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05/06/2007 | FRANCE | N°05NT01403

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 05 juin 2007, 05NT01403


Vu la requête enregistrée le 12 août 2005, présentée pour M. Noël X demeurant ..., par Me Alric, avocat au barreau de Tours ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 03-1573 du 30 juin 2005 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à ce que le centre hospitalier universitaire (CHU) d'Angers soit condamné à lui verser la somme de 1 347 627,38 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi à la suite de son hospitalisation dans cet établissement ;

2°) de condamner le CHU d'Angers à lui verser ladite indemni

té de 1 347 627,38 euros en réparation de son préjudice ;

3°) de condamner le...

Vu la requête enregistrée le 12 août 2005, présentée pour M. Noël X demeurant ..., par Me Alric, avocat au barreau de Tours ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 03-1573 du 30 juin 2005 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à ce que le centre hospitalier universitaire (CHU) d'Angers soit condamné à lui verser la somme de 1 347 627,38 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi à la suite de son hospitalisation dans cet établissement ;

2°) de condamner le CHU d'Angers à lui verser ladite indemnité de 1 347 627,38 euros en réparation de son préjudice ;

3°) de condamner ledit centre hospitalier à lui verser la somme de 6 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 mai 2007 :

- le rapport de M. Degommier, rapporteur ;

- et les conclusions de M. Artus, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. X interjette appel du jugement du 30 juin 2005 du Tribunal administratif de Nantes rejetant sa demande tendant à ce que le centre hospitalier universitaire (CHU) d'Angers soit condamné à lui verser une indemnité de 1 347 627,38 euros en réparation de son préjudice, à la suite de l'intervention chirurgicale qu'il a subie le 3 août 2000 dans cet établissement ;

Sur la responsabilité pour faute :

Considérant que l'introduction accidentelle d'un germe microbien dans l'organisme lors d'une intervention chirurgicale révèle une faute dans l'organisation ou le fonctionnement du service hospitalier et engage la responsabilité de celui-ci envers la victime des conséquences dommageables de l'infection ; qu'il en va, toutefois, autrement lorsque l'infection, si elle est déclarée à la suite d'une intervention chirurgicale, résulte de germes déjà présents dans l'organisme du patient avant l'hospitalisation ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction et, notamment, du rapport de l'expert désigné par ordonnance du 25 janvier 2002 du juge des référés du Tribunal administratif de Nantes, que l'intervention subie le 3 août 2000 par M. X, consistant en un triple pontage aorto-coronarien, s'est compliquée d'une médiastinite antérieure due à la présence d'une infection par staphylocoque doré méthi-R, ce qui a nécessité une nouvelle opération le 16 août 2000 ; que cette infection s'est associée à une complication neurologique grave, qui s'est traduite par une encéphalopathie, laissant à titre de séquelles un syndrome cérébelleux cinétique bilatéral ; qu'ainsi que le mentionne l'expert dans son rapport, M. X “n'avait aucune infection en pré-opératoire et cela avait été vérifié tant par l'examen clinique que par l'examen systématique des urines” ; que, dès lors, l'introduction accidentelle dudit germe microbien dans l'organisme, lors de l'intervention chirurgicale révèle, nonobstant les précautions prises par le CHU d'Angers et en dépit des facteurs de risques que présentait le patient, une faute dans l'organisation ou le fonctionnement du service hospitalier ; qu'il suit de là que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à la condamnation du CHU d'Angers à réparer les conséquences dommageables de l'infection nosocomiale dont il a été atteint lors de son hospitalisation dans cet établissement ;

Considérant que si M. X a également, présenté au cours de son hospitalisation un épisode d'encéphalopathie laissant à titre de séquelles un syndrome cérébelleux, il ressort dudit rapport d'expertise précité que des examens complémentaires ont permis d'écarter une origine infectieuse bactérienne de ce syndrome ; qu'ainsi, le fait que cette complication neurologique soit survenue de manière concomitante à l'infection nosocomiale dont a été victime l'intéressé ne permet pas d'établir qu'elle en soit la conséquence directe ; qu'il s'ensuit que la responsabilité du CHU d'Angers n'est engagée, à l'égard de M. X, qu'en ce qui concerne les conséquences directes de ladite infection nosocomiale ;

Sur la responsabilité sans faute :

Considérant que lorsqu'un acte médical nécessaire au diagnostic ou au traitement du malade présente un risque dont l'existence est connue mais dont la réalisation est exceptionnelle et dont aucune raison ne permet de penser que le patient y soit particulièrement exposé, la responsabilité du service public hospitalier est engagée si l'exécution de cet acte est la cause directe de dommages sans rapport avec l'état initial du patient comme avec l'évolution prévisible de cet état, et présentant un caractère d'extrême gravité ;

