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21/10/2015 | FRANCE | N°15NT00666

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre b, 21 octobre 2015, 15NT00666


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...A...et Mme E...A...ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler les décisions du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration du 17 février 2012 rejetant leur recours hiérarchique dirigés contre les décisions du 30 septembre 2011 rejetant leurs demandes de naturalisation.

Par un jugement nos 1205416, 1205417 du 9 janvier 2015, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

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r une requête enregistrée le 23 février 2015, M. et MmeA..., représentés par MeB..., deman...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...A...et Mme E...A...ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler les décisions du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration du 17 février 2012 rejetant leur recours hiérarchique dirigés contre les décisions du 30 septembre 2011 rejetant leurs demandes de naturalisation.

Par un jugement nos 1205416, 1205417 du 9 janvier 2015, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 23 février 2015, M. et MmeA..., représentés par MeB..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 9 janvier 2015 ;

2°) d'annuler les décisions du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration du 17 février 2012 ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, de réexaminer leurs demandes dans un délai d'un mois ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les décisions du 17 février 2012 sont insuffisamment motivées dès lors qu'elles ne comportent aucune référence de textes ni aucune considération de faits ;

- les décisions sont entachées d'un défaut d'examen particulier de leurs situations personnelles ;

- le ministre a commis une erreur de fait en se fondant sur des faits inexacts et non établis ;

- le ministre a commis une erreur de droit et a méconnu les dispositions de l'article 21-24 du code civil dès lors que le lien avec des groupes terroristes n'est pas établi ;

- les décisions du ministre sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il n'est nullement engagé dans un quelconque mouvement terroriste et qu'il n'a pas la qualité d'opposant politique.

Par un mémoire en défense enregistré le 31 mars 2015, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. et Mme A...ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Bachelier, président-rapporteur,

- et les observations de MeC..., substituant MeB..., représentant M. et MmeA....

1. Considérant que, par jugement du 9 janvier 2015, le tribunal administratif de Nantes a rejeté les demandes de M. et Mme A...tendant à l'annulation des décisions du 17 février 2012 par lesquelles le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a, sur recours gracieux des intéressés, confirmé ses décisions du 30 septembre 2011 rejetant leurs demandes de naturalisation ; que M. et Mme A...relèvent appel de ce jugement ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les décisions du 30 septembre 2011 rejetant les demandes de naturalisation présentées par M. et MmeA..., qui visent l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 et mentionnent les circonstances de fait sur lesquelles elles se fondent, sont suffisamment motivées ; que, par suite, les décisions du 17 février 2012, qui, contrairement à ce qui est soutenu par les requérants, rejettent les recours gracieux formés par les intéressés et ne constituent pas des décisions prises par le ministre sur recours préalable obligatoire, n'avaient pas à être elles-mêmes motivées dès lors que les décisions du 30 septembre 2011 l'étaient suffisamment ;

3. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le ministre de l'intérieur se serait abstenu de procéder à un examen particulier de la situation personnelle de M. et MmeA... ; que, par suite et quand bien même le ministre se contente de mentionner les éléments de leur situation sur lesquels il s'est fondé pour rejeter leurs demandes de naturalisation, le moyen tiré du défaut d'examen particulier doit être écarté ; que la circonstance que le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait commis des erreurs dans l'examen de leur situation, à la supposer établie, est inopérante dès lors que ces éléments n'ont pas été repris par le ministre ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 21-15 du code civil : " (...) l'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger " ; qu'aux termes de l'article 49 du décret du 30 décembre 1993, dans sa rédaction applicable au litige : " Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions (...) " ; qu'en vertu de ces dispositions, il appartient au ministre chargé des naturalisations de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la nationalité française à l'étranger qui la sollicite ; que, dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte les renseignements défavorables recueillis sur le comportement du postulant ainsi qu'un défaut d'adhésion aux valeurs républicaines et de loyalisme à l'égard de la France et de ses institutions ;

