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26/06/2020 | FRANCE | N°19NC01978

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre, 26 juin 2020, 19NC01978


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg, d'une part, d'annuler l'arrêté du 20 décembre 2018 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination et, d'autre part, d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de statuer à nouveau sur sa situation et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour.

Par un jugement n° 1900591 du 21 mai 2019, le tribunal ad

ministratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg, d'une part, d'annuler l'arrêté du 20 décembre 2018 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination et, d'autre part, d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de statuer à nouveau sur sa situation et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour.

Par un jugement n° 1900591 du 21 mai 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée sous le n° 19NC01978 le 23 juin 2019, Mme A... C..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 21 mai 2019 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet du Bas-Rhin du 20 décembre 2018 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et, dans cette attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 2 000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Mme C... soutient que :

- la décision contestée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation s'agissant de la gravité de son état de santé, de sa faible autonomie, et de l'impossibilité de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine, où elle se retrouverait en outre isolée ;

- l'administration n'a pas procédé à un examen réel et sérieux de sa situation personnelle.

La requête a été communiquée au préfet du Bas-Rhin, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Par ordonnance du 11 février 2020, la clôture d'instruction a été fixée au 3 mars 2020.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 19 septembre 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Favret, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., ressortissante russe d'origine tchétchène, née le 27 septembre 1958, est entrée irrégulièrement en France le 14 octobre 2012, selon ses déclarations. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA) du 31 décembre 2013, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 16 décembre 2014. Sa demande de réexamen au titre de l'asile a été également rejetée par une décision de l'OFPRA du 20 juillet 2015, confirmée par une décision de la CNDA du 7 janvier 2016. Mme C... a obtenu une carte de séjour temporaire pour raisons de santé, valable du 12 septembre 2016 au 11 septembre 2017. Elle en a demandé, le 8 août 2017, le renouvellement mais, par un arrêté du 20 décembre 2018, le préfet du Bas-Rhin a rejeté cette demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination. Mme C... fait appel du jugement du 21 mai 2019 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de l'arrêté du 20 décembre 2018 :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11°A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ".

3. Il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande au titre des dispositions du 11° de l'article L. 313-11, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin mentionné à l'article R. 313-22, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire. Lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine. Elle doit alors, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine.

4. Il ressort des pièces du dossier que Mme C... souffre d'un état dépressif sévère d'origine traumatique, d'hypertension artérielle, de dyslipidémie, de lombalgie chronique sur protrusion discale, d'un goître thyroïdien, d'une mastopathie fibrokystique, de gastrite chronique et de surpoids, pour lesquels elle bénéficie d'un traitement médicamenteux et fait l'objet d'un suivi régulier. Pour refuser à Mme C... le renouvellement du titre de séjour qui lui avait été délivré pour raisons de santé, le préfet du Bas-Rhin s'est fondé notamment sur un avis émis le 30 juin 2018 par le collège des médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), qui a estimé que l'état de santé de l'intéressée nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais qu'un traitement approprié était disponible dans le pays d'origine de l'intéressée vers lequel elle pouvait voyager sans risque.

5. Les pièces produites par la requérante, notamment le certificat médical du 17 janvier 2019 établi par le docteur Giami, psychiatre, mentionnant que l'intéressée " ne pourrait bénéficier de ces soins qu'en France ", que la présence à ses côtés de son fils et de son petit-fils contribueraient à sa guérison et qu'" une éventuelle interruption du traitement, ou un éloignement familial, ne manqueraient pas d'avoir pour elle des conséquences funestes à court terme ", ne sont pas suffisamment étayées et circonstanciées pour remettre en cause l'appréciation portée, au vu de cet avis, par le préfet du Bas-Rhin. Elles n'établissent pas davantage que le principe actif des médicaments Fluvastatine, Coversyl et Pantoprazole, prescrits à Mme C..., n'existerait pas en Russie sous une autre appellation commerciale. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que la pathologie psychiatrique de l'intéressée présenterait, avec les événements traumatisants qu'elle allègue avoir vécus dans son pays d'origine, un lien tel qu'un traitement approprié ne puisse pas, dans son cas, être envisagé dans ce pays. Enfin, si la requérante soutient qu'en raison de sa faible autonomie, elle ne pourrait pas bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine, elle n'établit pas l'absence de tout dispositif d'assistance à la personne en Russie, où résident au demeurant l'un de ses fils et ses deux frères et où elle ne serait, par suite, pas isolée.

6. Il résulte de ce qui précède que le préfet du Bas-Rhin n'a pas fait une inexacte application des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en lui refusant le renouvellement de son titre de séjour et en l'obligeant également à quitter le territoire français et il n'a pas davantage commis d'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de sa décision sur la situation de l'intéressée.

7. En deuxième lieu, il ne ressort ni des pièces du dossier ni des termes de l'arrêté contesté, que le préfet du Bas-Rhin n'aurait pas procédé à un examen réel et sérieux de la situation personnelle de Mme C....

8. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Bas-Rhin du 20 décembre 2018. Ses conclusions aux fins d'injonction doivent être rejetées, par voie de conséquence.

Sur les frais liés à l'instance :

9. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".

10. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que le conseil de Mme C... demande au titre des dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.

2

N° 19NC01978


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19NC01978
Date de la décision : 26/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. KOLBERT
Rapporteur ?: M. Jean-Marc FAVRET
Rapporteur public ?: Mme KOHLER
Avocat(s) : GALLAND YANNICK et KIEFFER EMMANUEL

Origine de la décision
Date de l'import : 30/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-06-26;19nc01978 ?
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