Considérant qu'il résulte du rapport d'expertise que M. X présentant avant son opération des facteurs de risques nombreux, notamment un diabète non insulino-dépendant, une hypercholestérolémie, une surcharge pondérale et une hypertension artérielle pouvant favoriser la survenance d'un accident neurologique, le syndrome cérébelleux dont il a été affecté ne peut être regardé comme sans lien avec son état initial ou avec l'évolution prévisible de cet état ; que, par suite, la responsabilité sans faute du CHU d'Angers ne peut être engagée à ce titre ;

Sur le préjudice :

Considérant qu'il sera fait une juste appréciation des troubles dans les conditions d'existence et de la douleur physique subis par M. X, du seul fait de l'infection microbienne accidentelle dont il a été victime et qui a nécessité une nouvelle intervention, en l'évaluant à la somme de 10 000 euros ; qu'à cette somme, il convient d'ajouter le montant des frais médicaux nécessaires au traitement de la seule infection nosocomiale, pris en charge par la caisse Régime Social des Indépendants (RSI) des Pays de la Loire et qui s'élève à la somme de 25 290,40 euros ; qu'ainsi, le montant total du préjudice de M. X dont la réparation incombe au CHU d'Angers s'élève à 35 290,40 euros ;

Sur les droit de la caisse RSI Pays de la Loire :

Considérant que la caisse RSI des Pays de la Loire peut prétendre au remboursement des frais médicaux qu'elle a pris en charge, en rapport avec l'infection nosocomiale subie par M. X et qui s'élèvent à la somme non contestée de 25 290,40 euros ; qu'elle a droit, en outre, aux intérêts au taux légal sur cette somme, à compter du 19 avril 2004 ;

Sur les droits de M. X :

Considérant que M. X a droit, après déduction de la créance de la caisse RSI, à la somme de 10 000 euros ;

Sur les conclusions de la caisse RSI Pays de la Loire tendant à l'octroi de l'indemnité forfaitaire prévue à l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale :

Considérant que le 9ème alinéa de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale dispose : “En contrepartie des frais qu'elle engage pour obtenir le remboursement mentionné au troisième alinéa ci-dessus, la caisse d'assurance maladie à laquelle est affilié l'assuré social victime de l'accident recouvre une indemnité forfaitaire à la charge du tiers responsable et au profit de l'organisme national d'assurance maladie. Le montant de cette indemnité est égal au tiers des sommes dont le remboursement a été obtenu, dans les limites d'un montant maximum de 910 euros et d'un montant minimum de 91 euros. A compter du 1er janvier 2007, les montants mentionnés au présent alinéa sont révisés chaque année, par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget, en fonction du taux de progression de l'indice des prix à la consommation hors tabac prévu dans le rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances pour l'année considérée (...)” ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de cette disposition et de condamner le CHU d'Angers à verser à la caisse RSI des Pays de la Loire la somme de 926 euros qu'elle demande ;

Sur les frais d'expertise :

Considérant qu'il y a lieu de mettre les frais d'expertise exposés devant le Tribunal administratif de Nantes, à la charge du CHU d'Angers ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de condamner le CHU d'Angers à verser, à M. X, une somme de 1 500 euros et, à la caisse RSI des Pays de la Loire, une somme de 1 500 euros, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 30 juin 2005 du Tribunal administratif de Nantes est annulé.

Article 2 : Le CHU d'Angers est condamné à verser à M. X une indemnité de 10 000 euros (dix mille euros).

Article 3 : Le CHU d'Angers versera à la caisse RSI des Pays de la Loire la somme de 25 290,40 euros (vingt cinq mille deux cent quatre vingt dix euros quarante centimes), avec les intérêts au taux légal à compter du 19 avril 2004, ainsi que la somme de 926 euros (neuf cent vingt six euros) au titre de l'indemnité forfaitaire prévue à l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale.

Article 4 : Le CHU d'Angers versera à M. X, une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) et à la caisse RSI des Pays de la Loire, une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros), au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les frais de l'expertise sont mis à la charge du CHU d'Angers.

Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. Noël X, au centre hospitalier universitaire d'Angers et à la caisse Régime Social des Indépendants des Pays de la Loire.

Une copie en sera, en outre, adressée au ministre de la santé, de la jeunesse et des sports.

N° 05NT01403

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 05NT01403
Date de la décision : 05/06/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LALAUZE
Rapporteur ?: M. Sébastien DEGOMMIER
Rapporteur public ?: M. ARTUS
Avocat(s) : ALRIC

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2007-06-05;05nt01403 ?
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