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01/06/2021 | FRANCE | N°20NC02776

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 01 juin 2021, 20NC02776


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler la décision du 28 juin 2019 par laquelle le préfet de la Haute-Saône a rejeté sa demande de regroupement familial présentée au bénéfice de son épouse ainsi que la décision du 26 août 2019 rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n°1901800 du 6 août 2020, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 septembre 2020, M C..., re

présenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Be...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler la décision du 28 juin 2019 par laquelle le préfet de la Haute-Saône a rejeté sa demande de regroupement familial présentée au bénéfice de son épouse ainsi que la décision du 26 août 2019 rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n°1901800 du 6 août 2020, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 septembre 2020, M C..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Besançon du 6 août 2020 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions du préfet de la Haute-Saône des 28 juin et 26 août 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Saône de procéder au réexamen de sa demande de regroupement familial dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision est entachée d'une erreur de droit au regard des dispositions de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que les principes essentiels régissant la vie de famille en France ne comprennent pas la notion d'ordre public ;

- la décision est entachée d'une erreur de fait, dès lors que les pièces produites démontrent qu'il respecte les principes régissant la vie de famille en France et les lois de la République ;

- la décision méconnaît le principe du " non bis in idem " selon lequel nul ne peut être puni ou poursuivi pénalement deux fois à raison des mêmes faits ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 janvier 2021, le préfet de la Haute-Saône conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme D..., première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant marocain né le 18 avril 1987, est entré en France le 17 mai 2005 et est titulaire d'une carte de résident valable jusqu'au 16 septembre 2025. Il a sollicité le 15 février 2018 le bénéfice du regroupement familial au profit de son épouse, avec laquelle il s'est marié au Maroc le 22 août 2017. Par une décision du 28 juin 2019, le préfet de la Haute-Saône a rejeté cette demande. Le préfet a également rejeté le recours gracieux présenté par M. C... par une décision du 26 août 2019. M. C... fait appel du jugement du 6 août 2020 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux décisions.

Sur la légalité de la décision du 28 juin 2019, ensemble le rejet du recours gracieux du 26 août 2019 :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : (...) / 3° Le demandeur ne se conforme pas aux principes essentiels qui, conformément aux lois de la République, régissent la vie familiale en France, pays d'accueil. "

3. Pour refuser le bénéfice du regroupement familial en faveur de son épouse à M. C..., le préfet de la Haute-Saône a estimé que ce dernier ne se conformait pas aux principes essentiels régissant la vie familiale en France, dès lors qu'il a été condamné par un jugement du tribunal correctionnel de Vesoul du 12 janvier 2017 à une peine de douze mois d'emprisonnement avec sursis, assortie d'une mise à l'épreuve, pour des faits de violences aggravées commis sur son ancienne épouse, ayant entrainé une incapacité temporaire de travail de quinze jours.

4. D'une part, de tels faits, qui révèlent un comportement de l'intéressé contraire à l'ordre public, peuvent légalement justifier un refus de regroupement familial sur le fondement des dispositions précitées dès lors qu'ils sont contraires aux principes essentiels qui, conformément aux lois de la République, régissent la vie familiale en France. Le moyen tiré de l'erreur de droit doit en conséquence être écarté.

5. D'autre part, si le juge de l'application des peines a constaté que M. C... s'était conformé aux obligations découlant de sa condamnation et a mis fin au sursis avec mise à l'épreuve à compter du 12 janvier 2019 et que celui-ci produit plusieurs attestations faisant état de son investissement envers son fils, né de sa précédente union, et de son bon comportement, ces éléments ne suffisent pas à établir que M. C... se conformait aux principes essentiels régissant la vie familiale en France, eu égard à la gravité et au caractère récent des faits de violences commis sur sa première épouse. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de fait ne peut qu'être écarté.

6. En troisième lieu, le refus opposé à une demande de regroupement familial, qui n'a pas le caractère d'une sanction, ne saurait constituer une violation du principe " non bis in idem " selon lequel nul ne peut être puni ou poursuivi pénalement deux fois à raison des mêmes faits.

7. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

8. Lorsqu'il se prononce sur une demande de regroupement familial, le préfet dispose d'un pouvoir d'appréciation et n'est pas tenu de rejeter la demande même dans le cas où l'étranger demandeur du regroupement ne justifierait pas remplir l'une des conditions de fond prévues par les dispositions du code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile, notamment dans le cas où il est porté une atteinte excessive au droit de mener une vie familiale normale tel qu'il est protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

9. S'il ressort des pièces du dossier que M. C... réside en France depuis l'année 2005 sous couvert d'une carte de résident, qu'il est marié depuis le 22 août 2017 à une compatriote et qu'il est par ailleurs père d'un enfant de nationalité française, né d'une précédente union, il est constant, d'une part, que le requérant n'a présenté sa demande de regroupement familial que le 15 février 2018, qu'il a toujours vécu séparé de son épouse et que le couple n'a pas d'enfant. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intéressé serait dans l'impossibilité de se rendre régulièrement au Maroc pour voir son épouse, ni que celle-ci ne pourrait pas lui rendre visite régulièrement en France. Dans ces conditions, la décision contestée ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de M. C... et de son épouse au respect de leur vie privée et familiale garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet de la Haute-Saône du 28 juin 2019, ensemble le rejet de son recours gracieux du 26 août 2019. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles qu'il présente sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Saône.

4

N° 20NC02776


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NC02776
Date de la décision : 01/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme GRENIER
Rapporteur ?: Mme Sandrine ANTONIAZZI
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : ERDEM DEVAUX

Origine de la décision
Date de l'import : 10/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-06-01;20nc02776 ?
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