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16/05/2023 | FRANCE | N°21NC01601

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre, 16 mai 2023, 21NC01601


Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D...,

- et les conclusions de M. Barteaux, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., adjoint technique principal de 2ème classe, était affecté depuis août 2013 en qualité de cuisinier au

près de la direction générale des services du département des Ardennes. Par une délibération du 27 mars 2018, le conseil ...

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D...,

- et les conclusions de M. Barteaux, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., adjoint technique principal de 2ème classe, était affecté depuis août 2013 en qualité de cuisinier auprès de la direction générale des services du département des Ardennes. Par une délibération du 27 mars 2018, le conseil départemental des Ardennes a toutefois supprimé le poste qu'il occupait. Par un arrêté du 23 mai 2018, M. B... a été maintenu en surnombre dans la collectivité. Par un arrêté du 15 mai 2019, il a été affecté en qualité de brigadier de cuisine à la direction de l'éducation et de la culture. En décembre 2019, M. B... s'est porté candidat au poste de chef de cuisine au sein du collège Jules Leroux de

Villers-Semeuse mais, par une décision du 13 décembre 2019, sa candidature a été rejetée et M. A..., ancien second de cuisine de cet établissement, a été nommé à ce poste. M. B... ayant accepté le poste de second de cuisine ainsi devenu vacant, il a, par un arrêté du 6 janvier 2020, été affecté au collège de Villers-Semeuse. M. B... interjette appel du jugement du 6 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 13 décembre 2019 par laquelle le président du conseil départemental des Ardennes n'a pas retenu sa candidature pour l'emploi de chef de cuisine au collège Jules Leroux de Villers-Semeuse, de l'arrêté nommant M. A... à ce poste, de l'arrêté du 6 janvier 2020 par lequel le président du conseil départemental des Ardennes l'a affecté dans ce collège et, enfin, de la décision implicite du président du conseil départemental rejetant son recours administratif contre ces décisions.

Sur la régularité du jugement :

2. Il résulte des motifs du jugement que le tribunal administratif de

Châlons-en-Champagne, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties, s'est prononcé sur les moyens soulevés par M. B... dans ses écritures et a notamment répondu au moyen tiré du détournement de pouvoir soulevé par ce dernier. En revanche, il ne ressort pas des écritures de première instance que M. B... se serait prévalu d'un moyen distinct de celui du détournement de pouvoir et tiré de ce que les décisions en litige n'ont pas été adoptées dans l'intérêt du service. Le tribunal n'avait donc pas à répondre à un tel moyen. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. En premier lieu, aux termes du I de l'article 97 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa version applicable au litige : " Un emploi ne peut être supprimé qu'après avis du comité technique paritaire. (...) Si la collectivité ou l'établissement ne peut lui offrir un emploi correspondant à son grade dans son cadre d'emplois ou, avec son accord, dans un autre cadre d'emplois, le fonctionnaire est maintenu en surnombre pendant un an. Pendant cette période, tout emploi créé ou vacant correspondant à son grade dans la collectivité ou l'établissement lui est proposé en priorité ; (...) ".

4. Il ressort des pièces du dossier qu'après avoir été maintenu en surnombre au sein du département des Ardennes, M. B... a, par un arrêté du 15 mai 2019, été affecté en qualité de brigadier de cuisine au sein de la direction de l'éducation et de la culture. En raison de cette nouvelle affectation, qui a nécessairement mis fin à son placement en situation de surnombre, M. B... ne peut faire valoir que les décisions en litige méconnaissent le droit de priorité prévu par les dispositions du I de l'article 97 de la loi du 26 janvier 1984. Le requérant ne saurait pas plus se prévaloir utilement, dans le cadre d'un recours pour excès de pouvoir, de l'obligation de loyauté de l'administration, ainsi que des différentes promesses qu'a pu lui faire sa hiérarchie pour obtenir l'annulation des décisions en litige.

5. En deuxième lieu, de manière générale, il appartient au juge administratif de demander aux parties de lui fournir tous les éléments d'appréciation de nature à établir sa conviction. Cette responsabilité doit, dès lors qu'il est soutenu qu'une mesure a pu être empreinte de discrimination, s'exercer en tenant compte des difficultés propres à l'administration de la preuve en ce domaine et des exigences qui s'attachent aux principes à valeur constitutionnelle des droits de la défense et de l'égalité de traitement des personnes. S'il appartient au requérant qui s'estime lésé par une telle mesure de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer une atteinte à ce dernier principe, il incombe au défendeur de produire tous ceux permettant d'établir que la décision attaquée repose sur des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si la décision contestée devant lui a été ou non prise pour des motifs entachés de discrimination, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.

