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12/10/2016 | FRANCE | N°15NT00732

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 12 octobre 2016, 15NT00732


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...D...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 2 juillet 2013 par laquelle l'inspecteur du travail de la 6ème section de l'unité territoriale du Finistère de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) de Bretagne a autorisé son licenciement pour inaptitude physique.

Par un jugement n° 1302867 du 23 janvier 2015, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant

la cour :

Par une requête, enregistrée le 26 février 2015, M.D..., représenté par M...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...D...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 2 juillet 2013 par laquelle l'inspecteur du travail de la 6ème section de l'unité territoriale du Finistère de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) de Bretagne a autorisé son licenciement pour inaptitude physique.

Par un jugement n° 1302867 du 23 janvier 2015, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 26 février 2015, M.D..., représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 23 janvier 2015 ;

2°) d'annuler la décision du 2 juillet 2013 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il lui avait été indiqué à l'inspection du travail de Quimper que l'inspecteur du travail de Beauvais, dont il avait sollicité la compétence, dès lors que le ressort de son lieu de travail était situé dans l'Oise, prendrait son attache ;

- or, le principe du contradictoire a été méconnu puisque ni l'inspecteur du travail de Beauvais, ni celui de Quimper n'ont pris attache avec lui pour qu'il puisse faire valoir ses arguments ;

- il n'a pu se rendre à la convocation de l'inspecteur du travail de Quimper en raison de l'éloignement géographique ;

- alors qu'il réside dans l'Oise, il a été convoqué à un entretien préalable se déroulant à Vern-sur-Seiche à 400 km et la réunion du comité d'entreprise relative à son licenciement a été fixée à Lyon, ville distante d'environ 800 km : faute de moyens mis à sa disposition, il n'a pas pu participer à ces réunions de sorte que les droits de la défense ont été délibérément méconnus.

Par un mémoire, enregistré le 20 mai 2015, la société Somaintel Informatique, représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 200 euros soit mise à la charge de M. D...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'inspecteur du travail de Quimper, lieu du siège social de la société Somaintel Informatique était compétent pour statuer sur la demande d'autorisation de licenciement, dès lors que l'agence de Beauvais, où travaillait M.D..., ne disposait pas d'une autonomie de gestion suffisante ;

- les autres moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 mai 2016, le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la requête est irrecevable en appel à défaut de motivation ;

- aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Millet,

- les conclusions de Mme Piltant, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., représentant la société Somaintel Informatique.

1. Considérant que M.D..., qui était employé par la société Somaintel Informatique depuis le 26 novembre 2010 en qualité de technicien de maintenance en automate bancaire, était représentant syndical au comité d'entreprise de cette société ; que le médecin du travail a déclaré ce dernier inapte à son poste en agence fermée avec la possibilité de l'affecter en atelier, sur poste informatique ou autre, ou en agence ouverte ; que M. D...a rejeté les offres de reclassement proposées par son employeur ; que, par décision du 2 juillet 2013, l'inspecteur du travail de la 6ème section de l'inspection du travail du Finistère a autorisé, à la demande de la société Somaintel Informatique, le licenciement pour inaptitude de l'intéressé ; que M. D...relève appel du jugement du 23 janvier 2015 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant, en premier lieu, que, lorsque le licenciement d'un délégué du personnel ou d'un membre élu du comité d'entreprise titulaire ou suppléant, d'un représentant syndical au comité d'entreprise ou d'un représentant des salariés au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail est envisagé par l'employeur, l'article L. 2421-3 du code du travail prévoit que : " (...) La demande d'autorisation de licenciement est adressée à l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement dans lequel le salarié est employé (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que l'inspecteur du travail compétent pour se prononcer sur une demande d'autorisation de licencier un salarié protégé est celui dans le ressort duquel se trouve l'établissement disposant d'une autonomie de gestion suffisante où le salarié est affecté ou rattaché et, à défaut, celui dans le ressort duquel se trouve le siège social de l'entreprise qui emploie le salarié, même lorsque cette entreprise appartient à un groupe ;

