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16/02/2023 | FRANCE | N°21NC00291

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 16 février 2023, 21NC00291


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par trois requêtes séparées, M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur le revenu et de contribution sociales qui lui ont été assignés au titre des années 2013, 2014 et 2015.

Par des jugements n°s 1904222, 1904220 et 1904242 du 27 octobre 2020, le tribunal administratif de Strasbourg, a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 29 janvier 20

21, sous le numéro 21NC00291, M. A..., représenté par Me Leloup, demande à la cour :

1°) d'annule...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par trois requêtes séparées, M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur le revenu et de contribution sociales qui lui ont été assignés au titre des années 2013, 2014 et 2015.

Par des jugements n°s 1904222, 1904220 et 1904242 du 27 octobre 2020, le tribunal administratif de Strasbourg, a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 29 janvier 2021, sous le numéro 21NC00291, M. A..., représenté par Me Leloup, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1904222 ;

2°) de prononcer, en droits et pénalités, la décharge des impositions contestées au titre de l'année 2013 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à tort que le jugement a considéré sa demande comme dépourvue de précisions utiles, alors que ces rectifications avaient bien été contestées dans sa réclamation ayant donné lieu à la décision de rejet du 2 avril 2019 ; c'est à tort que le service a remis en cause la déduction de son bénéfice industriel et commercial de charges pourtant parfaitement justifiées au titre des apports sur le compte de l'exploitant, l'amortissement d'un actif et divers frais généraux tels que frais de restaurant et d'avocats ;

- c'est à tort que l'administration, afin de l'imposer dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, a estimé que les quatre emprunts bancaires souscrits afin de rembourser son compte courant par la SARL Holding LLD ne relevaient pas d'une gestion commerciale normale alors que l'intérêt pour l'entreprise de ces prêts doit s'analyser au jour de leur souscription en 2005, 2006 et 2008, c'est-à-dire au cours d'exercices prescrits au sens de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales de sorte que cette appréciation ne pouvait plus être remise en cause afin de refuser la déduction des intérêts versés au cours des exercices 2013 et 2014 et qu'en tout état de cause, la décision de gestion de financer son activité par des avances consenties par son dirigeant ne saurait être remise en cause par l'administration, dès lors que cette pratique est conforme à son intérêt et plus avantageuse que des concours bancaires ; enfin, les intérêts afférents à des emprunts bancaires externes, en l'absence d'avances de son dirigeant, auraient été de toute manière déductibles ;

- c'est à tort que l'administration a réintégré dans le bénéfice imposable de la SCI La Rose les intérêts d'un emprunt de 250 000 euros que cette dernière a souscrit au cours de l'année 2013 alors que la décision de gestion prise par cette société de financer son activité par des avances de son dirigeant ne saurait être remise en cause par l'administration ; enfin, les intérêts afférents à des emprunts bancaires externes en l'absence d'avances de son dirigeant, auraient été de toute manière déductibles ;

- l'administration n'a pas rapporté la preuve que le loyer de 500 euros réclamé par la SCI LEL pour la location de sa maison serait insuffisant alors que les comparables choisis par le service ne sont pas pertinents dès lors qu'ils ne présentent pas les mêmes caractéristiques et dès lors que le loyer pratiqué est cohérent avec sa situation géographique et le marché local ;

- les pénalités appliquées doivent être déchargées dès lors que les redressements ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 4 juin 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la demande devant le tribunal administratif était irrecevable en ce qui concerne la contestation des bénéfices industriels et commerciaux ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

II. Par une requête enregistrée le 29 janvier 2021, sous le numéro 21NC00292, M. A..., représenté par Me Leloup, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1904220 ;

2°) de prononcer, en droits et pénalités, la décharge des impositions contestées au titre de l'année 2014 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à tort que le jugement a considéré sa demande comme dépourvue de précisions utiles, alors que ces rectifications avaient bien été contestées dans sa réclamation ayant donné lieu à la décision de rejet du 2 avril 2019 ; c'est à tort que le service a remis en cause la déduction de son bénéfice industriel et commercial de charges pourtant parfaitement justifiées au titre des apports sur le compte de l'exploitant, l'amortissement d'un actif et divers frais généraux tels que frais de restaurant et d'avocats ;

