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19/12/2014 | FRANCE | N°11NT03056

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 19 décembre 2014, 11NT03056


Vu la requête, enregistrée le 1er décembre 2011, présentée pour la Régie du Syndicat Electrique Intercommunal du Pays Chartrain (R.S.E.I.P.C.), dont le siège est situé 12 rue Kennedy, B.P 29 à Lucé Cedex (28000), par Me Letellier, avocat au barreau de Paris ; la Régie du Syndicat Electrique Intercommunal du Pays Chartrain demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement no 1000629 et 1000631 du 22 septembre 2011 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a, d'une part, résilié les lots n°1, 2, 3, 6, 19, 24, 36 et 57 de l'accord-cadre conclu par la R.S.E.I.P.C., publié

au bulletin officiel des marchés publics le 12 janvier 2010, avec un e...

Vu la requête, enregistrée le 1er décembre 2011, présentée pour la Régie du Syndicat Electrique Intercommunal du Pays Chartrain (R.S.E.I.P.C.), dont le siège est situé 12 rue Kennedy, B.P 29 à Lucé Cedex (28000), par Me Letellier, avocat au barreau de Paris ; la Régie du Syndicat Electrique Intercommunal du Pays Chartrain demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement no 1000629 et 1000631 du 22 septembre 2011 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a, d'une part, résilié les lots n°1, 2, 3, 6, 19, 24, 36 et 57 de l'accord-cadre conclu par la R.S.E.I.P.C., publié au bulletin officiel des marchés publics le 12 janvier 2010, avec un effet différé de quatre mois à compter de la notification du jugement, d'autre part, condamné la R.S.E.I.P.C. à verser la somme de 15 000 euros à la société In Elec et la somme de 1 000 euros à la société Socomest, avec intérêts de droit à compter du 17 février 2010 et capitalisation des intérêts à compter du 17 février 2011 ;

2°) de rejeter les demandes des sociétés In Elec et Socomest ;

3°) de condamner les sociétés In Elec et Socomest à lui verser, chacune, la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- le jugement est entaché de contradiction des motifs ;

- le tribunal n'a pas tiré les conséquences de ses constatations, en ce qu'il a considéré que les offres d'In Elec et Socomest étaient irrégulières mais que ces irrégularités ne justifiaient pas leur éviction de la procédure de passation, alors qu'elles ne pouvaient être régularisées ; la présentation de deux offres sous un même pli n'était pas possible, et au surplus contraire au principe d'autonomie et de confidentialité des offres ; une offre irrégulière doit être rejetée par l'acheteur public ;

- l'article 166 du code des marchés publics ne crée qu'une faculté d'examen des offres irrégulières, dans le cas où l'irrégularité peut être levée ;

- le tribunal administratif d'Orléans a commis une erreur en prononçant la résiliation avec effet différé des lots litigieux, sanction disproportionnée au regard du manquement en cause, du fait que, pour 7 des lots en cause, il a retenu une absence de perte sérieuse de chance d'obtenir les marchés ;

- les requêtes n'étaient pas fondées : la régie avait bien compétence pour signer les contrats ; la composition de la commission d'appel d'offres était régulière ; le moyen tiré du caractère incomplet de la lettre de consultation est à la fois inopérant et infondé ; le motif de l'éviction des offres des entreprises était parfaitement clair ; le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 83 du code des marchés publics est inopérant et infondé ;

- la procédure de passation des contrats étant régulière, les conclusions à fin d'indemnisation seront rejetées ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les mémoires en défense, enregistrés les 22 février et 23 août 2012, présentés pour la société In Elec, dont le siège est situé 197 avenue de Strasbourg à Brumath (67170), par Me Engel, avocat au barreau de Strasbourg ;

la société In Elec conclut :

1°) à la confirmation du jugement :

- en ce qu'il a prononcé la résiliation des lots 1, 2, 3, 6 et 19 de l'accord-cadre publié le 12 janvier 2010 ;

- en ce qu'il l'a indemnisée pour perte de chance sérieuse d'emporter le lot n° 19 ;

