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08/06/2017 | FRANCE | N°16NC01458

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 08 juin 2017, 16NC01458


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C...B...ont demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler le certificat d'urbanisme négatif que leur a délivré le maire de la commune de Grandrupt le 2 décembre 2014, au nom de l'Etat, ainsi que la décision du 9 mars 2015 par laquelle le préfet des Vosges a rejeté leur recours gracieux dirigé contre cette décision.

Par un jugement no 1501347 du 17 mai 2016, le tribunal administratif de Nancy a annulé la décision du préfet des Vosges du 9 mars 2015 rejetant leur recours gracieux

mais a rejeté leur demande tendant à l'annulation du certificat d'urbanisme négat...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C...B...ont demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler le certificat d'urbanisme négatif que leur a délivré le maire de la commune de Grandrupt le 2 décembre 2014, au nom de l'Etat, ainsi que la décision du 9 mars 2015 par laquelle le préfet des Vosges a rejeté leur recours gracieux dirigé contre cette décision.

Par un jugement no 1501347 du 17 mai 2016, le tribunal administratif de Nancy a annulé la décision du préfet des Vosges du 9 mars 2015 rejetant leur recours gracieux mais a rejeté leur demande tendant à l'annulation du certificat d'urbanisme négatif délivré par le maire de la commune de Grandrupt.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 11 juillet 2016 et 23 janvier 2017, M. et Mme C...B..., représentés par MeA..., demandent à la cour :

1°) d'annuler l'article 2 du jugement no 1501347 du 17 mai 2016 du tribunal administratif de Nancy ;

2°) d'annuler le certificat d'urbanisme négatif que leur a délivré le maire de la commune de Grandrupt le 2 décembre 2014, ensemble la décision du 9 mars 2015 par laquelle le préfet des Vosges a rejeté leur recours gracieux ;

3°) d'enjoindre au maire de leur délivrer, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, un certificat d'urbanisme positif portant sur le projet mentionné dans leur demande du 14 octobre 2014 ;

4°) de condamner l'Etat à leur verser une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. et Mme B...soutiennent que :

- le tribunal a omis de répondre à leur moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article A. 410-3 du code de l'urbanisme ;

- le tribunal a commis une erreur de droit en considérant que l'absence de réseau public de distribution d'eau potable au sens de l'article R. 111-10 du code de l'urbanisme doit s'entendre pour l'ensemble du territoire communal et non pour le secteur avoisinant le projet ;

- les parcelles bénéficient d'un point d'eau potable ; aucun texte n'impose au pétitionnaire de justifier, au stade de la demande de certificat d'urbanisme, d'un certificat de potabilité de l'eau ;

- le tribunal a commis une erreur manifeste d'appréciation en ce qui concerne la desserte des parcelles en électricité ; le réseau de distribution électrique est implanté à proximité des parcelles et ce réseau alimentait jadis la ferme située sur ce terrain ;

- la décision du 2 décembre 2014 a été prise en méconnaissance des dispositions de l'article A. 410-3 du code de l'urbanisme dès lors que les nom et prénom de l'auteur n'y sont pas lisibles et qu'il n'est pas précisé que le maire agissait au nom de l'Etat ;

- les constructions projetées sont nécessaires à leur exploitation agricole.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 janvier 2017, le ministre du logement et de l'habitat durable conclut au rejet de la requête.

Le ministre soutient qu'aucun des moyens soulevés par les requérants n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Rees, premier conseiller,

- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., pour M. et MmeB....

M. et Mme B...ont présenté une note en délibéré enregistrée le 23 mai 2017.

Considérant ce qui suit :

1. Le 14 octobre 2014, M. C...B...a sollicité auprès du maire de la commune de Grandrupt la délivrance d'un certificat d'urbanisme afin de savoir si son terrain, cadastré 0-A-2095, 0-A-202094, 0-A-1427, 0-A-1425 et 0-A-1416, pouvait être utilisé pour la réalisation d'une opération consistant en la reconstruction d'une maison d'habitation avec salle de vente et création d'un bâtiment agricole.

