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01/06/2015 | FRANCE | N°14NT02298

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 01 juin 2015, 14NT02298


Vu la requête, enregistrée le 28 août 2014, présentée pour Mme C...B..., néeA..., demeurant..., par Me Katz, avocat ;

Mme B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1211389 du 2 juillet 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France du 20 novembre 2012 rejetant son recours formé contre la décision des autorités consulaires françaises à Casablanca (Maroc) du 5 septembre 2012 refusant de lui délivrer un vis

a de long séjour en qualité de conjoint de français, ainsi que de cette décisio...

Vu la requête, enregistrée le 28 août 2014, présentée pour Mme C...B..., néeA..., demeurant..., par Me Katz, avocat ;

Mme B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1211389 du 2 juillet 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France du 20 novembre 2012 rejetant son recours formé contre la décision des autorités consulaires françaises à Casablanca (Maroc) du 5 septembre 2012 refusant de lui délivrer un visa de long séjour en qualité de conjoint de français, ainsi que de cette décision du 5 septembre 2012 ;

2°) d'annuler ces décisions des 5 septembre 2012 et 20 novembre 2012 ;

3°) d'ordonner à l'Etat de réexaminer sa demande de visa long séjour, dans un délai de quinze jours à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Mme B...soutient que :

- la décision de refus de visa est entachée d'un défaut de motivation ;

- les décisions attaquées sont entachées d'erreur d'appréciation car il n'existe pas de fraude susceptible de justifier le refus de visa qui lui a été opposé ; le mariage a été célébré à un moment où elle vivait en situation régulière en France ; ils ont vécu ensemble en France avant et après leur mariage, ainsi qu'en attestent de nombreux documents ; M. B...vient régulièrement au Maroc pour être auprès de son épouse ; l'intention matrimoniale et la sincérité du mariage sont établis ;

- la commission de recours a répondu de manière stéréotypée sans étudier le recours dont elle était saisi, qui ne tendait pas à se voir communiquer les motifs d'une décision implicite qui serait née le 8 octobre 2012 ;

- les décisions attaquées méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement et les décisions attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 14 octobre 2014, présenté par le ministre de l'intérieur, qui conclut au rejet de la requête ;

il soutient que :

- la décision de la commission de recours s'est substituée à celle des autorités consulaires, de sorte que les conclusions dirigées contre cette décision des autorités consulaires du 5 septembre 2012 sont irrecevables ;

- la décision de la commission de recours du 20 novembre 2012 est suffisamment motivée en fait et en droit ;

- il ressort de cette décision que la commission a procédé à un examen de la situation personnelle de MmeB... ;

- l'union de Mme A...avec M. B...avait pour seul objet de permettre l'installation de Mme A...en France et était donc frauduleux ; les documents produits ne permettent pas d'établir la sincérité du lien matrimonial ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 mai 2015, le rapport de Mme Rimeu, premier conseiller ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme C...A..., ressortissante marocaine, s'est marié en France, le 24 mai 2011, avec M. D...B..., citoyen français ; que, par une décision du 5 septembre 2012, les autorités consulaires de France à Casablanca ont refusé de délivrer à Mme B...un visa d'entrée et de long séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française ; que ce refus a été confirmé par une décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France du 20 novembre 2012, qui doit être regardée comme se substituant à la décision implicite de rejet née du silence gardé pendant quatre mois sur le recours formé, dés le 8 août 2012, par Mme B...; que Mme C...B...relève appel du jugement du 2 juillet 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision du 5 septembre 2012 :

2. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article D. 211-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France se substitue à la décision initiale de refus prise par les autorités diplomatiques et consulaires ; qu'ainsi les conclusions de Mme B...tendant à l'annulation de la décision des autorités consulaires françaises à Casablanca, à laquelle s'est substituée la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France du 20 novembre 2012, doivent être rejetées comme irrecevables ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision du 20 novembre 2012 :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) le visa pour une durée de séjour supérieure à trois mois ne peut être refusé à un conjoint de français qu'en cas de fraude, d'annulation du mariage ou de menace à l'ordre public " ;

4. Considérant que, pour refuser le visa sollicité par MmeB..., les autorités consulaires françaises à Casablanca puis la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, ont estimé que son mariage avec M. B...avait été contracté à des fins étrangères à l'union matrimoniale ; qu'il appartient en principe aux autorités consulaires de délivrer au conjoint étranger d'un ressortissant français dont le mariage n'a pas été contesté par l'autorité judiciaire le visa nécessaire pour que les époux puissent mener une vie familiale normale ; que, toutefois, il appartient à l'autorité consulaire, s'il est établi de façon certaine lors de l'examen d'une demande de visa d'entrée en France motivée par la circonstance que le demandeur entend rejoindre un conjoint de nationalité française, que le mariage a été contracté dans le but exclusif de permettre, dans un premier temps, l'obtention du visa, puis, ultérieurement, celle d'un titre de séjour, de faire échec à cette fraude et de refuser à l'intéressée, sous le contrôle du juge, le visa sollicité ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment du rapport établi par les services de la police à Marseille que M. et MmeB..., qui se sont rencontrés en 2007, ont vécu ensemble chez M. B...après leur mariage en mai 2011 et jusqu'en novembre 2011, date à laquelle Mme B...est retournée au Maroc, accompagnée de son époux, pour solliciter un visa en qualité de conjoint de français ; que M. B...est ensuite retourné au Maroc voir son épouse en mars 2012 et qu'ils entretiennent par ailleurs des relations téléphoniques ; qu'enfin, il ressort également des pièces produites que les époux se connaissent bien et qu'il existe entre eux une communauté d'intérêt qui ne permet pas de regarder leur union comme dépourvue de toute intention matrimoniale ; que dans ces conditions, en refusant le visa sollicité au motif que le mariage de M. et Mme B...serait frauduleux, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, qui n'établit pas que ce mariage aurait été contracté dans un but exclusivement migratoire, a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 2 juillet 2014, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France du 20 novembre 2012 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

7. Considérant qu'ainsi que le demande la requérante, le présent jugement implique nécessairement que l'Etat procède au réexamen de la demande de visa de MmeB..., dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1500 euros au titre des frais exposés par Mme B...et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes 2 juillet 2014 et la décision de la commission contre les décisions de refus de visa d'entrée en France du 20 novembre 2012 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint à l'Etat de procéder au réexamen de la demande de visa de MmeB..., dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Mme B...la somme de 1500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5: Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 11 mai 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Francfort, président-assesseur,

- Mme Rimeu, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 1er juin 2015.

Le rapporteur,

S. RIMEU

Le président,

H. LENOIR

Le greffier,

C. GOY

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N° 14NT02298

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT02298
Date de la décision : 01/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: Mme Sophie RIMEU
Rapporteur public ?: Mme GRENIER
Avocat(s) : KATZ

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-06-01;14nt02298 ?
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