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19/07/2013 | FRANCE | N°12NT01602

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 19 juillet 2013, 12NT01602


Vu la requête, enregistrée le 13 juin 2012, présentée pour M. B... D..., demeurant..., par Me Guerekobaya, avocat au barreau d'Orléans ; M. D... demande à la cour ;

1°) d'annuler le jugement n° 1200512 du 15 mai 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 octobre 2011 du préfet du Loiret portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Loiret de lui délivrer un titre de séjour

portant la mention " salarié " ou, à défaut, de réexaminer sa situation et de lui déliv...

Vu la requête, enregistrée le 13 juin 2012, présentée pour M. B... D..., demeurant..., par Me Guerekobaya, avocat au barreau d'Orléans ; M. D... demande à la cour ;

1°) d'annuler le jugement n° 1200512 du 15 mai 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 octobre 2011 du préfet du Loiret portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Loiret de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " ou, à défaut, de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 500 euros par jours de retard dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) d'enjoindre au préfet du Loiret de lui restituer son passeport sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter du jugement à intervenir ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- il n'a jamais été informé de l'envoi en lettre recommandée avec accusé de réception de l'arrêté du 13 octobre 2011 du préfet du Loiret pris à son encontre ; rien ne prouve qu'il a été destinataire de cet envoi n'ayant jamais reçu un avis de passage alors qu'il n'avait pas changé d'adresse jusqu'au mois de février 2012 ; l'arrêté contesté lui a été remis le 19 janvier 2012 ; sa requête enregistrée au greffe du tribunal administratif d'Orléans le 10 février 2012 était bien recevable ;

- la décision portant refus de séjour est entachée d'un vice de procédure : il n'a pas été convoqué par les services de la préfecture ;

- elle n'est pas suffisamment motivée au regard des dispositions de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article 19 de la directive du 25 novembre 2003 ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-4-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues ; s'il était installé en Espagne avec sa famille depuis 2003, il venait régulièrement en France où son épouse a toute sa famille qui y réside ; il dispose d'une promesse d'embauche et c'est pourquoi il a décidé de venir s'installer en France avec toute sa famille ; il est porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale, une atteinte disproportionnée ;

- le fait pour l'administration de refuser à un gérant de société le libre choix de procéder à une embauche comme celle de M. D... constitue une atteinte à la liberté de gestion ;

- l'avis donné par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi est illégal ; l'appréciation de l'administration ne peut se fonder exclusivement sur la profession considérée ;

- le préfet en décidant de refuser le séjour à M. D... a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle et familiale de ce dernier ; la situation de la famille de M. D... est conforme aux dispositions de l'article 16 de la directive du 25 novembre 2003 ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité de la décision de refus de séjour ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article 12 de la directive du 25 novembre 2003 ;

- la décision fixant le pays de renvoi est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- la rétention du passeport de M. D... par les services de la préfecture du Loiret constitue une violation des dispositions de l'article L. 611-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; seuls les fonctionnaires de police et les unités de gendarmerie sont habilités à retenir les passeports des étrangers en situation irrégulière ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 13 septembre 2012, présenté pour le préfet du

Loiret, par MeC..., qui conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de M. D... le versement d'une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Le préfet soutient que :

- comme l'ont relevé les premiers juges, la requête présentée par l'intéressé devant le tribunal administratif d'Orléans était irrecevable ;

- son arrêté n'est pas entaché d'un vice de procédure et est suffisamment motivé en fait et en droit ;

- l'arrêté contesté en tant qu'il porte refus de séjour n'a pas méconnu les dispositions de l'article 19 de la directive communautaire du 25 novembre 2003 ;

- les moyens tirés de la violation des dispositions des articles L. 313-4-1 5° et L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne sont pas fondés ;

- il n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; le requérant n'est entré en France qu'en décembre 2010 pour s'y établir avec sa famille alors qu'il bénéficie d'une carte de résident délivrée par les autorités espagnoles et valable jusqu'au 21 avril 2013 ; il a vécu avec sa famille en Espagne depuis l'année 2003 ; il n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait établi en France le centre de ses intérêts privés et familiaux ;

- le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision portant refus de séjour en ce qu'il est dirigé contre la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut être que rejeté ;

- le moyen tiré de la violation de l'article 12 de la directive CE/2003/12 est inopérant et doit être rejeté ;

- le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français en ce qu'il est dirigé contre la décision fixant le pays de renvoi ne peut être que rejeté ;

- il pouvait légalement procéder à la retenue du passeport du requérant ; il n'y a pas lieu d'en ordonner la restitution à M. D... qui s'est vu notifier les conditions dans lesquelles il pourra en retrouver la disposition ;

Vu le mémoire, enregistré le 29 octobre 2012, présenté pour M. D... tendant aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens qu'il précise ;

Il soutient en outre que :

- la décision du préfet du Loiret portant refus de séjour lui a été notifiée alors qu'il habitait encore à son ancienne adresse où il recevait toutes ses correspondances ; s'il n'a pas accusé réception de la décision qui lui a été envoyée ce n'est ni parce qu'il aurait déménagé et encore moins qu'il aurait refusé de réceptionner une décision dont il ignorait la teneur ; il n'a appris l'existence de la décision rejetant sa demande que le 19 janvier 2012 ;

