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09/04/2004 | FRANCE | N°99NT02251

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4eme chambre, 09 avril 2004, 99NT02251


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 31 août 1999, présentée pour la société GTB Bouyer Duchemin, venant aux droits de l'entreprise Bouyer, dont le siège social est 6, rue Alain Colas, 44202 Nantes, représentée par son représentant légal, par Me GRIFFITHS, avocat au barreau de Lisieux ;

La société GTB Bouyer Duchemin demande à la Cour :

1°) d'annuler les articles 2, 3 et 4 du jugement n° 95-3653 du 10 mai 1999 du Tribunal administratif de Nantes, en tant qu'ils l'ont condamnée, solidairement avec d'autres constructeurs, à verser à l'Etat, une i

ndemnité de 275 565 F TTC en réparation des préjudices subis à la suite de déso...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 31 août 1999, présentée pour la société GTB Bouyer Duchemin, venant aux droits de l'entreprise Bouyer, dont le siège social est 6, rue Alain Colas, 44202 Nantes, représentée par son représentant légal, par Me GRIFFITHS, avocat au barreau de Lisieux ;

La société GTB Bouyer Duchemin demande à la Cour :

1°) d'annuler les articles 2, 3 et 4 du jugement n° 95-3653 du 10 mai 1999 du Tribunal administratif de Nantes, en tant qu'ils l'ont condamnée, solidairement avec d'autres constructeurs, à verser à l'Etat, une indemnité de 275 565 F TTC en réparation des préjudices subis à la suite de désordres survenus à la maison d'arrêt de Nantes, une somme de 29 164,70 F en remboursement des frais d'expertise et une somme de 5 000 F au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

2°) de rejeter les conclusions dirigées contre elle par l'Etat devant le Tribunal administratif de Nantes ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 10 000 F au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

...............................................................................................................

C

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 mars 2004 :

- le rapport de Mme STEFANSKI, premier conseiller,

- les observations de Me NALITOU, substituant Me GRIFFITHS, avocat de la société GTB Bouyer Duchemin,

- les observations de Me LIVORY, avocat de M. X,

- et les conclusions de M. MORNET, commissaire du gouvernement ;

Considérant que par marché notifié le 24 septembre 1984, l'Etat a confié à M. X, architecte, et à la société SODETEG, bureau d'études, une mission de maîtrise d'oeuvre des travaux de rénovation de la maison d'arrêt de Nantes, et que par marché du 29 juin 1983, il a confié à la société Bureau Véritas une mission de contrôle technique ; que par marchés notifiés en 1987, la société Bouyer a été chargée du lot n°1 gros oeuvre, la société ASSELIN du lot n° 2 charpente bois, traitement charpente et plancher, l'entreprise Sintab du lot n° 7 cloisons, doublage plafonds, la société Sanit-Chauffage du lot n° 10 plomberie et la société Hamard frères du lot n° 17 carrelages sols ; qu'à la suite de l'apparition en 1994 de traces d'infiltrations et de l'effondrement d'un plancher dans des salles de douches, l'Etat a mis en cause la responsabilité de l'ensemble de ces cocontractants sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil ; que, par le jugement attaqué du 10 mai 1999, le Tribunal administratif de Nantes a condamné solidairement l'ensemble de ces constructeurs à verser une indemnité à l'Etat au titre de la responsabilité décennale et, statuant sur les actions en garantie, a réparti la charge de l'indemnisation à hauteur de 15 % pour M. X et de 35 % pour la société SODETEG, au motif que la maîtrise d'oeuvre n'avait pas prévu de dispositifs d'étanchéité sous les douches, à hauteur de 15 % pour la société Bureau Véritas en raison de manquements à ses missions de contrôleur technique et à hauteur de 35 % pour la société Hamard qui avait commis des malfaçons dans l'exécution des travaux du lot n° 17 et n'avait pas fait d'observations sur la conception des ouvrages ; que, par la voie de l'appel principal, la société GTB Bouyer Duchemin venant aux droits de la société Bouyer, interjette appel du jugement en tant qu'il l'a condamnée solidairement avec les autres constructeurs à verser à l'Etat, une indemnité de 275 565 F TTC en réparation des préjudices subis à la suite de ces désordres, une somme de 29 164,70 F en remboursement des frais d'expertise et une somme de 5 000 F au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, par la voie de l'appel provoqué, la société Bureau Véritas, la société ASSELIN et la société Sanit-Chauffage demandent également à être déchargées des sommes qu'elles ont été solidairement condamnées à verser à l'Etat ; que la société Bureau Véritas, M. X et la société SODETEG concluent à la réformation du jugement attaqué en tant qu'il a condamné d'autres constructeurs à les garantir dans des proportions qu'ils estiment insuffisantes ; que la société ASSELIN demande subsidiairement à être garantie intégralement des condamnations prononcées contre elle par M. X, la société SODETEG, la société Bureau Véritas et la société Hamard ;

