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06/02/2024 | FRANCE | N°23NC00301

France | France, Cour administrative d'appel, 1ère chambre, 06 février 2024, 23NC00301


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 9 septembre 2022 par lequel le préfet du Jura l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné .



Par un jugement n° 2201571 du 16 novembre 2022, le président du tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :


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1°) d'...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 9 septembre 2022 par lequel le préfet du Jura l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné .

Par un jugement n° 2201571 du 16 novembre 2022, le président du tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 28 janvier 2023, M. B..., représenté par Me Abdelli, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Besançon du 16 novembre 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 9 septembre 2022 par lequel le préfet du Jura l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné;

3°) d'enjoindre au préfet du Jura de lui délivrer une carte de séjour temporaire, subsidiairement de réexaminer sa situation administrative et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour, dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 200 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article L. 611-3-9° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision fixant le délai de départ volontaire à trente jours est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'un rendez-vous médical en France était fixé le 7 juillet 2023 ;

- la décision fixant le pays de renvoi est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;

- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 531-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense enregistré le 13 mars 2023, le préfet du Jura conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 avril 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Roussaux, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant rwandais né le 25 mai 1991, est entré sur le territoire français le 2 janvier 2020 selon ses déclarations. Il a déposé une demande d'asile le 13 février 2020 qui a été rejetée le 18 février 2022 par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), confirmée par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 18 août suivant. Par un arrêté du 9 septembre 2022, le préfet du Jura a fait obligation à M. B... de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné en cas de non-respect de ce délai. Le 3 novembre 2022, il a sollicité un titre de séjour pour raisons de santé. M. B... fait appel du jugement du 16 novembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 septembre 2022.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

2. Aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ".

3. S'il est constant que M. B... souffre du syndrome de Poland pour lequel il a été opéré à deux reprises en Afrique du Sud, il n'établit pas, à la date de la décision attaquée, que son état de santé nécessiterait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé rwandais, il ne pourrait pas bénéficier effectivement d'un traitement approprié au Rwanda. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 611-3-9° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est écarté.

Sur la légalité la décision fixant le délai de départ volontaire à trente jours :

4. Aux termes de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger faisant l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de cette décision./ L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas / (...) ". En se bornant à produire une convocation du 7 juillet 2023 dans le service de pneumologie du centre hospitalier régional universitaire (CHRU) de Besançon relative à son rendez-vous de suivi annuel, le requérant n'établit pas que le délai de départ volontaire fixé par le préfet soit entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

5. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français à l'encontre de la décision fixant le pays de renvoi. Par suite, le moyen soulevé en ce sens est écarté.

6. En second lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Aux termes de l'article L. 531-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le fait que le demandeur a fait l'objet de persécutions ou d'atteintes graves ou de menaces directes de telles persécutions ou atteintes constitue un indice sérieux du caractère fondé des craintes du demandeur d'être persécuté ou du risque réel de subir des atteintes graves, sauf s'il existe des éléments précis et circonstanciés qui permettent de penser que ces persécutions ou ces atteintes graves ne se reproduiront pas (...) ".

7. D'une part, est susceptible de poser un problème au regard des stipulations précitées les cas d'éloignement d'une personne gravement malade dans lesquels il y a des motifs sérieux de croire que cette personne, bien que ne courant pas de risque imminent de mourir, ferait face, en raison de l'absence de traitements adéquats dans le pays de destination ou du défaut d'accès à ceux-ci, à un risque réel d'être exposée à un déclin grave, rapide et irréversible de son état de santé entraînant des souffrances intenses ou à une réduction significative de son espérance de vie. Il résulte de ce qui est exposé au point 3 que M. B... n'établit pas qu'il ne pourrait pas bénéficier effectivement d'un traitement approprié au Rwanda ni qu'il courrait ainsi un risque réel d'aggravation de son état de santé. D'autre part, il ne produit à l'appui de ses allégations aucune précision ni aucun justificatif susceptible d'établir qu'il court personnellement des risques en cas de retour dans son pays. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est écarté. Enfin, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 531-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est inopérant à l'encontre d'une décision fixant le pays de renvoi dès lors qu'il n'appartient pas au juge de l'éloignement d'apprécier la légalité de la décision par laquelle l'Office rejette une demande d'asile.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet du Jura.

Délibéré après l'audience du 18 janvier 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Bauer, présidente,

- Mme Brodier, première conseillère,

- Mme Roussaux, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 février 2024.

La rapporteure,

Signé : S. RoussauxLa présidente,

Signé : S. Bauer

La greffière,

Signé : S. RobinetLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

S. Robinet

2

N° 23NC00301


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23NC00301
Date de la décision : 06/02/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BAUER
Rapporteur ?: Mme Sophie ROUSSAUX
Rapporteur public ?: M. MARCHAL
Avocat(s) : ABDELLI - ALVES

Origine de la décision
Date de l'import : 11/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-06;23nc00301 ?
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