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04/06/2019 | FRANCE | N°17NC01650

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 04 juin 2019, 17NC01650


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler la décision du 29 mai 2015 par laquelle l'inspectrice du travail a autorisé la SELARL Charles Brucelle, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société La Persévérance, à procéder à son licenciement pour motif économique.

Par un jugement n° 1501513 du 1er juin 2017, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé cette décision.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregis

trée le 7 juillet 2017, la SELARL Charles Brucelle, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la s...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler la décision du 29 mai 2015 par laquelle l'inspectrice du travail a autorisé la SELARL Charles Brucelle, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société La Persévérance, à procéder à son licenciement pour motif économique.

Par un jugement n° 1501513 du 1er juin 2017, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé cette décision.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 7 juillet 2017, la SELARL Charles Brucelle, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société La Persévérance, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 1er juin 2017 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. C...B...devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge de M. B...le versement de la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision contestée est suffisamment motivée, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges ;

- les représentants du personnel ont été suffisamment informés dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire ;

- l'employeur a rempli ses obligations de reclassement dès lors que la société fait l'objet d'une liquidation entraînant la suppression de l'ensemble des emplois de l'entreprise, que celle-ci n'appartient à aucun groupe et que les démarches requises par l'accord national du 12 juin 1987 ont été réalisées en vue d'un éventuel reclassement externe.

La requête a été communiquée au ministre du travail et à M. C...B...qui n'ont pas présenté de mémoire en défense.

Par une ordonnance du 11 mars 2019, l'instruction a été close à la date du 27 mars 2019, à 16 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- l'accord national sur les problèmes généraux de l'emploi conclu le 12 juin 1987 dans le secteur de la métallurgie ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Guérin-Lebacq,

- et les conclusions de Mme Kohler, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société La Persévérance, qui exploite une fonderie de deuxième fusion et exerce une activité de négoce d'éléments de construction et de mobiliers, a fait l'objet d'une liquidation judiciaire par un jugement du tribunal de commerce de Sedan du 16 avril 2015. La SELARL Charles Brucelle, qui assure les fonctions de liquidateur judiciaire de cette société, a sollicité l'autorisation de licencier M. B..., désigné comme délégué du personnel titulaire au sein de l'entreprise. L'inspectrice du travail a accordé cette autorisation par une décision du 29 mai 2015. La SELARL Charles Brucelle relève appel du jugement du 1er juin 2017 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé cette décision.

2. En application des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives, qui bénéficient d'une protection exceptionnelle dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, ne peuvent être licenciés que sur autorisation de l'inspecteur du travail. Lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé. Dans le cas où la demande d'autorisation de licenciement présentée par l'employeur est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié. Il appartient également à l'autorité administrative autorisant un tel licenciement d'énoncer les raisons de fait et de droit qui fondent l'autorisation et notamment d'indiquer les éléments sur lesquels elle s'est fondée pour admettre que les possibilités de reclassement du salarié protégé ont été suffisamment explorées par l'employeur et pour estimer que le licenciement pour motif économique est justifié. Lorsque le licenciement d'un salarié protégé repose sur un motif économique, la motivation de la décision de l'administration doit donc notamment porter sur la matérialité des efforts de reclassement accomplis par l'employeur.

3. D'une part, aux termes de l'article R. 2421-12 du code du travail : " La décision de l'inspecteur du travail est motivée (...) ".

4. D'autre part, aux termes de l'article L. 1233-4 du code du travail, dans sa version applicable à la date de la décision contestée : " Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient. / Le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d'une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure. / Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises ".

5. Il est constant que la société La Persévérance, qui fait l'objet d'une liquidation judiciaire et n'appartient à aucun groupe d'entreprises, n'offrait aucune possibilité de reclassement dans les conditions prévues par l'article L. 1233-4 précité du code du travail. Toutefois, l'article 28 de l'accord national sur les problèmes généraux de l'emploi, conclu le 12 juin 1987 dans le secteur de la métallurgie, prévoit que toute entreprise envisageant un licenciement collectif d'ordre économique doit rechercher les possibilités de reclassement à l'extérieur de l'entreprise, en particulier dans le cadre des entreprises de métaux, en faisant appel à la commission territoriale de l'emploi.

6. Dans sa décision, l'inspectrice du travail a constaté la réalité du motif économique du licenciement de M.B..., résultant de la liquidation judiciaire de l'entreprise, ainsi que la suppression de l'ensemble des emplois de l'entreprise, dont celui du salarié intéressé. Elle se réfère ensuite à " la recherche de reclassement qui, à ce jour, n'a pas abouti ", sans indiquer la nature, l'étendue et la réalité des efforts de reclassement effectués par l'entreprise, notamment dans le cadre de l'accord précité du 12 juin 1987, alors que l'administration, qui est tenue de se prononcer sur la réalité de ces efforts lorsqu'elle est saisie d'une demande d'autorisation de licenciement, doit mentionner son appréciation sur ce point dans la décision afin de permettre à ses destinataires de s'assurer qu'elle a effectivement exercé son contrôle. La décision autorisant le licenciement de M. B... est donc insuffisamment motivée.

7. Il résulte de ce qui précède que la SELARL Charles Brucelle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé la décision du 29 mai 2015 autorisant le licenciement de M.B.... Ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent donc qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SELARL Charles Brucelle est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SELARL Charles Brucelle, à la ministre du travail et à M. C... B....

2

N° 17NC01650


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17NC01650
Date de la décision : 04/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés.


Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: M. Jean-Marc GUERIN-LEBACQ
Rapporteur public ?: Mme KOHLER
Avocat(s) : SELARL AHMED HARIR

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2019-06-04;17nc01650 ?
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