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21/07/2022 | FRANCE | N°21NC02992

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre, 21 juillet 2022, 21NC02992


Vu la procédure suivante :

Procédures contentieuses antérieures :

Par une requête n° 2100989, Mme D... F... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 8 décembre 2020 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle est susceptible d'être éloignée d'office.

Par une requête n° 2102481, M. B... G... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 8

décembre 2020 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, ...

Vu la procédure suivante :

Procédures contentieuses antérieures :

Par une requête n° 2100989, Mme D... F... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 8 décembre 2020 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle est susceptible d'être éloignée d'office.

Par une requête n° 2102481, M. B... G... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 8 décembre 2020 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné d'office

Par un jugement n° 2100989 du 29 avril 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande de Mme F....

Par un jugement n° 2102481 du 29 juillet 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande de M. G....

Procédures devant la cour :

I- Par une requête enregistrée le 19 novembre 2021, Mme F..., représentée par Me Burkatzki demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 29 avril 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 8 décembre 2020 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle est susceptible d'être éloignée d'office ;

3°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour en application de l'article L. 614-16 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'irrégularité dès lors que la minute n'a pas été signée conformément à l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- le tribunal a méconnu le principe du contradictoire en ne communiquant pas l'arrêté du 17 novembre 2020 donnant délégation de signature à Mme B... ;

- le tribunal a commis une erreur en considérant que Mme F... n'avait pas demandé de titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- les décisions attaquées méconnaissent les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elles méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elles sont entachées d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Un mémoire en défense de la préfète du Bas-Rhin a été enregistré après la clôture d'instruction fixée au 15 mai 2022 et n'a pas été communiqué.

Mme F... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 18 octobre 2021.

II- Par une requête n° 22NC01060 enregistrée le 29 avril 2022, M. G... représenté par Me Burkatzki, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 29 juillet 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 8 décembre 2020 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné d'office ;

3°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour en application de l'article L. 614-16 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'irrégularité dès lors que la minute n'a pas été signée conformément à l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- les décisions attaquées méconnaissent les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elles méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elles méconnaissent les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elles sont entachées d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

La requête a été communiquée à la préfète du Bas-Rhin, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

M. G... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 29 mars 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Barrois, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme F... et M. G..., ressortissants kosovars, respectivement nés le 27 novembre 1987 et le 13 juin 1986, sont entrés sur le territoire français le 12 janvier 2016 et le 21 février 2015 afin d'y solliciter la reconnaissance du statut de réfugié et y sont devenus parents de deux enfants, né en 2016 et en 2018. Leurs demandes d'asile ont été rejetées par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 29 avril 2016, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 2 mars 2017 et ils ont fait l'objet d'un refus de titre de séjour et d'une obligation de quitter le territoire français le 29 mars 2017. Le 12 octobre 2016, ils ont sollicité la délivrance d'un titre de séjour en application des dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et sur le fondement de l'article L. 313-10-1° de ce même code. Par un arrêté du 15 octobre 2018, le préfète du Haut-Rhin a refusé de leur délivrer un titre de séjour et leur a fait obligation de quitter le territoire français. Le 30 septembre 2020, ils ont demandé leur admission au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par deux arrêtés du 8 décembre 2020, la préfète du Bas-Rhin a rejeté leur demande. Par la requête n° 21NC02992, Mme F... fait appel du jugement du 29 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté et par la requête n° 22NC01060, M. G... fait appel du jugement du 29 juillet 2021 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. Les deux requêtes, présentées par Mme F... et M. G... , présentant à juger des questions semblables, il y a lieu de les joindre pour y statuer par un même arrêt.

Sur la régularité des jugements attaqués :

3. En premier lieu, aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ". Il ressort des pièces du dossier que les jugements attaqués ont été signés par la présidente de la formation de jugement, la rapporteure et la greffière. Par suite, le moyen tiré de leur irrégularité doit être écarté.