- en ce qu'il l'a indemnisée des frais engagés pour présenter ses offres ;

2°) à l'infirmation du jugement :

- en ce qu'il a jugé qu'elle n'avait pas perdu une chance sérieuse d'emporter les lots n° 1, 2, 3 et 6 ;

- en ce qu'il a limité à 13 000 euros l'indemnisation au titre du lot n° 19 et à 2 000 euros s'agissant des frais engagés, et rejeté sa demande au titre du préjudice commercial ;

3°) à la condamnation de la R.S.E.I.P.C. à lui verser les sommes de 70 002,30 euros au titre du manque à gagner pour le lot n°19 et de 144 572,00 euros au même titre pour les lots 1, 2, 3 et 6, la somme de 3 937,50 euros au titre des frais engagés pour présenter une offre, et la somme de 86 000 euros au titre du préjudice commercial, avec intérêts au taux légal à compter du 17 février 2010 et capitalisation ;

4°) à ce que soit mise à la charge de la R.S.E.I.P.C. la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- c'est à bon droit que le tribunal a résilié avec effet différé de quatre mois les lots 1, 2, 3, 6 et 19 de l'accord-cadre conclu par la R.S.E.I.P.C., après avoir considéré que l'éviction de la société In Elec était irrégulière pour ces lots ;

- le mode de transmission des offres était régulier : la règle un pli = une offre n'est pas incluse dans le règlement de consultation ; les dispositions de l'article 166 du code des marchés publics ont été respectées ;

- les entreprises n'étaient pas en concurrence puisque positionnées sur des lots différents ;

- c'est à tort que le tribunal n'a pas examiné les autres moyens tendant à la nullité de l'accord cadre dans son ensemble : la convention constitutive du groupement de commandes est entachée de nullité (elle ne comporte aucune date de signature et n'a été transmise à la préfecture qu'après le lancement de la procédure ; elle a été signée par une autorité incompétente ; les membres de la commission d'appel d'offres n'étaient pas compétents pour y siéger) ;

- il y a confusion entre irrecevabilité et irrégularité ;

- la notification des motifs de l'éviction n'a pas été faite dans les 15 jours de la demande ;

- l'ouverture de son offre est irrégulière ;

- l'évaluation du préjudice est erronée pour le lot n° 19 ;

- elle avait une chance sérieuse d'emporter les lots 1, 2, 3 et 6 ;

- les frais engagés pour présenter l'offre s'élèvent à la somme de 3 937,50 euros ;

- son éviction porte atteinte à son image commerciale ;

Vu les mémoires en défense, enregistrés les 22 février et 24 août 2012, présentés pour la société Socomest, dont le siège est situé 197 avenue de Strasbourg à Brumath (67170), par Me Engel, avocat au barreau de Strasbourg ;

la société Socomest conclut :

1°) à la confirmation du jugement :

- en ce qu'il a prononcé la résiliation des lots 24, 36 et 57 de l'accord-cadre publié le 12 janvier 2010 ;

- en ce qu'il l'a indemnisée des frais engagés pour présenter ses offres ;

2°) à l'infirmation du jugement :

- en ce qu'il a jugé qu'elle n'avait pas perdu une chance sérieuse d'emporter les lots n° 24, 36 et 57, et rejeté sa demande au titre du préjudice commercial ;

3°) à la condamnation de la R.S.E.I.P.C. à lui verser la somme de 12 761,04 euros au titre du manque à gagner pour les lots 24, 36 et 57, et la somme de 12 000 euros au titre du préjudice commercial, avec intérêts au taux légal à compter du 17 février 2010 et capitalisation ;

4°) à ce que soit mise à la charge de la R.S.E.I.P.C. la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

elle soutient que :

- c'est à bon droit que le tribunal a résilié avec effet différé de quatre mois les lots 24, 36 et 57 de l'accord-cadre conclu par la R.S.E.I.P.C., après avoir considéré que l'éviction de la société Socomest était irrégulière pour ces lots ;

