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16/03/2023 | FRANCE | N°20NC00485

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 16 mars 2023, 20NC00485


Vu la procédure suivante :

Par un arrêt partiellement avant dire-droit du 28 avril 2022, auquel il est fait expressément référence, cette cour a ordonné un supplément d'instruction afin de statuer sur l'éligibilité au crédit d'impôt recherche de l'année 2015 des dépenses exposées par la société par actions simplifiée (SAS) Archefinances concernant les projets 1 " Nouveaux modèles pour le développement hospitalier " et 2 " Ville durable et écoquartiers face aux mutations actuelles " en demandant à l'administration fiscale de soumettre ces projets à l'avis d'un agent

du ministère chargé de la recherche.

Par un mémoire enregistré le 16 déce...

Vu la procédure suivante :

Par un arrêt partiellement avant dire-droit du 28 avril 2022, auquel il est fait expressément référence, cette cour a ordonné un supplément d'instruction afin de statuer sur l'éligibilité au crédit d'impôt recherche de l'année 2015 des dépenses exposées par la société par actions simplifiée (SAS) Archefinances concernant les projets 1 " Nouveaux modèles pour le développement hospitalier " et 2 " Ville durable et écoquartiers face aux mutations actuelles " en demandant à l'administration fiscale de soumettre ces projets à l'avis d'un agent du ministère chargé de la recherche.

Par un mémoire enregistré le 16 décembre 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique soutient que les projets restant en litige sont identiques à ceux présentés par la société Fouqueray-Jacquet lesquels ont donné lieu à des rapports du ministère chargé de la recherche dont les avis sont ainsi transposables à la société Archefinances.

Par une ordonnance du 16 décembre 2022, la clôture de l'instruction de l'affaire a été fixée au 16 février 2023 à 12 heures.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience publique.

Ont été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A... ;

- et les conclusions de Mme Stenger, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite de l'arrêt ci-dessus visé, demeure en litige la question de l'éligibilité des dépenses exposées par la SAS Archefinances en vue de la définition des performances haute qualité environnementale de la polyclinique de Courlancy, de la conception du centre d'odontologie de Reims et de la conception de l'écoquartier Rémavert.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

2. Aux termes du I de l'article 244 quater B du code général des impôts : " Les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles imposées d'après leur bénéfice réel (...) peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année (...) II. Les dépenses de recherche ouvrant droit au crédit d'impôt sont : a) Les dotations aux amortissements des immobilisations, créées ou acquises à l'état neuf et affectées directement à la réalisation d'opérations de recherche scientifique et technique, y compris la réalisation de prototypes ou d'installations pilotes. (...) ; b) Les dépenses de personnel afférentes aux chercheurs et techniciens de recherche directement et exclusivement affectés à ces opérations. (...) ; c) les autres dépenses de fonctionnement exposées dans les mêmes opérations ; (...) d bis) Les dépenses exposées pour la réalisation d'opérations de même nature confiées à des organismes de recherche privés agréés par le ministre chargé de la recherche, ou à des experts scientifiques ou techniques agréés dans les mêmes conditions. (...) j) Les dépenses de veille technologique exposées lors de la réalisation d'opérations de recherche, dans la limite de 60 000 € par an. (...) ". Aux termes de l'article 49 septies F de l'annexe III à ce code : " Pour l'application des dispositions de l'article 244 quater B du code général des impôts, sont considérées comme opérations de recherche scientifique ou technique : a. Les activités ayant un caractère de recherche fondamentale, qui pour apporter une contribution théorique ou expérimentale à la résolution des problèmes techniques, concourent à l'analyse des propriétés, des structures, des phénomènes physiques et naturels, en vue d'organiser, au moyen de schémas explicatifs ou de théories interprétatives, les faits dégagés de cette analyse ; / b. Les activités ayant le caractère de recherche appliquée qui visent à discerner les applications possibles des résultats d'une recherche fondamentale ou à trouver des solutions nouvelles permettant à l'entreprise d'atteindre un objectif déterminé choisi à l'avance. / Le résultat d'une recherche appliquée consiste en un modèle probatoire de produit, d'opération ou de méthode ; / c. Les activités ayant le caractère d'opérations de développement expérimental effectuées, au moyen de prototypes ou d'installations pilotes, dans le but de réunir toutes les informations nécessaires pour fournir les éléments techniques des décisions, en vue de la production de nouveaux matériaux, dispositifs, produits, procédés, systèmes, services ou en vue de leur amélioration substantielle. Par amélioration substantielle, on entend les modifications qui ne découlent pas d'une simple utilisation de l'état des techniques existantes et qui présentent un caractère de nouveauté ".

3. Ne peuvent être prises en compte pour le bénéfice du crédit d'impôt recherche que les dépenses exposées pour le développement ou l'amélioration substantielle de matériaux, dispositifs, produits, procédés, systèmes, services, dont la conception ne pouvait être envisagée, eu égard à l'état des connaissances techniques à l'époque considérée, par un professionnel averti, par simple développement ou adaptation de ces techniques.

4. Il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si les opérations réalisées par le contribuable entrent dans le champ d'application du crédit d'impôt recherche eu égard aux conditions dans lesquelles sont effectuées ces opérations, et, notamment, d'examiner si les opérations de recherche apportent une contribution théorique ou expérimentale à la résolution de problèmes techniques, ou bien présentent un caractère de nouveauté au sens de l'article 49 septies F de l'annexe III au code général des impôts.

