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11/12/2018 | FRANCE | N°16NC02073

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 11 décembre 2018, 16NC02073


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... Del Popolo a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les décisions implicites par lesquelles la directrice interrégionale des services pénitentiaires Est-Strasbourg a refusé de reconnaître l'imputabilité au service des accidents de travail survenus les 17 mai 2013, 9 août 2013 et 16 août 2013, ainsi que la décision du 18 décembre 2014 par laquelle cette même autorité a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident survenu le 9 février 2013, et de condamner

l'Etat à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice moral qu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... Del Popolo a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les décisions implicites par lesquelles la directrice interrégionale des services pénitentiaires Est-Strasbourg a refusé de reconnaître l'imputabilité au service des accidents de travail survenus les 17 mai 2013, 9 août 2013 et 16 août 2013, ainsi que la décision du 18 décembre 2014 par laquelle cette même autorité a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident survenu le 9 février 2013, et de condamner l'Etat à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice moral qu'il estime avoir subi.

Par un jugement n° 1405077 du 28 juillet 2016, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision du 18 décembre 2014 et a rejeté le surplus de la demande de M. Del Popolo.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 15 septembre 2016, un mémoire ampliatif enregistré le 18 juin 2018 et des mémoires enregistrés le 20 septembre 2018 et le 8 octobre 2018, M. A... Del Popolo, représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 28 juillet 2016 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions implicites par lesquelles la directrice interrégionale des services pénitentiaires Est-Strasbourg a refusé de reconnaître l'imputabilité au service des accidents de travail survenus les 17 mai 2013, 9 août 2013 et 16 août 2013, ainsi que la décision du 18 décembre 2014 par laquelle cette même autorité a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident survenu le 9 février 2013 ;

3°) d'enjoindre à l'administration de procéder au réexamen de sa situation ;

4°) de reconnaître l'imputabilité au service de son accident de travail du 9 février 2013 ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- les premiers juges auraient dû annuler la décision du 18 décembre 2014 non pour un vice de procédure mais au motif que l'accident du 9 février 2013 est imputable au service ;

- cet accident, survenu sur le lieu du service et pendant les horaires de travail, est imputable au service ;

- il est présumé imputable au service en application de l'article L. 411-1 du code du travail ;

- la décision du 18 décembre 2014 a été prise au terme d'une procédure irrégulière dès lors que le médecin de prévention n'a pas déposé de rapport devant la commission de réforme ;

- les décisions implicites rejetant ses demandes d'imputabilité des accidents survenus les 17 mai 2013, 9 août 2013 et 16 août 2013 sont entachées d'incompétence ;

- ces accidents résultant de chocs émotionnels sont imputables au service, alors même qu'il se trouvait à son domicile, dès lors qu'aucune faute ne lui est imputable ;

- son employeur a divulgué des informations personnelles le concernant sans avoir préalablement obtenu un avis favorable de la commission nationale de l'informatique et des libertés ;

- son employeur devait assurer sa protection en application de l'article 2-1 du décret du 9 mai 1995 et des articles L. 4121-1, L. 4121-2 et L. 4121-3 du code du travail ;

- la directrice interrégionale des services pénitentiaires, appelée à d'autres fonctions, ne peut procéder au réexamen de sa situation.

Par un mémoire en défense enregistré le 20 septembre 2018, la ministre de la justice conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- l'appelant ne peut contester que le dispositif du jugement attaqué et non ses motifs ;

- les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions tendant à l'annulation du jugement du 28 juillet 2016 en tant qu'il annule la décision du 18 décembre 2014 dès lors que M. Del Popolo ne présente aucun intérêt à contester le jugement qui lui donne satisfaction sur ce point, quels que soient, par ailleurs, les motifs retenus par les premiers juges.

Les parties ont également été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions visant à ce que la cour reconnaisse l'imputabilité au service de l'accident survenu le 9 février 2013 dès lors que de telles conclusions sont nouvelles en appel.

Par un mémoire enregistré le 7 novembre 2018, M. Del Popolo a présenté ses observations sur les moyens relevés d'office.

Par une ordonnance du 9 octobre 2018, l'instruction a été close à la date du 24 octobre 2018.

M. Del Popolo a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 8 décembre 2016 modifiée le 18 octobre 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Guérin-Lebacq,

- et les conclusions de Mme Kohler, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. Del Popolo, secrétaire administratif de l'administration pénitentiaire, a saisi la direction interrégionale des services pénitentiaires Est-Strasbourg de plusieurs demandes tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service de chocs émotionnels qu'il indique avoir éprouvés les 9 février 2013, 17 mai 2013, 9 août 2013 et 16 août 2013. Par une décision du 18 décembre 2014, la directrice interrégionale des services pénitentiaires Est-Strasbourg a expressément rejeté sa demande en ce qui concerne le choc qu'il aurait ressenti le 9 février 2013. M. Del Popolo a saisi le tribunal administratif de Strasbourg en vue d'obtenir l'annulation de cette décision, ainsi que des décisions implicites de rejet nées du silence gardé par l'administration sur ses autres demandes d'imputabilité au service. Par un jugement du 28 juillet 2016, dont M. Del Popolo relève appel, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision du 18 décembre 2014 et a rejeté le surplus de sa demande.

