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06/11/2012 | FRANCE | N°11NT01916

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 06 novembre 2012, 11NT01916


Vu la requête, enregistrée le 18 juillet 2011, présentée pour M. Jean-Louis A, demeurant ..., par Me Delair, avocat au barreau de Paris ; M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 10-1767 du 13 mai 2011 par lequel le tribunal administratif d'Orléans l'a condamné à verser à la commune de Garancières-en-Drouais la somme de 95 637,16 euros en réparation des désordres affectant la toiture de l'église de la commune ;

2°) de rejeter la demande présentée par la commune de Garancières-en-Drouais devant le tribunal administratif d'Orléans ;

3°) de m

ettre à la charge de la commune de Garancières-en-Drouais une somme de 1 500 euros en ...

Vu la requête, enregistrée le 18 juillet 2011, présentée pour M. Jean-Louis A, demeurant ..., par Me Delair, avocat au barreau de Paris ; M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 10-1767 du 13 mai 2011 par lequel le tribunal administratif d'Orléans l'a condamné à verser à la commune de Garancières-en-Drouais la somme de 95 637,16 euros en réparation des désordres affectant la toiture de l'église de la commune ;

2°) de rejeter la demande présentée par la commune de Garancières-en-Drouais devant le tribunal administratif d'Orléans ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Garancières-en-Drouais une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 octobre 2012 :

- le rapport de Mme Tiger, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Martin, rapporteur public ;

1. Considérant que dans le courant de l'année 1999 la commune de Garancières-en-Drouais a confié à M. A, architecte, la maîtrise d'oeuvre des travaux de rénovation de la toiture de son église ; que ces travaux ont été exécutés en juin et juillet 2001 et ont fait l'objet d'un procès-verbal de réception sans réserves le 15 novembre 2001 ; qu'à la fin de l'année 2004, la commune a constaté différents désordres au niveau de la toiture de l'église et a sollicité la désignation d'un expert, qui a remis son rapport le 28 janvier 2006 ; que M. Latour M. A relève appel du jugement du 13 mai 2011 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a retenu que sa responsabilité contractuelle était engagée, tout en considérant que la commune de Garancières-en-Drouais avait elle-même concouru à hauteur de 30 % à la réalisation du dommage dont elle souhaitait être indemnisée, l'a condamné à verser à la commune une somme de 95 637,16 euros TTC et a réparti les frais et honoraires de l'expertise dans les mêmes proportions entre M. A et la commune de Garancières-en-Drouais ; que par la voie de l'appel incident, la commune de Garancières-en-Drouais demande la condamnation du maître d'oeuvre, sur le fondement de la garantie décennale ou de la responsabilité contractuelle, à lui verser la somme de 130 154,52 euros TTC au titre des travaux de reprise des désordres constatés sur la toiture de l'église de la commune après travaux de rénovation, ainsi que la somme de 6 500 euros TTC au titre des honoraires et frais de maîtrise d'oeuvre nécessaires pour assurer le suivi des travaux de reprise, et d'ordonner l'actualisation de ces sommes sur la base de l'indice BT 01 le plus proche au jour de la décision à intervenir ;

Sur la responsabilité contractuelle :

2. Considérant que si M. A soutient, comme il peut le faire pour la première fois en appel en sa qualité de défendeur de première instance, que serait intervenu le 13 décembre 2001 un décompte général et définitif ayant mis fin aux relations contractuelles qui le liaient à la commune de Garancières-en-Drouais, il résulte toutefois de l'instruction que le maître de l'ouvrage n'a pas signé le document présenté comme décompte général du marché qui n'a, par suite, pas acquis de caractère définitif ; que, dès lors, la commune était recevable à rechercher sa responsabilité contractuelle ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que la toiture restaurée de l'église de Garancières-en-Drouais présente un important défaut de planéité des chevrons, que les tuiles ne sont pas clouées alors que le clouage d'une tuile sur cinq était prévu par le contrat, que certaines des sections de liteaux sont de dimensions non conformes à ce que prévoit le DTU 40.23 qui, contrairement à ce que soutient M. A, n'est pas réservé aux constructions neuves et est applicable à tous travaux de pose de tuiles plates en terre cuite ; que ces malfaçons ont conduit au décrochage de plusieurs tuiles sur le versant nord de la nef et du choeur ainsi qu'au niveau de l'égout et empêchent la toiture de présenter les garanties d'étanchéité requises ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. A, qui s'était vu confier une mission de conseil du maître de l'ouvrage et de direction du chantier, n'a pas mis la commune de Garancières-en-Drouais en garde sur l'insuffisance des compétences de l'entreprise retenue, ne l'a pas davantage informée du fait que celle-ci ne s'était pas conformée à ses ordres écrits relatifs à la nécessité de procéder à un callage du lattis et n'a pas signalé les défauts d'alignement et l'absence de clouage des tuiles dans les comptes rendus de réunions de chantier ; que le maître d'oeuvre a en outre signé le procès-verbal de réception des travaux sans y mentionner aucune réserve alors que les malfaçons de la toiture étaient aisément décelables par un maître d'oeuvre normalement précautionneux et auraient dû le conduire, dès lors qu'il était également chargé d'assister le maître d'ouvrage au moment de la réception des travaux, à appeler l'attention de la commune sur les défectuosités faisant obstacle à ce que ladite réception fût prononcée sans réserve ;