6. M. B... soutient avoir été discriminé par le jury de recrutement au poste de chef de cuisine du collège de Villers-Semeuse en raison de ses problèmes de santé et de ses conflits avec sa hiérarchie. A ce titre, M. B... fait valoir que le procès-verbal présentant les observations du jury sur les différentes candidatures témoigne de la discrimination qu'il a subie. Toutefois, il ressort de ce document que la candidature du requérant n'a pas été retenue par le motif qu'il n'a pas justifié de son plein engagement pour occuper ce poste. Le procès-verbal relève par ailleurs que M. B... a mentionné à plusieurs reprises les dissensions qui l'opposent à la collectivité. Alors que le requérant ne se prévaut d'aucun autre élément permettant de faire présumer l'existence d'une discrimination et qu'aucun élément au dossier ne permet de considérer que le rejet de sa candidature ne serait pas exclusivement fondé sur le caractère peu convaincant de ses réponses à l'entretien et sur la qualité supérieure des candidatures mieux classées, le moyen doit être écarté.

7. En troisième lieu, le requérant soutient que les décisions en litige ne poursuivent pas l'intérêt du service, mais sont constitutives de sanctions déguisées et sont entachées d'un détournement de pouvoir dès lors que son nouveau poste de second de cuisine implique une perte de responsabilité et que ces décisions n'ont été adoptées que pour le sanctionner des révélations qu'il a faites sur les faits de harcèlement moral et sexuel dont il a été victime. Toutefois, le requérant, qui se borne à verser une lettre de dépôt de plainte du 20 janvier 2021, postérieure à l'adoption des décisions litigieuses, n'apporte au soutien de ses allégations aucun élément, ni aucune précision quant à la réalité et à la date des dénonciations qu'il aurait faites. Il n'apporte par ailleurs aucun élément permettant de présumer l'existence de fait de harcèlement. En tout état de cause, il ressort des pièces du dossier qu'à la suite de la suppression du poste de cuisinier qu'il occupait à l'hôtel du département, dont rien au dossier ne permet de considérer qu'elle ne serait pas intervenue en raison de la baisse d'activité mentionnée par la délibération du 27 mars 2018 décidant la suppression de ce poste, M. B..., qui était maintenu jusque-là en surnombre, a été affecté à la direction générale de l'éducation et de la culture dans un emploi de brigadier de cuisine, soit un emploi correspondant à son grade. Si, ainsi qu'il a été indiqué, sa candidature à un poste de chef de cuisine du collège de Villers-Semeuse a été rejetée en raison des qualités et mérites supérieurs du candidat retenu, il lui a néanmoins été proposé une nouvelle affectation au poste de second de cuisine dans ce même collège. M. B..., qui a accepté cette affectation, a ainsi été nommé à un poste conforme à son grade, ne verse aucun élément permettant de considérer qu'il n'y disposerait pas de responsabilités au moins équivalentes à celles assumées dans ses précédentes fonctions de brigadier de cuisine. La circonstance qu'il a été antérieurement affecté à des fonctions de cuisinier auprès de la direction générale ne saurait faire obstacle à ce que, à la suite de la suppression de ce poste, il occupe d'autres fonctions. Dans ces conditions, les moyens ne peuvent qu'être écartés.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Sur les frais d'instance :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du département des Ardennes, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que M. B... demande au titre des frais exposés par lui en première instance et en appel et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. B... le versement d'une somme au département des Ardennes sur le fondement de ces dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le département des Ardennes sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au département des Ardennes.

Délibéré après l'audience du 11 avril 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Wurtz, président,

- Mme Haudier, présidente assesseure,

- M. Marchal, conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 mai 2023.

Le rapporteur,

Signé : S. D...

Le président,

Signé : Ch. WURTZLe greffier,

Signé : F. LORRAIN

La République mande et ordonne au préfet des Ardennes, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier :

F. LORRAIN

N° 21NC01601 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NC01601
Date de la décision : 16/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: M. Swann MARCHAL
Rapporteur public ?: M. BARTEAUX
Avocat(s) : LEDOUX FERRI YAHIAOUI RIOU-JACQUES

Origine de la décision
Date de l'import : 21/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2023-05-16;21nc01601 ?
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