épandage que la chambre d'agriculture l'a aidée à concevoir moyennant un coût d'environ 12 700 francs en 2001, mais que ce plan d'épandage n'était pas opérationnel ainsi qu'en atteste la mise en demeure prise à l'encontre de l'Earl de la Voie Lactée par le préfet de Meurthe-et-Moselle par un arrêté du 26 août 2010, le cahier d'épandage correspondant n'étant toujours pas constaté et mis à disposition des services de l'inspection des installations classées, ainsi que le relève le préfet dans une lettre du 28 juillet 2016.

15. L'appelante ne produit donc pas d'éléments précis et probants de nature à établir qu'en l'absence de la décision illégale du 6 juin 2008, l'ensemble de son projet aurait pu être achevé avant le 8 décembre 2008 et conformément à l'ensemble des dispositions légales et réglementaires régissant son exploitation agricole, alors qu'il s'agit d'une condition posée par les décisions de subventionnement prises à son égard en application du décret du 16 décembre 1999 relatif aux subventions de l'Etat pour des projets d'investissement et rappelée dans l' arrêté préfectoral du 15 décembre 2003 portant attribution de la ·subvention à la réalisation des travaux nécessaires à la mise aux normes des bâtiments, et dans l'accord de partenariat contresigné par M.C.... La circonstance que M.C..., et non l'Earl requérante, ait été relaxé des poursuites engagées contre lui pour avoir méconnu, durant le 1er semestre de l'année 2010, les règles fixées par l'arrêté du 7 février 2005, notamment en ce qui concerne la mise aux normes de son installation concernant la création d'ouvrages de stockage des effluents d'élevage, n'est pas de nature à lui permettre d'établir que sans l'intervention de l'arrêté municipal du 6 juin 2008, les travaux auraient pu être régulièrement achevés dans les délais.

16. Il résulte de ce qui a été dit aux points 5 à 15 que faute d'établir la réalité d'un lien suffisamment direct et certain entre le non versement des subventions et la décision fautive du maire de Montigny-sur-Chiers, la demande indemnitaire relative à ce poste de préjudice ne peut qu'être rejetée.

En ce qui concerne le préjudice découlant de l'obligation de remplacer les matériaux détériorés et du surcoût de la construction :

17. Le tribunal a condamné la commune de Montigny-sur-Chiers à verser à l'Earl de la Voie Lactée la somme de 5 000 euros en réparation de ce poste de préjudice.

18. Il résulte de l'instruction que l'Earl de la Voie Lactée justifie avoir acquis, deux mois avant l'intervention de la décision illégale du maire de Montigny-sur-Chiers, des sacs de ciment en vue de poursuivre les travaux visés par son projet de mise aux normes de son exploitation, et qu'elle n'a pu les utiliser compte tenu de l'interdiction qui lui a été faite de poursuivre les travaux. Il résulte également du procès-verbal de constat que, malgré les précautions prises pour les conserver, 728 sacs de ciment d'un montant global de 1 820 euros se sont détériorés. L'Earl de la Voie Lactée est donc fondée à demander la réparation du préjudice relatif à la détérioration des matériaux acquis en vue de poursuivre les travaux en cours lorsque la décision illégale constatant la péremption de son permis de construire est intervenue.

19. En revanche, l'Earl de la Voie Lactée qui se borne à produire deux devis d'une seule entreprise de construction datés du 29 janvier 2005, soit plus de trois ans avant la survenance de la décision illégale de péremption de son permis de construire, et du 10 janvier 2011, soit près de dix huit mois après l'interruption des travaux, n'établit pas de façon suffisamment probante que l'interruption des travaux est à l'origine d'un surcoût de plus de 15 000 euros, aucune explication n'étant donnée quant aux origines d'un tel surenchérissement, en particulier pour la réalisation du hangar agricole envisagé. La requérante, si elle produit le devis et la facture relatifs à la réalisation de ce hangar qui a été finalement construit de façon partielle en 2013/2014, n'apporte pas non plus d'explications sur l'origine et la justification du surcoût de 15 000 euros dont elle demande l'indemnisation.

20. Il résulte de ce qui précède que la commune de Montigny-sur-Chiers est fondée à demander que l'indemnisation de ce poste de préjudice soit ramenée de 5 000 euros à 1 820 euros.

En ce qui concerne le préjudice relatif au coût de nettoyage du chantier et de reprise des travaux :

