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28/12/2021 | FRANCE | N°20NC02863

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 28 décembre 2021, 20NC02863


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 17 août 2018 par lequel le maire de la commune de Wintzenheim a ordonné la fermeture de l'établissement " Hôtel Cristal ", situé 91 rue Clémenceau, à compter du 27 août 2018 et prescrit les mesures nécessaires à sa réouverture au public.

Par un jugement n°1802699 du 24 juillet 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un m

émoire enregistrés les 30 septembre 2020 et 8 octobre 2021, Mme A..., représentée par Me Tadic, de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 17 août 2018 par lequel le maire de la commune de Wintzenheim a ordonné la fermeture de l'établissement " Hôtel Cristal ", situé 91 rue Clémenceau, à compter du 27 août 2018 et prescrit les mesures nécessaires à sa réouverture au public.

Par un jugement n°1802699 du 24 juillet 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 30 septembre 2020 et 8 octobre 2021, Mme A..., représentée par Me Tadic, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) à titre principal, d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 24 juillet 2020 et l'arrêté du maire de la commune de Wintzenheim du 17 août 2018 ;

2°) à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Wintzenheim le versement d'une somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le maire n'était pas compétent pour édicter la mesure de police en litige fondée sur un risque de danger grave et imminent ;

- l'arrêté attaqué a été pris au terme d'une procédure irrégulière en raison de l'irrégularité de la composition de la commission d'arrondissement de sécurité en l'absence d'agent de la direction départementale des territoires ;

- l'arrêté attaqué a été pris au terme d'une procédure irrégulière en l'absence de procédure contradictoire préalable ; contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, l'urgence n'est pas caractérisée ;

- le maire a apprécié le risque pour la sécurité de façon manifestement erronée ;

- les travaux prescrits sont disproportionnés au regard du risque effectivement représenté par l'établissement ; contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, plusieurs des obligations qui lui sont imposées, dont l'encloisonnement de l'escalier, ne sont pas applicables à un " très petit hôtel " relevant des ERP de 5e catégorie, 2e groupe ;

- l'arrêté est entaché d'erreurs de droit, d'erreurs manifestes d'appréciation et de détournement de pouvoir.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 29 septembre et 25 octobre 2021, la commune de Wintzenheim, représentée par la Selarl Soler-Couteaux, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 500 euros soit mise à la charge de Mme A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le décret n° 95-260 du 8 mars 1995 modifié ;

- l'arrêté du 25 juin 1980 portant approbation des dispositions générales du règlement de sécurité contre les risques d'incendie et de panique dans les établissements recevant du public (ERP) ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Picque, première conseillère,

- les conclusions de M. Michel, rapporteur public,

- et les observations de Me Lazzarin, substituant Me Tadic, représentant Mme A... et de Me Huk, représentant la commune de Wintzenheim.

Considérant ce qui suit :

1. Depuis 1988, Mme A... exploite en son nom personnel un hôtel-restaurant sous l'enseigne commerciale " Cristal ", situé 91 rue Clémenceau à Wintzenheim, relevant de la catégorie des " très petits hôtels ", établissement recevant du public (ERP) de 5eme catégorie. Le 11 juillet 2018, la commission de sécurité de l'arrondissement de Colmar-Ribeauvillé, après une visite de l'établissement, a émis un avis défavorable à son ouverture au public au motif qu'il présentait un danger grave et imminent en l'assortissant de vingt-quatre prescriptions techniques. Mme A... fait appel du jugement n°1806299 du 24 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de la commune de Wintzenheim en date du 17 août 2018 ordonnant la fermeture au public de l'établissement à compter du 27 août 2018 et prescrivant les mesures nécessaires à sa réouverture au public.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. D'une part, aux termes de l'article 1er du décret du 8 mars 1995 relatif à la commission consultative départementale de sécurité et d'accessibilité, dans sa version alors en vigueur : " Dans chaque département, une commission consultative départementale de sécurité et d'accessibilité est instituée par arrêté préfectoral. Le préfet peut en outre créer : (...) des commissions d'arrondissement ". Aux termes de l'article 2 de ce décret : " (...) La commission consultative départementale de sécurité et d'accessibilité exerce sa mission dans les domaines suivants et dans les conditions où sa consultation est imposée par les lois et règlements en vigueur, à savoir : 1. La sécurité contre les risques d'incendie et de panique dans les établissements recevant du public et les immeubles de grande hauteur, conformément aux dispositions des articles R. 122-19 à R. 122-29 et R. 123-1 à R. 123-55 du code de la construction et de l'habitation (...) ". Selon l'article 23 du même décret : " L'arrêté préfectoral par lequel est créée une commission d'arrondissement, en application de l'article R. 123-38 du code de la construction et de l'habitation, fixe également les modalités de fonctionnement de cette commission ". Enfin, les articles 25 et 26 de ce même décret prévoient que : " Sont membres de la commission d'arrondissement pour la sécurité contre les risques d'incendie et de panique dans les établissements recevant du public avec voix délibérative les personnes désignées ci-après ou leurs suppléants : / - le chef de la circonscription de sécurité publique ou le commandant de compagnie de gendarmerie territorialement compétent ; / - un agent de la direction départementale de l'équipement ; / - un sapeur-pompier titulaire du brevet de prévention ; / - le maire de la commune concernée ou l'adjoint désigné par lui " et qu'" En cas d'absence de l'un des membres désignés à l'article 25, la commission d'arrondissement ne peut émettre d'avis ".

