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24/01/2014 | FRANCE | N°12NT02965

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 24 janvier 2014, 12NT02965


Vu la requête, enregistrée le 16 novembre 2012, présentée pour Mme B... F..., demeurant..., par Me G... ; Mme F... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1004011 du 13 mars 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 26 octobre 2010 du préfet du Loiret portant refus de titre de séjour et invitation à quitter le territoire ;

2°) d'annuler cette décision ;

3°) d'enjoindre au préfet du Loiret, sous astreinte, de lui délivrer dans le délai de quinze jours à compter de la notif

ication de l'arrêt à intervenir, une carte de séjour temporaire portant mention " vie ...

Vu la requête, enregistrée le 16 novembre 2012, présentée pour Mme B... F..., demeurant..., par Me G... ; Mme F... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1004011 du 13 mars 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 26 octobre 2010 du préfet du Loiret portant refus de titre de séjour et invitation à quitter le territoire ;

2°) d'annuler cette décision ;

3°) d'enjoindre au préfet du Loiret, sous astreinte, de lui délivrer dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, une carte de séjour temporaire portant mention " vie privée et familiale " ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que celle-ci renonce à percevoir la contribution versée par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;

elle soutient que :

- la décision contestée méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313- 11 du code

de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle est venue en France pour rejoindre M. E... avec qui elle entretenait déjà des liens alors qu'elle avait divorcé en Turquie le 30 mars 2007 et que ce dernier avait lui-même initié une procédure de divorce ;

- si elle a déclaré une adresse différente de celle de M. E..., c'est sur des conseils peu avisés de son entourage alors que sa fille fréquente l'école de Sully-sur-Loire et qu'une enfant est née de sa relation avec M. E..., laquelle vit au domicile du couple avec l'ensemble de la fratrie de cette famille recomposée ;

- la recomposition de cette cellule familiale serait impossible en Turquie ;

- la cour de céans a jugé dans un sens favorable aux requérants dans un dossier similaire ;

- la décision en litige méconnait les stipulations de l'article 8 la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 1er février 2013, présenté pour le préfet du Loiret qui conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme F... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

le préfet fait valoir que :

- la vie familiale dont se prévaut la requérante présente un caractère confus et n'est pas démontrée par les seules attestations versées aux débats qui ne permettent pas de justifier d'une communauté de vie ;

- Mme F... a déclaré dans un courrier du 2 mars 2009 qu'elle ne voyait M. E... que de temps en temps et le certificat de scolarisation de sa fille à Sully-sur-Loire est insuffisant pour démontrer qu'elle vit avec M. E... ;

- à la supposer établie la communauté de vie est très récente ;

- la requérante a vécu jusqu'à l'âge de 26 ans en Turquie et n'établit pas être isolée dans ce pays ;

Vu la décision du 15 octobre 2012 du président de la section administrative du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes admettant Mme F... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 janvier 2014 :

- le rapport de M. Auger, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public ;

1. Considérant que Mme F..., ressortissante turque, relève appel du jugement du 13 mars 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet du Loiret du 26 octobre 2010 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire français ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant que Mme F... est entrée irrégulièrement sur le territoire français le 1er septembre 2007 accompagnée de sa fille mineureA..., née le 3 janvier 2005 ; qu'elle a fait l'objet le 7 mai 2009 d'un arrêté du préfet du Loiret portant refus de séjour avec obligation de quitter le territoire mais a sollicité la régularisation de sa situation administrative en faisant valoir qu'elle entretenait une relation avec M. D... E..., ressortissant turc, titulaire d'une carte de résident et qu'une enfant, née le 21 juin 2010, était issue de cette union ; que, par la décision contestée du 26 octobre 2010, le préfet du Loiret lui a opposé un refus fondé sur le caractère récent de son entrée en France et la faible durée de la vie commune avec son compatriote ;

3. Considérant que les pièces versées au dossier permettent toutefois d'établir le caractère suffisamment stable et durable de la relation alléguée au moment où la décision en litige a été prise ; qu'en particulier, trois certificats de scolarité attestent que l'enfant A...a été scolarisée en classe de maternelle à compter du mois de septembre 2009 à l'école de Sully-sur-Loire, commune de résidence de M. E..., qu'un médecin traitant installé dans cette même commune atteste y suivre médicalement l'intéressée depuis le 17 novembre 2009 et que des attestations produites en appel émanant de voisines et d'un agent territorial spécialisé des écoles maternelles (ATSEM) font état de la présence de l'intéressée à Sully-sur-Loire depuis plusieurs années, la dernière précisant notamment que Mme F... venait dès l'année 2007 chercher à l'école une enfant de M. E... issue de son mariage précédent ; que l'effectivité et l'ancienneté de cette relation ne sont ainsi pas suffisamment remises en cause par le seul courrier adressé le 2 mars 2009 au préfet du Loiret par lequel l'intéressée a déclaré une adresse à Romorantin-Lanthenay et indiquait ne se rendre chez M. E... qu'épisodiquement ; qu'au regard de l'ensemble de ces éléments, la décision du préfet du Loiret du 26 octobre 2010 a porté au droit de Mme F... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts dans lesquels elle était prise ; que le préfet a ainsi méconnu tant les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant que les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme F... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet du Loiret du 26 octobre 2010 refusant de lui délivrer un titre de séjour ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

5. Considérant que l'exécution du présent arrêt implique nécessairement, eu égard au motif d'annulation retenu et en l'absence de changement significatif dans la situation de la requérante, qu'il soit enjoint au préfet du Loiret de délivrer à Mme F... une carte de séjour temporaire au titre de la vie privée et familiale ; qu'il y a lieu d'enjoindre au préfet de procéder à cette délivrance dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt, sans qu'il y ait lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte et, dans l'attente, de lui accorder une autorisation provisoire de séjour ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant qu'il n'y a pas a lieu de mettre à la charge de Mme F..., qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme réclamée par le préfet du Loiret à ce titre ; qu'il y a lieu, en revanche et dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante, la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme F... et non compris dans les dépens sous réserve que son avocat renonce à percevoir la contribution versée par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif d'Orléans n° 1004011 du 13 mars 2012 et la décision du 26 octobre 2010 du préfet du Loiret sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Loiret de délivrer à Mme F..., dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, une carte de séjour temporaire au titre de la vie privée et familiale et de lui accorder, dans l'attente de sa décision, une autorisation provisoire de séjour.

Article 3 : L'Etat versera à Me G...une somme de 1 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me G... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...F..., au ministre de l'intérieur et à Me G....

Une copie en sera adressée au préfet du Loiret.

Délibéré après l'audience du 6 janvier 2014, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Aubert, président-assesseur,

- M. Auger, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 janvier 2014.

Le rapporteur,

P. AUGERLe président,

L. LAINÉ

Le greffier,

M. C...

La république mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 12NT02965


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 12NT02965
Date de la décision : 24/01/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Paul AUGER
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : GREFFARD-POISSON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-01-24;12nt02965 ?
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