La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/12/2007 | FRANCE | N°07NT02182

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 26 décembre 2007, 07NT02182


Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés respectivement les 20 juillet et 24 septembre 2007, présentés pour M. Mahamadou X, demeurant ..., par Me Demgne Fondjo, avocat au barreau de la Seine-Saint-Denis ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 07-867 en date du 22 juin 2007 par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 mars 2007 du préfet du Calvados portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ;

2°) d'annuler ledit arrêt

;

3°) d'enjoindre au préfet du Calvados de réexaminer sa demande de...

Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés respectivement les 20 juillet et 24 septembre 2007, présentés pour M. Mahamadou X, demeurant ..., par Me Demgne Fondjo, avocat au barreau de la Seine-Saint-Denis ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 07-867 en date du 22 juin 2007 par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 mars 2007 du préfet du Calvados portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Calvados de réexaminer sa demande de titre de séjour ;
……………………………………………………………………………………………………...

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;


Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 décembre 2007 :

- le rapport de M. Martin, rapporteur ;

- et les conclusions de M. Hervouet, commissaire du gouvernement ;


Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, né le 26 février 1978 et de nationalité ivoirienne, est entré le 19 mars 2002 en France muni d'un visa pour un séjour d'une durée de 15 jours ; qu'il s'est marié, le 13 décembre 2006, à Ouistreham (Calvados) avec une ressortissante française, Mlle Isabelle Y ; qu'il a demandé au préfet du Calvados le 13 janvier 2007 la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention “vie privée et familiale” ; que, par arrêté du 21 mars 2007, le préfet a rejeté sa demande au motif, notamment, que M. X n'était pas en possession d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ; qu'il a assorti son refus de délivrance d'un titre de séjour d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé la Côte d'Ivoire comme pays de destination ;

Sur la légalité de l'arrêté attaqué en tant qu'il porte refus de délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention “vie privée et familiale” :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : “Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention “vie privée et familiale” est délivrée de plein droit : (…) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française (…)” ; qu'aux termes de l'article L. 311-7 du même code : “Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour “compétence et talents” sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois” ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 211-2-1 dudit code : “(…) Le visa mentionné à l'article L. 311-7 ne peut être refusé à un conjoint de Français qu'en cas de fraude, d'annulation du mariage ou de menace à l'ordre public. Les autorités diplomatiques et consulaires sont tenues de statuer sur la demande de visa de long séjour formée par le conjoint de Français dans les meilleurs délais. Lorsque la demande de visa de long séjour émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un ressortissant de nationalité française et que le demandeur séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint, la demande de visa de long séjour est présentée à l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour” ; qu'il résulte de ces dispositions combinées que la délivrance de plein droit d'une carte de séjour temporaire portant la mention “vie privée et familiale” à un étranger marié avec un ressortissant de nationalité française est subordonnée non seulement aux conditions énoncées par le 4° précité de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile mais aussi à la production d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ; que la circonstance que l'étranger soit en mesure de justifier, à la date de sa demande de titre, qu'il séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint a pour seule conséquence de le dispenser de retourner dans son pays d'origine pour y déposer sa demande de visa ;

Considérant qu'en admettant même que M. X ait vécu maritalement avec Mlle Y en France depuis juillet 2004, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il ait sollicité du préfet du Calvados la délivrance d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ; que, dans ces conditions, il ne pouvait, à la date de la décision litigieuse, prétendre à la délivrance de plein droit d'une carte de séjour temporaire sur le fondement du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le préfet a pu à bon droit refuser de lui délivrer ladite carte, ce refus ne faisant pas obstacle à ce que M. X sollicite ultérieurement la délivrance d'un visa ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'étant pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour sur le fondement du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet du Calvados n'était pas tenu, en application de l'article L. 313-2 du même code, de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande de titre de séjour ;

Sur la légalité de l'arrêté attaqué en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de destination :

Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs : “Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : - restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (…)” ; que l'article 3 de la même loi dispose : “La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision” ;

Considérant que l'obligation de quitter le territoire français dont le préfet peut assortir le refus ou le retrait d'un titre de séjour est une mesure de police qui doit, comme telle, être motivée en application des règles de forme édictées, pour l'ensemble des décisions administratives, par l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée ; que si la motivation de cette mesure, se confondant avec celle du refus ou du retrait de titre de séjour dont elle découle nécessairement, n'appelle pas d'autres mentions spécifiques pour respecter les exigences de la loi du 11 juillet 1979, c'est toutefois à la condition que le préfet ait mentionné dans sa décision le I de l'article L. 511-1-I du même code qui l'habilite à assortir le refus de titre de séjour d'une obligation de quitter le territoire ;

Considérant qu'en se bornant, en l'espèce, à viser le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sans mentionner le I de l'article L. 511-1, le préfet du Calvados a méconnu cette exigence ; que, par suite et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête sur ce point, la décision par laquelle il a fait obligation à M. X de quitter le territoire français est illégale ; qu'elle doit être annulée de même, par voie de conséquence, que la décision fixant le pays de renvoi ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : “Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette décision doit intervenir dans un délai déterminé” ; qu'aux termes de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : “(…) Si l'obligation de quitter le territoire français est annulée, (…) l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas.” ;

Considérant qu'à la suite de l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français, il incombe au préfet, en application des dispositions précitées de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, non seulement de munir l'intéressé d'une autorisation provisoire de séjour mais aussi, qu'il ait été saisi ou non d'une demande en ce sens, de se prononcer sur son droit à un titre de séjour ; que, dès lors, il appartient au juge administratif, lorsqu'il prononce l'annulation d'une obligation de quitter le territoire français et qu'il est saisi de conclusions en ce sens, d'user des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 911-2 du code de justice administrative pour fixer le délai dans lequel la situation de l'intéressé doit être examinée, au vu de l'ensemble de la situation de droit et de fait existant à la date de ce réexamen ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'enjoindre au préfet du Calvados de se prononcer sur la situation de M. X dans le délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Caen a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Calvados en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de destination ;


DÉCIDE :

Article 1er : L'arrêté du préfet du Calvados en date du 21 mars 2007 est annulé en tant que, par ses articles 2 et 3, il oblige M. X à quitter le territoire français et qu'il fixe le pays de destination.
Article 2 : Il est enjoint au préfet du Calvados de statuer sur la situation de M. X dans le délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt.
Article 3 : Le jugement du Tribunal administratif de Caen en date du 22 juin 2007 est annulé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Mahamadou X et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement. Une copie sera transmise au préfet du Calvados.
N° 07NT02182
2

1


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 07NT02182
Date de la décision : 26/12/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LEMAI
Rapporteur ?: M. Luc MARTIN
Rapporteur public ?: M. HERVOUET
Avocat(s) : DEMGNE FONDJO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2007-12-26;07nt02182 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award