- le mode de transmission des offres était régulier : la règle un pli = une offre n'est pas incluse dans le règlement de consultation ; les dispositions de l'article 166 du code des marchés publics ont été respectées ;

- les entreprises n'étaient pas en concurrence puisque positionnées sur des lots différents ;

- c'est à tort que le tribunal n'a pas examiné les autres moyens tendant à la nullité de l'accord cadre dans son ensemble : la convention constitutive du groupement de commandes est entachée de nullité (elle ne comporte aucune date de signature et n'a été transmise à la préfecture qu'après le lancement de la procédure ; elle a été signée par une autorité incompétente ; les membres de la commision d'appel d'offres n'étaient pas compétents pour y siéger) ;

- il y a confusion entre irrecevabilité et irrégularité ;

- la Régie n'a pas répondu à sa demande de communication des motifs de son éviction ;

- elle avait une chance sérieuse d'emporter les lots 24, 36 et 57 ;

- son éviction porte atteinte à son image commerciale ;

Vu les bordereaux de communication de pièces complémentaires, enregistrés le 14 septembre 2012, présentés pour les sociétés In Elec et Socomest ;

Vu les mémoires en réplique, enregistrés le 19 avril 2013, présentés pour la R.S.E.I.P.C. qui reprend ses conclusions et moyens ;

elle soutient en outre que :

- la règle " un pli = une offre " résulte des termes du règlement de consultation ;

- le risque de collusion entre les entreprises est évident ;

- le regroupement des offres n'est possible qu'en cas de groupement d'entreprises ;

- les vices allégués de la procédure ne justifiaient pas la résiliation des contrats ;

- la convention constitutive du groupement de commandes n'est pas nulle : elle a été signée par les responsables des parties prenantes ; un groupement de commandes n'est pas soumis au contrôle de légalité ;

- le procès-verbal de la délibération désignant les membres de la commision d'appel d'offres n'avait pas à être signé par tous les présents ;

- la Socomest n'a jamais demandé à connaître les motifs du rejet de son offre ;

- le préjudice n'est en tout état de cause pas établi ;

- la société In Elec n'a pas présenté de candidature pour le lot n° 6 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 décembre 2014 :

- le rapport de M. Madelaine, premier conseiller,

- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public ;

- les observations de Me Le Bouedec, avocat, représentant de la Régie du Syndicat Electrique Intercommunal du Pays Chartrain, et de Me Chatin, avocat, représentant des sociétés In Elec et Socomest ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 5 décembre 2014, présentée pour la société In Elec ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 5 décembre 2014, présentée pour la société Socomest ;