- aucun traitement discriminatoire ne pouvait être relevé dès lors que la SARL AMANE ne lui avait nullement réservé une situation privilégiée ; les autres salariés n'étaient pas bouchers ;

- il a été victime d'un dysfonctionnement des services administratifs de la préfecture du Loiret qui ont mis presqu'un an avant de rejeter sa demande de délivrance de carte de séjour ;

- il remplissait les conditions pour se voir délivrer le titre de séjour sollicité ;

- lui et sa famille sont venus régulièrement séjourner en France, son épouse y ayant toute sa famille ; ayant reçu la proposition d'embauche de la société AMANE, c'est tout naturellement qu'il a décidé de s'installer en France avec sa famille ;

- le préfet a méconnu les dispositions de l'article 3 de l'accord franco marocain du 9 octobre 1987 ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas motivée au regard des dispositions de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public et des dispositions de l'article 12 alinéa 1 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 juin 2013 :

- le rapport de M. Madelaine, faisant fonction de premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Martin rapporteur public ;

1. Considérant que M. D..., ressortissant marocain, relève appel du jugement du 15 mai 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 octobre 2011 du préfet du Loiret portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de retour ;

Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté du 13 octobre 2011 :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 776-2 du code de justice administrative :

" I.- Conformément aux dispositions du I de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la notification d'une obligation de quitter le territoire français avec délai de départ volontaire fait courir un délai de trente jours pour contester cette obligation ainsi que les décisions relatives au séjour, au délai de départ volontaire, au pays de renvoi et à l'interdiction de retour notifiées simultanément. (...) " ;

3. Considérant que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté la demande présentée par M. D... contre l'arrêté préfectoral litigieux pour cause de tardiveté, en considérant que la lettre recommandée portant notification dudit arrêté ayant été retournée aux services préfectoraux avec la mention " destinataire non identifiable ", alors que le requérant n'avait pas changé d'adresse ni indiqué un éventuel changement de domicile, la notification de ladite décision devait être regardée comme ayant été régulièrement effectuée ; que, dans sa requête d'appel, M. D... soutient qu'il n'avait pas changé d'adresse à la date de la notification de l'arrêté contesté et qu'en l'absence de remise d'un avis de passage, la notification de la décision litigieuse, dont il n'a pas eu connaissance, n'a pu déclencher le délai de recours ; que, cependant, la notification en cause a été envoyée à l'adresse que le requérant avait indiquée aux services compétents comme étant la sienne lors du dépôt de sa demande de titre de séjour et, dans ces conditions, doit être regardée comme régulièrement effectuée ; qu'ainsi, la lettre recommandée adressée le 14 octobre 2011 par la préfecture du Loiret ayant été réceptionnée en retour par le service expéditeur le 17 octobre 2011 sans avoir pu être distribuée faute d'identification du destinataire, la requête de première instance, enregistrée au greffe du tribunal administratif d'Orléans le 10 février 2012, a été formée après l'expiration du délai de trente jours imparti par l'article R. 776-2 du code de justice administrative précité ; qu'il suit de là que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont regardé sa requête dirigée contre l'arrêté du préfet du Loiret du 13 octobre 2011 comme tardive ;

Sur les conclusions dirigées contre la décision du 19 janvier 2012 de procéder à la rétention du passeport de M. D... :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative compétente, les services de police et les unités de gendarmerie sont habilités à retenir le passeport ou le document de voyage des personnes de nationalité étrangère en situation irrégulière . Ils leur remettent en échange un récépissé valant justification de leur identité et sur lequel sont mentionnées la date de retenue et les modalités de restitution du document retenu. " ; qu'aux termes de l'article R. 611-41-1 dudit code : " L'autorité administrative habilitée à retenir le passeport ou le document de voyage d'un étranger en situation irrégulière en application de l'article L. 611-2 est le préfet de département et, à Paris, le préfet de police " ;

5. Considérant que, contrairement à ce que soutient M. D..., le préfet du Loiret était compétent pour procéder à la rétention du passeport, laquelle est intervenue régulièrement dès lors qu'un récépissé lui a bien été délivré par les services de la préfecture du Loiret, ainsi que cela ressort des pièces du dossier ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

7. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de la

requête de M. D..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de l'intéressé tendant à ce qu'il soit enjoint, sous astreinte, au préfet du Loiret de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " ou à défaut, que sa situation soit réexaminée, et de le munir d'une autorisation provisoire de séjour, ainsi que celles tendant à ce qu'il soit ordonné au préfet de lui restituer son passeport, ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à M. D... de la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'affaire, de mettre à la charge du requérant le versement de la somme demandée par le préfet du Loiret au titre des mêmes frais ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du préfet du Loiret tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D...et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera transmise au préfet du Loiret.

Délibéré après l'audience du 28 juin 2013, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- M. Madelaine, faisant fonction de premier conseiller,

- M. Gauthier, premier conseiller.

Lu en audience publique le 19 juillet 2013.

Le rapporteur,

B. MADELAINELe président,

L. LAINÉ

Le greffier,

M. A...

La république mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 12NT01602 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 12NT01602
Date de la décision : 19/07/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Bernard MADELAINE
Rapporteur public ?: M. MARTIN
Avocat(s) : GUEREKOBAYA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2013-07-19;12nt01602 ?
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