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26/07/2022 | FRANCE | N°20NC02924

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre, 26 juillet 2022, 20NC02924


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat CGT des agents du service départemental d'incendie et de secours de la Moselle a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la délibération du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours de la Moselle du 24 juin 2019 autorisant la signature d'un protocole d'accord modifié relatif aux droits syndicaux au sein du service.

Par un jugement n° 1908991 du 21 juillet 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé partiellement la délibérat

ion du 24 juin 2019, en tant que le protocole d'accord modifié dont elle autor...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat CGT des agents du service départemental d'incendie et de secours de la Moselle a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la délibération du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours de la Moselle du 24 juin 2019 autorisant la signature d'un protocole d'accord modifié relatif aux droits syndicaux au sein du service.

Par un jugement n° 1908991 du 21 juillet 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé partiellement la délibération du 24 juin 2019, en tant que le protocole d'accord modifié dont elle autorise la signature prévoit, au premier alinéa du b de l'article 8 de ce protocole, que les demandes d'organisation préalable d'une réunion syndicale mensuelle d'information doivent être formulées quinze jours au moins avant la date de cette réunion, et a rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 7 octobre 2020, le syndicat CGT des agents du service départemental d'incendie et de secours de la Moselle, représenté par Me Ponseele, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1908991 du tribunal administratif de Strasbourg du 21 juillet 2020 en tant qu'il s'est borné à annuler partiellement la délibération du 24 juin 2019 et a rejeté le surplus des conclusions de la demande ;

2°) d'annuler la délibération du 24 juin 2019 dans son intégralité ;

3°) de mettre à la charge du service départemental d'incendie et de secours de la Moselle la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement de première instance doit être confirmé en ce qu'il a annulé partiellement la délibération du 24 juin 2019 au motif que, en prévoyant, au premier alinéa du b de l'article 8 du protocole d'accord relatif aux droits syndicaux au service départemental d'incendie et de secours de la Moselle, que les demandes d'organisation préalable d'une réunion syndicale mensuelle d'information doivent être formulées quinze jours au moins avant la date de cette réunion, elle méconnaît les dispositions de l'article 8 du décret n° 85-397 du 3 avril 1985 relatif à l'exercice du droit syndical dans la fonction publique territoriale ;

- les dispositions du b de l'article 13 du protocole d'accord relatif aux droits syndicaux, portant sur le calcul du contingent global des autorisations d'absence, méconnaissent les dispositions de l'article 14 du décret n° 85-397 du 3 avril 1985 ;

- les dispositions du c de l'article 16 du protocole d'accord relatifs aux droits syndicaux, portant sur les modalités d'utilisation des décharges syndicales, portent atteinte au libre exercice de l'activité syndicale, garanti par le sixième alinéa du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, par l'article 8 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et par l'article 101-1 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 février 2021, le service départemental d'incendie et de secours de la Moselle, représenté par Me Keller, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge du syndicat CGT des agents du service départemental d'incendie et de secours de la Moselle de la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens invoqués par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 85-397 du 3 avril 1985 ;

- le décret n° 2001-1382 du 31 décembre 2001 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de M. Barteaux, rapporteur public,

- et les observations de Me Ponseele pour le syndicat CGT des agents du service départemental d'incendie et de secours de la Moselle et de Me Hassan pour le service départemental d'incendie et de secours de la Moselle.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 24 juin 2019, le conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours de la Moselle a autorisé la signature d'un protocole d'accord modifié relatif aux droits syndicaux au sein du service. Son recours gracieux, formé le 19 août 2019, ayant été rejeté le 30 septembre 2019, le syndicat CGT des agents du service départemental d'incendie et de secours de la Moselle a saisi le tribunal administratif de Strasbourg d'une demande tendant à l'annulation de cette délibération. Il relève appel du jugement n° 1908991 du 21 juillet 2020, en tant qu'il s'est borné à annuler partiellement l'acte ainsi contesté et a rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. En premier lieu, aux termes, d'une part, de l'article 12 du décret du 3 avril 1985 relatif à l'exercice du droit syndical dans la fonction publique territoriale : " A la suite de chaque renouvellement général des comités techniques, la collectivité territoriale, l'établissement public ou le centre de gestion attribue un crédit de temps syndical aux organisations syndicales, compte tenu de leur représentativité. / Le montant de ce crédit de temps est reconduit chaque année jusqu'aux élections suivantes (...). Le crédit de temps syndical comprend deux contingents : 1° Un contingent d'autorisations d'absence ; 2° Un contingent de décharges d'activité de service. ". Aux termes de l'article 14 du même décret : " Le contingent d'autorisations d'absence mentionné au 1° de l'article 12 est calculé au niveau de chaque comité technique, à l'exclusion des comités techniques facultatifs, proportionnellement au nombre d'électeurs inscrits sur la liste électorale du comité technique, à raison d'une heure d'autorisation d'absence pour 1 000 heures de travail accomplies par ceux-ci. / (...) / Les agents bénéficiaires sont désignés par les organisations syndicales parmi leurs représentants en activité dans la collectivité ou l'établissement concerné (...). "

