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23/11/2017 | FRANCE | N°16NC00891

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 23 novembre 2017, 16NC00891


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Grenke Location a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner le collège Paul Bert de Malakoff à lui verser la somme de 28 285,98 euros au titre d'un contrat de location conclu le 20 janvier 2011, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 19 juillet 2013.

Par un jugement n° 1305656 du 21 avril 2016, le tribunal administratif a condamné le collège Paul Bert à verser à la société Grenke Location une somme de 2 319,03 euros assortie des intérêts au taux lé

gal à compter du 2 septembre 2013 et a rejeté le surplus de la demande.

Procédure devan...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Grenke Location a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner le collège Paul Bert de Malakoff à lui verser la somme de 28 285,98 euros au titre d'un contrat de location conclu le 20 janvier 2011, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 19 juillet 2013.

Par un jugement n° 1305656 du 21 avril 2016, le tribunal administratif a condamné le collège Paul Bert à verser à la société Grenke Location une somme de 2 319,03 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 2 septembre 2013 et a rejeté le surplus de la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 17 mai 2016 et 24 juillet 2017, la société Grenke Location, représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande ;

2°) de condamner le collège Paul Bert à lui verser les sommes de 25 206,87 euros au titre de dommages et intérêts augmentée des intérêts au taux légal à compter du 19 juillet 2013 et de la capitalisation des intérêts ;

3°) de mettre à la charge du collège Paul Bert une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à bon droit que le tribunal administratif a jugé que la résiliation prononcée par le collège n'était pas régulière ;

- elle a droit à l'indemnisation de la totalité du préjudice résultant de la résiliation ;

- c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que la restitution du matériel à la fin de l'année 2013 excluait l'existence d'un préjudice dès lors que le collège a utilisé le matériel sans contrepartie pour le propriétaire jusqu'au 20 décembre 2013, que ce matériel utilisé depuis trois ans ne pouvait être reloué au prix d'un matériel neuf et que ce matériel soumis à une obsolescence rapide était sans valeur et ne pouvait être revendu sur le marché de l'occasion ;

- elle a subi une perte de 17 779,17 euros égale à la différence entre les sommes décaissées et les loyers versés par le collège ;

- le gain manqué et la perte subie du fait des investissements réalisés doivent être indemnisés, ce qui conduit à condamner le collège à lui verser un montant de 25 206,87 euros HT correspondant aux loyers restant dus du 1er avril 2013 au 30 juin 2016 que la société était en droit de percevoir.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 28 juillet 2016, le 12 juillet et le 19 octobre 2017, le collège Paul Bert, représenté par MeA..., conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à titre subsidiaire à une réduction de l'indemnisation accordée à la société Grenke Location ;

3°) à ce que soit mise à la charge de la société Grenke Location une somme de 1 500 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il a payé pendant deux ans des matériels non conformes aux mentions du bon de livraison et qui ne lui ont pas rendu les services qu'il en attendait ;

- dès le 17 janvier 2013, il avait informé la société Grenke Location qu'il avait demandé la reprise des matériels donnés en location, alors que la demande de restitution ne lui est parvenue que par lettre du 22 novembre 2013 enregistrée le 27 novembre ;

- le contrat ne comportait pas de précisions suffisantes sur les matériels donnés en location, ni sur la durée du contrat ;

- les fautes du prestataire de service sont opposables à la société Grenke Location dès lors que le contrat était tripartite et impliquait les deux sociétés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Stefanski, président,

- et les conclusions de M. Favret, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Le 17 décembre 2010, un représentant de la société Copy Conform et le principal du collège Paul Bert de Malakoff ont signé un contrat prévoyant que la société Grenke Location, après avoir acheté à la société Copy Conform deux copieurs, deux cartes d'impression, deux cartes de scanners et deux finisseurs, s'engageait à donner ces matériels en location sans option d'achat au collège pour une durée de soixante-trois mois moyennant 21 loyers trimestriels de 2 319, 04 euros TTC soit 1 939 euros HT.

2. Après un changement de l'équipe dirigeante, le collège a cessé de payer les loyers à compter du 1er janvier 2013. Le 17 janvier 2013, le collège a adressé à la société Grenke Location et à la société Burotik'R venant aux droits de la société Copy Conform, une lettre de résiliation du contrat aux torts des intéressés à compter du 31 janvier 2013. Par lettre du 5 mars 2013, la société Grenke Location a répondu au collège qu'elle avait rempli ses obligations, que les manques invoqués concernaient la seule société Burotik'R et ne lui étaient pas opposables et qu'elle l'invitait à respecter ses engagements.