Sur l'appel principal de la société GTB Bouyer Duchemin :

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert nommé par le juge des référés du Tribunal administratif de Nantes, que les désordres indemnisés au titre de la garantie décennale par les premiers juges, et qui consistent dans l'effondrement d'un plancher d'une salle de douches et dans l'apparition de dégâts sur un autre plancher, ont pour origine des infiltrations dues à l'absence de dispositifs d'étanchéité sous les carrelages des douches ; que ces désordres trouvent leur origine dans les travaux que la société Hamard était chargée de réaliser dans le cadre du lot n° 17 et sont étrangers aux travaux de gros oeuvre qui incombaient à la société Bouyer ; que la société GTB Bouyer Duchemin est, dès lors, fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nantes a regardé ces désordres comme imputables à la société Bouyer et l'a condamnée solidairement à verser une indemnité à l'Etat ;

Sur les appels provoqués :

Considérant que l'admission de l'appel de la société GTB Bouyer Duchemin, qui n'a présenté devant le tribunal administratif aucune demande tendant à être garantie des condamnations prononcées contre elle et qui n'est, en tout état de cause, pas recevable à le faire pour la première fois en appel, aggrave la situation des autres sociétés appelantes, qui se trouvent exposées, d'une part, en raison de la solidarité, à devoir payer à l'Etat la totalité des indemnités que lui a allouées le tribunal administratif, et d'autre part, à devoir garantir la ou les sociétés auxquelles le paiement de ces sommes sera demandé ;

Considérant, d'une part, qu'il résulte du rapport d'expertise que la dégradation et l'effondrement du plancher de la salle de douches, a pour seule origine des infiltrations provenant de l'absence d'étanchéité du carrelage et ne sont pas imputables à la société ASSELIN, chargée du lot charpentes, qui a utilisé des bois préalablement traités conformément aux règles de l'art ; que, de même, les travaux de plomberie exécutés par la société Sanit-Chauffage, ne sont pas à l'origine des désordres ; qu'ainsi, la société ASSELIN et Me PELLETIER ; en qualité de liquidateur de la société Sanit-Chauffage, sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nantes a regardé les dommages comme imputables aux travaux qu'elles ont réalisés et les a condamnées à verser une indemnité à l'Etat ;

Considérant qu'aux termes de l'article 3 du marché conclu par la société Bureau Véritas : les interventions confiées au contrôleur technique concernent... la solidité des ouvrages, la sécurité des personnes... le fonctionnement des installations dans les domaines notamment des fondations, ouvrages de clos et de couvert y compris partition et finitions et des installations sanitaires et fluides divers... Le contrôle intervient pendant la conception et l'exécution des ouvrages jusqu'à la fin de la période de garantie de parfait achèvement... ; qu'il résulte de ces stipulations que, contrairement à ce que soutient la société Bureau Véritas, le contrôle sur la mise en oeuvre de traitements et dispositifs des sols des douches, dont l'absence était de nature à nuire au fonctionnement des installations sanitaires et à porter atteinte à la solidité des ouvrages tels que les planchers et en conséquence à la sécurité des personnes, entrait dans le cadre de ses missions contractuelles ; que si la société fait valoir qu'elle avait mentionné la nécessité de prévoir une étanchéité sous les douches dans ses observations sur le dossier préparé par les concepteurs, il est constant qu'elle n'a fait aucune remarque lors de l'exécution des travaux ; qu'ainsi, elle a méconnu l'étendue de ses obligations contractuelles qui stipulaient que les contrôles devaient également s'exercer pendant l'exécution des ouvrages ; qu'en conséquence, la société Bureau Véritas qui, en tant que contrôleur technique, est susceptible de voir sa responsabilité solidairement engagée dans les mêmes conditions que les autres constructeurs en application des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif l'a condamnée solidairement à indemniser l'Etat au titre de la garantie décennale ;