2. Le 2 décembre 2014, le maire de la commune de Grandrupt lui a délivré, au nom de l'Etat, un certificat d'urbanisme négatif. Le 9 mars 2015, le préfet des Vosges a rejeté le recours gracieux formé par M. et Mme B...contre cette décision.

3. Par un jugement du 17 mai 2016, le tribunal administratif de Nancy a annulé la décision du préfet des Vosges du 9 mars 2015 rejetant leur recours gracieux et a rejeté la demande de M. et Mme B...tendant à l'annulation du certificat d'urbanisme négatif délivré par le maire de la commune de Grandrupt.

4. M. et Mme B...relèvent appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté cette demande.

Sur la régularité du jugement :

5. En premier lieu, M. et Mme B...soutiennent que le tribunal a omis de répondre à leur moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article A. 410-3 du code de l'urbanisme et du vice de forme de la décision du maire du 2 décembre 2014 qui en résulte.

6. Toutefois, le tribunal, contrairement à ce que soutiennent les requérants, a visé ce moyen et y a expressément répondu en indiquant au point 8 de son jugement " que le maire se trouvant ainsi en situation de compétence liée, les moyens soulevés par M. et Mme B...tirés de ce que la décision attaquée serait entachée d'un vice de forme et d'erreurs d'appréciation sont inopérants ".

7. En second lieu, si M. et Mme B...soutiennent que le tribunal a entaché son jugement d'erreurs de droit et d'appréciation, de telles erreurs sont, en tout état de cause, sans incidence sur la régularité du jugement.

Sur la légalité du certificat d'urbanisme attaqué :

En ce qui concerne la légalité externe :

8. M. et Mme B...soutiennent que la décision du 2 décembre 2014 a été prise en méconnaissance des dispositions de l'article A. 410-3 du code de l'urbanisme dès lors que les nom et prénom de l'auteur n'y sont pas lisibles et qu'il n'est pas précisé que le maire agissait au nom de l'Etat.

9. Aux termes de l'article A. 410-3 du code de l'urbanisme : " (...) L'arrêté mentionne, en caractères lisibles, le prénom, le nom et la qualité de son signataire ".

10. D'une part, la décision en cause mentionne le prénom, le nom et la qualité de son auteur en caractères suffisamment lisibles pour identifier M. E...D..., maire de la commune. D'autre part, la décision mentionne dans son intitulé qu'elle est prise au nom de l'Etat. Le moyen soulevé manque donc en fait.

En ce qui concerne la légalité interne :

11. Aux termes de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme : " Le certificat d'urbanisme, en fonction de la demande présentée : (...) b) Indique en outre, lorsque la demande a précisé la nature de l'opération envisagée ainsi que la localisation approximative et la destination des bâtiments projetés, si le terrain peut être utilisé pour la réalisation de cette opération ainsi que l'état des équipements publics existants ou prévus ". Il résulte de ces dispositions qu'un certificat d'urbanisme négatif est légalement délivré lorsque les règles d'urbanisme applicables font obstacle à l'opération envisagée.

12. Le maire a délivré un certificat d'urbanisme négatif à M. et Mme B...au triple motif que le terrain d'assiette de leur projet, situé en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune définies par sa carte communale, n'est desservi ni par le réseau de distribution d'eau potable, ni par le réseau de distribution d'électricité, et que la reconstruction d'une maison d'habitation sur le site n'est pas nécessaire à l'activité agricole de M.B....

13. En premier lieu, les requérants font valoir que le maire a commis une erreur d'appréciation dès lors que, si le terrain d'assiette de leur projet n'est pas desservi par le réseau public de distribution d'eau potable, il dispose de sa propre source pour son alimentation en eau potable.

