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06/06/2013 | FRANCE | N°12NT00823

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 06 juin 2013, 12NT00823


Vu, enregistrée au greffe de la cour le 26 mars 2012, la décision du 21 mars 2012 par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi en cassation présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement, a annulé l'arrêt n° 09NT01729 du 29 septembre 2010 de la cour administrative d'appel de Nantes ayant annulé le jugement n° 08-1831 du tribunal administratif de Caen du 7 mai 2009 et prononcé la décharge des cotisations à l'impôt sur les sociétés et sa contribution additionnelle, à l'imposition for

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Vu, enregistrée au greffe de la cour le 26 mars 2012, la décision du 21 mars 2012 par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi en cassation présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement, a annulé l'arrêt n° 09NT01729 du 29 septembre 2010 de la cour administrative d'appel de Nantes ayant annulé le jugement n° 08-1831 du tribunal administratif de Caen du 7 mai 2009 et prononcé la décharge des cotisations à l'impôt sur les sociétés et sa contribution additionnelle, à l'imposition forfaitaire annuelle des sociétés et à la taxe d'apprentissage auxquelles la commune de Cherbourg-Octeville avait été assujettie au titre des années 2004, 2005 et 2006 et de la participation des employeurs à l'effort de construction qui lui avait été réclamée au titre des années 2004 et 2005 à raison de l'exploitation du port de plaisance Chantereyne ainsi que des pénalités dont ces impositions et participations ont été assorties ;

Vu la requête, enregistrée le 15 juillet 2009, présentée pour la commune de Cherbourg-Octeville, dont le siège est place de la République à Cherbourg (50100), par Me Bresson, avocat au barreau de Neuilly-sur-Seine ; la commune de Cherbourg-Octeville demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 08-1831 du 7 mai 2009 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations à l'impôt sur les sociétés et à sa contribution additionnelle, à l'imposition forfaitaire annuelle des sociétés, et à la taxe d'apprentissage auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2004, 2005 et 2006 et de la participation des employeurs à l'effort de construction qui lui a été réclamée au titre des années 2004 et 2005 à raison de l'activité du port de plaisance Chantereyne, qu'elle exploite en régie, ainsi que des pénalités dont ces impositions et participations ont été assorties ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

Elle soutient que la référence aux décisions ministérielles ayant instauré l'exonération

d'impôts directs au bénéfice des collectivités publiques, visées par la doctrine administrative 4 H 1352, a pour seul objet d'expliquer l'origine du régime dérogatoire litigieux et de rappeler le contexte dans lequel ces décisions sont intervenues, de sorte que cette doctrine, dont elle a fait une stricte application littérale, n'a pas pour effet d'en limiter l'application aux seuls ports détruits pendant la Seconde Guerre mondiale ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré le 8 février 2010, le mémoire en défense, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient :

- que la doctrine 4 H 1352 n'instaure pas un régime d'exonération général ; que le contexte historique qui lui a donné naissance doit conduire à considérer qu'est exclue du champ d'application de cette exonération l'activité régulière d'exploitation d'un port de plaisance dont les installations ont été "reconstituées", ou même qu'elle est devenue caduque quoique non expressément rapportée ;

- que la situation du port de plaisance en cause qui, créé au début des années 70, est aujourd'hui l'un des plus importants du littoral atlantique avec ses 1 300 places, n'est pas en adéquation avec l'activité portuaire commerciale à laquelle le gouvernement souhaitait venir en aide à la fin de la Seconde Guerre mondiale en instaurant le régime dérogatoire dont se prévaut la commune de Cherbourg-Octeville ;

- que l'identité entre la liste des activités portuaires mentionnées au point 3 de la documentation de base 4 H 1352 et celles énumérées par la documentation de base 6 E 131, qui commente les dispositions de l'article 1449 du code général des impôts, aux termes desquelles sont exonérés de taxe professionnelle les ports gérés par des collectivités locales à l'exception des ports de plaisance, démontre que la première de ces doctrines ne peut viser que les ports de commerce ;

Vu, enregistré le 29 juin 2010, le mémoire complémentaire, présenté pour la commune de Cherbourg-Octeville, qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;

Elle soutient en outre que la doctrine invoquée, en ce qu'elle prévoit une exception au principe d'imposition posé par l'article 165 de l'annexe IV au code général des impôts qui n'a pas été modifié depuis son entrée en vigueur, n'est pas frappée de caducité et a même été mise à jour au 1er mars 1995 ;