- c'est à tort que l'administration a estimé que les quatre emprunts bancaires souscrits afin de rembourser son compte courant par la SARL Holding LLD ne relevaient pas d'une gestion commerciale normale alors que l'intérêt pour l'entreprise de ces prêts doit s'analyser au jour de leur souscription en 2005, 2006 et 2008, c'est-à-dire au cours d'exercices prescrits au sens de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales de sorte que cette appréciation ne pouvait plus être remise en cause afin de refuser la déduction des intérêts versés au cours des exercices 2013 et 2014 et qu'en tout état de cause, la décision de gestion de financer son activité par des avances consenties par son dirigeant ne saurait être remise en cause par l'administration, dès lors que cette pratique est conforme à son intérêt et plus avantageuse que des concours bancaires ; enfin, les intérêts afférents à des emprunts bancaires externes, en l'absence d'avances de son dirigeant, auraient été de toute manière déductibles ;

- c'est à tort que l'administration, afin de l'imposer dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, a réintégré dans le bénéfice imposable de la SCI La Rose les intérêts d'un emprunt de 250 000 euros que cette dernière a souscrit au cours de l'année 2013 alors que la décision de gestion prise par cette société de financer son activité par des avances de son dirigeant ne saurait être remise en cause par l'administration ; enfin, les intérêts afférents à des emprunts bancaires externes en l'absence d'avances de son dirigeant, auraient été de toute manière déductibles ;

- l'administration n'a pas rapporté la preuve que le loyer de 500 euros réclamé par la SCI LEL pour la location de sa maison serait insuffisant alors que les comparables choisis par le service ne sont pas pertinents dès lors qu'ils ne présentent pas les mêmes caractéristiques et dès lors que le loyer pratiqué est cohérent avec sa situation géographique et le marché local ;

- les espèces encaissées sur ses comptes bancaires, que le service a taxées en tant que revenu d'origine indéterminée, sont des gains de casino qui ont été entièrement justifiés ;

- les pénalités appliquées doivent être déchargées dès lors que les redressements ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 4 juin 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la demande devant le tribunal administratif était irrecevable en ce qui concerne la contestation des bénéfices industriels et commerciaux ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

III. Par une requête enregistrée le 29 janvier 2021, sous le numéro 21NC00293, M. A..., représenté par Me Leloup, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1904242 ;

2°) de prononcer, en droits et pénalités, la décharge des impositions contestées au titre de l'année 2015 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à tort que l'administration, afin de l'imposer dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, a réintégré dans le bénéfice imposable de la SCI La Rose les intérêts d'un emprunt de 250 000 euros que cette dernière a souscrit au cours de l'année 2013 alors que la décision de gestion prise par cette société de financer son activité par des avances de son dirigeant ne saurait être remise en cause par l'administration ; enfin, les intérêts afférents à des emprunts bancaires externes en l'absence d'avances de son dirigeant, auraient été de toute manière déductibles ;

- l'administration n'a pas rapporté la preuve que le loyer de 500 euros réclamé par la SCI LEL pour la location de sa maison serait insuffisant alors que les comparables choisis par le service ne sont pas pertinents dès lors qu'ils ne présentent pas les mêmes caractéristiques et dès lors que le loyer pratiqué est cohérent avec sa situation géographique et le marché local ;

- les pénalités appliquées doivent être déchargées dès lors que les redressements ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 4 juin 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience publique.

Ont été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B... ;

- et les conclusions de Mme Stenger, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... A... exploite un commerce de détail de chaussures, vêtements, articles de bazar, tabac, loto et presse, situé 6, Grand Rue à Soufflenheim (Bas-Rhin). Il est par ailleurs le gérant de la SARL Holding LLD laquelle a pour activité la gestion de ses participations dans des sociétés civiles immobilières de gestion lesquelles donnent en location des locaux commerciaux. L'activité commerciale de M. A... a fait l'objet d'une vérification de comptabilité ayant concerné la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015 à l'issue de laquelle, par proposition de rectification du 25 octobre 2016, le service a porté à sa connaissance, selon la procédure contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, notamment, des rehaussements de son bénéfice industriel et commercial imposable au titre des années 2013 et 2014. En réponse aux observations de M. A..., le service a confirmé ces rectifications par lettres des 20 janvier et 15 mars 2017. M. A... a également fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle au titre des années 2013 et 2014 ayant donné lieu à des propositions de rectification du 13 décembre 2016 et 9 mars 2017. M. A... a également fait l'objet d'un contrôle sur pièces à l'impôt sur le revenu au titre de l'année 2015 ayant donné lieu à une proposition de rectification du 9 mars 2017. Par ces procédures, l'administration, au titre des années 2013, 2014 et 2015, a tiré les conséquences de la vérification de comptabilité de l'activité commerciale de l'intéressé, a rectifié ses déficits reportables sur le revenu global, a rehaussé le revenu global à raison de revenus d'origine indéterminée et a tiré les conséquences de la vérification de comptabilité et des procédures de rectification suivie à l'égard de la SARL Holding LLD en matière de revenus de capitaux mobiliers. M. A... ayant refusé ces rectifications, le service a admis certaines de ses observations mais confirmé sa position y compris après entrevue avec le supérieur hiérarchique et l'interlocuteur départemental tout en tenant compte de l'avis de la commission des impôts directs du 26 mars 2018 en matière de revenus d'origine indéterminée. Les suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales ont été mis en recouvrement les 31 août, 24 septembre et 9 octobre 2018. M. A... a réclamé contre ces impositions les 19 septembre, 3 décembre et 31 décembre 2018 et l'administration a partiellement admis ces réclamations par trois décisions du 2 avril 2019. Par les trois requêtes ci-dessus visées, qu'il y a lieu de joindre afin de statuer par un seul arrêt, M. A... relève appel des jugements du 27 octobre 2020 par lesquels le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses demandes tendant à la décharge en droits et pénalités de ces impositions supplémentaires.

