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21/03/2014 | FRANCE | N°13NT01743

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 21 mars 2014, 13NT01743


Vu la requête, enregistrée le 17 juin 2013, présentée pour M. A... C..., demeurant à..., par Me Hardy, avocat au barreau de Tours ; M. C... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1300309 du 23 mai 2013 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 8 janvier 2013 par lesquelles le préfet d'Indre-et-Loire a rejeté sa demande de délivrance de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours suivant la notification de la décision et a décidé qu'à l'expirat

ion de ce délai il pourra être reconduit d'office à la frontière à destinatio...

Vu la requête, enregistrée le 17 juin 2013, présentée pour M. A... C..., demeurant à..., par Me Hardy, avocat au barreau de Tours ; M. C... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1300309 du 23 mai 2013 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 8 janvier 2013 par lesquelles le préfet d'Indre-et-Loire a rejeté sa demande de délivrance de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours suivant la notification de la décision et a décidé qu'à l'expiration de ce délai il pourra être reconduit d'office à la frontière à destination de la Côte d'Ivoire, pays dont il a la nationalité, ou de tout autre pays dans lequel il établira être légalement admissible ;

2°) d'annuler ces décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet d'Indre et Loire de délivrer le titre de séjour sollicité, ou à défaut de procéder à un nouvel examen de sa situation et de lui délivrer, en attendant, une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à venir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il soutient que :

- s'agissant du refus de titre de séjour : la décision est insuffisamment motivée ; le préfet a délégué sa compétence au médecin inspecteur ; la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation : le retour en Côte-d'Ivoire aggraverait son état de santé, il n'a plus d'attaches familiales dans ce pays ; l'appréciation de sa situation est erronée ; il relève des articles L. 313-11 7° et 11°et L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; la demande de titre était très large : le préfet a commis une erreur de droit en n'examinant pas tous les cas de figure ;

- s'agissant de l'obligation de quitter le territoire : elle est insuffisamment motivée ; le refus de titre de séjour est illégal ; la décision qui ne fixe pas de pays de destination ne peut être exécutée ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la mise en demeure adressée le 26 septembre 2013 au préfet d'Indre-et-Loire, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, et l'avis de réception de cette mise en demeure ;

Vu les mémoires en défense, enregistrés les 1er et 30 octobre 2013, présentés par le préfet d'Indre-et-Loire, qui conclut au rejet de la requête ;

il soutient que :

- il ne s'est pas senti lié par l'avis émis par le médecin inspecteur de la santé ; l'intéressé a de plus été entendu par la commission médicale régionale ;

- M. C... n'est engagé dans aucune formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle ;

- l'obligation de quitter le territoire est motivée ;

Vu la décision en date du 19 août 2013 du président du bureau d'aide juridictionnelle accordant l'aide juridictionnelle totale à M. C... ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 février 2014 :

- le rapport de M. Madelaine, faisant fonction de premier conseiller ;

1. Considérant que M. C... relève appel du jugement du 23 mai 2013 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 8 janvier 2013 par lesquelles le préfet d'Indre-et-Loire a rejeté sa demande de délivrance de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision et a décidé qu'à l'expiration de ce délai il pourra être reconduit d'office à la frontière à destination de la Côte d'Ivoire, pays dont il a la nationalité, ou de tout autre pays dans lequel il établira être légalement admissible ;

Sur la légalité de la décision de refus de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que la décision litigieuse comporte l'énoncé des textes dont elle fait application ainsi que des circonstances de fait au vu desquelles, sur le fondement de leurs dispositions, la demande de titre de séjour du requérant doit être refusée ; qu'après avoir visé le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en particulier l'article L. 5ll-1 (I, II, III), la décision précise que l'intéressé, ressortissant ivoirien, serait entré irrégulièrement en France le 8 février 2011, et mentionne l'appréciation portée sur son état de santé par le médecin de l'agence régionale de santé ; que la décision indique ensuite que M. C... ne peut se prévaloir des stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et qu'il n'entre dans aucun cas d'attribution d'un titre de séjour de plein droit en application des dispositions du code précité ; que la décision mentionne également que le requérant ne peut se prévaloir d'attaches familiales en France, l'ensemble de sa famille résidant dans son pays d'origine ; qu'il est relevé qu'il n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention précitée dans son pays d'origine ; que le préfet mentionne également qu'il a examiné la situation du requérant au regard des déclarations et des pièces produites par ce dernier ; qu'ainsi, la décision litigieuse est suffisamment motivée en droit et en fait ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat. " ;

