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17/03/2011 | FRANCE | N°10NT00374

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 17 mars 2011, 10NT00374


Vu la requête, enregistrée le 22 février 2010, présentée pour M. et Mme Yusuf X, demeurant ..., par la Selarl Alain Sarrazin, société d'avocats au barreau de Rouen ; M. et Mme X demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 09-385 en date du 23 décembre 2009 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande tendant, d'une part, à la réduction des impositions supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2004 et 2005 et, d'autre part, à la décharge des pénalités pou

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Vu la requête, enregistrée le 22 février 2010, présentée pour M. et Mme Yusuf X, demeurant ..., par la Selarl Alain Sarrazin, société d'avocats au barreau de Rouen ; M. et Mme X demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 09-385 en date du 23 décembre 2009 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande tendant, d'une part, à la réduction des impositions supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2004 et 2005 et, d'autre part, à la décharge des pénalités pour manquement délibéré qui leur ont été infligées au titre de ces deux années ;

2°) de prononcer la réduction et la décharge demandées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 février 2011 :

- le rapport de M. Christien, président-assesseur ;

- les conclusions de Mme Specht, rapporteur public ;

- et les observations de Me Boudin, substituant Me Sarrazin, avocat de M. et Mme X ;

Considérant que M. et Mme X ont fait l'objet, au cours de l'année 2007, d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle portant sur les années 2004 et 2005 au cours duquel il est apparu qu'ils avaient pu disposer de revenus supérieurs à ceux déclarés au titre de ces deux années ; que M. et Mme X n'ayant, selon l'administration, pas apporté de réponses suffisantes à une demande de justifications, les crédits bancaires non expliqués ont été taxés d'office en application des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales comme revenus d'origine indéterminée ; que le redressement en résultant a été soumis à la majoration de 40 % prévue au a de l'article 1729 du code général des impôts ; que M. et Mme X interjettent appel du jugement en date du 23 décembre 2009 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande tendant à la réduction des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2004 et 2005 et à la décharge des pénalités mises à leur charge au titre de ces deux années ;

Sur le bien-fondé des impositions :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales : En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements. (...) Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés (...) ; qu'aux termes de l'article L. 69 du même livre : Sous réserve des dispositions particulières au mode de détermination des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices agricoles et des bénéfices non commerciaux, sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L. 16. ;

Considérant que, si l'administration ne peut régulièrement taxer d'office, en application de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales, les sommes dont elle n'ignore pas qu'elles relèvent d'une catégorie précise de revenus, elle peut en revanche procéder à cette taxation d'office si, au vu des renseignements dont elle disposait avant l'envoi de la demande de justifications fondée sur l'article L. 16 du livre des procédures fiscales et des réponses apportées par le contribuable à cette demande, la nature des sommes en cause, et donc la catégorie de revenus à laquelle elles seraient susceptibles de se rattacher, demeure inconnue ; qu'il est toutefois loisible au contribuable régulièrement taxé d'office sur le fondement de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales d'apporter devant le juge de l'impôt la preuve que ces sommes, soit ne constituent pas des revenus imposables, soit se rattachent à une catégorie précise de revenus ; que, dans cette dernière situation, le contribuable peut obtenir, le cas échéant, une réduction de l'imposition d'office régulièrement établie au titre du revenu global, à raison de la différence entre les bases imposées d'office et les bases résultant de l'application des règles d'assiette propres à la catégorie de revenus à laquelle se rattachent, en définitive, les sommes en cause ;

Considérant, d'une part, que les requérants soutiennent que les crédits bancaires litigieux correspondent à des chèques rémunérant l'activité professionnelle de bûcheronnage de la mère de Mme X, Mme Done Y, qui les déposait sur le compte bancaire de sa fille, laquelle procédait ensuite dans les plus brefs délais à des retraits d'espèces d'un montant équivalent à celui des chèques déposés, qu'elle reversait à sa mère ;