3. D'autre part, selon l'article 49 du décret du 8 mars 1995 : " Le préfet peut également créer un groupe de visite de la commission d'arrondissement, intercommunale ou communale pour la sécurité contre les risques d'incendie et de panique dans les établissements recevant du public, après avis de la commission consultative départementale de sécurité et d'accessibilité. / Le groupe de visite établit un rapport à l'issue de chaque visite. Ce rapport est conclu par une proposition d'avis. Il est signé de tous les membres présents en faisant apparaître la position de chacun. Ce document permet aux commissions mentionnées au présent article de délibérer ". Enfin, selon l'article 49-1 du même texte : " I.- Le groupe de visite chargé d'effectuer les visites mentionnées aux articles R. 122-23 et R. * 123-45 du code de la construction et de l'habitation est composé comme suit : (...) 2. Pour la commission d'arrondissement, intercommunale ou communale de sécurité : -un sapeur-pompier membre de la commission concernée ou l'un de ses suppléants ; -le maire ou son représentant. / Pour les visites de réception des établissements recevant du public de 2e et 3e catégorie, le groupe de visite comprend également le directeur départemental des territoires ou le directeur départemental des territoires et de la mer ou l'un de ses suppléants ".

4. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que si la présence du directeur départemental des territoires au sein du groupe de visite de la commission d'arrondissement de sécurité et d'accessibilité n'est requise que pour les visites de réception des établissements recevant du public de 2e et 3e catégorie, les articles 25 et 26 du décret du 8 mars 2015 imposent la présence d'un agent de cette direction, ancienne direction départementale de l'équipement, au sein de la commission d'arrondissement, seule compétente pour donner un avis à l'autorité investie du pouvoir de police.

5. Il ressort des pièces du dossier, et en particulier du procès-verbal du 24 mai 2017, que la commission d'arrondissement de sécurité et d'accessibilité de Colmar-Ribeauvillé qui a émis un avis défavorable sur la situation de l'établissement " Cristal ", ne comprenait aucun agent de la direction départementale des territoires. Par suite, Mme A... est fondée à soutenir que la commission d'arrondissement était irrégulièrement composée, celle-ci ayant siégé alors qu'un de ses membres avec voix délibérative était absent.

6. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et les règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou s'il a privé les intéressés d'une garantie.

7. Le vice relevé au point 5, qui a conduit à ce que la commission d'arrondissement se prononce sur la demande d'avis du maire de la commune Wintzenheim sans que la condition de quorum fixée par l'article 26 décret du 8 mars 1995 soit remplie, est de nature à avoir privé la requérante d'une garantie.

8. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de la commune de Wintzenheim en date du 17 août 2018 ordonnant la fermeture au public de l'établissement " Cristal " à compter du 27 août 2018 et prescrivant des mesures nécessaires à sa réouverture au public.

Sur les frais liés à l'instance :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de Mme A..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la commune de Wintzenheim demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de la commune de Wintzenheim le versement d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des mêmes dispositions.

D E C I D E:

Article 1er : Le jugement n° 1802699 du 24 juillet 2020 du tribunal administratif de Strasbourg ainsi que l'arrêté du maire de la commune de Wintzenheim en date du 17 août 2018 ordonnant la fermeture au public de l'établissement " Cristal " à compter du 27 août 2018 et prescrivant des mesures nécessaires à sa réouverture au public sont annulés.

Article 2 : La commune de Wintzenheim versera à Mme A... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions de la commune de Wintzenheim présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la commune de Wintzenheim

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N° 20NC02683


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NC02863
Date de la décision : 28/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

49-05-003 Police. - Polices spéciales.


Composition du Tribunal
Président : Mme GHISU-DEPARIS
Rapporteur ?: Mme Anne-Sophie PICQUE
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : TADIC

Origine de la décision
Date de l'import : 04/01/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-12-28;20nc02863 ?
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