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19/11/2019 | FRANCE | N°19NC02440-19NC02534

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre, 19 novembre 2019, 19NC02440-19NC02534


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... A..., divorcée C..., a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 5 février 2019 par lequel le préfet du Haut-Rhin lui a retiré le titre de séjour qui lui avait été délivré pour la période du 21 juillet 2017 au 20 juillet 2019, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle sera éloignée.

Par un jugement n° 1901591 du 8 juillet 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a reje

té sa demande.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée le 30 juillet ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... A..., divorcée C..., a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 5 février 2019 par lequel le préfet du Haut-Rhin lui a retiré le titre de séjour qui lui avait été délivré pour la période du 21 juillet 2017 au 20 juillet 2019, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle sera éloignée.

Par un jugement n° 1901591 du 8 juillet 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée le 30 juillet 2019 sous le n° 19NC02440, et un mémoire complémentaire, enregistré le 16 octobre 2019, Mme E... A..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 8 juillet 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Haut-Rhin du 5 février 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, de procéder à un réexamen de sa situation dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir et de lui delivrer, durant cet examen, une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement qui lui a été notifié ne comporte pas les signatures du président de la formation de jugement, du rapporteur et du greffier, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- le jugement est irrégulier dès lors que les premiers juges ont commis des erreurs de droit et ont entaché leur jugement d'erreurs manifestes d'appréciation ;

- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur sa situation personnelle et familiale ;

- la décision litigieuse méconnaît l'effet utile de la citoyenneté européenne qui découle de l'article 20 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et de la directive 2004/38/CE du 29 avril 2004, dès lors que sa fille a été reconnue par son père qui est titulaire de la nationalité néerlandaise.

Par un mémoire, enregistré le 14 octobre 2019, le préfet du Haut-Rhin conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens invoqués par la requérante n'est fondé.

II. Par une requête, enregistrée le 5 août 2019 sous le n° 19NC02534, et un mémoire complémentaire, enregistré le 14 août 2019, Mme E... A..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'ordonner le sursis à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 8 juillet 2019 ;

2°) de suspendre, jusqu'à ce qu'il soit statué sur la requête d'appel, l'arrêté du 5 février 2019 ou, subsidiairement, de suspendre l'arrêt en cause en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français et qu'il fixe le pays de destination ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens exposés dans la requête enregistrée sous le n° 19NC02440 sont de nature à justifier l'annulation du jugement ;

- l'exécution du jugement du 8 juillet 2019 aurait des conséquences difficilement réparables.

Par des mémoires, enregistrés le 13 août et le 5 septembre 2019, le préfet du Haut-Rhin conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens invoqués par la requérante n'est fondé.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement (UE) n°604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes n° 19NC02440 et 19NC02534 présentées par Mme A... ont fait l'objet d'une instruction commune et concernent un même jugement. Il y a ainsi lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.

2. Mme A..., ressortissante ivoirienne née en 1987, est entrée régulièrement en France le 16 août 2015 sous couvert d'un visa de long séjour valant titre de séjour délivré par les autorités consulaires françaises en Côte d'Ivoire, en raison de son mariage avec un ressortissant français célébré en 2015 à Abidjan. Elle s'est vu délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " valable du 21 juillet 2016 au 20 juillet 2017, puis une carte de séjour pluriannuelle valable du 21 juillet 2017 au 20 juillet 2019 qui lui ont été attribuées en sa qualité de conjoint d'un ressortissant français. Par un courrier du 19 décembre 2018, le préfet du Haut-Rhin l'a informée de ce qu'il envisageait de lui retirer son titre de séjour en raison de la rupture de la communauté de vie avec son époux et l'a invitée à lui transmettre ses observations éventuelles dans un délai de quinze jours. Par arrêté du 5 février 2019, le préfet du Haut-Rhin a retiré son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle sera éloignée.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. En premier lieu, aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ".

4. Contrairement à ce que soutient Mme A..., la minute du jugement attaqué comporte les signatures du président de la formation de jugement, du rapporteur et du greffier d'audience. Par ailleurs, la circonstance que la copie du jugement notifiée à la requérante ne comporterait pas ces signatures est sans incidence sur la régularité du jugement.