14. Aux termes de l'article L. 111-4 du code de l'urbanisme, alors applicables : " Lorsque, compte tenu de la destination de la construction projetée, des travaux portant sur les réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou de distribution d'électricité sont nécessaires pour assurer la desserte de ladite construction, le permis de construire ne peut être accordé si l'autorité qui le délivre n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public lesdits travaux doivent être exécutés ".

15. Aux termes de l'article R. 111-8 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors applicable : " L'alimentation en eau potable et l'assainissement des eaux domestiques usées, la collecte et l'écoulement des eaux pluviales et de ruissellement ainsi que l'évacuation, l'épuration et le rejet des eaux résiduaires industrielles, doivent être assurés dans des conditions conformes aux règlements en vigueur ". Aux termes de l'article R. 111-9 du même code : " Lorsque le projet prévoit des bâtiments à usage d'habitation, ceux-ci doivent être desservis par un réseau de distribution d'eau potable sous pression raccordé aux réseaux publics ". Aux termes de l'article R. 111-10 du même code : " En l'absence de réseau public de distribution d'eau potable et sous réserve que l'hygiène générale et la protection sanitaire soient assurées, l'alimentation est assurée par un seul point d'eau ou, en cas d'impossibilité, par le plus petit nombre possible de points d'eau. (...) En outre, les installations collectives sont établies de manière à pouvoir se raccorder ultérieurement aux réseaux publics ". Enfin, aux termes de l'article R. 111-11 du même code : " Des dérogations à l'obligation de réaliser des installations collectives de distribution d'eau potable peuvent être accordées à titre exceptionnel, lorsque la grande superficie des parcelles ou la faible densité de construction ainsi que la facilité d'alimentation individuelle, font apparaître celle-ci comme nettement plus économique, mais à la condition que la potabilité de l'eau et sa protection contre tout risque de pollution puissent être considérées comme assurées (...) ".

16. Il résulte de ces dispositions que, lorsque le projet porte sur un bâtiment à usage d'habitation et ne peut pas être raccordé au réseau public de distribution d'eau potable, faute de desserte existante ou envisagée, l'alimentation en eau potable peut être assurée par un ou plusieurs points d'eau, sous réserve que ses modalités d'exploitation garantissent l'hygiène générale et la protection sanitaire et, en cas de dérogation à l'obligation de réaliser des installations collectives, la potabilité de l'eau et sa protection contre tout risque de pollution.

17. Il est constant que le terrain d'assiette du projet n'est pas desservi par le réseau public de distribution d'eau de la commune mais dispose d'une source d'eau.

18. Si les requérants font tout d'abord valoir qu'un certificat d'urbanisme positif délivré à M. B...le 3 septembre 1998 indique que le terrain est desservi avec une capacité suffisante en eau potable malgré l'absence de réseau public, cette circonstance, du reste ancienne, ne suffit pas à établir que les conditions posées par les articles R. 111-10 et R. 111-11 du code de l'urbanisme sont remplies et est donc sans incidence sur la légalité du premier motif opposé par l'autorité administrative.

19. M. et Mme B...produisent également un rapport d'analyse d'eau établi par la société Eurofins le 13 juin 2016 et un courrier du 28 juin 2016 de l'Agence régionale de santé, interprétant, à leur demande, ce rapport. Si l'Agence régionale de santé indique que les résultats sont conformes aux limites des qualités réglementaires en vigueur pour les eaux destinées à la consommation humaine, elle souligne toutefois que cette conclusion est fournie au vu des " paramètres analysés ". A cet égard, elle relève que plusieurs paramètres, notamment microbiologiques, n'apparaissent pas dans le rapport de la société Eurofins et que " la qualité de l'eau dépend également des conditions et du lieu de prélèvement, informations ne figurant pas dans le bulletin transmis ". Dans ces conditions, ces pièces, produites pour la première fois en appel, ne suffisent pas à établir la potabilité de l'eau fournie par la source présente sur le terrain d'assiette du projet.

20. Ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier et, notamment, des éléments produits par les requérants que cette source délivre une eau présentant les qualités requises par la réglementation pour être destinée à la consommation humaine et que ses modalités d'exploitation garantissent l'hygiène générale et la protection sanitaire.

21. Dès lors, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le premier motif retenu par le maire de Grandrupt, tiré de l'absence de desserte du projet par le réseau public de distribution d'eau potable, est entaché d'illégalité.

22. En deuxième lieu, les requérants, font valoir que, contrairement à ce qu'a retenu le maire, les constructions projetées sont desservies par le réseau de distribution d'électricité.

23. Si les clichés produits par les requérants représentent un poteau situé à proximité du terrain d'assiette du projet, il n'est pas établi qu'il s'agit d'un poteau électrique ni, à supposer que ce soit le cas, que celui-ci est toujours relié au réseau de distribution d'électricité. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que la ferme sur les ruines de laquelle ils envisagent de reconstruire une maison d'habitation était jadis raccordée au réseau électrique. La circonstance que le certificat d'urbanisme positif délivré à M. B...le 3 septembre 1998, fait état de ce raccordement ne saurait être regardée, compte tenu de son ancienneté, comme suffisante pour établir la réalité de ce raccordement, Enfin, la proposition de raccordement établie par ERDF le 25 août 2016, à supposer qu'elle concerne le terrain d'assiette du projet, est postérieure à la décision attaquée.

24. Dans ces conditions, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le deuxième motif retenu par le maire, tiré de l'absence de desserte du projet par le réseau public de distribution d'électricité, est entaché d'illégalité.

25. En troisième lieu, M. et Mme B...font valoir que le maire a commis une erreur d'appréciation en considérant que la reconstruction d'une maison d'habitation sur le site n'est pas nécessaire à l'activité agricole de M.B....

26. Aux termes de l'article L. 124-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors applicable : " Les cartes communales (...) délimitent les secteurs où les constructions sont autorisées et les secteurs où les constructions ne sont pas admises, à l'exception de l'adaptation, du changement de destination, de la réfection ou de l'extension des constructions existantes ou des constructions et installations nécessaires (...) à l'exploitation agricole ou forestière et à la mise en valeur des ressources naturelles ".

27. Les requérants, qui résident à Munich, font valoir que M. B...élève un troupeau de 52 bovins et qu'il lui est nécessaire de disposer d'une habitation sur place afin de pouvoir surveiller l'état sanitaire des animaux, d'assurer l'approvisionnement du troupeau et de développer une salle de vente sur les lieux. Ils soulignent, en outre, que M.B..., du fait de l'éloignement de son domicile en Allemagne, est dans l'incapacité d'intervenir rapidement en cas de nécessité et que cette situation ne peut pas perdurer sans mettre son exploitation en péril.

28. Les requérants n'apportent toutefois aucun précision sur les conditions de fonctionnement de l'exploitation ni sur le siège de celle-ci, où M. B...dit se rendre régulièrement et qui se trouve à un autre endroit du territoire de la commune. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que la construction projetée serait nécessaire à l'exploitation agricole de M.B....

29. Dès lors, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le troisième motif retenu par le maire, qui au même titre que les deux premiers suffisait à lui seul à justifier la délivrance d'un certificat d'urbanisme négatif, est entaché d'illégalité.

30. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté leur demande tendant à l'annulation du certificat d'urbanisme négatif du 2 décembre 2014. Leurs conclusions à fin d'annulation, ainsi que, par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction et d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées.

Par ces motifs,

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C...B...et au ministre de la cohésion des territoires.

Copie en sera adressée au maire de la commune de Grandrupt et au préfet des Vosges.

2

N° 16NC01458


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16NC01458
Date de la décision : 08/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-025 Urbanisme et aménagement du territoire. Certificat d'urbanisme.


Composition du Tribunal
Président : M. MESLAY
Rapporteur ?: M. Philippe REES
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : CUNY

Origine de la décision
Date de l'import : 20/06/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-06-08;16nc01458 ?
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