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15/01/2016 | FRANCE | N°15NT00141

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 15 janvier 2016, 15NT00141


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif d'Orléans :

1°) d'annuler la décision implicite par laquelle le maire de la commune de Reugny (Indre-et-Loire) a rejeté sa demande tendant à l'enlèvement de la partie d'une canalisation d'acheminement des eaux pluviales et des eaux usées implantée sur son terrain et à ce qu'il soit mis fin aux écoulements provenant de cet ouvrage sur son terrain ;

2°) d'enjoindre au maire de la commune de Reugny de faire cesser tout écoulement sur son terra

in et de procéder à l'enlèvement de l'ouvrage litigieux ;

Par un jugement n° 1303016 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif d'Orléans :

1°) d'annuler la décision implicite par laquelle le maire de la commune de Reugny (Indre-et-Loire) a rejeté sa demande tendant à l'enlèvement de la partie d'une canalisation d'acheminement des eaux pluviales et des eaux usées implantée sur son terrain et à ce qu'il soit mis fin aux écoulements provenant de cet ouvrage sur son terrain ;

2°) d'enjoindre au maire de la commune de Reugny de faire cesser tout écoulement sur son terrain et de procéder à l'enlèvement de l'ouvrage litigieux ;

Par un jugement n° 1303016 du 20 novembre 2014, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 19 janvier et 23 septembre 2015, M.C..., représenté par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 20 novembre 2014 ;

2°) d'annuler le refus implicite opposé à sa demande ;

3°) d'enjoindre à la commune de Reugny de faire cesser tout écoulement d'eaux pluviales ou d'eaux usées sur sa parcelle et de procéder à l'enlèvement des ouvrages maçonnés implantés sur cette dernière sans son autorisation ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Reugny le versement d'une somme de 5 000 euros au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il est victime d'une emprise irrégulière ;

- l'installation de l'ouvrage en cause a aggravé les arrivées d'eau sur son terrain ;

- son étang n'avait auparavant jamais été alimenté par des eaux usées ou pluviales provenant des habitations dont les effluents ont été recueillis puis dirigés vers sa propriété à la suite des travaux communaux ;

- il a proposé une régularisation en déviant les eaux sur une autre parcelle lui appartenant et les premiers juges ont commis une erreur de droit en s'abstenant de prendre en compte cette possibilité de régularisation ;

- le tribunal a commis une erreur manifeste d'appréciation en effectuant le bilan de l'atteinte susceptible d'être portée aux différents intérêts en présence sans prendre en compte ni le risque de pollution de l'étang ni le risque sanitaire lié à l'activité de pêche pratiquée dans cet étang.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 avril 2015, la commune de Reugny, représentée par Me Benoit, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. C...au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens présentés par M. C...ne sont pas fondés.

Un mémoire présenté pour la commune de Reugny, représentée par Me Benoit, avocat, a été enregistré le 20 octobre 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Francfort, président-assesseur,

- les conclusions de M. Durup de Baleine, rapporteur public,

- et les observations de Me B...substituant Me Benoit, représentant la commune de Reugny.

1. Considérant que M. C...est propriétaire d'une parcelle cadastrée section YE n° 19, située au lieudit " Foustico " sur le territoire de la commune de Reugny (Indre-et-Loire) sur laquelle il a créé en 2000 un étang de 12 000 m² ; qu'en 2012 la commune de Reugny a construit une canalisation destinée à recevoir les eaux de ruissellement provenant d'une partie des habitations situées passage de la Lande et route de la Lande en surplomb de cette parcelle ; que M. C..., estimant qu'une partie de cette canalisation a été implantée irrégulièrement sur son terrain et que les eaux qu'elles transportent s'y écoulent sans son autorisation, a demandé au tribunal administratif d'Orléans, d'annuler la décision implicite par laquelle le maire de la commune de Reugny a rejeté sa demande tendant à l'enlèvement de la partie d'une canalisation d'acheminement des eaux pluviales et des eaux usées implantée sur son terrain et à ce qu'il soit mis fin aux écoulements provenant de cet ouvrage sur son terrain ; qu'il relève appel du jugement du 20 novembre 2014 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à ce que la cour ordonne l'enlèvement de l'ouvrage public :

2. Considérant que, lorsque le juge administratif est saisi d'une demande tendant à l'annulation d'une décision rejetant une demande d'enlèvement d'un ouvrage public édifié irrégulièrement et à ce que cet enlèvement soit ordonné, il lui appartient, pour déterminer, en fonction de la situation de droit et de fait existant à la date à laquelle il statue, s'il convient de faire droit à cette demande, de rechercher, d'abord, si, eu égard notamment à la nature de l'irrégularité, une régularisation appropriée est possible ; que, dans la négative, il lui revient ensuite de prendre en considération, d'une part les inconvénients que la présence de l'ouvrage entraîne pour les divers intérêts publics ou privés en présence et notamment, le cas échéant, pour le propriétaire du terrain d'assiette de l'ouvrage, d'autre part, les conséquences de l'enlèvement pour l'intérêt général, et d'apprécier, en rapprochant ces éléments, si cet enlèvement n'entraîne pas une atteinte excessive à l'intérêt général ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la commune de Reugny a décidé, au printemps de l'année 2012, de réaliser au passage de la Lande des travaux en vue de créer une canalisation enterrée destinée à collecter les eaux de ruissellement ; que cette canalisation rejoint un fossé situé route de la Lande, qui recueille les eaux pluviales et les eaux usées de certaines des habitations situées en amont ; que les travaux entrepris par la commune ont également consisté à prolonger ce fossé par un passage busé sous la chaussée dont l'exutoire est prolongé, en sortie de buse, par la réalisation d'un ouvrage maçonné, qualifié par la commune de " langue de béton " ; qu'il est constant que l'ouvrage public que constitue la canalisation empiète sur une faible longueur, pour cette partie située en sortie du passage busé, sur la parcelle appartenant à M.C..., lequel n'a pas donné son accord à la réalisation de cette langue de béton sur sa propriété, dont il n'est ni établi, ni même allégué qu'elle serait grevée d'une servitude au profit de la commune de Reugny ; que, dans ces conditions, M. C...est fondé à soutenir que la partie de l'ouvrage public empiétant sur sa propriété est irrégulièrement implantée ;