3. Le 19 juillet 2013, la société Grenke Location a, à son tour, adressé une lettre de résiliation à l'établissement en lui demandant, par application des conditions générales du contrat relatives aux conséquences des résiliations, le versement d'une somme totale de 28 285,98 euros correspondant, d'une part, à trois loyers trimestriels TTC dus avant la résiliation entre le 1er janvier 2013 et le 1er juillet 2013, d'autre part, à 11 loyers HT à échoir jusqu'à la fin prévue du contrat.

4. Le 14 décembre 2013, la société a saisi le tribunal administratif de Strasbourg en demandant la condamnation du collège à lui verser une somme totale de 27 525,90 euros correspondant à 2 319,03 euros TTC au titre des loyers dus pour le trimestre débutant le 1er janvier 2013 et une somme de 25 206,87 euros au titre de dommages et intérêts. Devant les premiers juges, la société ne s'est plus fondée sur la résiliation qu'elle avait prononcée et sur les stipulations des conditions générales du contrat applicables en cas de résiliation par une des parties, mais sur l'illégalité de la résiliation prononcée par le collège à ses torts en demandant la réparation des dommages dus à cette faute.

5. Après avoir jugé que la résiliation prononcée aux torts de la société Grenke Location par le collège n'était pas fondée et qu'elle prenait effet au 31 janvier 2013, le tribunal administratif, a condamné le collège à verser à la société le loyer du 1er trimestre 2013 dû à la date de la résiliation et a rejeté le surplus de la demande aux motifs que la société Grenke Location ne démontrait pas l'étendue de ses préjudices, tant pour le préjudice tenant à l'achat des biens dès lors que le collège les lui avaient restitués, que pour le préjudice tenant aux loyers à échoir dès lors que la société n'invoquait pas les stipulations du contrat. La société Grenke Location interjette appel du jugement dans la mesure où il a rejeté ses conclusions.

6. En premier lieu, le collège Paul Bert fait valoir en défense que le contrat de location litigieux ne fait pas mention du détail des prix et de la nature précise des matériels commandés et livrés, qu'il n'indique pas explicitement la date de fin du contrat dès lors que le nombre de trimestres est de 21 ou 22 suivant les documents et que l'établissement n'a pas été informé de la marque et du numéro de série des biens pris en location. Toutefois, à supposer même ces allégations fondées et opérantes, le collège n'en tire aucune conséquence juridique. Dans ces conditions, il ne peut pas être regardé comme contestant utilement le jugement attaqué en tant qu'il a jugé que la résiliation prononcée par l'établissement aux torts de la société, pour des motifs tenant notamment à l'illégalité des stipulations contractuelles, n'était pas justifiée et, donc, fautive.

7. En deuxième lieu, il ne résulte pas de l'instruction, qu'en achetant à la société Copy Conform les biens que le collège Paul Bert avait certifié avoir reçus en signant la confirmation de commande, la société Grenke Location a commis une faute. En effet, selon les stipulations du contrat conclu par le collège, la signature par lui de la confirmation de commande déclenchait la vente des matériels à la société Grenke Location. Rien n'indique que la société Copy Conform n'avait pas vendu à la société Grenke Location les biens spécifiés dans le contrat. Les fautes éventuellement commises par la société Copy Conform lors de la livraison des biens, à les supposer avérées, ne sont pas opposables au contrat de location conclu entre la société Grenke Location et le collège. La circonstance que la société Copy Conform ou son successeur n'auraient pas correctement entretenu ces biens, qui relève d'un autre contrat que celui de location, ne peut davantage être opposée à l'appelante. Ainsi, le collège n'est pas fondé à soutenir que des fautes commises par la société Grenke Location seraient de nature à conduire à un partage de responsabilité.

8. En troisième lieu, la société Grenke Location demande la condamnation du collège à lui verser une somme de 25 206,87 euros au titre du gain manqué ainsi que de la perte des investissements réalisés pour l'exécution du contrat de location. Elle soutient qu'elle a subi une perte correspondant à la différence entre le prix de 38 650,53 euros TTC qu'elle a payé à la société Copy Conform pour acquérir les biens donnés en location au collège et le montant de 20 871,36 euros qu'elle a finalement encaissé compte tenu du jugement du tribunal administratif, soit au total 17 779,17 euros.

