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14/03/2014 | FRANCE | N°13NT02865

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 14 mars 2014, 13NT02865


Vu la requête, enregistrée le 9 octobre 2013, présentée pour Mme E... D... épouse F..., demeurant..., par Me Bressot, avocat au barreau de Rouen ; Mme F... G...ssdemande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 11-9867 du 19 juillet 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 5 avril 2011 du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration rejetant sa demande de naturalisation et de la décision du 16 août 2011 rejetant son recours gracieux ;

2°) d'annu

ler, pour excès de pouvoir, ces décisions ;

3°) de faire droit à sa demand...

Vu la requête, enregistrée le 9 octobre 2013, présentée pour Mme E... D... épouse F..., demeurant..., par Me Bressot, avocat au barreau de Rouen ; Mme F... G...ssdemande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 11-9867 du 19 juillet 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 5 avril 2011 du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration rejetant sa demande de naturalisation et de la décision du 16 août 2011 rejetant son recours gracieux ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ces décisions ;

3°) de faire droit à sa demande de naturalisation ;

4°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de réexaminer sa demande ;

elle soutient que :

- les renseignements défavorables recueillis concernent le comportement de son époux et non le sien ; elle a subi la relation adultérine qu'a entretenue celui-ci à l'étranger ; elle produit une attestation émanant de la femme avec laquelle son époux a eu d'autres enfants établissant que ce dernier n'a jamais eu de vie commune avec cette dernière et qu'il en est séparé ; la circonstance que son mari verse des pensions alimentaires aux enfants nés de sa relation extraconjugale ne caractérise pas l'existence d'une cellule familiale ;

- elle est parfaitement insérée dans la société française ; elle vit en France depuis plus de 25 ans et y a travaillé avant d'avoir d'importants problèmes de santé ;

- ses enfants et son conjoint ont la nationalité française ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense enregistré le 11 décembre 2013, présenté par le ministre de l'intérieur qui conclut au rejet de la requête ;

il fait valoir que :

- la situation de polygamie de fait est ici caractérisée par la naissance alternée d'enfants issus d'unions différentes ainsi que par la prise en charge effective de ceux-ci ;

- pour de plus amples développements des motifs justifiant sa décision, il se réfère à ses écritures de première instance ;

- il n'appartient pas au juge administratif de se substituer à l'administration pour accorder la nationalité française ;

Vu la décision du 5 décembre 2013 par laquelle la section administrative du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes a accordé à Mme F... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, relative à l'aide juridique ;

Vu le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991, portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 modifié, relatif aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité française ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 février 2014 :

- le rapport de M. Pérez, président-rapporteur ;

- et les conclusions de M. Pouget, rapporteur public ;

1. Considérant que Mme F..., de nationalité sénégalaise, interjette appel du jugement du 19 juillet 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 5 avril 2011 du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration rejetant sa demande de naturalisation et de la décision du 16 août 2011 rejetant son recours gracieux ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 21-15 du code civil : " Hors le cas prévu à l'article 21-14-1, l'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger " ; qu'aux termes de l'article 48 du décret susvisé : " Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d 'accorder la naturalisation ou la réintégration dans la nationalité sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions. Ce délai une fois expiré ou ces conditions réalisées, il appartient au postulant, s'il le juge opportun, de formuler une nouvelle demande. Ces décisions motivées (...) sont notifiées à l'intéressé dans les délais fixés par l'article 21-25-1 du code civil " ; qu'en vertu de ces dispositions, il appartient au ministre chargé des naturalisations de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la naturalisation ou la réintégration dans la nationalité française à l'étranger qui la sollicite ; que, dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte les renseignements défavorables recueillis sur le comportement du postulant ;

3. Considérant que, pour rejeter la demande de naturalisation présentée par Mme F..., le ministre en charge des naturalisations a retenu que cette dernière vivait avec un conjoint bigame, M. B... F..., lequel a eu entre 1991 et 2001 neuf enfants issus en alternance de sa relation avec elle et d'une autre relation avec Mme A...C... ;

4. Considérant toutefois qu'il ressort des pièces du dossier que l'époux de Mme F... n'a contracté qu'un seul mariage le 6 janvier 1979 et vit en France avec cette dernière ; que la seule circonstance qu'il a entretenu depuis plusieurs années une relation extraconjugale avec une compatriote sénégalaise résidant dans ce pays, dont sont issus quatre enfants et avec laquelle il n'a pas eu de vie commune, n'établit pas l'existence d'une situation de bigamie, alors même que M. et Mme F... ont déclaré ces enfants fiscalement à leur charge ; que, par, suite, c'est à tort que le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration s'est fondé sur ce motif pour rejeter la demande de naturalisation de Mme F... ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme F... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Considérant qu'il n'appartient pas au juge administratif de se substituer à l'administration pour accorder la nationalité française ; que, par suite, les conclusions de l'intéressée tendant à ce que la cour lui attribue la nationalité française ne peuvent qu'être rejetées ; que le présent arrêt implique en revanche nécessairement que le ministre de l'intérieur statue de nouveau sur la demande de naturalisation présentée par Mme F... ; ; qu'il y a lieu, par suite, d'enjoindre au ministre de statuer sur la demande de naturalisation de l'intéressée, dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement susvisé du 19 juillet 2013 du tribunal administratif de Nantes et les décisions des 5 avril et 16 août 2011 du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur de réexaminer la demande de naturalisation de Mme F... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme. F... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... D... épouse F...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 18 février 2014, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- M. Sudron, président-assesseur,

- Mme Buffet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 14 mars 2014.

L'assesseur le plus ancien

dans l'ordre du tableau,

A. SUDRON Le président-rapporteur,

A. PÉREZ

Le greffier,

S. BOYÈRE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 13NT028652

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N° 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 13NT02865
Date de la décision : 14/03/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Alain PEREZ
Rapporteur public ?: M. POUGET
Avocat(s) : SCP BRESSOT BRESSON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-03-14;13nt02865 ?
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