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11/12/2015 | FRANCE | N°14NT02622

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 11 décembre 2015, 14NT02622


Vu l'ordonnance n° 384518 du 8 octobre 2014, par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a attribué à la cour administrative d'appel de Nantes le jugement de la requête, enregistrée le 16 septembre 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée, pour l'association pour la Sauvegarde du Trégor, par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, tendant à ce que le Conseil d'Etat prononce l'annulation du jugement n°1300197/1300223 du 16 mai 2014 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande d'annulation de la décision du maire de la commune de Gu

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Vu l'ordonnance n° 384518 du 8 octobre 2014, par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a attribué à la cour administrative d'appel de Nantes le jugement de la requête, enregistrée le 16 septembre 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée, pour l'association pour la Sauvegarde du Trégor, par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, tendant à ce que le Conseil d'Etat prononce l'annulation du jugement n°1300197/1300223 du 16 mai 2014 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande d'annulation de la décision du maire de la commune de Guimaec (Finistère) de ne pas s'opposer à la déclaration de travaux déposé par M. C...en vue de l'extension d'un bassin de rétention d'eaux pluviales et au versement d'une somme de 3000 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

L'association fait valoir que :

- le jugement est irrégulier dès lors que le sens des conclusions du rapporteur public a été mis à la disposition des parties trop tardivement ;

- le jugement n'est pas revêtu des signatures exigées par l'article R.741-7 du code de justice administrative.

- le jugement est entaché d'une contradiction de motifs ;

- c'est à tort que le tribunal a estimé que les dispositions de l'article R. 421-23 du code de l'urbanisme n'avaient pas été méconnues ;

- de même, c'est à tort que le tribunal a estimé que l'article ND1 du règlement plan d'occupation des sols n'avait pas été méconnu ;

- c'est également à tort que le tribunal a estimé que l'article ND2 du même règlement n'avait pas été méconnu ;

- contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, l'illégalité du permis de construire initial n'était pas sans influence sur la légalité de la déclaration ;

- l'opération réalisée par M. C...ne pouvait pas être qualifiée de simple opération d'aménagement pour écarter l'application des I et II de l'article L.146-4 du code de l'urbanisme.

Vu les mémoires, enregistrés le 20 novembre 2014 et le 9 avril 2015, présentés, pour la commune de Guimaëc, par Me Cosnard, avocat.

La commune conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de l'association Sauvegarde du Trégor une somme de 2000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- Le jugement est régulier ;

- Aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 9 février 2015, présenté, pour l'association Sauvegarde du Trégor, par Me Apcher, avocat ; l'association maintient ses conclusions initiales par les mêmes moyens et par les moyens que :

- la décision attaquée méconnaît l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme car le projet, qui n'a pas fait l'objet d'études préalables, constitue une menace pour la sécurité publique ;

- elle méconnaît également l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme puisque le projet, de par ses dimensions, porte atteinte à l'environnement dans lequel il prétend s'insérer ;

- Le maire a commis une erreur manifeste d'appréciation.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes du 8 décembre 2014 accordant à l'association Sauvegarde du Trégor le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Lenoir, président ;

- les conclusions de M. Durup de Baleine, rapporteur public ;

- et les observations de Me A...substituant Me Cosnard, représentant la commune de Guimaëc.

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le 31 juillet 2012, M. C...a déposé une déclaration préalable de travaux concernant l'agrandissement d'un bassin de rétention d'eaux pluviales, destiné à l'irrigation de cultures maraîchères sous serres, situé sur la parcelle cadastrée section A n° 60 située au lieudit Traon Paol à Guimaëc (Finistère) régie par les dispositions applicables à la zone ND du plan d'occupation des sols de la commune ; que, par un arrêté du 14 novembre 2012, le maire de Guimaëc a déclaré ne pas s'opposer aux travaux en question ; que l'association Sauvegarde du Trégor relève appel du jugement du 16 mai 2014 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision du 14 novembre 2012 ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant, en premier lieu, que le sens des conclusions du rapporteur public a été communiqué aux parties par la mise à disposition de cette information dans l'application " sagace " le 9 avril 2014, soit avec un délai suffisant pour qu'elles en soient informées avant l'audience du 11 avril 2014 ; que par suite le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 711-3 du code de justice administrative doit être écarté ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'examen de la minute du jugement attaqué qu'elle comporte, conformément aux dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative, les signatures du président de la formation de jugement, du rapporteur et du greffier d'audience ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le jugement ne comporterait pas l'ensemble des signatures requises manque en fait ;