Sur les bénéfices industriels et commerciaux :

2. Le jugement attaqué a écarté les conclusions de la demande en matière de bénéfices industriels et commerciaux comme dépourvues de précision à l'appui de ses moyens. En se prévalant uniquement de la décision de rejet de sa réclamation, sans même préciser l'argumentation juridique à l'appui de ses conclusions et notamment la critique apportée à l'encontre de cette décision, le requérant ne met pas le juge d'appel en mesure d'identifier les moyens soulevés à l'encontre des redressements litigieux en matière de bénéfices industriels et commerciaux et encore moins d'en apprécier le bien-fondé.

Sur les revenus de capitaux mobiliers :

3. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués :/ (...) 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices ". Aux termes de l'article 111 du même code : " Sont notamment considérés comme des revenus distribués:/ (...) c. Les rémunérations et avantages occultes ".

En ce qui concerne les intérêts des emprunts souscrits par la SARL Holding LLD :

4. Il résulte de l'instruction que le compte courant d'associé de M. A... ouvert dans les écritures comptables de la SARL Holding LLD s'est retrouvé fortement créditeur à compter de l'année 2005 et des années suivantes à la suite de l'apport fait par ce dernier à la société des créances qu'il détenait sur les SCI La Rose, LEL, HD et CD, créances correspondant aux soldes créditeurs de ses comptes courants dans ces sociétés. Afin de rembourser à M. A... le solde créditeur de son compte courant d'associé, la SARL Holding LLD a souscrit auprès d'établissements bancaires quatre emprunts d'un montant respectif de 300 000 euros le 3 août 2005, de 380 000 euros le 6 juillet 2006, de 200 000 euros le 17 juin 2008 et de 200 000 euros le 24 octobre 2014, ces sommes ayant été versées à l'intéressé selon les modalités détaillées dans les jugements attaqués. La SARL Holding LLD a déduit les intérêts de ces emprunts de ses résultats. Estimant que le fait de reprendre les créances que lui avait apportées M. A..., d'en devenir ainsi le débiteur puis de s'endetter afin de lui rembourser les soldes de son compte courant ne relevait pas d'une gestion commerciale normale, le service, après avoir analysé les écritures du compte courant ainsi qu'il ressort de l'annexe à la proposition de rectification du 27 juillet 2016, a réintégré, à la suite d'une vérification de comptabilité, dans les bénéfices imposables des années 2010 à 2014 la fraction des intérêts des emprunts dans la mesure où ces derniers avaient servi à financer l'apport de ces créances par M. A.... Elle a en conséquence regardé M. A... comme le bénéficiaire de revenus réputés distribués correspondant à ces sommes, imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers sur le fondement des dispositions ci-dessus reproduites de l'article 109 du code général des impôts.

