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09/01/2017 | FRANCE | N°15NT02119

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 09 janvier 2017, 15NT02119


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

MmeH..., agissant en tant que mandataire des successions de M. et MmeA..., a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté en date du 13 décembre 2012 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine a déclaré cessible au profit de la commune de Saulnières ou de son concessionnaire, la société d'aménagement et de développement d'Ille-et-Vilaine (SADIV), la parcelle cadastrée section ZK n° 6 située dans cette commune.

Par un jugement n° 1302428 du 29 mai 2015, le tribunal administratif

de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

MmeH..., agissant en tant que mandataire des successions de M. et MmeA..., a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté en date du 13 décembre 2012 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine a déclaré cessible au profit de la commune de Saulnières ou de son concessionnaire, la société d'aménagement et de développement d'Ille-et-Vilaine (SADIV), la parcelle cadastrée section ZK n° 6 située dans cette commune.

Par un jugement n° 1302428 du 29 mai 2015, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 16 juillet 2015 et les 31 mai et 14 octobre 2016, MmeH..., agissant es qualités, représentée par MeF..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 29 mai 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté de cessibilité du 13 décembre 2012 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me H...es-qualité d'une somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- Sur la régularité du jugement attaqué : cette décision est entachée d'insuffisance de motivation dès lors que le tribunal administratif n'a répondu ni au moyen selon lequel une nouvelle enquête publique devait être organisée alors que les propriétaires n'étaient pas connus dès le début de la procédure, ni au grief tiré de la confusion entre la procédure d'enquête publique, de droit commun et environnementale ;

- Sur la légalité de la décision contestée

I - l'arrêté de cessibilité en litige a été pris pour l'exécution d'une déclaration d'utilité publique elle-même illégale, car

- le dossier transmis au préfet ne comprenait pas l'étude d'impact, en violation du I de l'article R. 11-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

- le choix de la procédure d'enquête publique est entaché de confusion, ce qui a porté atteinte aux garanties offertes au public ; l'article R 11-4 du code de l'expropriation a été méconnu car le commissaire enquêteur a été désigné pour conduire les enquêtes publiques conjointes qui se sont déroulées du 2 au 16 février 2010 par une décision du tribunal administratif, et non par une décision du préfet ; le commissaire enquêteur a procédé à une visite des lieux, ce qu'il ne pouvait pas faire dans le cadre d'une enquête de droit commun ; l'arrêté d'ouverture d'enquête du 31 décembre 2009 vise les dispositions applicables aux enquêtes de droit commun, tandis que l'arrêté déclaratif d'utilité publique du 21 juin 2010 vise celles applicables aux enquêtes environnementales ; il a été produit à l'enquête une étude d'impact comme celle définie à l'article R. 122-3 du code de l'environnement lorsque les ouvrages et les travaux n'en sont pas dispensés

- le dossier d'enquête publique est incomplet : les caractéristiques des ouvrages les plus importants sont insuffisamment précisés ; l'appréciation sommaire des dépenses est insuffisante et manifestement sous-évaluée ; l'étude d'impact est insuffisante, en ce qui concerne les effets sur l'environnement et la santé ; les risques et mesures relatifs à la sécurité n'y sont pas appréhendés.

- l'article L. 123-16 du code de l'urbanisme alors en vigueur a été méconnu : les enquêtes publiques relatives à la modification du plan d'occupation des sols et celle préalable à la déclaration d'utilité publique sont concomitantes et non successives ; le recours à deux enquêtes distinctes n'est pas justifié ; en outre, l'acte déclaratif d'utilité publique n'a fait l'objet ni d'un examen conjoint des autorités énumérées à l'article L. 123-16 du code de l'urbanisme ni d'un avis du conseil municipal de Saulnières ;

- l'utilité publique du projet n'est pas démontrée : le recours à l'expropriation n'était pas nécessaire dès lors, d'une part, que l'initiative privée n'était pas défaillante, les propriétaires de la parcelle ayant trouvé un acquéreur ayant l'intention de réaliser l'opération envisagée et d'autre part que le coût financier du projet et les atteintes qu'il porte à la propriété privée sont excessifs au regard de l'intérêt qu'il présente ;

II - Les vices entachant la procédure d'enquête de cessibilité doit conduire à l'annulation de l'arrêté de cessibilité du 13 décembre 2012 ;