4. Considérant enfin, que contrairement à ce qui est soutenu par la requérante, le jugement attaqué est suffisamment motivé ; que ce dernier moyen doit également être écarté ;

Sur le bien fondé du jugement attaqué :

S'agissant de la recevabilité de la demande de l'association Sauvegarde du Trégor :

5. Considérant qu'aux termes de l'article 2 des statuts en vigueur à la date de l'introduction de sa requête devant le tribunal administrative de Rennes, l'association Sauvegarde du Trégor avait pour objet social "la défense des patrimoines naturel, paysager et culturel, la protection des ressources naturelles et la préservation de leur qualité, la préservation du cadre de vie des habitants du Trégor. A ce titre, elle agit dans le domaine de l'environnement, pour un aménagement harmonieux et équilibré du territoire et de l'urbanisme. (...) Elle défend une approche économe des espaces naturels, agricoles ou forestiers visant à maintenir une harmonie paysagère et architecturale, dans tous les outils et processus de développement, d'aménagement ou d'urbanisme. (...) " ; que cet objet social, qui se réfère à l'aménagement des espaces naturels et agricoles du Trégor, lui confère, eu égard à la nature du projet en cause, qui concerne l'extension d'une réserve d'eau pluviale de 150 m2 à 675 m2 située à 300 mètres du rivage, un intérêt de nature à lui donner qualité pour demander l'annulation de l'arrêté attaqué du 14 novembre 2012 ; que par suite, la commune de Guimaëc n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté la fin de non-recevoir qu'elle avait soulevée sur ce fondement ;

S'agissant de la contradiction de motifs alléguée :

6. Considérant qu'en relevant, pour répondre au moyen tiré de ce que le projet en cause porterait atteinte à l'intérêts des lieux avoisinants ou aux paysages, que, si ce projet se situait dans une zone classée naturelle par le plan d'occupation des sols, il était également implanté dans un secteur ne relevant d'aucune protection particulière au titre de l'environnement et du patrimoine, le tribunal administratif de Rennes n'a pas entaché son jugement d'une contradiction de motifs ;

S'agissant de la légalité de l'arrêté du du 14 novembre 2012 :

7. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 421-18 du code de l'urbanisme : " Les travaux, installations et aménagements autres que ceux exécutés sur des constructions existantes sont dispensés de toute formalité au titre du code de l'urbanisme à l'exception : (...) b) De ceux, mentionnés aux articles R. 421-23 à R. 421-25, qui doivent faire l'objet d'une déclaration préalable(...) " ; qu'aux termes de l'article R. 421-23 du même code : " Doivent être précédés d'une déclaration préalable de travaux les installations et aménagements suivants : (...) j) A moins qu'ils ne soient nécessaires à l'exécution d'un permis de construire, les affouillement et exhaussements du sols dont la hauteur, s'il s'agit d'un exhaussement, ou la profondeur dans le cas d'un affouillement, excède deux mètres et qui portent sur une superficie supérieure ou égale à 100 m 2 (...) " ; que le projet en cause concerne l'agrandissement d'un bassin de rétention des eaux de pluie nécessaires à l'irrigation des cultures sous serres exploitées par M. C...afin de porter sa superficie de 150 m2 à 675 m2 et implique la réalisation d'affouillements et d'exhaussements de terrain supérieurs à deux mètres ; qu'ainsi, c'est sans commettre d'erreur de droit que les premiers juges ont estimé que les travaux en question relevaient du régime de déclaration préalable institué par les dispositions précitées de l'article R. 421-18 du code de l'urbanisme ;

8. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article ND 1 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Guimaëc : " sont admis hormis en zone Nds, sous réserve de respecter par leur localisation et les aménagements qu'ils nécessitent, les préoccupations d'environnement notamment la qualité des sites, les milieux naturels ou les paysages et qu'ils soient compatibles avec la vocation agricole de la zone : (...) 4) la réalisation des réserves d'eau liées à l'usage des exploitations agricoles ou nécessaires à la protection contre l'incendie où la régulation des cours d'eau (...) " ; qu'il n'est pas contesté que l'agrandissement du bassin de rétention objet de la déclaration contestée a pour but la constitution d'une réserve d'eau destinée à un usage agricole afin de permettre l'irrigation des cultures maraîchères de M. C...; que, par ailleurs, il ne résulte pas des pièces produites au dossier, notamment des photographies qui y sont jointes, que le bassin ainsi réalisé sans surélévation par rapport au sol existant porterait atteinte au paysage ou à la qualité du site environnant ; que, de même, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que ce bassin de rétention d'eaux pluviales, isolé du terrain environnant, aurait un impact sur la préservation du milieu naturel environnant ; que, par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont écarté le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article ND 1 du règlement du plan d'occupation des sols ;

9. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article ND2 du plan d'occupation des sols de la commune de Guimaec : " sont interdits en zone ND : (...) 9) les exhaussements et affouillements sauf s'ils sont justifiés par des considérations d'ordre technique ou architectural et liés à des modes d'occupation admis dans la zone. " ; qu'il ressort des pièces du dossier que la déclivité de la parcelle d'assiette du bassin de rétention en cause justifie le recours à des exhaussements et affouillements afin de réaliser ce bassin, lequel est, ainsi qu'il l'a été précisé au point 9, destiné à un usage agricole admis dans la zone ND du plan d'occupation des sols de la commune ; que, par suite, l'association requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision qu'elle critique méconnaitrait les dispositions précitées de l'article ND 2 du plan d'occupation des sols de la commune de Guimaëc ;

10. Considérant, en quatrième lieu, que si l'association requérante soutient que le projet objet de la déclaration préalable contestée méconnaitrait les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme à raison des risques encourus par les activités situées en contrebas, elle ne démontre cependant pas l'existence de ce risque en l'absence de tout élément au dossier laissant supposer une fragilisation des sols du fait de l'extension du bassin existant ;

11. Considérant, en cinquième lieu, que si l'association requérante soutient que la construction en cause aurait du faire l'objet, du fait de ses dimensions, de prescriptions spéciales en application de l'article R.111-21 du code de l'urbanisme, elle ne le démontre pas alors que, ainsi qu'il l'a été précisé au point 9, le bassin en cause, non surélevé, ne porte pas atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux environnants, au site ou au paysage naturel ; que ce moyen doit, en conséquence, être rejeté ;

12. Considérant, en sixième lieu, qu'aux termes de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme : " I - L'extension de l'urbanisation doit se réaliser soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 146-4 du même code : " II. L'extension limitée de l'urbanisation des espaces proches du rivage (...) doit être justifiée et motivée, dans le plan local d'urbanisme, selon des critères liés à la configuration des lieux ou à l'accueil d'activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau (...) " ; que l'agrandissement d'un bassin de rétention d'eaux pluviales destiné à l'alimentation en eau d'une exploitation agricole existante ne saurait, compte tenu de son caractère de simple aménagement d'une construction déjà édifiée, caractériser une extension de l'urbanisation au sens des dispositions précitées de L.146-4 du code de l'urbanisme ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être rejeté ;

13. Considérant, en septième lieu, que si l'association requérante soutient que l'arrêté qu'elle critique serait irrégulier dès lors que le permis de construire ayant autorisé la réalisation de l'exploitation maraîchère de M. C...serait lui-même irrégulier, elle n'assortit pas ce moyen des précisions suffisantes pour permettre à la Cour d'y statuer ;

14. Considérant, enfin, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le maire de Guimaëc aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en ne s'opposant pas à la déclaration de travaux effectuée par M.C... ;

15. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'association Sauvegarde du Trégor n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

16. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la commune de Guimaëc, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamnée à payer, en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 191, au conseil de l'association Sauvegarde du Trégor la somme que cette dernière demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

17. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'association Sauvegarde du Trégor le versement à la commune de Guimaëc de la somme demandée par cette dernière au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'association Sauvegarde du Trégor est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Guimaec tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Sauvegarde du Trégor, à M. B...C...et à la commune de Guimaëc.

Délibéré après l'audience du 20 novembre 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Francfort, président-assesseur,

- M. Mony, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 11 décembre 2015.

Le président-assesseur,

J. FRANCFORT

Le président-rapporteur,

H. LENOIR

Le greffier,

C. GOY

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N° 14NT02622 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT02622
Date de la décision : 11/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: M. Hubert LENOIR
Rapporteur public ?: M. DURUP de BALEINE
Avocat(s) : SCP F. ROCHETEAU et C. UZAN-SARANO

Origine de la décision
Date de l'import : 17/11/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-12-11;14nt02622 ?
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