5. Si M. A... soutient que l'existence de la cession des créances qu'il détenait sur les quatre SCI est établie, notamment par l'existence des conventions dites " d'avances en compte courant " conclues par la SARL Holding LLD avec elles le 2 janvier 2008, au demeurant dépourvues de date certaine et produites après les opérations de contrôle, il ne justifie pas, en tout état de cause, de l'intérêt qu'aurait eu cette société à reprendre ces créances fut-ce afin de centraliser la trésorerie du groupe. Contrairement à ce qu'il soutient, en l'absence de ces écritures, la SARL Holding LLD ne se serait pas retrouvée endettée dans cette mesure sans aucune contrepartie dès lors que l'apport de ces créances ne lui a permis de dégager aucun avantage de trésorerie. Il n'est dès lors pas fondé à soutenir qu'en l'absence de ces opérations sa société aurait supporté des frais financiers identiques qui auraient été déductibles de ses bénéfices. Il résulte de ces éléments que la SARL Holding LLD n'a accepté de recevoir les créances apportées par M. A... qu'afin de permettre à celui-ci d'obtenir le remboursement des avances qu'il avait consenties aux quatre SCI lesquelles ne disposaient pas des moyens financiers pour y procéder. Dès lors, c'est à bon droit que l'administration a refusé la déduction des intérêts d'emprunts litigieux des bénéfices imposables de la SARL Holding LLD, dans la seule mesure où ils ont été souscrits afin de financer ce remboursement, comme ne se rapportant pas à une gestion commerciale normale. Par suite, c'est à juste titre que l'administration a estimé que les frais financiers et intérêts afférents aux prêts litigieux constituaient des revenus distribués au profit de M. A... sur le fondement des dispositions ci-dessus reproduites du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts.

6. Aux termes de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales : " Pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due ".

7. Afin d'apprécier la déductibilité des intérêts d'emprunts comptabilisés au cours des exercices 2010 à 2014 de la SARL Holding LLD, l'administration était en droit d'examiner les contrats de prêts souscrits par elle au cours des années 2005, 2006 et 2008 afin de déterminer dans quelle mesure ils avaient contractés dans le cadre d'une gestion commerciale normale. En procédant à la réintégration d'une fraction des intérêts dans les bénéfices des exercices 2010 à 2014 de la société, non prescrits, puis en imposant M. A... sur les revenus distribués correspondant au titre des années 2013 et 2014, l'administration n'a pas méconnu les dispositions ci-dessus reproduites de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales.

En ce qui concerne le prêt contracté par la SCI La Rose :

8. Par proposition de rectification du 27 juillet 2016, le service a réintégré dans les bénéfices de la SCI La Rose, sur lesquels la SARL Holding LLD est imposée en vertu des articles 218 et 238 bis K du code général des impôts, une fraction des intérêts déduits au cours des exercices 2013, 2014 et 2015 au titre d'un emprunt souscrit le 12 juillet 2013 pour la somme de 270 000 euros. Il résulte de l'instruction que cet emprunt avait été souscrit afin de rembourser à la SARL Holding LLD le solde créditeur de son compte courant d'associé. Il n'est pas contesté que ce prêt n'a pas été affecté à cet objet puisqu'aucun remboursement n'a été effectué au profit de la SARL Holding LLD mais qu'au contraire, le capital a été appréhendé à hauteur de 250 000 euros par M. A... le 18 juillet 2013. L'administration a en conséquence considéré que les intérêts de ce prêt n'avaient pas été exposés dans cette mesure dans l'intérêt de la SCI La Rose mais au profit de M. A... et les a réintégrés dans ses bénéfices imposables et a regardé M. A... comme le bénéficiaire de revenus distribués à raison de ces sommes sur lesquelles elle l'a imposé sur le fondement des dispositions ci-dessus reproduites du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts. Si M. A... soutient que cette opération s'inscrit dans la politique du groupe consistant à se financer à des conditions avantageuses auprès de ses associés, en l'occurrence lui-même, plutôt qu'auprès d'établissements bancaires, il résulte de l'instruction que le compte courant de M. A... à la suite de cette opération s'est retrouvé débiteur, de sorte que l'existence d'avances antérieures n'est pas établie et qu'en utilisant le prêt obtenu pour les besoins privé de ce dernier, la SCI La Rose est demeurée débitrice à l'égard de la SARL Holding LLD sans se libérer de sa dette à son égard. En l'absence de toute contrepartie pour la SCI La Rose, l'administration a rapporté la preuve que cette opération est constitutive d'un acte anormal de gestion et c'est par suite à juste titre qu'elle a imposé M. A... sur le montant de ces sommes en tant que bénéficiaire de revenus distribués imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.

En ce qui concerne le loyer du logement de M. A... :

9. La SCI LEL a donné en location à M. C... A... depuis l'année 1999 un immeuble d'habitation situé 6, Grand Rue à Soufflenheim, moyennant un loyer mensuel de 500 euros, composé de 10 pièces principales comprenant 7 chambres, cuisine, salle d'eau, annexe, d'une surface habitable de 230 m². Le service a estimé que ce loyer était anormalement bas. Il a en conséquence procédé à une évaluation d'un loyer normal pour une telle maison d'habitation sur la base du loyer au m² pratiqué pour un appartement de 48 m² situé à la même adresse, construit en 2009, ajusté au prorata de la valeur locative des deux immeubles retenue pour la taxe foncière, aboutissant à un loyer mensuel de 1 000 euros.