Considérant, d'autre part, que M. X demande, d'ailleurs sans préciser les proportions, à être davantage garanti par la société SODETEG, la société Bureau Véritas et la société Hamard ; que M. X, dont la part de responsabilité a été fixée à 15 % par le jugement attaqué alors que celle de la société SODETEG est de 35 %, ne peut utilement faire valoir que le tribunal administratif n'a pas tenu compte de la part prépondérante attribuée par le marché à la société SODETEG dans l'élaboration des spécifications techniques détaillées et du plan d'exécution des ouvrages ; qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert, qu'en condamnant la société Bureau Véritas et la société Hamard à garantir M. X respectivement à concurrence de 15 % et de 35 %, le tribunal administratif n'a pas fait une inexacte appréciation de leurs responsabilités, alors que les fautes commises par la maîtrise d'ouvrage justifient que la moitié des indemnités soit laissée à sa charge ;

Considérant que si la société SODETEG demande que le société Hamard la garantisse davantage des condamnations prononcées contre elle, elle n'apporte pas de précisions à l'appui de ses allégations ;

Considérant que la société Bureau Véritas ne présente aucun moyen à l'appui de ses conclusions tendant à être intégralement garantie par M. X, la société SODETEG et la société Hamard ; qu'elles ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions de condamner l'Etat, à verser à la société GTB Bouyer Duchemin, à Me PELLETIER en qualité de liquidateur de la société Sanit-Chauffage et à la société ASSELIN, chacun, une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

Considérant que ces mêmes dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'a pas eu recours au ministère d'avocat et ne se prévaut pas de frais spécifiques exposés par lui en indiquant leur nature, obtienne que les appelants soient condamnés à lui payer la somme qu'il demande à ce titre ;

Considérant que ces dispositions font également obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance à l'égard de la société Bureau Véritas, soit condamné à payer à cette dernière la somme qu'elle demande au titre des mêmes frais et, pour la même raison, à ce que les constructeurs contre lesquels ils dirigent ces conclusions soient condamnés à verser à M. X et à la société SODETEG les sommes qu'ils demandent au titre de tels frais ;

DÉCIDE :

Article 1er : M. X, la société SODETEG, la société Bureau Véritas et la société Hamard sont condamnés solidairement à verser à l'Etat une indemnité de quarante deux mille neuf euros, soixante et un centimes (42 009,61 euros) (275 565 F) sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil, ainsi que la somme de quatre mille quatre cent quarante six euros, quatre centimes (4 446,04 euros) (29 164,70 F) en remboursement des frais d'expertise et celle de sept cent soixante deux euros, vingt quatre centimes (762,24 euros) (5 000 F) au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Article 2 : Le jugement du 10 mai 1999 du Tribunal administratif de Nantes est annulé en tant qu'il a condamné solidairement la société GTB Bouyer Duchemin, la société Sanit-Chauffage et la société ASSELIN à verser à l'Etat une indemnité sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil ainsi que le remboursement des frais d'expertise et une somme au titre des frais irrépétibles.

Article 3 : Les conclusions d'appel provoqué de M. X, de la société Bureau Véritas et de la société SODETEG sont rejetées.

Article 4 : L'Etat versera à la société GTB Bouyer Duchemin, à Me PELLETIER en qualité de liquidateur de la société Sanit-Chauffage et à la société ASSELIN, chacun, une somme de mille euros (1 000 euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions présentées par le ministre de la justice, par M. X, par la société SODETEG et par la société Bureau Véritas en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la société GTB Bouyer Duchemin, à Me PELLETIER en qualité de liquidateur de la société Sanit-Chauffage, à la société ASSELIN, à la société Bureau Véritas, à M. X, à la société SODETEG, à la société Hamard, à la société Sintab et au ministre de la justice.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4eme chambre
Numéro d'arrêt : 99NT02251
Date de la décision : 09/04/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LEPLAT
Rapporteur ?: Mme Colette STEFANSKI
Rapporteur public ?: M. MORNET
Avocat(s) : GRIFFITHS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2004-04-09;99nt02251 ?
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