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22/12/2022 | FRANCE | N°21NC02569

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 22 décembre 2022, 21NC02569


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Nancy de le décharger de l'obligation de payer les sommes de 3 142, 10 euros et 6 443, 01 euros mises à sa charge par deux titres de perception émis le 8 avril 2015 par le ministre de l'intérieur et faisant l'objet de saisies à tiers détenteurs en date du 15 novembre 2017.

Par un jugement n° 1901340 du 26 août 2021, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le

22 septembre 2021, M. D..., représenté par Me Vivier, demande à la cour :

1°) d'annuler ce ju...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Nancy de le décharger de l'obligation de payer les sommes de 3 142, 10 euros et 6 443, 01 euros mises à sa charge par deux titres de perception émis le 8 avril 2015 par le ministre de l'intérieur et faisant l'objet de saisies à tiers détenteurs en date du 15 novembre 2017.

Par un jugement n° 1901340 du 26 août 2021, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 22 septembre 2021, M. D..., représenté par Me Vivier, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 26 août 2021 ;

2°) d'annuler les avis à tiers détenteurs contestés ;

3°) d'enjoindre à l'Etat de lui rembourser les sommes prélevées sur sa pension de retraite ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les titres exécutoires attaqués sont entachés de nullité dès lors que ce n'est pas lui mais Mme D... qui a la qualité de débiteur ;

- Mme D... s'est acquittée de l'indemnité d'occupation de juillet 2012 à septembre 2014, pour un montant total de 6 954, 05 euros, de sorte que cette somme aurait dû être déduite de l'indemnisation versée par l'Etat au propriétaire de l'immeuble qu'ils occupaient sans titre ; l'Etat n'est subrogé qu'en ce qui concerne les sommes qu'il a versées à juste titre ; les titres exécutoires sont donc erronés et entachés de nullité.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 avril 2022, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les conclusions présentées par M. D... devant le tribunal administratif sont portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des procédures civiles d'exécution ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- et les conclusions de M. Michel, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme D... étaient propriétaires d'une maison d'habitation à Fains-Veel. A la suite de l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de M. D..., le tribunal de grande instance de Bar-le-Duc, par un jugement du 9 mars 2006, a déclaré la société en nom collectif (SNC) Molière adjudicataire de la maison. Par une ordonnance du 13 février 2009, le juge des référés du tribunal d'instance de Bar-le-Duc a constaté que Mme D... était occupante sans droit ni titre de l'immeuble en cause et a ordonné son expulsion. Par un arrêt du 17 novembre 2011, la cour d'appel de Nancy a confirmé cette ordonnance et mis à la charge de Mme D... le versement d'une provision de 21 700 euros au titre de l'indemnité d'occupation et fixé à 350 euros le montant de l'indemnité d'occupation due par Mme D..., à compter du 1er août 2011, à la SNC DB Valorisation à laquelle la maison avait été cédée par la SNC Molière par acte notarié du 27 juillet 2011. Le 10 mai 2012, le préfet de la Meuse a été saisi d'une demande tendant à l'octroi du concours de la force publique afin de procéder à l'expulsion de M. et Mme D.... Cette expulsion est intervenue le 23 octobre 2014. Le 25 février 2015, sur le fondement de l'article 16 de la loi du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution dans le cadre d'expulsions locatives, le préfet de la Meuse a pris deux arrêtés portant règlement d'indemnités amiables en accordant à la selarl Cappelaire-Prunaux, mandataire de la SNC DB Valorisation une somme totale de 9 585,11 euros (3142,10 euros + 6 443,01), dont le versement a été mandaté le même jour. Le 8 avril 2015, le ministre de l'intérieur, subrogé dans les droits du propriétaire, a émis à l'encontre de M. D... deux titres de perception de 3 142,10 euros et 6 443,01 euros. Deux avis à tiers détenteurs ont été notifiés le 15 novembre 2017. M. D... relève appel du jugement du 26 août 2021 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à le décharger de l'obligation de payer ces sommes.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. D'une part, aux termes de l'article L. 153-1 du code des procédures civiles d'exécution, issu de l'article 16 de de la loi du 9 juillet 1991 : " L'Etat est tenu de prêter son concours à l'exécution des jugements et des autres titres exécutoires. Le refus de l'Etat de prêter son concours ouvre droit à réparation ". Lorsqu'il indemnise un propriétaire du retard pris dans l'octroi du concours de la force publique pour exécuter un jugement ordonnant l'expulsion des occupants d'un immeuble, l'Etat est subrogé, dans la limite de l'indemnité versée, dans les droits que le propriétaire peut tenir au titre de l'occupation irrégulière de son bien pendant la période de responsabilité de l'Etat.

3. D'autre part, la juridiction compétente pour connaître du litige afférent à l'action du subrogé est, quel que soit le mode de recouvrement de la créance prétendue, celle qui a compétence pour connaître de l'action principale du subrogeant.

4. Par l'émission des deux titres de recettes en litige, le ministre a entendu procéder au recouvrement d'une somme égale à celle que l'Etat a versée au propriétaire du bien anciennement occupé par le requérant pour l'indemniser du refus du concours de la force publique. Elle correspond aux indemnités d'occupation dues par l'occupant sans titre non versées. Le ministre a ainsi agi en qualité de subrogé dans les droits que le propriétaire est susceptible de détenir sur M. D... à raison de l'occupation irrégulière de son bien. Ces droits sont attachés à une créance de nature privée. Au regard de ce qui a été dit au point 3, la juridiction judiciaire est, par suite, compétente pour connaître du litige afférent à l'action de l'Etat. Ainsi, en ne relevant pas d'office, pour rejeter la demande qui lui était présentée, que seuls les tribunaux de l'ordre judiciaire étaient compétents pour statuer sur le litige relatif aux titres de perception en cause, le tribunal administratif de Nancy a entaché son jugement d'irrégularité. Celui-ci doit, dès lors, être annulé.

Sur la demande présentée par M. D... devant le tribunal :

5. Il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu, par la voie de l'évocation, de rejeter l'ensemble des conclusions présentées par M. D... devant le tribunal administratif de Nancy comme étant portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

Sur les frais d'instance :

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que demande le requérant au titre des frais d'instance.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n°1901340 du 26 août 2021 du tribunal administratif de Nancy est annulé.

Article 2 : Les conclusions àfin de décharge présentées par M. D... devant le tribunal administratif de Nancy sont rejetées comme étant portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête d'appel de M. D... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 29 novembre 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Ghisu-Deparis, présidente,

- Mme Samson-Dye, présidente assesseure,

- Mme Picque, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 décembre 2022.

La rapporteure,

Signé : A.-S. B...La présidente,

Signé : V. Ghisu-Deparis

La greffière,

Signé : M. A....

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

M. A...

2

N° 21NC02569


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NC02569
Date de la décision : 22/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme GHISU-DEPARIS
Rapporteur ?: Mme Anne-Sophie PICQUE
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : VIVIER

Origine de la décision
Date de l'import : 01/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2022-12-22;21nc02569 ?
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