Considérant qu'à l'appui de leurs allégations, M. et Mme X produisent des copies de chèques émis par des sociétés d'exploitation forestière et libellés, pour certains, à l'ordre de Mme Done Y et, pour d'autres, soit à celui d'Y, sans plus de précisions, soit à celui de Meliha Y, qui est le nom patronymique de Mme X, ainsi que des copies de bordereaux de remise de chèques et de relevés du compte bancaire de M. et Mme X faisant apparaitre une concomitance sur ce compte entre les dépôts de chèques et les retraits ; que les requérants versent au dossier une attestation datée du 9 février 2010 dans laquelle Mme Done Y, dont l'administration indique, sans être contredite, qu'elle n'avait jamais indiqué, lors de l'examen de sa situation fiscale personnelle, avoir déposé des recettes professionnelles sur le compte bancaire de sa fille, déclare désormais : je tiens à vous signaler que ma fille Meliha X a remis mes chèques à son compte. Peu de temps après, elle faisait les retraits en espèces pour me donner ; que ni ces éléments, ni les termes du jugement n° 09-975 du 23 décembre 2009 du tribunal administratif de Caen, lequel s'il a jugé, dans le cadre de l'instance opposant l'administration à Mme Done Y, que celle-ci n'avait pas déclaré certaines de ses recettes professionnelles, ne s'est pas prononcé sur d'éventuels dépôts de chèques et d'espèces sur les comptes bancaires des membres de sa famille, ne peuvent être regardés comme établissant que les crédits bancaires litigieux sont le produit de l'activité professionnelle de Mme Done Y ;

Considérant, d'autre part, que M. et Mme X soutiennent qu'en tout état de cause les crédits litigieux ne pourraient être taxés à l'impôt sur le revenu comme revenus d'origine indéterminée que s'ils constituaient des revenus imposables de leur foyer fiscal, ce qui n'est pas le cas dès lors qu'ils n'avaient pas la disposition des sommes en cause qui ne faisaient que transiter brièvement sur leur compte bancaire avant d'être reversées par Mme X à sa mère ;

Considérant qu'aux termes de l'article 156 du code général des impôts : L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal (...) ; qu'il résulte de cette disposition que l'impôt sur le revenu porte sur les revenus dont le contribuable a eu la disposition au cours de l'année d'imposition, quel que soit l'usage qu'il en ait fait ;

Considérant que, dans la présente espèce, les requérants ont, contrairement à ce qu'ils soutiennent, eu la disposition des sommes déposées sur leur compte bancaire en 2004 et en 2005, dès lors qu'il s'agissait d'un compte courant non bloqué, quand bien même ils auraient ensuite procédé à des retraits en espèces en faveur de Mme Done Y, ce qu'ils n'établissent d'ailleurs pas ainsi qu'il a été dit plus haut ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme X n'apportent pas la preuve, qui leur incombe, du caractère exagéré des impositions supplémentaires auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2004 et 2005 et ne sont, par suite, pas fondés à en demander la réduction ;

Sur les pénalités :

Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de (...) a 40 % en cas de manquement délibéré (...) ; et qu'aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, (...) la preuve de la mauvaise foi et des manoeuvres frauduleuses incombe à l'administration ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les sommes figurant sur le compte bancaire personnel de M. et Mme X et qui ont entrainé un redressement de leur imposition sur le revenu et aux contributions sociales au titre des années 2004 et 2005 résultaient de dépôts réguliers de chèques et d'espèces dont les montants non déclarés ont excédé le double des revenus déclarés pour l'année 2004 et ont représenté une fois et demi les revenus déclarés pour l'année 2005 ; qu'en raison de l'importance et de la régularité des dépôts en cause, les requérants ne sauraient sérieusement prétendre qu'ils ignoraient que les sommes correspondant à ces dépôts devaient être soumises à l'impôt sur le revenu ou qu'ils ont par erreur omis de les déclarer ; qu'ainsi, l'administration doit être regardée comme établissant le caractère intentionnel de l'omission et de l'insuffisance des déclarations des requérants et comme apportant la preuve du bien-fondé des pénalités pour manquement délibéré mises à leur charge ; que, par suite, M. et Mme X ne sont pas fondés à demander à être déchargés de ces pénalités ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que M. et Mme X demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Yusuf X et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 10NT00374
Date de la décision : 17/03/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme MASSIAS
Rapporteur ?: M. Robert CHRISTIEN
Rapporteur public ?: Mme SPECHT
Avocat(s) : SARRAZIN ; SARRAZIN ; SARRAZIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2011-03-17;10nt00374 ?
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