Vu la lettre en date du 19 août 2010 par laquelle le ministre informe la cour que le dernier mémoire de la commune de Cherbourg-Octeville n'appelle aucune observation de sa part ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le code des ports maritimes ;

Vu le décret n° 71-827 du 1er octobre 1971 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 mai 2013 :

- le rapport de Mme Gélard, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Degommier, rapporteur public ;

1. Considérant que la commune de Cherbourg-Octeville est, depuis 1973, concessionnaire de l'Etat pour l'exploitation de l'ensemble des installations et outillages du port de plaisance de Chantereyne situé sur son territoire ; qu'elle a fait l'objet d'impositions au titre de l'impôt sur les sociétés et des contributions associées pour les années 2004, 2005 et 2006 au motif qu'elle entrait, pour ces trois années, dans le champ d'application des dispositions combinées des articles 206 et 1654 du code général des impôts et de l'article 165 de l'annexe IV à ce code et devait, en conséquence, être assujettie aux impôts directs ; que la commune a contesté ces cotisations devant le tribunal administratif de Caen en soutenant qu'en application de la documentation administrative n° 4 H-1352 dont elle invoquait le bénéfice elle était en droit d'être exonérée d'impôts directs pour cette activité ; que le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande par un jugement du 7 mai 2009 ; que la commune de Cherbourg-Octeville fait appel de ce jugement ;

2. Considérant qu'aux termes du second alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : "Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente" ; que si ces dispositions instituent une garantie contre les changements de doctrine de l'administration, qui permet aux contribuables de se prévaloir des énonciations contenues dans les notes ou les instructions publiées, qui ajoutent à la loi ou la contredisent, c'est à la condition que les intéressés entrent dans les prévisions de la doctrine, appliquée littéralement, résultant de ces énonciations ;

3. Considérant qu'aux termes du deuxième paragraphe de la documentation administrative n° 4 H-1352 intitulée "chambres de commerce maritimes, ports autonomes, municipalités concessionnaires d'outillage public dans les ports maritimes", dans sa version mise à jour au 1er mars 1995 : "En vue de faciliter la reconstruction des installations portuaires détruites par fait de guerre, des décisions ministérielles successives ont exonéré d'impôts directs (...) les municipalités concessionnaires d'outillage public propriété de l'Etat dans les ports maritimes ainsi que les entreprises qu'elles ont pu se substituer pour l'exploitation de cet outillage." ; que si cette documentation constitue une interprétation formelle des dispositions du 1 de l'article 206 du code général des impôts aux termes desquelles "sont passibles de l'impôt sur les sociétés (...) les organismes (...) des communes (...) se livrant à une exploitation ou à des opérations de caractère lucratif", il résulte de ses termes mêmes que seules les concessions d'outillage public dans les ports maritimes entrent dans ses prévisions ; que si un port de plaisance est susceptible de constituer un port maritime, il résulte des dispositions du décret du 1er octobre 1971, relatif aux concessions d'outillage public dans les ports maritimes et fluviaux ainsi qu'aux concessions des ports de plaisance et modifiant le décret n° 69-140 du 6 février 1969 relatif aux concessions d'outillage public dans les ports maritimes, que la seconde catégorie de concessions visée par ce décret est distincte de la première et ne saurait, ainsi, entrer dans les prévisions de la doctrine précitée appliquée littéralement ; que, dès lors, la commune de Cherbourg-Octeville ne peut utilement invoquer le bénéfice de la documentation administrative n° 4 H-1352, qui ne lui est pas applicable, pour contester les impositions litigieuses ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Cherbourg-Octeville, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Cherbourg-Octeville est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Cherbourg-Octeville et au ministre de l'économie et des finances.

Délibéré après l'audience du 16 mai 2013, où siégeaient :

- Mme Perrot, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- Mme Gélard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 6 juin 2013.

Le rapporteur,

V. GÉLARD Le président,

I. PERROT

Le greffier,

A. MAUGENDRE

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 12NT00823


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 12NT00823
Date de la décision : 06/06/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: Mme Valérie GELARD
Rapporteur public ?: M. DEGOMMIER
Avocat(s) : BRESSON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2013-06-06;12nt00823 ?
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