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20/12/2012 | FRANCE | N°11NT02273

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 20 décembre 2012, 11NT02273


Vu la requête, enregistrée le 16 août 2011, présentée pour la Fédération française de sport automobile, dont le siège est 32, avenue de New-York à Paris (75781), par Me Spinosi, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; la Fédération française de sport automobile demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 10-1426 du 14 juin 2011 par lequel le tribunal administratif de Caen a, à la demande de M. A, annulé la décision du 17 décembre 2009 de son tribunal d'appel national qui avait annulé la décision du 31 octobre 2009 du collège des commissaires spo

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Vu la requête, enregistrée le 16 août 2011, présentée pour la Fédération française de sport automobile, dont le siège est 32, avenue de New-York à Paris (75781), par Me Spinosi, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; la Fédération française de sport automobile demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 10-1426 du 14 juin 2011 par lequel le tribunal administratif de Caen a, à la demande de M. A, annulé la décision du 17 décembre 2009 de son tribunal d'appel national qui avait annulé la décision du 31 octobre 2009 du collège des commissaires sportifs établissant le classement de la finale de la coupe de France des rallyes 2009 et ordonné la rectification de ce classement ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A devant le tribunal administratif de Caen ;

3°) de mettre à la charge de M. A la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du sport ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 novembre 2012 :

- le rapport de M. Coiffet, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Degommier, rapporteur public ;

- et les observations de Me Bellamy, substituant Me Marguerie, avocat de M. A ;

1. Considérant que, lors de la seconde journée de la finale de la coupe de France des rallyes qui s'est déroulée les 30 et 31 octobre 2009 à Dunkerque, un accident impliquant le véhicule du premier concurrent a entraîné la neutralisation, après le passage des six concurrents suivants, puis l'arrêt de l'épreuve spéciale n° 14 (ES n° 14), la dernière de la course ; que le collège des commissaires sportifs a alors décidé à l'unanimité le 31 octobre au soir de ne pas prendre en compte les temps réalisés lors de l'ES n° 14, d'annuler cette épreuve et d'établir le classement final de l'épreuve à l'issue de l'épreuve spéciale n° 13, la dernière à s'être déroulée dans des conditions normales de course et de sécurité ; que le classement définitif de la coupe de France des rallyes ainsi établi a permis de déclarer M. A vainqueur et M. B second ; que sur saisine de ce dernier, le comité directeur de la Fédération française du sport automobile (FFSA) a décidé de faire appel de la décision précitée du 31 octobre 2009 auprès du tribunal d'appel national de cette fédération ; que, par une décision du 17 décembre 2009, ce tribunal, estimant que l'annulation des temps réalisés lors de l'ES n° 14 était de nature à rompre l'équité sportive, a ordonné la rectification de ce classement en tenant compte de la quatorzième épreuve spéciale et en faisant application du système de classement défini à l'article 7.5.16 du règlement standard des rallyes 2009 ; que la Fédération française de sport automobile relève appel du jugement du 14 juin 2011 par lequel le tribunal administratif de Caen a fait droit à la demande de M. A et annulé la décision précitée du 17 décembre 2009 du tribunal d'appel national ; que M. A demande à la cour d'enjoindre sous astreinte à la Fédération française du sport automobile de justifier du rétablissement du classement résultant de la décision du 31 octobre 2009 du collège des commissaires sportifs de la finale de la coupe de France des rallyes 2009 ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant, en premier lieu, que la Fédération française du sport automobile soutient que le jugement attaqué a été rendu à la suite d'une procédure irrégulière, le tribunal administratif n'ayant pas procédé à la réouverture de l'instruction après avoir pris connaissance de la note en délibéré qu'elle lui avait adressée évoquant l'incompétence territoriale du tribunal administratif de Caen ;

