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03/12/2019 | FRANCE | N°18NC00098

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 03 décembre 2019, 18NC00098


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... E... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 21 août 2017 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait renvoyée.

Par un jugement n° 1704720 du 5 décembre 2017, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire

, enregistrés les 11 janvier 2018 et 6 décembre 2018, Mme E..., représentée par Me C..., demande à la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... E... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 21 août 2017 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait renvoyée.

Par un jugement n° 1704720 du 5 décembre 2017, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 11 janvier 2018 et 6 décembre 2018, Mme E..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 5 décembre 2017 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions du 21 août 2017 refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination prises à son encontre par le préfet du Haut-Rhin ;

3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans un délai de quinze jours ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

S'agissant de la décision de refus de titre de séjour :

- elle est entachée d'une erreur de fait ;

- elle méconnaît les dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

- elle a été prise par une autorité incompétente ;

- elle est entachée d'une erreur de fait ;

- elle méconnaît les dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 316-1 de ce code ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision en litige quant à sa situation personnelle ;

S'agissant de la décision fixant le pays de destination :

- elle est illégale en raison de l'illégalité des décisions de refus de titre de séjour et portant obligation de quitter le territoire français.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 19 et 24 avril 2018, le préfet du Haut-Rhin conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Mme E... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 janvier 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Michel, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme E..., ressortissante malgache née le 31 janvier 1992, a épousé M. A..., ressortissant français, le 19 octobre 2013, à Madagascar, et est entrée en France le 27 mai 2014 sous couvert d'un visa de long séjour en qualité de conjoint de Français. Elle a bénéficié d'un titre de séjour en cette qualité, renouvelé jusqu'au 7 mai 2016. A la suite de sa demande de renouvellement de ce titre de séjour, le préfet du Haut-Rhin, par un arrêté du 21 juin 2016, dont la légalité a été confirmée en dernier lieu par une ordonnance de la cour administrative d'appel de Nancy du 30 octobre 2017, a refusé de faire droit à sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme E... a ensuite sollicité, le 26 avril 2017, la délivrance d'un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français. Par un arrêté du 21 août 2017, le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait renvoyée. Mme E... fait appel du jugement du 5 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la décision de refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée ".

3. Mme E... a donné naissance, le 9 septembre 2016, sur le territoire français, à un enfant prénommé Ethan. Par un jugement du 26 avril 2019, le tribunal de grande instance de Mulhouse, saisi à la demande de M. A... d'une action en contestation de paternité, a constaté que M. A... n'est pas le père biologique de l'enfant B... A..., qui portera désormais le nom patronymique E..., et a ordonné la transcription et la mention de cette décision en marge de l'acte de naissance de l'enfant ainsi qu'en marge de tous les actes faisant référence à sa filiation. Par suite, et alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et n'est d'ailleurs pas allégué qu'un appel aurait été formé contre ce jugement, les moyens tirés de ce que la décision de refus de titre de séjour en litige est entachée d'une erreur de fait et d'une erreur de droit dans l'application des dispositions précitées du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant de délivrer à Mme E... un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français mineur doivent être écartés.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

4. En premier lieu, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, Mme E... n'établit pas l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour. Dès lors, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision doit être écarté.

5. En deuxième lieu, par un arrêté du 20 septembre 2016 publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du 21 septembre 2016, le préfet du Haut-Rhin a donné délégation à M. Christophe Marx, secrétaire général de la préfecture, à l'effet de signer tous arrêtés et décisions relevant des attributions de l'Etat dans le département à l'exception de certaines catégories d'actes au nombre desquelles ne figurent pas les décisions prises en matière de séjour et d'éloignement des étrangers. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

6. En troisième lieu, un étranger ne peut faire l'objet d'une mesure prescrivant à son égard une obligation de quitter le territoire français en application des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lorsque la loi prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 3 ci-dessus, et en l'absence de tout autre élément invoqué par Mme E..., les moyens tirés de l'erreur de fait et de l'erreur de droit dans l'application des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés.

7. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 316-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace à l'ordre public, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée à l'étranger qui dépose plainte contre une personne qu'il accuse d'avoir commis à son encontre les infractions visées aux articles 225-4-1 à 225-4-6 et 225-5 à 225-10 du code pénal ou témoigne dans une procédure pénale concernant une personne poursuivie pour ces mêmes infractions. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. Cette carte de séjour temporaire ouvre droit à l'exercice d'une activité professionnelle. Elle est renouvelée pendant toute la durée de la procédure pénale, sous réserve que les conditions prévues pour sa délivrance continuent d'être satisfaites. / En cas de condamnation définitive de la personne mise en cause, une carte de résident est délivrée de plein droit à l'étranger ayant déposé plainte ou témoigné ". Il résulte de ces dispositions que la loi prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour dans le seul cas d'une condamnation définitive de la personne mise en cause au bénéfice de l'étranger ayant déposé plainte ou témoigné. Mme E..., qui a porté plainte contre son époux le 12 avril 2016, n'établit pas ni d'ailleurs n'allègue d'une condamnation définitive prononcée à l'encontre de ce dernier. Par suite, la requérante ne peut se prévaloir de la méconnaissance des dispositions précitées pour contester l'obligation de quitter le territoire français en litige.

8. En cinquième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

9. Il ressort des pièces du dossier que la communauté de vie de Mme E... avec son époux a pris fin en mars 2016. En outre, la requérante n'établit pas qu'elle ne pourra pas poursuivre avec son enfant une vie privée et familiale normale dans son pays d'origine, où réside l'ensemble de sa famille. Par ailleurs, s'agissant des procédures judiciaires et de l'enquête pénale dont Mme E... se prévaut, l'intéressée dispose de la faculté de se faire représenter notamment par un conseil et de solliciter un visa afin, le cas échéant, d'être personnellement entendue. Par suite, dans les circonstances de l'espèce, la décision en litige n'a pas porté au droit de Mme E... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

10. En dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 9 ci-dessus, le moyen tiré de ce que le préfet aurait commis une erreur dans l'appréciation des conséquences de la décision en litige quant à la situation personnelle de Mme E... doit être écarté.

Sur la décision fixant le pays de destination :

11. Ainsi qu'il a été précédemment dit, Mme E... n'établit pas l'illégalité des décisions de refus de titre de séjour et portant obligation de quitter le territoire français. Dès lors, le moyen tiré de l'illégalité de ces décisions, invoqué par voie d'exception, doit être écarté.

12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... E... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Haut-Rhin.

2

N° 18NC00098


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NC00098
Date de la décision : 03/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. KOLBERT
Rapporteur ?: M. Alexis MICHEL
Rapporteur public ?: M. LOUIS
Avocat(s) : BOHNER

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2019-12-03;18nc00098 ?
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