5. Considérant, toutefois, que la commune de Garancières-en-Drouais a fait le choix de retenir l'offre de l'entreprise Tessier, moins disante, pour réaliser la pose de la couverture en tuiles de son église à laquelle elle souhaitait conserver son aspect ancien en employant des tuiles neuves mises en place suivant une pose dite " à liaisons brouillées ", tout en assurant une parfaite étanchéité de la toiture, sans vérifier si celle-ci avait les compétences techniques requises pour effectuer lesdits travaux ; qu'en privilégiant ainsi le seul critère du prix dans l'attribution du marché, au détriment de la valeur technique particulière exigée par la spécificité du chantier, la commune a commis une imprudence qui, si elle ne saurait avoir pour effet d'exonérer M. A de toute responsabilité à raison de ses propres manquements, est de nature à réduire, à hauteur de 30 %, la responsabilité encourue par ce dernier ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à bon droit que le tribunal administratif d'Orléans a retenu la responsabilité contractuelle du maître d'oeuvre dans la survenance du dommage dont la commune de Garancières-en-Drouais a demandé réparation, et a jugé que cette responsabilité devait être réduite dans la proportion susmentionnée en raison de la faute de la commune ;

Sur la garantie décennale :

7. Considérant qu'il résulte de l'instruction, en particulier du contenu des comptes-rendus de chantier rappelé par le rapport d'expertise, que les désordres sus-décrits étaient pour l'essentiel apparents à la date du 15 novembre 2001 où est intervenue la réception sans réserve des travaux en cause ; que le caractère apparent des désordres s'oppose à ce que le maître de l'ouvrage recherche la responsabilité des constructeurs sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil ; que, dès lors, la commune de Garancières-en-Drouais n'est, en tout état de cause, pas fondée à soutenir, par la voie de l'appel incident, que la responsabilité du maître d'oeuvre aurait dû être admise par les premiers juges sur le terrain de la garantie décennale ;

Sur le quantum du préjudice :

8. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que les travaux nécessaires à la remise en état de la toiture de l'église consistent en la dépose complète des tuiles, des gouttières, du faîtage, des arêtiers et des liteaux, le dressement des chevrons, la fourniture et la pose de liteaux, la repose des tuiles, la pose des gouttières en cuivre, la réfection du faîtage en tuiles neuves et la réfection des arêtiers ; que l'expert a évalué le montant de ces travaux à la somme de 130 124,52 euros TTC auxquels s'ajoutent 6 500 euros de frais de maîtrise d'oeuvre ; que si M. A a, pour sa part, fait établir un devis pour la seule reprise des tuiles glissées pour un montant nettement inférieur à celui chiffré par l'expert, il ne résulte pas de l'instruction qu'une telle intervention serait suffisante pour réparer les malfaçons dont est affectée la toiture de l'église de Garennes-en-Drouais ; que, dans ces conditions, M. A ne saurait utilement soutenir que les travaux mis à sa charge donneraient à l'ouvrage une plus-value, qu'il qualifie improprement d' " enrichissement sans cause ", dès lors qu'ils n'excèdent pas ceux qui sont nécessaires à l'exécution dans les règles de l'art des travaux prévus au marché initial ;

9. Considérant que les dommages ayant affecté l'église de la commune de Garancières-en- Drouais doivent être évalués à la date à laquelle, leur cause ayant pris fin et leur étendue étant connue, les travaux destinés à les réparer pouvaient être entrepris ; qu'en l'espèce, cette date est, au plus tard, le 28 janvier 2006, jour du dépôt du rapport d'expertise, lequel définissait avec une précision suffisante la nature et la consistance des travaux nécessaires ; que si la commune de Garancières-en-Drouais soutient qu'elle ne pourra réaliser les travaux de reprise que lorsque M. A l'aura dédommagée, elle n'établit pas avoir été dans l'impossibilité d'entreprendre les travaux une fois le rapport d'expertise remis ; qu'ainsi, elle n'est pas fondée à prétendre que le montant des travaux nécessaires à la réparation des dommages ayant affecté son immeuble devrait être actualisé sur la base de l'indice BT 01 le plus proche au jour de la décision à intervenir ;

Sur les dépens :

10. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de maintenir à la charge de M. A 70 % de la somme globale de 3 304,37 euros TTC à laquelle ont été liquidés les frais et honoraires de l'expertise, et à la charge de la commune de Garancières-en-Drouais 30 % de cette même somme ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans l'a condamné à verser à la commune de Garancières-en-Drouais une indemnité de 95 637,16 euros TTC, et que la commune de Garancières-en-Drouais n'est pas davantage fondée à demander la réformation de ce même jugement par la voie de l'appel incident ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de laisser à la charge de chacune des parties les frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Les conclusions d'appel incident présentées par la commune de Garancières-en-Drouais et ses conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Jean-Louis A et à la commune de Garancières-en-Drouais.

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N° 11NT01916


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 11NT01916
Date de la décision : 06/11/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: Mme Nathalie TIGER
Rapporteur public ?: M. MARTIN
Avocat(s) : DELAIR

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2012-11-06;11nt01916 ?
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