3. Aux termes, d'autre part, de l'article 1er du décret du 31 décembre 2001 relatif au temps de travail des sapeurs-pompiers professionnels : " La durée de travail effectif des sapeurs-pompiers professionnels est définie conformément à l'article 1er du décret du 25 août 2000 susvisé auquel renvoie le décret du 12 juillet 2001 susvisé (...). ". Aux termes de l'article 2 de ce décret : " La durée de travail effectif journalier définie à l'article 1er ne peut pas excéder 12 heures consécutives. Lorsque cette période atteint une durée de 12 heures, elle est suivie obligatoirement d'une interruption de service d'une durée au moins égale ". Aux termes de l'article 3 du même décret : " Par dérogation aux dispositions de l'article 2 relatives à l'amplitude journalière, une délibération du conseil d'administration du service d'incendie et de secours peut, eu égard aux missions des services d'incendie et de secours et aux nécessités de service, et après avis du comité technique, fixer le temps de présence à vingt-quatre heures consécutives. / Dans ce cas, le conseil d'administration fixe une durée équivalente au décompte semestriel du temps de travail, qui ne peut excéder 1 128 heures sur chaque période de six mois. / (...) ".

4. Selon les stipulations contestées du b de l'article 13 du protocole d'accord modifié relatif aux droits syndicaux au service départemental d'incendie et de secours de la Moselle : " Le contingent d'autorisation d'absence est calculé proportionnellement au nombre d'électeurs inscrits sur la liste électorale du comité technique, à raison d'une heure d'autorisation d'absence pour 1000 heures de travail accompli par ceux-ci. Il est pris en référence le nombre moyen d'heures de travail réalisé par agent au SDIS de la Moselle : 1593 heures et le nombre d'agents des trois filières sapeurs-pompiers professionnels (SPP), administrative et technique en activité au 31 décembre 2018 : 769 ".

5. Il résulte des dispositions du premier alinéa du point 1 du paragraphe A de la délibération du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours de la Moselle du 19 décembre 2017, relative à la mise en œuvre du temps de travail, dont la légalité a été confirmée par un arrêt n° 19NC02731 rendu par la cour le même jour que le présent arrêt, que la durée annuelle du travail au sein du service est de 1 593 heures. En application des dispositions de l'article 14 du décret du 3 avril 1985 et alors qu'il n'est pas contesté que l'établissement public compte 769 agents, le contingent annuel des autorisations d'absence accordées aux représentant syndicaux s'élève à 1 225 heures. Si le syndicat CGT des agents du service départemental d'incendie et de secours de la Moselle fait valoir que les sapeurs-pompiers professionnels, qui représentent un effectif de 364 agents, accomplissent dans l'année soixante-cinq gardes de 24 heures et quarante gardes de 12 heures, soit un total de 2 040 heures par an, et si leur temps de présence ne saurait excéder 1 128 heures par semestre, il est loisible au conseil d'administration, conformément aux dispositions du deuxième alinéa de l'article 3 du décret du 31 décembre 2001, d'instituer un temps d'équivalence à la durée annuelle du travail. Ce temps d'équivalence constitue un mode particulier de comptabilisation du travail effectif pour les sapeurs-pompiers professionnels, astreints à des gardes de 24 heures, qui consiste à prendre en compte la totalité des heures de présence, tout en leur appliquant un mécanisme de pondération tenant à la moindre intensité du travail fourni pendant les périodes d'inaction. Dans ces conditions et à défaut pour le syndicat requérant de démontrer que les sapeurs-pompiers professionnels accomplissent un nombre d'heures de travail effectif supérieur à 1 593 heures, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du premier alinéa de l'article 14 du décret du 3 avril 1985 ne peut qu'être écarté.