5. Considérant que le ministre de l'intérieur a rejeté les demandes de naturalisation de M. et Mme A...en raison, pour M.A..., de son implication persistante dans les affaires politiques de son pays d'origine caractérisée par sa qualité d'opposant qu'il revendique, conduisant à douter de son loyalisme envers la France et ses institutions et, pour MmeA..., son épouse, de ce qu'elle ne pouvait ignorer l'implication de son époux au sein de diverses organisations dès lors qu'ils vivent ensemble depuis plus de vingt ans ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment de la note du directeur des libertés publiques et des affaires juridiques du ministère de l'intérieur du 5 août 2011 que M. A...est membre du conseil d'administration du Gurdwara A...Sabha France culte Sikh, association qui gère un temple Sikh dont les dirigeants sont proches du Babbar Khalsa International (BKI) et de l'International Sikh Youth Federation (ISYF) ; que, si M. et Mme A...contestent la réalité des éléments contenus dans cette note, ils ne produisent à l'appui de ces allégations, aucun élément précis et circonstancié de nature à établir le caractère erroné de ces informations ; que, par une décision du 12 juillet 2010, le Conseil de l'Union européenne a inscrit ces deux mouvements sur la liste des organisations terroristes, en application de l'article 2, paragraphe 3, du règlement (CE) n° 2580/2001 du Conseil, du 27 décembre 2001, concernant l'adoption de mesures restrictives spécifiques à l'encontre de certaines personnes et entités dans le cadre de la lutte contre le terrorisme ; que M.A..., qui a déclaré être en contact avec un de ces dirigeants pour des motifs uniquement professionnels puis a indiqué en appel qu'il s'agissait d'un homonyme, n'apporte aucune élément pour étayer ses affirmations ; que les liens entretenus par M.A..., qui, en tant que membre du conseil d'administration de l'association, ne peut invoquer sa seule qualité de pratiquant, avec des personnes impliquées dans des groupes qualifiés de terroristes sont de nature à remettre en cause son loyalisme envers la France et ses institutions ; que, par suite, il n'est pas établi que les décisions contestées reposeraient sur des faits matériellement inexacts ; que, dès lors, le moyen tiré de l'erreur de fait doit être écarté ;

7. Considérant que le ministre, dans le cadre du large pouvoir d'appréciation dont il dispose pour accorder la naturalisation, a pu sans commettre d'erreur de droit ou d'erreur manifeste d'appréciation, rejeter la demande de M.A..., ainsi que celle de MmeA..., son épouse, qui, vivant avec lui depuis plus de vingt ans, ne pouvait ignorer ses liens avec ces organisations ; que le fait que la famille A...soit bien intégrée dans la société française est sans incidence sur la légalité des décisions contestées ;

8. Considérant que M. et Mme A...ne peuvent utilement se prévaloir à l'encontre de ces décisions de ce qu'ils remplissent la condition d'assimilation posée par l'article 21-24 du code civil, le ministre ayant rejeté leurs demandes au regard de l'opportunité de leur naturalisation, sur le fondement des dispositions précitées de l'article 49 du décret du 30 décembre 1993 ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme A...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort, que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté leurs demandes ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

10. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation, n'implique aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au ministre de l'intérieur de réexaminer la demande de naturalisation de M. et Mme A...sous astreinte, ne sauraient être accueillies ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement à M. et Mme A...de la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...A..., à Mme E...A...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 14 octobre 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Bachelier, président de la cour,

- Mme Buffet, premier conseiller,

- Mme Piltant, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 21 octobre 2015.

L'assesseur le plus ancien

dans l'ordre du tableau,

C. BUFFETLe président-rapporteur

G. BACHELIER

Le greffier,

S. BOYERE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15NT00666


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre b
Numéro d'arrêt : 15NT00666
Date de la décision : 21/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BACHELIER
Rapporteur ?: M. le Pdt. Gilles BACHELIER
Rapporteur public ?: M. DELESALLE
Avocat(s) : TAELMAN

Origine de la décision
Date de l'import : 03/11/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-10-21;15nt00666 ?
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