3. Considérant, d'une part, qu'aux termes du second alinéa de l'article R. 312-2 du code de justice administrative : " Lorsqu'il n'a pas été fait application de la procédure de renvoi prévue à l'article R. 351-3 et que le moyen tiré de l'incompétence territoriale du tribunal administratif n'a pas été invoqué par les parties avant la clôture de l'instruction de première instance, ce moyen ne peut plus être ultérieurement soulevé par les parties ou relevé d'office par le juge d'appel ou de cassation." ; que, d'autre part, lorsqu'il est saisi, postérieurement à la clôture de l'instruction et au prononcé des conclusions du rapporteur public, d'une note en délibéré émanant d'une des parties à l'instance, il appartient dans tous les cas au juge administratif d'en prendre connaissance avant la séance au cours de laquelle sera rendue la décision ; que, en dehors des hypothèses où il est tenu de rouvrir l'instruction à peine d'irrégularité de sa décision, c'est-à-dire de celles où cette note contient l'exposé soit d'une circonstance de fait dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et que le juge ne pourrait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts, soit d'une circonstance de droit nouvelle ou qu'il devrait relever d'office, le juge a toujours la faculté, dans l'intérêt d'une bonne justice, de rouvrir l'instruction et de soumettre au débat contradictoire les éléments contenus dans la note en délibéré ; qu'il est constant que la Fédération française du sport automobile n'a pas invoqué avant la clôture de l'instruction de première instance le moyen tiré de l'incompétence territoriale du tribunal administratif de Caen alors qu'il lui était loisible de le faire ; que la circonstance que ce moyen a été présenté dans une note en délibéré, qui ne contenait l'exposé d'aucune circonstance de droit nouvelle, après que le rapporteur public se fut interrogé à l'audience sur la question, demeure sans incidence sur l'application des dispositions précitées de l'article R. 312-2 du code de justice administrative ; qu'il s'ensuit que le tribunal, qui a visé la note en délibéré précitée et a admis implicitement mais nécessairement sa compétence territoriale pour connaître du litige qui lui était soumis, n'a pas, en ne rouvrant pas l'instruction, entaché son jugement d'irrégularité ;

4. Considérant, en second lieu, que pour estimer que la décision du 17 décembre 2009 du tribunal d'appel national de la Fédération française du sport automobile était au nombre des actes soumis au contrôle du juge administratif, les premiers juges ont rappelé précisément les principes qui gouvernent la question du caractère contestable des actes pris tant par les arbitres et les juges des compétitions à caractère sportif que par les organes des fédérations en cette matière ainsi que la nature et la portée de la décision contestée ; que le tribunal, a par suite, suffisamment motivé son jugement sur ce point ;

Sur le bien fondé du jugement attaqué :

5. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 14 D de la réglementation générale de la Fédération française du sport automobile : " Le comité directeur FFSA peut faire appel de toutes décisions du Collège des Commissaires Sportifs lorsque vient à se produire ou à se révéler un fait nouveau ou un élément inconnu des Commissaires sportifs, de nature à faire naître un doute " ; qu'aux termes de l'article 4 du règlement concernant le tribunal d'appel national : " (...) Le Tribunal pourra décider que la décision contre laquelle il a été fait appel soit annulée et, le cas échéant la pénalité diminuée ou augmentée (...) " ; qu'en application de l'article 7.5.16 du règlement des rallyes, il appartient au collège des commissaires sportifs de décider si, en cas d'interruption d'une épreuve spéciale, un classement sera néanmoins établi en affectant à tous les équipages touchés par les circonstances de l'interruption un temps forfaitaire selon l'une des deux modalités définies par cet article ;

6. Considérant que pour annuler la décision contestée du tribunal d'appel national faisant application des dispositions de l'article 7.5.16 du règlement national standard des rallyes 2009, le tribunal administratif a estimé que le motif tiré de ce que cette instance s'était déclarée convaincue que le mauvais temps réalisé par M. A, à l'épreuve spéciale n° 14, procédait d'une faute de conduite et non d'une initiative en vue de venir en aide au concurrent victime de l'accident, ne reposait pas sur " un fait nouveau ou un élément inconnu des commissaires sportifs " de nature à remettre en cause la décision légalement prise par le collège des commissaires sportifs ;

7. Considérant que si, lorsque le juge administratif connaît des actes pris tant par les

arbitres et les juges des compétitions à caractère sportif que par les organes des fédérations en cette matière, ni l'application des dispositions techniques propres à chaque discipline ni l'appréciation des performances des participants ne peuvent être discutées devant lui, il lui appartient cependant d'exercer son contrôle sur le respect des principes et des règles qui s'imposent aux auteurs de tout acte accompli dans l'exercice d'une mission de service public ; qu'il en résulte que si M. A ne pouvait utilement invoquer devant le juge administratif des moyens tendant à contester l'application par le tribunal d'appel national de la Fédération française du sport automobile des dispositions de l'article 7.5.16 du règlement national standard des rallyes 2009 relatif aux différentes modalités de classement en cas d'interruption d'une épreuve spéciale, lesquelles se rattachent à l'application des règles techniques propres à la discipline sportive en cause, il pouvait, en revanche, utilement invoquer les vices de forme et de procédure susceptibles d'affecter la décision du tribunal d'appel national du 17 décembre 2009 et notamment la circonstance que les conditions permettant la saisine de cette instance d'appel n'étaient pas réunies, ces moyens relevant des principes et des règles qui s'imposent aux auteurs de tout acte accompli dans l'exercice d'une mission de service public ;