- l'ensemble des propriétaires concernés par le projet d'aménagement et de restructuration du centre-bourg n'étaient pas connus par la commune de Saulnières dès le début de la procédure d'enquête : dès lors, les conditions d'application de la procédure d'enquêtes conjointes d'utilité publique et parcellaire prévue par l'article R. 11-21 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique et celles de la procédure simplifiée prévue par l'article R. 11-30 du même code, n'étaient pas réunies ; il appartenait à la commune de Saulnières, à défaut de connaître l''identité du propriétaire le parcelle, de procéder à l'assignation d'un mandataire en application de l'article R. 11-22 ;

- les consorts A...ne figuraient pas sur l'état parcellaire et n'ont pas reçu les informations obligatoires relatives aux enquêtes conjointes qui se sont déroulées en février 2010, en violation des articles R. 11-20 à R. 11-22 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

- dans la mesure où les conditions d'application de l'article R. 11-30 n'étaient pas remplies, la commune de Saulnières aurait dû procéder à une nouvelle enquête parcellaire dans les conditions fixées par les articles R. 11-19 et suivants du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ; en l'occurrence, les procédures d'affichage de l'arrêté d'ouverture d'enquête parcellaire et de notification du dépôt du dossier d'enquête parcellaire en mairie n'ont pas été respectées.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 mai et 29 août 2016, la commune de Saulnières, représentée par MeC..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 4 500 euros soit mise à la charge de Me H...es-qualité au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 octobre 2016, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient :

- que la requête est irrecevable, à défaut de comporter une critique de l'analyse effectuée par les premiers juges ;

- qu'au cas où la cour admettrait la recevabilité de la requête, il s'associe aux moyens de la commune de Saulnières.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le décret n° 55-22 du 4 janvier 1955 portant réforme de la publicité foncière ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Francfort, président-assesseur,

- les conclusions de M. Durup de Baleine, rapporteur public,

- les observations de MeF..., représentant MeH..., et de MeD..., représentant la commune de Saulnières.

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la commune de Saulnières met en oeuvre un projet d'aménagement et de restructuration de son centre-bourg, lequel consiste à rénover un quartier central de la commune, constitué d'anciennes friches et de hangars désaffectés, et à urbaniser une parcelle agricole d'environ 2,4 ha située au sud de ce secteur ; que ce projet implique notamment une modification de la voirie, la création d'espaces et de bâtiments publics et la réalisation de 68 logements ; qu'à défaut pour la commune d'avoir la maitrise foncière de l'ensemble du périmètre de l'opération, le conseil municipal a sollicité du préfet d'Ille-et-Vilaine, par délibération du 28 avril 2009, l'ouverture conjointe d'une enquête préalable à la déclaration d'utilité publique et d'une enquête parcellaire ; qu'après l'organisation de cette enquête, qui s'est déroulée du 1er au 16 février 2010 et a donné lieu à un avis favorable du commissaire enquêteur, le préfet d'Ille-et-Vilaine a déclaré d'utilité publique le projet d'aménagement et de restructuration du centre-bourg de Saulnières par un arrêté en date du 21 juin 2010 ; qu'après une enquête parcellaire complémentaire, qui s'est déroulée du 11 au 27 juillet 2012, le préfet d'Ille-et-Vilaine a, par arrêté en date du 13 décembre 2012, déclaré cessible au profit de la commune de Saulnières ou de son concessionnaire, la société d'aménagement et de développement d'Ille-et-Vilaine (SADIV), la parcelle cadastrée section ZK n°6, d'une superficie de 24 080 m², située au lieu-dit " L'Eglise ", qui appartenait à Mme E...épouseA..., décédée le 30 juin 2005 ; que MeH..., relève appel, en sa qualité d'administrateur judiciaire mandataire de la succession de MmeA..., du jugement en date du 29 mai 2015 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté de cessibilité du 13 décembre 2012 ;

Sur les conclusions à fins d'annulation, sans qu'il soit nécessaire de statuer sur la fin de non recevoir opposée par le ministre de l'intérieur :

En ce qui concerne l'exception d'illégalité de la déclaration d'utilité publique du 21 juin 2010 :