1. Considérant que la Régie du Syndicat Electrique Intercommunal du Pays Chartrain (R.S.E.I.P.C.) a lancé une procédure de consultation relative à la conclusion d'un accord-cadre, à bons de commande, en vue de la fourniture de coffrets, connecteurs et matériels de distribution électrique, divisé en cinquante sept lots, sur le fondement des dispositions des articles 134, 135, 144-1, 165 et 166 du code des marchés publics ; qu'un avis d'appel public à la concurrence a été publié au Journal officiel de l'Union européenne du 28 mars 2009 et au Bulletin officiel des annonces des marchés publics du 31 mars 2009 ; que, par courrier en date du 13 mai 2009, la R.S.E.I.P.C. a transmis à tous les candidats retenus, dont les sociétés In Elec et Socomest, une lettre de consultation comportant notamment le règlement de la consultation et le cahier des clauses administratives particulières ; que la société In Elec a présenté une offre pour les lots n° 1, 2, 3, 6 et 19 de ce marché, et la société Socomest pour les lots n° 24, 36 et 57 ; que ces sociétés ont transmis leurs offres par un pli unique d'expédition parvenu à la R.S.E.I.P.C. le 8 juin 2009 soit avant la date limite de dépôt des offres ; que, par courrier en date du 29 octobre 2009, la R.S.E.I.P.C. les a informées de ce que leurs offres pour les différents lots étaient rejetées, au motif qu'elles étaient irrecevables, du fait de leur transmission dans un pli unique d'expédition contrairement aux exigences du règlement de la consultation ; que, par jugement du 22 septembre 2011, le tribunal administratif d'Orléans a, à la demande des sociétés In Elec et Socomest, d'une part, résilié l'accord cadre en ses lots n° 1, 2, 3, 6, 19, 24, 36 et 57 avec effet différé de quatre mois à compter de la notification du jugement, d'autre part, condamné la R.S.E.I.P.C. à verser la somme de 15 000 euros à la société In Elec et la somme de 1 000 euros à la société Socomest, avec intérêts de droit à compter du 17 février 2010 et capitalisation des intérêts à compter du 17 février 2011 ; que la R.S.E.I.P.C. relève appel de ce jugement ; que, par la voie de l'appel incident, la société In Elec conclut à la réformation du jugement en ce qu'il a jugé qu'elle ne justifiait pas avoir perdu une chance sérieuse d'emporter les marchés relatifs aux lots n° 1, 2, 3 et 6, et, écartant sa demande d'indemnisation du manque à gagner pour ces lots, limité à 15 000 euros le montant de l'indemnité allouée, et la société Socomest conclut à la réformation du jugement en ce qu'il a jugé qu'elle ne justifiait pas avoir perdu une chance sérieuse d'emporter les marchés relatifs aux lots n° 24, 36 et 57 et a limité l'indemnisation du préjudice au montant des frais engagés pour présenter ses offres, ainsi qu'en ce qu'il a rejeté leurs demandes d'indemnisation du préjudice commercial qu'elles estiment avoir subi ;

Sur la validité du contrat :