En ce qui concerne la polyclinique de Courlancy :

5. Il résulte de l'instruction que les opérations nouvelles de l'année 2015 relatives au projet de la polyclinique de Courlancy en ce qui concerne les performances " haute qualité environnementale " (HQE), pour lesquelles elle a été assistée par le bureau d'études Arcoba, se situent dans le prolongement du projet d'ensemble du site de Courlancy ayant donné lieu à l'arrêt ci-dessus analysé du 28 avril 2022. Il ressort du dossier justificatif produit par la société à l'appui de sa déclaration de l'année 2015, que ces opérations ne sauraient être qualifiées de dépenses de recherche en l'absence d'un protocole de recherche mis en œuvre pour recueillir des données, construire des hypothèses, et en déduire des résultats. Dès lors, en dépit de sa qualité architecturale et des contraintes surmontées en cours de conception, de la nature de celles rencontrées par tout cabinet d'architectes, il ne résulte pas de l'instruction que le projet dépasse l'adaptation de technologies existantes et qu'il présente un caractère de nouveauté qui irait au-delà de la seule amélioration des performances des techniques existantes. Dans ces conditions, si la réponse proposée par la société devrait permettre d'améliorer les performances des bâtiments, le développement de ce projet s'inscrit davantage dans un processus normal de conception architecturale que dans la levée de verrous technologiques ou scientifiques et ne présente ainsi pas le caractère d'une innovation, au sens des dispositions précitées, qui pourrait justifier la qualification de recherche appliquée à l'échelle de l'ensemble du projet.

En ce qui concerne la conception du centre d'odontologie de Reims et la conception de l'écoquartier Rémavert :

6. Il résulte de l'arrêt ci-dessus visé du 28 avril 2022 que, contrairement à ce que soutient l'administration en défense, la conception du centre d'odontologie de Reims, ayant donné lieu à l'établissement d'une base de données numériques permettant la modélisation de la production architecturale, et la conception de l'écoquartier Rémavert, reposant sur des dispositifs de construction permettant d'atteindre un objectif de durabilité du bâtiment, associés à une approche bioclimatique et une démarche participative des locataires, sont propres à la SAS Archefinances au titre de l'année 2015 et n'ont pas fait l'objet de l'avis de l'agent du ministère chargé de la recherche du 3 décembre 2017. Ces dépenses ont été exposées et motivées par la société requérante dans son dossier de justification de sa déclaration de crédit d'impôt recherche au titre de l'année 2015. Afin de refuser à la société requérante le bénéfice de ce dispositif, l'administration s'est bornée à soutenir qu'elles ne répondaient pas aux conditions rappelées aux points 3 et 4 ci-dessus en estimant que ces projets étaient analogues à ceux qui avaient fait l'objet de l'avis négatif du 3 décembre 2017. Eu égard aux caractéristiques du projet et compte tenu de l'abstention du ministre chargé des finances publiques de recueillir l'avis de l'agent du ministre chargé de la recherche pourtant prescrit par l'arrêt avant dire-droit du 28 avril 2022 en ce qui concerne ces projets et du dossier justificatif présenté par la société à l'appui de sa déclaration de l'année 2015, il y a lieu de considérer que les dépenses litigieuses entrent dans le champ d'application du crédit d'impôt recherche. Dans ses conditions, la SAS Archefinances est fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration fiscale lui a refusé le bénéfice du crédit d'impôt recherche au titre de l'année 2015 à raison de ces dépenses.

7. Il résulte de l'instruction que le nombre d'heures de chercheurs effectuées par la SAS Archefinances au titre de l'année 2015 s'est élevé à 1 565 heures dont 805 heures consacrées au centre d'odontologie de Reims et à l'écoquartier Rémavert, représentant 51,5 % du total. Il y a lieu dès lors d'estimer que la part des dépenses de recherches en main d'œuvre et fonctionnement consacrées aux opérations de recherche relatives à ces projets ouvrant droit au crédit d'impôt, dans le total des dépenses de recherche de l'année 2015 qui s'élève à 77 260 euros, est égale à ce taux de 51,5 %. Par suite, le montant des dépenses de recherche de ces projets doit être fixé à 39 789 euros formant l'assiette du crédit d'impôt recherche de l'année 2015 ouvrant droit à la SAS Archefinances à un crédit d'impôt de 11 936 euros.

8. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS Archefinances est seulement fondée à demander que le crédit d'impôt recherche au titre de l'année 2015 soit fixé à la somme de 11 936 euros et à ce que le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne soit réformé dans cette mesure.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante à titre principal dans la présente instance, verse à la SAS Archefinances une somme au titre des frais exposés par elle.

D E C I D E :

Article 1er : L'Etat restituera à la SAS Archefinances la somme de 11 936 euros au titre du crédit d'impôt recherche de l'année 2015.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 19 décembre 2019 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la SAS Archefinances est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Archefinances et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 16 février 2023, à laquelle siégeaient :

M. Martinez, président de chambre,

M. Agnel, président assesseur,

Mme Brodier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 mars 2023.

Le rapporteur,

Signé : M. AgnelLe président,

Signé : J. Martinez

Le greffier,

Signé : J-Y. Gaillard

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

J-Y. Gaillard

N° 20NC00485

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NC00485
Date de la décision : 16/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-04-02-01-08-01-01 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. - Bénéfices industriels et commerciaux. - Calcul de l'impôt.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: M. Marc AGNEL
Rapporteur public ?: Mme STENGER
Avocat(s) : PERY

Origine de la décision
Date de l'import : 22/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2023-03-16;20nc00485 ?
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