6. En second lieu, aux termes du sixième alinéa du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 : " Tout homme peut défendre ses droits et ses intérêts par l'action syndicale et adhérer au syndicat de son choix. ". Aux termes de l'article 8 de la loi du 13 juillet 1983, portant droits et obligations des fonctionnaires, alors en vigueur : " Le droit syndical est garanti aux fonctionnaires. Les intéressés peuvent librement créer des organisations syndicales, y adhérer et y exercer des mandats. (...). ". Aux termes du premier paragraphe de l'article L. 100-1 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, alors en vigueur : " I. ' Sous réserve des nécessités du service, les collectivités et établissements accordent un crédit de temps syndical aux responsables des organisations syndicales représentatives. Celui-ci comprend deux contingents : 1° Un contingent est utilisé sous forme d'autorisations d'absence accordées aux représentants syndicaux mandatés pour participer aux congrès ou aux réunions statutaires d'organismes directeurs des organisations syndicales d'un autre niveau que ceux indiqués au 1° de l'article 59. Il est calculé proportionnellement au nombre d'électeurs inscrits sur la liste électorale au comité technique compétent. / (...) ; 2° Un contingent est accordé sous forme de décharges d'activité de service. Il permet aux agents publics d'exercer, pendant leurs heures de service, une activité syndicale au profit de l'organisation syndicale à laquelle ils appartiennent et qui les a désignés en accord avec la collectivité ou l'établissement. Il est calculé selon un barème dégressif appliqué au nombre d'électeurs inscrits sur la liste électorale du ou des comités techniques compétents. / (...) ". Aux termes du premier alinéa de l'article 19 du décret du 3 avril 1985 : " Le contingent de décharges d'activité de service mentionné au 2° de l'article 12 est calculé par chaque collectivité ou établissement non obligatoirement affilié à un centre de gestion conformément au barème ci-dessous. ". Aux termes de l'article 20 du même décret, dans sa rédaction alors applicable : " Les organisations syndicales désignent les agents bénéficiaires des décharges d'activité de service parmi leurs représentants en activité dans le périmètre du ou des comités techniques pris en compte pour le calcul du contingent concerné. Elles en communiquent la liste nominative à l'autorité territoriale et, dans le cas où la décharge d'activité de service donne lieu à remboursement des charges salariales par le centre de gestion, au président du centre de gestion. / Si la désignation d'un agent est incompatible avec la bonne marche du service, l'autorité territoriale motive son refus et invite l'organisation syndicale à porter son choix sur un autre agent. La commission administrative paritaire ou la commission consultative paritaire compétente doit être informée de cette décision. ".

7. Selon les stipulations en litige du c de l'article 16 du protocole d'accord relatif aux droits syndicaux au service départemental d'incendie et de secours de la Moselle, " il appartient au chef de centre ou de service de suivre le contingent d'heures autorisées pour l'année des agents placés sous son autorité " et, " afin de faciliter le décompte des heures de décharges d'activité de service, il conviendra d'appliquer des règles suivantes : une demi-journée équivaut à 4 heures ; une journée équivaut à 7h ". Par ces stipulations, le protocole d'accord modifié fixe, dans l'intérêt du service, les modalités de décompte des heures de décharge d'activité de service. Si le syndicat CGT des agents du service départemental d'incendie et de secours de la Moselle fait valoir que les modalités ainsi retenues visent avant tout à faciliter le calcul de ces heures, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elles auraient pour objet ou pour effet de porter une atteinte disproportionnée au libre exercice des activités syndicales. En se bornant à faire valoir que ses interventions se limitent le plus souvent à des entretiens ou à des réunions d'une à deux heures, le requérant ne démontre pas en quoi les dispositions litigieuses seraient de nature à le priver d'une partie de ses moyens d'action, à préjudicier à son bon fonctionnement ou à entraver le bon accomplissement de ses missions. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que la délibération autorisant la signature de ces stipulations porterait atteinte au libre exercice des activités syndicales, garanti par le sixième alinéa du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, par l'article 8 de la loi du 13 juillet 1983 et par l'article 100-1 de la loi du 26 janvier 1984.

8. Il résulte de tout ce qui précède que le syndicat CGT des agents du service départemental d'incendie et de secours de la Moselle n'est pas fondé à demander l'annulation de la délibération du 24 juin 2019 dans son intégralité, ni à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg s'est borné à annuler partiellement cette délibération et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Sur les frais de justice :

9. Les dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge du service départemental d'incendie et de secours de la Moselle, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme réclamée par le syndicat CGT des agents du service départemental d'incendie et de secours de la Moselle. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par le défendeur en application de ces mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête du syndicat CGT des agents du service départemental d'incendie et de secours de la Moselle est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le service départemental d'incendie et de secours de la Moselle en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat CGT des agents du service départemental d'incendie et de secours de la Moselle et au service départemental d'incendie et de secours de la Moselle.

Délibéré après l'audience du 5 juillet 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Wurtz, président de de la chambre,

- M. Meisse, premier conseiller,

- M. Marchal, conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 juillet 2022.

Le rapporteur,

Signé : E. A...

Le président,

Signé : C. WURTZ

Le greffier,

Signé : F. LORRAIN

La République mande et ordonne au préfet de la Moselle, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier :

F. LORRAIN

N° 20NC02924 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NC02924
Date de la décision : 26/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: M. Eric MEISSE
Rapporteur public ?: M. BARTEAUX
Avocat(s) : M et R AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2022-07-26;20nc02924 ?
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