4. Considérant, d'une part, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet d'Indre-et-Loire, qui a procédé à l'examen particulier de la situation de droit et de fait du requérant, aurait, contrairement à ce que soutient M. C..., méconnu l'étendue de sa compétence en s'estimant lié par l'avis du médecin de l'agence régionale de santé du 30 novembre 2012 ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le préfet aurait, ce faisant, entaché sa décision d'une erreur de droit doit être écarté ;

5. Considérant, d'autre part, que, dans son avis, le médecin de l'agence régionale de santé de la région Centre a estimé que si l'état de santé de M. C... nécessitait une prise en charge médicale, le défaut de celle-ci ne devrait cependant pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que son état de santé lui permettait de voyager sans risque vers son pays d'origine ; que les certificats médicaux produits par le requérant se bornent à rappeler les troubles psychologiques dont il souffre et le traitement médicamenteux qui lui est prescrit pour stabiliser son état ; que ces documents ne sont de nature ni à remettre en cause la pertinence de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé, lui-même fondé sur l'avis de la commission médicale régionale consultée le 26 novembre 2012, quant à la gravité des conséquences d'une absence de prise en charge, ni à établir la réalité du lien existant entre les troubles dont l'intéressé est atteint et les actes traumatisants qu'il prétend avoir subis et qui seraient ravivés par un retour dans son pays d'origine ; que, dans ces conditions, le préfet d'Indre et Loire n'a pas fait une inexacte application des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant de délivrer à M. C... le titre de séjour sollicité sur ce fondement ;

6. Considérant, en troisième lieu, que si le requérant, entré récemment en France, célibataire et sans enfant, fait valoir que le préfet a entaché sa décision de lui refuser un titre de séjour d'erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences sur sa situation personnelle et familiale, il ne fait état d'aucun élément probant justifiant des liens personnels qu'il entretiendrait sur le territoire français ou de son intégration à la société française, qui ne résulte pas de la seule conclusion d'un contrat jeune-majeur ou de sa prise en charge par les services de l'aide sociale ; que s'il fait valoir qu'il est dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, ses parents étant décédés, il ne justifie pas de ses allégations ; qu'en tout état de cause ses soeurs et sa tante résident dans son pays d'origine ; que, par suite, M. C... n'est pas fondé à soutenir que le refus de séjour contesté comporterait pour sa situation personnelle des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que, pour les mêmes motifs, la décision litigieuse ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

7. Considérant, en quatrième lieu, qu'en admettant que M. C... ait également fondé sa demande de titre de séjour sur les dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il n'établit pas remplir les conditions requises pour obtenir la délivrance d'une carte de séjour temporaire sur ce fondement, dès lors qu'il ne justifie pas suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle ; que par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il ait fait la preuve de son assiduité et de son implication lors des formations qui lui ont été proposées par l'équipe éducative qui l'a pris en charge;

8. Considérant, enfin, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet d'Indre-et-

Loire ne se serait pas livré à un examen particulier de la situation de M. C... avant de refuser de lui délivrer un titre de séjour ni qu'il aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision sur sa situation personnelle ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire :

9. Considérant que, contrairement à ce que soutient M. C..., la décision litigieuse fixe la Côte-d'Ivoire comme pays de renvoi ; que, dès lors, le moyen tiré de l'erreur de droit dont serait entachée l'obligation de quitter le territoire en l'absence de désignation du pays de renvoi manque en fait ;

10. Considérant, pour le surplus, que M. C... se borne à invoquer devant le juge d'appel, sans plus de précisions ou de justifications, les mêmes moyens que ceux développés en première instance ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges, et tirés de ce que l'obligation de quitter le territoire français est suffisamment motivée, de ce que l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour n'est pas fondée, et de ce que la décision n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur sa vie personnelle et n'a pas été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ; qu'il y a lieu, en conséquence de rejeter sa requête, ainsi que ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C...et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera transmise au préfet d'Indre-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 28 février 2014, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Aubert, président-assesseur,

- M. Madelaine, faisant fonction de premier conseiller.

Lu en audience publique le 21 mars 2014.

Le rapporteur,

B. MADELAINELe président,

L. LAINÉ

Le greffier,

M. B...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 13NT017432

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 13NT01743
Date de la décision : 21/03/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Bernard MADELAINE
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : SCP HARDY BULTEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-03-21;13nt01743 ?
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