9. Toutefois, la société indique en appel que la somme de 25 206,87 euros HT qu'elle demande devant la cour, correspond aux treize loyers de 1 938,99 euros HT qu'elle aurait dû percevoir entre le 1er avril 2013 et le 30 juin 2016, soit après le dernier loyer perçu et jusqu'à la date prévue de fin du contrat, en faisant valoir qu'elle avait acheté les matériels donnés en location et que son préjudice comprend la perte des loyers et du bénéfice escompté.

10. Puis, dans son mémoire en réplique, tout en continuant à demander une condamnation de 25 206,87 euros HT, la société fait également valoir que si le contrat s'était poursuivi jusqu'à son terme, elle aurait perçu des loyers de 48 699,84 euros TTC et, compte tenu du prix d'achat de 38 650,53 euros TTC, aurait réalisé un bénéfice TTC de 10 049,31 euros.

11. Si la société démontre qu'elle a versé à la société Copy Conform la somme de 38 650,53 euros pour l'achat des matériels donnés en location, la somme qu'elle a réellement exposée est de 32 316,50 euros HT figurant sur la facture de la société Copy Conform, compte tenu de la taxe sur la valeur ajoutée que la société requérante est en mesure de récupérer. Il est constant que la société Grenke Location a perçu, après la décision du tribunal administratif, une somme totale de 20 871,36 euros compte tenu des loyers antérieurement versés par le collège Paul Bert et qu'est ainsi resté à sa charge, en raison de l'interruption prématurée du contrat, un montant de 11 745,14 euros (soit 32 316,50 euros moins 20 871,36 euros).

12. Toutefois, il est constant que l'appelante a obtenu la restitution des biens loués. La société fait valoir qu'elle n'a perçu aucune somme à ce titre, car si les biens loués lui ont été restitués par le collège à la fin de l'année 2013, l'obsolescence rapide de ce type de matériels mis en service trois ans auparavant, a pour conséquence leur absence totale de valeur vénale sur le marché du matériel d'occasion sur lequel la société Grenke Location revend les matériels restitués, d'autant plus que, comme l'affirme le collège lui-même, le modèle a été remplacé et n'existe plus. Toutefois, s'il est vrai que des matériels de bureautique connaissent une obsolescence rapide, la société se borne à des considérations générales, sans démontrer qu'en l'espèce, elle n'a pas été en mesure de revendre ces biens, alors qu'elle indique le faire pour d'autres.

13. En outre, si la société soutient qu'elle a également perdu le bénéfice escompté à la fin normale du contrat, elle ne donne pas d'indications suffisamment précises sur son montant en le calculant par différence entre le prix d'achat TTC des matériels et les loyers qu'elle aurait perçus, alors qu'elle n'avait à sa charge que la valeur HT des matériels et que ses bénéfices auraient été amputés de diverses charges, notamment ses charges de fonctionnement. Dans ces conditions, la société ne démontre pas la réalité et le montant du bénéfice escompté et du préjudice qu'elle aurait subi à ce titre.

14. Ainsi, compte tenu de ce que la société ne démontre pas qu'elle n'aurait pas pu obtenir un prix, même faible, des biens loués après leur restitution, il sera fait une juste appréciation du préjudice subi par la société requérante en l'évaluant à la somme de 8 000 euros.

15. Il résulte de ce qui précède que la société Grenke Location est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande à hauteur de 8 000 euros.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

16. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu, en application de ces dispositions de mettre à la charge de la société Grenke Location, comme du collège Paul Bert, les sommes que chacun d'eux demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Par ces motifs,

DECIDE :

Article 1er : Le collège Paul Bert de Malakoff versera à la société Grenke Location une somme de 8 000 (huit mille) euros au titre de la réparation de ses préjudices dus à la résiliation anticipée du contrat en litige.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la société Grenke Location et les conclusions du collège Paul Bert relatives à l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Grenke Location et au collège Paul Bert.

Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.

2

N° 16NC00891


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16NC00891
Date de la décision : 23/11/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-04-02 Marchés et contrats administratifs. Fin des contrats. Résiliation.


Composition du Tribunal
Président : M. MESLAY
Rapporteur ?: Mme Colette STEFANSKI
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : THIERY

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-11-23;16nc00891 ?
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