5. En second lieu, si Mme A... soutient que les premiers juges ont entaché leur jugement d'erreurs de droit et d'appréciation, de telles erreurs, à les supposer établies, sont seulement susceptibles de remettre en cause, dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel, les motifs retenus par le tribunal administratif pour rejeter sa demande d'annulation. Par suite, les erreurs alléguées qui se rapportent au bien-fondé du jugement attaqué sont, en tout état de cause, sans incidence sur la régularité de ce même jugement.

Sur le bien-fondé du jugement :

6. En premier lieu, les stipulations combinées de l'article 20 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et de l'article 7 de la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004, relative au droit des citoyens de l'Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, telles qu'interprétées par la Cour de justice de l'Union européenne, confèrent au ressortissant mineur d'un Etat membre, en sa qualité de citoyen de l'Union, ainsi que, par voie de conséquence, au ressortissant d'un Etat tiers, parent de ce mineur et qui en assume la charge, un droit de séjour dans l'Etat membre d'accueil à la double condition que cet enfant soit couvert par une assurance maladie appropriée et que le parent qui en assume la charge dispose de ressources suffisantes. L'Etat membre d'accueil, qui doit assurer aux citoyens de l'Union la jouissance effective des droits que leur confère ce statut, ne peut refuser à l'enfant mineur, citoyen de l'Union, et à son parent, le droit de séjourner sur son territoire que si l'une au moins de ces deux conditions, dont le respect permet d'éviter que les intéressés ne deviennent une charge déraisonnable pour ses finances publiques, n'est pas remplie.

7. Si Mme A... se prévaut pour la première fois en appel de la nationalité néerlandaise de sa fille née le 31 mai 2018 et reconnue par un ressortissant néerlandais le 5 novembre 2018, elle ne peut être regardée comme remplissant les deux conditions énumérées au point précédent. Notamment, s'il est constant que Mme A... était titulaire d'un contrat à durée indéterminée en qualité de serveuse, il ressort des pièces du dossier qu'elle n'a pas repris cette activité à l'issue de son congé de maternité en septembre 2018 et qu'elle n'a ainsi exercé aucune activité professionnelle depuis la naissance de sa fille. Elle ne justifie pas par ailleurs de ressources dont elle aurait bénéficié après la fin de son congé maternité. Par ailleurs, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que le père de l'enfant qui n'habitait pas encore avec Mme A... et sa fille à la date de décision litigieuse contribuait effectivement à l'entretien de l'enfant. Par suite, il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme A... disposait, à la date de la décision litigieuse, de ressources suffisantes pour qu'elle et sa fille ne deviennent pas une charge déraisonnable pour les finances publiques.

8. En second lieu, Mme A... n'est entrée en France qu'au mois d'août 2015 et n'établit pas être isolée en Côte d'Ivoire où elle est au demeurant retournée du 24 octobre 2018 au 31 janvier 2019 avec sa fille. Par ailleurs la vie commune avec le père de l'enfant, qui ne les a pas accompagnés en Côte d'Ivoire, n'a débuté qu'au mois de mai 2019, soit postérieurement à l'édiction de la décision litigieuse. Il ne ressort ainsi pas des pièces du dossier que l'arrêté litigieux aurait porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris. Le préfet n'a ainsi pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que le préfet aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision litigieuse sur la situation personnelle et familiale de Mme A....

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Haut-Rhin du 5 février 2019.

Sur les conclusions tendant à ce que la cour ordonne le sursis à l'exécution du jugement attaqué et la suspension de l'arrêté du 5 février 2019 :

10. La cour statuant par le présent arrêt sur les conclusions de Mme A... tendant à l'annulation du jugement du 8 juillet 2019, les conclusions de sa requête n° 19NC02534 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement et, en tout état de cause, celles tendant à la suspension de l'arrêté du 5 février 2019 sont privées d'objet. Il n'y a, ainsi, pas lieu d'y statuer.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

11. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de Mme A..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent par suite qu'être rejetées.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que Mme A... demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 19NC02534 de Mme A... tendant à ce que la cour ordonne le sursis à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 8 juillet 2019 et la suspension de l'arrêté du préfet du Haut-Rhin du 5 février 2019.

Article 2: La requête n° 19NC02440 et le surplus de la requête n° 19NC02534 de Mme A... sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Rebecca A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Haut-Rhin.

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N° 19NC02440, 19NC02534


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC02440-19NC02534
Date de la décision : 19/11/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: Mme Guénaëlle HAUDIER
Rapporteur public ?: Mme SEIBT
Avocat(s) : STAEDELIN MULLER

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2019-11-19;19nc02440.19nc02534 ?
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