10. Il incombe à l'administration d'établir le caractère anormalement bas d'un loyer consenti par une entreprise. En l'espèce, il n'est pas contesté que M. C... A... occupe le logement litigieux pour les besoins de sa résidence personnelle depuis l'année 1999 sans aucune réévaluation du loyer. En admettant que cet immeuble datant de 1870 ne soit pas conforme aux dernières normes d'habitabilité et de performances énergétiques, qu'il se situe dans un secteur résidentiel moins prisé que d'autres dans la métropole strasbourgeoise et que son rez-de-chaussée se trouve occupé par son commerce, il n'en demeure pas moins qu'un loyer mensuel de 500 euros pour une maison de 10 pièces et de 230 m² paraît anormalement bas. Par suite, l'administration doit être regardée comme ayant apporté la preuve que le loyer réclamé par la SCI LEL à M. A... ne correspond pas à une gestion commerciale normale. En procédant à la détermination du loyer qui aurait dû être pratiqué selon la méthode ci-dessus analysée, l'administration n'en a pas fait une évaluation exagérée. Si M. A... soutient qu'il existe plusieurs biens comparables dans le secteur concerné qui ne trouvent pas preneurs pour des loyers de l'ordre de celui que la SCI LEL lui avait réclamé, il n'en justifie pas en invoquant seulement le cas d'un immeuble de 130 m² que la SCI La Rose tenterait vainement de louer pour un loyer mensuel de 400 euros sans autre précision. Par suite c'est à juste titre que l'administration a inclus dans les bénéfices imposables de la SCI LEL des années 2013 et 2014 la différence entre les loyers qu'elle aurait dû normalement percevoir et ceux qu'elle a effectivement encaissés de M. A... et qu'elle a imposé M. A... sur le montant de l'avantage correspondant sur le fondement des dispositions ci-dessus reproduites du c de l'article 111 du code général des impôts.

Sur les revenus d'origine indéterminée :

11. Aux termes de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales : " Sous réserve des dispositions particulières au mode de détermination des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices agricoles et des bénéfices non commerciaux, sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L. 16 ". Aux termes de l'article L. 192 du même code : " (...) la charge de la preuve incombe au contribuable (...) en cas de taxation d'office à l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle en application des dispositions des articles L. 16 et L. 69 ".

12. M. A... a été destinataire le 4 octobre 2016 d'une demande d'éclaircissements ou de justifications concernant ses revenus de l'année 2014. Sa réponse ayant été jugée insuffisante, une mise en demeure lui a été adressée le 1er décembre 2016. Malgré sa réponse du 25 janvier 2017, l'origine des sommes encaissées sur ses comptes bancaires est demeurée indéterminée et lesdites sommes ont été taxées d'office. Par suite, s'agissant de ces sommes, M. A... supporte la charge de la preuve du mal-fondé des impositions.

13. Si M. A... soutient que les sommes de 15 000 euros et 78 163 euros proviendraient de gains au casino et de prélèvements dans la caisse de son entreprise, il n'en justifie pas par les documents qu'il produit lesquels sont constitués de cartes et tickets d'entrée dans des casinos en Allemagne.

Sur les pénalités :

14. Les suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales litigieux ont été uniquement assortis de l'intérêt de retard prévu par l'article 1727 du code général des impôts. Le bien-fondé des rectifications ayant été établi ci-dessus, M. A... n'est par suite pas fondé à demander la décharge des intérêts de retard les ayant assorties.

15. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par le ministre, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses demandes. Par suite, ses requêtes doivent être rejetées en toutes leurs conclusions y compris celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes de M. A... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 26 janvier 2023, à laquelle siégeaient :

M. Martinez, président de chambre,

M. Agnel, président assesseur,

Mme Brodier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 février 2023.

Le rapporteur,

Signé : M. AgnelLe président,

Signé : J. Martinez

La greffière,

Signé : C. Schramm

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. Schramm

N°s 21NC00291 ; 21NC00292 et 21NC00293

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NC00291
Date de la décision : 16/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: M. Marc AGNEL
Rapporteur public ?: Mme STENGER
Avocat(s) : LELOUP

Origine de la décision
Date de l'import : 03/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2023-02-16;21nc00291 ?
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