8. Considérant, d'une part, qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que la Fédération française du sport automobile n'est pas fondée à soutenir que la décision du 17 décembre 2009 du tribunal d'appel national échappait dans sa totalité au contrôle du juge administratif ;

9. Considérant, d'autre part, qu'il ressort des déclarations du directeur de course et du président du collège des commissaires sportifs devant le tribunal d'appel national que sept voitures seulement, après qu'un accident eut été subi par le premier concurrent, ont pris le départ de l'épreuve spéciale n° 14, au cours de laquelle devaient s'affronter au total cent-douze concurrents ; que la décision du collège des commissaires sportifs du 31 octobre 2009 d'établir le classement en litige sans tenir compte des résultats réels des six candidats qui s'étaient élancés après le premier concurrent ni attribuer un temps forfaitaire aux autres concurrents a été motivée par l'existence de temps anormaux des concurrents ayant fini l'épreuve et par le fait qu'ils n'avaient pu concourir dans des conditions normales du fait de la survenance de l'accident subi par le premier concurrent ; qu'il est constant que cette décision a été prise par le collège des commissaires sportifs à l'issue d'une réunion au cours de laquelle a été portée à sa connaissance par la direction de course la contestation d'un autre concurrent, M. B, appuyée sur plusieurs témoignages et mettant en cause le comportement de M. A pendant la course ; que si le comité directeur de la Fédération saisi par M. B a, le 25 novembre 2009 décidé de faire appel de la décision du collège des commissaires sportifs auprès du tribunal national d'appel, il ne ressort toutefois d'aucun élément du dossier que cet appel aurait reposé sur " des faits nouveaux ou un élément inconnu des Commissaires sportifs, de nature à faire naître un doute " qui lui auraient été communiqués par M. B, alors que seuls de tels éléments peuvent fonder, en vertu des dispositions précitées du premier alinéa de l'article 14 D de la réglementation générale de la Fédération française du sport automobile, une saisine du tribunal d'appel ; que M. B a d'ailleurs lui-même précisé que l'ensemble des faits qu'il imputait à M. A avait été rapporté au collège des commissaires sportifs dès le 31 octobre 2009 au soir ; que c'est ainsi à tort que le tribunal d'appel national s'est estimé régulièrement saisi par le comité des directeurs ; que sa décision du 17 décembre 2009 est, par suite, entachée d'illégalité ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la Fédération française du sport automobile n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a fait droit à la demande de M. A et annulé la décision du 17 décembre 2009 du Tribunal d'appel national ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

11. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative :

" Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ; que le présent arrêt, qui confirme l'annulation de la décision du 17 décembre 2009 du tribunal d'appel national de la Fédération française du sport automobile, a pour effet de rétablir le classement résultant de la décision du 31 octobre 2009 du collège des commissaires sportifs de la finale de la coupe de France des rallyes 2009 ; que, par suite, les conclusions de M. A tendant à ce qu'il soit enjoint à la Fédération française du sport automobile de rétablir ce classement sont sans objet ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de

M. A qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la Fédération française du sport automobile demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de la Fédération française du sport automobile le versement à

M. A de la somme de 1 500 euros sur le fondement des mêmes dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la Fédération française du sport automobile est rejetée.

Article 2 : La Fédération française du sport automobile versera à M. A la somme de 1500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par M. A devant la cour est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la Fédération française du sport automobile et à M. Arnaud A.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 11NT02273
Date de la décision : 20/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

63-05-01-04 Spectacles, sports et jeux. Sports. Fédérations sportives. Organisation des compétitions.


Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: M. Olivier COIFFET
Rapporteur public ?: M. DEGOMMIER
Avocat(s) : MARGUERIE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2012-12-20;11nt02273 ?
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