21. Il résulte de l'instruction que les déblais du bassin à lisier se sont dégradés entre la date de leur réalisation et la date à laquelle les travaux ont pu être repris, après l'interruption du chantier survenue du fait de l'interruption rendue nécessaire par l'arrêté déclarant la péremption du permis de construire délivré à l'Earl de la Voie Lactée. La commune de Montigny-sur-Chiers ne produit aucun élément de nature à contester sérieusement le constat que cette dégradation trouve essentiellement son origine dans le fait que l'ensemble de l'ouvrage n'a pas pu être réalisé en continuité des travaux de déblais effectués, favorisant ainsi la détérioration de l'ensemble en raison, notamment, des conditions météorologiques. Par ailleurs, la circonstance qu'aucune facture n'ait été jointe en sus d'un devis évaluant le coût de la reprise des déblais pour un montant de 599 euros n'est pas de nature à priver l'Earl de la Voie Lactée du droit à l'indemnisation de ce préjudice en lien direct et certain avec la décision du maire déclarant la péremption du permis de construire et obligeant l'Earl de la Voie Lactée à cesser la poursuite de ses travaux. En revanche et ainsi que le soutient la commune de Montigny-sur-Chiers, qui n'est aucunement contredite sur ce point, l'Earl de la Voie Lactée ne produit aucun justificatif pour établir la nature et l'étendue précise du préjudice subi concernant le nettoyage requis, préalablement à la reprise des travaux, pour le terrain dont elle est propriétaire et qu'il lui incombait en tout état de cause d'entretenir. Il s'ensuit que l'Earl de la Voie Lactée, pas plus que la commune de Montigny-sur-Chiers, ne sont fondées à soutenir que c'est à tort que le tribunal a évalué à 599 euros le montant de l'indemnisation de l'Earl de la Voie Lactée pour le poste de préjudice relatif aux coûts de nettoyage et de reprise des travaux.

En ce qui concerne le préjudice relatif à l'indisponibilité du terrain et des équipements :

22. Il résulte de l'instruction que l'Earl de la Voie Lactée n'a pu poursuivre les travaux qu'elle avait engagés dans le cadre de la mise aux normes de son exploitation agricole compte tenu de la décision de péremption de permis de construire prise à son encontre. Il s'en est suivi des complications d'ordre économique et administratif, indépendamment des problèmes rencontrés par l'exploitation, pour réaliser dans les meilleurs délais son programme de mise aux normes conformément aux textes en vigueur. La circonstance que plusieurs irrégularités aient perduré alors même que l'Earl de la Voie Lactée avait repris la poursuite de l'exécution des travaux visés par l'arrêté de péremption de son permis n'est pas, contrairement à ce que soutient la commune, de nature à priver, par principe, l'Earl de toute indemnisation. Les difficultés nées de la survenance de l'arrêté du 6 juin 2008 ont ainsi donné lieu à un préjudice en lien direct et certain avec la décision illégale du maire de Montigny-sur-Chiers dont il sera fait une juste réparation en maintenant la somme de 3 000 euros mise à la charge de la commune par le tribunal. Les demandes de l'Earl de la Voie Lactée et de la commune de Montigny-sur-Chiers pour ce chef de préjudice ne pourront donc qu'être rejetées.

23. En conclusion de tout ce qui précède, l'Earl requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal n'a pas fait droit à l'intégralité de sa demande indemnitaire. En revanche, la commune est fondée à demander que le montant de l'indemnité qu'elle doit verser à l'Earl de la Voie Lactée soit ramené à 5 419 euros ainsi que la réformation du jugement litigieux dans cette mesure.

Sur les intérêts :

24. L'Earl de la Voie Lactée a droit aux intérêts à compter de la date de réception de sa demande indemnitaire par la commune, laquelle doit être fixée au 25 octobre 2011 ainsi que cela résulte des propres termes de la lettre du 23 décembre 2011 par laquelle la commune a refusé de faire droit à la demande préalable.

Sur les frais d'expertise de 442,24 euros :

25. Il résulte de l'instruction que l'Earl de la Voie Lactée a sollicité la réalisation d'un constat par huissier le 12 septembre 2016 afin d'établir qu'elle avait réalisé les mises aux normes requises pour son exploitation agricole, notamment en vue de justifier du bien fondé de ses prétentions indemnitaires relatives à la perte de subventions. Compte tenu du rejet des prétentions de l'appelante, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la commune de tels frais d'expertise. Les conclusions susvisées doivent ainsi être rejetées.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

26. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Montigny-sur-Chiers qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que l'Earl de la Voie Lactée demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

27. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la commune de Montigny-sur-Chiers présentées sur le fondement de ces mêmes dispositions.

Par ces motifs,

DECIDE :

Article 1er : La commune de Montigny-sur-Chiers versera à l'Earl de la Voie Lactée une somme ramenée à 5 419 (cinq mille quatre cent dix-neuf) euros assortie des intérêts à compter du 25 octobre 2011.

Article 2 : Le jugement du 31 décembre 2015 du tribunal administratif de Nancy est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de l'Earl de la Voie Lactée et des conclusions de la commune de Montigny-sur-Chiers est rejeté.

Article 4 : Les conclusions de l'Earl de la Voie Lactée et de la commune de Montigny-sur-Chiers tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à l'Earl de la Voie Lactée et à la commune de Montigny-sur-Chiers.

Copie en sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle.

2

N°16NC00185


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16NC00185
Date de la décision : 27/04/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Responsabilité de la puissance publique - Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité - Fondement de la responsabilité - Responsabilité pour faute.

Responsabilité de la puissance publique - Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité - Responsabilité et illégalité.


Composition du Tribunal
Président : M. MESLAY
Rapporteur ?: M. Michel RICHARD
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : SELAS CABINET DEVARENNE ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 09/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-04-27;16nc00185 ?
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