Sur la recevabilité des conclusions d'appel tendant à l'annulation de la décision du 18 décembre 2014 et à la reconnaissance de l'imputabilité au service de l'accident survenu le 9 février 2013 :

2. En premier lieu, il ressort de l'article 1er du dispositif du jugement attaqué que le tribunal administratif de Strasbourg a prononcé l'annulation de la décision de la directrice interrégionale des services pénitentiaires Est-Strasbourg du 18 décembre 2014. Il a ainsi été fait intégralement droit aux conclusions de la demande présentée en première instance contre cette décision, quels que soient, par ailleurs, les motifs retenus par les premiers juges. Dans ces conditions, les conclusions présentées par M. Del Popolo, qui n'a pas intérêt pour faire appel de ce jugement en tant qu'il se prononce sur la décision du 18 décembre 2014, sont irrecevables dans cette mesure et, par suite, ne peuvent qu'être rejetées.

3. En second lieu, les conclusions tendant à ce que la cour reconnaisse l'imputabilité au service de l'accident survenu le 9 février 2013 sont nouvelles en appel et, par suite, irrecevables.

Sur le surplus des conclusions de la requête :

4. En premier lieu, par un arrêté du 5 mars 2012 publié au Journal officiel de la République française le 11 mars suivant, MmeB..., directrice interrégionale des services pénitentiaires de Strasbourg a reçu délégation pour signer l'ensemble des actes, à l'exception des décrets, relatifs aux affaires des services placés sous son autorité. Ainsi, Mme B...était compétente pour se prononcer sur les demandes d'imputabilité au service présentées par M. Del Popolo. Si le requérant fait valoir que l'arrêté du 5 mars 2012 omet de rappeler les textes applicables en matière de gestion du personnel, mentionne uniquement le premier prénom de MmeB..., vise des textes omettant de se référer au " ministère de la justice et des libertés " et permet aux directeurs interrégionaux de subdéléguer leur signature sans préciser expressément que cette possibilité est également offerte aux directrices, l'ensemble de ces circonstances est sans influence sur la régularité de la délégation dont bénéficie MmeB....

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. (...). / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite (...) ". Un accident survenu sur le lieu et dans le temps du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par un fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal présente, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant cet évènement du service, le caractère d'un accident de service.

6. M. Del Popolo allègue avoir subi plusieurs chocs émotionnels les 17 mai 2013, 9 août 2013 et 16 août 2013 à la lecture de courriers émanant de l'administration. Il est toutefois constant que les faits ainsi allégués se sont produits au domicile du requérant, lequel ne produit en outre aucun document, notamment médical, susceptible de justifier de l'existence des chocs émotionnels qui en auraient résulté et de leurs conséquences sur son état de santé. A cet égard, il ressort des pièces du dossier que, dans sa séance du 23 mai 2013, la commission de réforme a rendu un avis défavorable à ses demandes tendant à obtenir la reconnaissance de l'imputabilité au service de quatorze chocs émotionnels qu'il soutenait avoir éprouvés entre le mois de septembre 2006 et le mois de janvier 2013. Dans ces conditions, M. Del Popolo n'est pas fondé à soutenir que l'administration aurait méconnu les dispositions précitées du 2° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 en refusant de lui en reconnaître le bénéfice.

7. En dernier lieu, la décision du 18 décembre 2014 refusant de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident du 9 février 2013 a été annulée au motif qu'elle était entachée d'un vice de procédure. Une telle annulation implique seulement le réexamen de la situation de M. Del Popolo afin que l'administration se prononce de nouveau, et suivant une procédure régulière, sur sa demande d'imputabilité. La circonstance que la directrice interrégionale des services pénitentiaires Est-Strasbourg, signataire de cette décision, a été appelée à d'autres fonctions ne fait pas obstacle à un tel réexamen par son remplaçant. M. Del Popolo n'est donc pas fondé à contester sur ce point la mesure d'injonction prise par les premiers juges.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. Del Popolo n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté le surplus de sa demande. Ses conclusions présentées à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. Del Popolo est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... Del Popolo et à la ministre de la justice, garde des sceaux.

Copie en sera adressée à la direction interrégionale des services pénitentiaires Est-Strasbourg.

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N° 16NC02073


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16NC02073
Date de la décision : 11/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-04-01-03 Fonctionnaires et agents publics. Positions. Congés. Congés de maladie. Accidents de service.


Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: M. Jean-Marc GUERIN-LEBACQ
Rapporteur public ?: Mme KOHLER
Avocat(s) : ORDRE DES AVOCATS À LA COUR D'APPEL DE NANCY

Origine de la décision
Date de l'import : 18/12/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2018-12-11;16nc02073 ?
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