2. Considérant que tout concurrent évincé de la conclusion d'un contrat administratif est recevable à former devant le juge du contrat, dans un délai de deux mois à compter de l'accomplissement des mesures de publicité appropriées, un recours de pleine juridiction contestant la validité de ce contrat ou de certaines de ses clauses qui en sont divisibles, afin d'en obtenir la résiliation ou l'annulation ; qu'il appartient au juge saisi de telles conclusions, lorsqu'il constate l'existence de vices entachant la validité du contrat, d'en apprécier l'importance et les conséquences ; qu'ainsi, il lui revient, après avoir pris en considération la nature de ces vices, soit de décider que la poursuite de l'exécution du contrat est possible, soit d'inviter les parties à prendre des mesures de régularisation dans un délai qu'il fixe, sauf à résilier ou résoudre le contrat ; qu'en présence d'irrégularités qui ne peuvent être couvertes par une mesure de régularisation et qui ne permettent pas la poursuite de l'exécution du contrat, il lui revient de prononcer, le cas échéant avec un effet différé, après avoir vérifié que sa décision ne portera pas une atteinte excessive à l'intérêt général, soit la résiliation du contrat, soit, si le contrat a un contenu illicite ou s'il se trouve affecté d'un vice de consentement ou de tout autre vice d'une particulière gravité que le juge doit ainsi relever d'office, l'annulation totale ou partielle de celui-ci ; qu'il peut enfin, s'il en est saisi, faire droit, y compris lorsqu'il invite les parties à prendre des mesures de régularisation, à des conclusions tendant à l'indemnisation du préjudice découlant de l'atteinte à des droits lésés ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 6 du règlement de la consultation de l'accord-cadre dont la R.S.E.I.P.C. poursuivait la conclusion : " Les offres seront remises adressées sous pli cacheté contenant une enveloppe également cachetée. / L'enveloppe extérieure porte la mention " PROPOSITION POUR FOURNITURE DE COFFRETS, CONNECTEURS ET MATERIELS DE DISTRIBUTION - NE PAS OUVRIR ". / L'enveloppe intérieure porte la mention " Proposition pour Fourniture de coffrets et Matériels de Distribution ", et le nom de l'entreprise. Elle contient l'Acte d'Engagement dûment renseigné et signé, ainsi que l'offre de l'entreprise (...) . / Les plis contenant les offres doivent être transmis par lettre recommandée avec demande d'avis de réception postale ou être remis contre récépissé (...) " ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment des pièces produites par la Régie qui ne sont pas sérieusement contestées en défense, que les sociétés In Elec et Socomest ont fait parvenir leurs offres à la commission d'appel d'offres par un pli d'expédition unique, qui ne contenait, pour chacune d'elles, que l'"enveloppe intérieure " ; qu'ainsi ces modalités de transmission des offres ne respectaient pas les exigences du règlement de la consultation qui imposait un pli unique d'expédition propre à chaque entreprise, sauf groupement conjoint ou solidaire ; qu'à ce titre les offres des sociétés In Elec et Socomest devaient être regardées comme des offres irrecevables ; que, contrairement à ce que soutiennent les sociétés, ce dispositif ne contrevenait pas aux dispositions de l'article 166 du code des marchés publics, applicables en l'espèce, selon lesquelles les offres doivent être transmises par tout moyen permettant de déterminer de façon certaine la date et l'heure de réception et d'en garantir la confidentialité et qui n'ont pas pour objet ou pour effet d'interdire aux entités adjudicatrices de fixer des règles formelles de transmission des offres et n'étaient pas de nature à restreindre la liberté d'accès à la commande publique, en méconnaissance du principe d'égalité de traitement des candidats ; qu'ainsi, la R.S.E.I.P.C. n'a commis ni erreur de fait, ni erreur de droit, lorsqu'elle a estimé que les conditions de transmission des offres litigieuses ne respectaient pas le règlement de consultation et que ces offres devaient par suite être écartées de la négociation comme irrecevables ; qu'à cet égard les sociétés In Elec et Socomest, qui n'étaient pas constituées en groupement, ne sauraient utilement arguer de leur proximité en termes capitalistique ou organisationnel ; qu'elles ne sauraient davantage invoquer les dispositions du VI de l'article 166 du code des marchés publics qui ne prévoit d'écarter de la négociation que les offres inappropriées au sens du 3° du II de l'article 35 de ce code, dès lors que l'appréciation de ce caractère renvoie au contenu même de l'offre et non à la méconnaissance des règles formelles de leur présentation ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en écartant comme irrecevables les offres présentées par les sociétés In Elec et Socomest, la R.S.E.I.P.C. n'a pas entaché la procédure de négociation d'irrégularité ; que la requérante est, en conséquence, fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif d'Orléans, après avoir relevé que les sociétés n'avaient pas respecté les formalités requises, a néanmoins procédé à la résiliation des contrats contestés avec effet différé ;

6. Considérant qu'il y a lieu pour la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par les sociétés In Elec et Socomest devant le tribunal administratif d'Orléans et devant la cour ;

7. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction, et qu'il n'est pas sérieusement contesté, que la convention constitutive du groupement de commandes, bien que non datée, a été conclue en janvier 2009 et signée de tous les participants au groupement avant le lancement de la procédure de consultation ; que cette convention désignait, en son article 3, la R.S.E.I.P.C. comme coordonnateur, pour procéder à l'organisation de l'ensemble des opérations de sélection des fournisseurs de fournitures faisant l'objet du groupement, et la mandatait pour la passation, la signature et la notification des marchés conclus ; qu'elle précisait enfin que la commission d'appel d'offres compétente pour examiner les offres était celle du coordonnateur ; qu'ainsi les sociétés In Elec et Socomest ne sont pas fondées à soutenir qu'il n'est pas établi que la R.S.E.I.P.C. était compétente pour lancer et organiser la procédure de consultation ;

8. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que, par délibération du 2 juin 2008, le conseil d'administration de la R.S.E.I.P.C. a désigné les membres de sa commission d'appel d'offres, soit en qualité de président M.B..., directeur de la régie, ou son représentant, et, comme membres titulaires, MM. C...et Lelong, président du conseil d'administration et administrateur ; que la commission qui s'est réunie le 8 juin 2009 pour examiner les offres siégeait dans cette composition, assistée avec voix consultative du receveur-comptable de la Régie et d'un représentant de l'administration en charge de la concurrence ; que le rapport établi à l'issue de cette réunion est signé, contrairement à ce que soutiennent les sociétés In Elec et Socomest, par tous les membres de la commission ;