3. Considérant que si M.D..., qui était affecté à une agence de la société Somaintel Informatique implantée à Beauvais, soutient que l'inspecteur du travail du ressort de cette ville était compétent pour conduire l'enquête contradictoire, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'agence de Beauvais aurait été dotée d'un comité d'établissement ou aurait disposé d'une autonomie de gestion suffisante permettant d'établir la compétence de l'inspecteur du travail de l'Oise ; que, dès lors, l'inspecteur compétent pour entendre le salarié était celui dans le ressort duquel se trouvait le siège social de l'entreprise qui l'employait; qu'il est constant que la demande d'autorisation de licenciement adressée à l'inspecteur du travail de Quimper (29) émanait de la direction des ressources humaines rattachée fonctionnellement au siège social de l'entreprise basé dans cette dernière ville ; qu'ainsi, l'inspecteur du travail de la 6ème section de l'inspection du travail du Finistère était seul compétent pour mener l'enquête contradictoire, sans que celle-ci puisse être déléguée à l'inspecteur du travail de Beauvais ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R. 2421-11 du code du travail : " L'inspecteur du travail procède à une enquête contradictoire au cours de laquelle le salarié peut, sur sa demande, se faire assister d'un représentant de son syndicat (...) " ; que cette disposition implique, pour le salarié dont le licenciement est envisagé, le droit d'être entendu personnellement et individuellement par l'inspecteur du travail ; que, toutefois, un tel droit n'est pas méconnu lorsque le salarié, régulièrement convoqué par l'inspecteur du travail, s'abstient de donner suite à la convocation sans motif légitime ;

5. Considérant que M. D...soutient que ni l'inspecteur du travail de Beauvais, ni celui de Quimper n'ont pris attache avec lui pour qu'il puisse faire valoir ses arguments ; que, toutefois, l'inspecteur du travail de Beauvais, ainsi qu'il vient d'être dit, n'était pas compétent pour mener l'enquête visée par les dispositions précitées ; qu'il ressort, en outre, des pièces du dossier que l'inspecteur du travail de la 6ème section du Finistère a adressé à M. D...une convocation, par courrier recommandé avec demande d'avis de réception du 30 mai 2013, pour l'enquête contradictoire devant se tenir le 12 juin 2013 ; que si ce pli a été retiré par M. D...le 4 juin 2013, l'intéressé n'a pas déféré à cette convocation, sans que son éloignement géographique puisse être regardé comme un motif légitime susceptible de justifier sa non présentation devant l'inspecteur du travail ; qu'en outre, l'intéressé n'a pas donné suite au second courrier du 17 juin 2013 par lequel l'inspecteur du travail de Quimper l'invitait à faire part de ses observations par tout moyen approprié pour le 28 juin 2013 ; que, dès lors, c'est du propre fait du requérant, qui a retiré ce pli le 20 juin 2013, que l'entretien avec l'inspecteur du travail compétent n'a pu avoir lieu ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe du contradictoire doit être écarté ;

6. Considérant, en troisième et dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 1232-2 du code du travail : " L'employeur qui envisage de licencier un salarié le convoque, avant toute décision, à un entretien préalable. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 1232-1 du même code : " La lettre de convocation prévue à l'article L. 1232-2 indique l'objet de l'entretien entre le salarié et l'employeur. / Elle précise la date, l'heure et le lieu de cet entretien. / Elle rappelle que le salarié peut se faire assister pour cet entretien par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise ou, en l'absence d'institutions représentatives dans l'entreprise, par un conseiller du salarié. " ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'impose que l'entretien préalable doive se dérouler sur le lieu de travail du salarié, ni au siège social de l'entreprise ; qu'il en va de même de la réunion du comité d'entreprise ;

7. Considérant que si M. D...soutient qu'il a été convoqué à un entretien préalable se déroulant à Vern-sur-Seiche (35) alors qu'il réside dans l'Oise, à une distance supérieure à 400 km, et que la réunion du comité d'entreprise relative à son licenciement a été fixée à Lyon, il ne saurait utilement se prévaloir de l'absence de moyen mis à sa disposition pour se rendre à ces rendez-vous, alors qu'il est constant qu'il disposait d'un véhicule de service pour se rendre aux convocations en cause ; que, par suite, le moyen tiré du vice de procédure doit, en tout état de cause, être écarté ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée par le ministre, que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que M. D...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de mettre à la charge de M. D...la somme de 1 000 euros à payer à la société Somaintel Informatique au titre des frais de même nature qu'elle a exposés ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.

Article 2 : M. D...versera la somme de 1 000 euros (mille euros) à la société Somaintel Informatique en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...D..., à la société Somaintel Informatique et au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

Délibéré après l'audience du 27 septembre 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- M. Millet, président-assesseur,

- Mme Buffet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 octobre 2016.

Le rapporteur,

J-F. MILLET

Le président,

A. PÉREZLe greffier,

S. BOYÈRE

La République mande et ordonne au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision

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N° 15NT00732

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 15NT00732
Date de la décision : 12/10/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Jean-Frédéric MILLET
Rapporteur public ?: Mme PILTANT
Avocat(s) : HASSANI

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2016-10-12;15nt00732 ?
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