4. En second lieu, même s'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté portant délégation de signature à Mme B... du 17 novembre 2020 était joint en annexe du mémoire en défense du préfet en première instance enregistré après la clôture et non communiqué, cet acte publié au recueil des actes de la préfecture du Bas-Rhin du même jour est librement accessible sur internet. Par suite le moyen tiré de la méconnaissance du principe du contradictoire par les premiers juges doit être écarté.

Sur la légalité des décisions du 8 décembre 2020 refusant le séjour à Mme F... et M. G... :

5. En premier lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

6. Les requérants se prévalent de la durée de leur présence en France et de l'existence, au demeurant non établie, d'un contrat à durée indéterminée au bénéfice de M. G.... Il ressort toutefois des pièces du dossier que Mme F... et M. G..., qui n'ont pas exécuté les précédentes mesures d'éloignement prises à leur encontre, résident en France depuis cinq ans en situation irrégulière. En outre, ils n'établissent ni même n'allèguent être dépourvus d'attaches familiales à l'étranger. Dans ces conditions, et alors qu'ils ne font valoir aucun obstacle à ce que leurs deux filles âgées respectivement de 2 et 4 ans les accompagnent au Kosovo, ils ne sont pas fondés à soutenir que la préfète du Bas-Rhin a porté à leur droit au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a refusé de les admettre au séjour. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées ne peut qu'être écarté.

7. En deuxième lieu, aux termes des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation.

8. Il ne ressort pas des pièces du dossier que les deux filles de A... F... et de M. G..., nées en France en 2016 et en 2018, ne puissent pas poursuivre leur scolarité au Kosovo, eu égard à leur très jeune âge et à leur durée de séjour en France. Dans ces conditions, alors que les décisions portant refus d'admission au séjour et obligation de quitter le territoire français n'ont ni pour objet, ni pour effet de séparer les deux enfants mineurs de leurs parents, Mme F... et M. G... ne sont pas fondés à soutenir qu'elles sont de nature à porter à l'intérêt supérieur de ses enfants une atteinte disproportionnée au regard de leurs motifs. Par suite, le moyen tiré d'une méconnaissance des stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.

9. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 ".

10. D'une part, eu égard à sa situation personnelle et familiale, décrite au point 3, M. G... ne justifie pas, par les pièces qu'il produit, ni de considérations humanitaires, ni de motifs exceptionnels de nature à lui ouvrir droit au bénéfice d'une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale ".

11. D'autre part, la promesse d'embauche dont se prévaut le requérant est insuffisante pour constituer un motif exceptionnel au sens des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, justifiant la délivrance d'une carte de séjour portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " dès lors qu'il ne justifie d'aucun diplôme ou qualification, ni d'aucune expérience professionnelle en France durant les cinq années où il y a séjourné.

12. En dernier lieu, Mme F... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont jugé que son moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-11-7°du CESEDA était inopérant à l'encontre de l'arrêté attaqué dès lors qu'il n'est pas établi qu'elle aurait formé une demande de titre de séjour sur ce fondement.

13. Il résulte de tout ce qui précède que Mme F... et M. G... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués du 29 avril et du 29 juillet 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes de Mme F... et de M. G... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... F..., M. B... G... et au ministre de l'intérieur et des Outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète du Bas-Rhin.

Délibéré après l'audience du 7 juillet 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Vidal, présidente de chambre,

- M. Rees, président-assesseur,

- Mme Barrois, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 21 juillet 2022.

La rapporteure,

Signé : M. E...La présidente,

Signé : S. Vidal

La greffière,

Signé : S. RobinetLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des Outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

S. Robinet

2

N° 21NC02992-22NC01060


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21NC02992
Date de la décision : 21/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme VIDAL
Rapporteur ?: Mme Marion BARROIS
Rapporteur public ?: Mme ANTONIAZZI
Avocat(s) : BERARD JEMOLI SANTELLI BURKATZKI BIZZARRI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/08/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2022-07-21;21nc02992 ?
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