9. Considérant, en troisième lieu, qu'à la lettre de consultation adressée aux candidats sélectionnés était joint le règlement de consultation qui énumérait précisément en son point 5 l'ensemble des documents à fournir avec l'offre conformément aux dispositions de l'article 166 du code des marchés publics ; que, si cette lettre ne faisait pas référence aux avis d'appel public à la concurrence publiés, cette information n'est pas requise à peine d'irrégularité de la procédure suivie et n'a pas, au demeurant, empêché les sociétés de présenter une offre ;

10. Considérant, enfin, que la circonstance que, en tout état de cause, la R.S.E.I.P.C. n'a pas donné suite dans le délai de quinze jours imparti par l'article 83 du code des marchés publics à la demande des sociétés de communication des motifs de rejet de leur offre, ainsi que les circonstances que la convention constitutive du groupement de commandes n'ait été adressée au contrôle de légalité que le 24 novembre 2009 et que l'enveloppe contenant l'offre de la société In Elec ait été ouverte n'affectent ni le consentement de la personne publique ni le bien-fondé du contrat ; que, dès lors, elles ne justifient pas que soit prononcée l'annulation ou la résiliation des contrats contestés ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions des sociétés In Elec et Socomest tendant à l'annulation de l'accord-cadre contesté en ses lots n° 1, 2, 3, 6, 19, 24, 36 et 57 ne peuvent qu'être rejetées, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de ces conclusions en tant qu'elles concernent le lot n° 6 ;

Sur les conclusions indemnitaires :

12. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit aux points 4 et 5 du présent arrêt, les offres présentées par les sociétés In Elec et Socomest ont été écartées à bon droit comme irrecevables ; que, de ce seul fait, ces entreprises ne sont pas susceptibles d'avoir été lésées par la sélection d'offres concurrentes ; qu'ainsi leurs conclusions tendant à l'indemnisation des préjudices que leur aurait causé l'attribution des lots pour lesquels elles avaient présenté une offre ne peuvent qu'être rejetées ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la R.S.E.I.P.C. est fondée à demander l'annulation du jugement attaqué, sans qu'il soit besoin de statuer sur sa régularité, et qu'il y a lieu de rejeter les demandes présentées par les sociétés In Elec et Socomest devant le tribunal administratif d'Orléans, ainsi que, par voie de conséquence, de rejeter les conclusions présentées par ces sociétés devant la cour, par la voie de l'appel incident ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la R.S.E.I.P.C., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que les sociétés In Elec et Socomest demandent au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge des sociétés In Elec et Socomest une somme de 1 500 euros chacune au titre des frais qu'a exposés la R.S.E.I.P.C. et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif d'Orléans du 22 septembre 2011 est annulé.

Article 2 : Les demandes présentées par les sociétés In Elec et Socomest devant le tribunal administratif d'Orléans, ainsi que les conclusions présentées par ces sociétés devant la cour, par la voie de l'appel incident, sont rejetées.

Article 3 : Les sociétés In Elec et Socomest verseront chacune à la Régie du Syndicat Electrique Intercommunal du Pays Chartrain la somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par les sociétés In Elec et Socomest au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la Régie du Syndicat Electrique Intercommunal du Pays Chartrain, à la société In Elec et à la société Socomest.

Délibéré après l'audience du 2 décembre 2014, à laquelle siégeaient :

- M. Bachelier, président de la cour,

- Mme Aubert, président-assesseur,

- M. Madelaine, faisant fonction de premier conseiller.

Lu en audience publique le 19 décembre 2014.

Le rapporteur,

B. MADELAINELe président,

G. BACHELIER

Le greffier,

M. A...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 11NT030562


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 11NT03056
Date de la décision : 19/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Bernard MADELAINE
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : SELARL SYMCHOWICZ WEISSBERG ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-12-19;11nt03056 ?
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