En ce qui concerne les possibilités de régularisation :

4. Considérant, en premier lieu, qu'en vue de rechercher si une régularisation de l'ouvrage est possible, il n'y a pas lieu pour le juge administratif d'examiner celles des solutions proposées par le propriétaire privé qui impliquent nécessairement, non le maintien de l'ouvrage en litige, mais son déplacement ou sa destruction ; que dès lors est sans incidence la proposition émanant de M. C...consistant à dévier les eaux vers un autre fossé communal en empruntant une parcelle lui appartenant ;

5. Considérant, en second lieu, que si la commune de Reugny a proposé de pénétrer sur la propriété de M. C...afin de procéder à l'enlèvement de l'ouvrage en cause, elle n'a pas donné suite à cette proposition dès lors que M. C...conditionnait son acceptation à la condition que la commune fasse les travaux nécessaires pour qu'aucun écoulement d'eaux usées ou pluviales en provenance d'immeubles ne lui appartenant pas n'intervienne sur la parcelle YE n°19 ; qu'il ne résulte de l'instruction ni que M. C...soit disposé à céder le sol de la partie du terrain sur laquelle est implanté l'exutoire en litige, ni qu'il soit disposé à consentir une quelconque servitude aux fins de régulariser cet ouvrage ;

6. Considérant que, compte tenu de ce qui vient d'être dit, il ne résulte pas de l'instruction qu'une régularisation appropriée de l'ouvrage serait possible ;

En ce qui concerne la demande d'enlèvement :

7. Considérant que M.C..., qui n'est recevable à demander l'enlèvement que de la seule partie de la canalisation implantée sur sa propriété en fonction des avantages et inconvénients consécutifs à cette emprise irrégulière, ne peut utilement invoquer, au soutien de cette demande, les nuisances qui résulteraient selon lui de l'ensemble des ouvrages mis en place par la commune de Reugny au printemps 2012 ; que l'ouvrage maçonné implanté irrégulièrement sur la parcelle du requérant n'a pas, par lui-même, pour effet d'aggraver l'écoulement des eaux de ruissellement sur cette parcelle ; que le requérant ne conteste pas que la mise en place de cette surface de béton, de dimensions modestes, permet d'éviter l'érosion du sol que l'écoulement des eaux causerait au talus, lequel borde immédiatement la route de la Lande ; que, dans ces conditions, compte tenu des inconvénients limités qu'entraîne l'implantation de l'ouvrage maçonné implanté irrégulièrement sur la parcelle du requérant et de l'utilité que présente cet ouvrage, son enlèvement entraînerait une atteinte excessive à l'intérêt général ;

Sur les conclusions tendant à ce que la cour fasse injonction à la commune de Reugny de faire cesser tout écoulement sur la parcelle :

8. Considérant, d'une part, que si M. C...se prévaut des dispositions de l'article 640 du code civil qui, instituant une servitude d'écoulement des eaux au détriment des fonds inférieurs, interdisent au propriétaire supérieur de rien faire qui aggrave cette servitude, ces dispositions ne peuvent, en tout état de cause, être utilement invoquées à l'encontre d'une demande tendant à faire cesser le surcroît d'écoulements qui résulterait de la réalisation d'un ouvrage public ;

9. Considérant, d'autre part, que M. C...allègue que certaines des habitations desservies par la nouvelle canalisation ne seraient pas équipées de systèmes d'assainissement autonomes conformes à la réglementation, ce qui entrainerait selon lui des risques de pollution pesant sur l'étang existant sur sa parcelle, ainsi que les risques sanitaires liés à la pratique de la pêche sur ce même plan d'eau ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que l'ensemble des constructions possèdent actuellement des systèmes d'assainissement non collectifs dont la régularité a été vérifiée par le syndicat d'assistance technique pour l'épuration et le suivi des eaux (Satese) d'Indre-et-Loire, à l'exception d'une habitation pour laquelle l'installation d'un tel système est d'ores et déjà prévu selon un devis accepté, et d'une autre, actuellement inhabitée et pour laquelle la commune de Reugny indique qu'en cas de vente, l'obligation de mise aux normes sera portée sur le certificat d'urbanisme ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Reugny, qui n'a pas dans la présente instance la qualité de partie perdante, la somme que demande M. C...au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. C...le versement à la commune de Reugny d'une somme au même titre ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Reugny présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et à la commune de Reugny.

Délibéré après l'audience du 18 décembre 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Bachelier, président de la cour,

- M. Francfort, président-rapporteur,

- Mme Piltant, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 janvier 2016.

Le rapporteur,

J. FRANCFORTLe président,

G. BACHELIER

Le greffier,

C. GOY

2

N° 15NT00141


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 15NT00141
Date de la décision : 15/01/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BACHELIER
Rapporteur ?: M. Jérôme FRANCFORT
Rapporteur public ?: M. DURUP de BALEINE
Avocat(s) : SCP CEBRON DE LISLE - BENZEKRI

Origine de la décision
Date de l'import : 21/11/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2016-01-15;15nt00141 ?
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