S'agissant des vices de procédure dont serait entachée l'enquête publique conjointe :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 11-21 du code de l'expropriation alors en vigueur: " Lorsque l'expropriant est en mesure, avant la déclaration d'utilité publique, de déterminer les parcelles à exproprier et de dresser le plan parcellaire et la liste des propriétaires, l'enquête parcellaire peut être faite soit en même temps que l'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique, soit postérieurement " ; que Me H...soutient que la commune de Saulnières ne pouvait, dans l'ignorance de l'identité des propriétaires de la parcelle cadastrée ZK n°6, solliciter l'organisation d'une enquête publique conjointe sur le fondement de ces dispositions ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 11-28 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique alors en vigueur : " Sur le vu du procès-verbal et des documents y annexés, le préfet, par arrêté, déclare cessibles les propriétés ou parties de propriétés dont la cession est nécessaire. Ces propriétés sont désignées conformément aux dispositions de l'article 7 du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955 portant réforme de la publicité foncière et l'identité des propriétaires est précisée conformément aux dispositions de l'alinéa 1er de l'article 5 de ce décret (...) " ; qu'aux termes de l'article 5 du décret du 4 janvier 1955 : " Tout acte ou décision judiciaire sujet à publicité dans un bureau des hypothèques doit contenir les nom, prénoms dans l'ordre de l'état civil, domicile, date et lieu de naissance et profession des parties, ainsi que le nom de leur conjoint " ; et qu'aux termes de l'article 7 du même décret : " Tout acte ou décision judiciaire sujet à publicité dans un bureau des hypothèques doit indiquer pour chacun des immeubles qu'il concerne la nature, la situation, la contenance et la désignation cadastrale (section, numéro du plan et lieudit) " ;

4. Considérant, d'une part, qu'en application de ces dernières dispositions le préfet est tenu, pour désigner les fonds qu'il rend cessibles et leurs propriétaires, de reproduire les mentions publiées au fichier immobilier du bureau des hypothèques ; que si, à la date de l'enquête publique conjointe, Mme E... épouseA..., auteur de la succession représentée par Me H...et propriétaire de la parcelle ZK 6, était décédée, il est constant que la transmission de ses biens n'était pas réalisée et n'avait fait l'objet d'aucune publication au fichier immobilier du bureau des hypothèques, les héritiers ayant, s'agissant de ce terrain ici en cause, différé l'acceptation de la succession ; que, par suite, l'arrêté de cessibilité litigieux a fait une exacte application de l'article R.11-21 précité du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique en reproduisant les mentions relatives à Mme E...; que dans la mesure où Mme E...était la seule propriétaire connue au sens des mêmes dispositions, la commune n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article R. 11-21 en organisant une enquête publique conjointe ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R. 11-4 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, alors en vigueur : " (...) Lorsque l'enquête est préalable à une déclaration d'utilité publique, le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête sont désignés dans les conditions fixées à l'article R. 11-14-3 " ; et qu'aux termes de l'article R. 11-14-3 : " Le préfet saisit, en vue de la désignation d'un commissaire enquêteur ou d'une commission d'enquête, le président du tribunal administratif dans le ressort duquel doit être réalisée l'opération ou la plus grande partie de l'opération soumise à enquête et lui adresse à cette fin une demande précisant l'objet de l'enquête ainsi que la période d'enquête retenue. " ; qu'il résulte de ces dispositions que Me H...n'est pas fondée à mettre en cause la compétence du président du tribunal administratif de Rennes pour procéder, par une ordonnance du 26 novembre 2009, à la désignation du commissaire-enquêteur ;

6. Considérant, en troisième lieu, que s'il résulte du rapport d'enquête que le commissaire-enquêteur a procédé à une visite des lieux en compagnie du maire, il ne peut s'en déduire qu'il aurait, à cette occasion, pénétré sur des propriétés privées ; que la requérante n'est dès lors et en tout état de cause pas fondée à invoquer les dispositions de l'article R. 123-18 du code de l'environnement qui encadrent ce type de visite ;

7. Considérant, en quatrième lieu, que Me H...allègue que l'enquête conjointe d'utilité publique et de cessibilité serait entachée d'une confusion sur la procédure mise en oeuvre, de nature à nuire à la bonne information du public ;

8. Considérant, d'une part, que les erreurs ou omissions dans les visas d'un texte ne constituent pas une irrégularité de nature à entraîner l'annulation d'une décision pour excès de pouvoir ; que Me H...ne peut dès lors invoquer utilement la discordance constatée entre les visas de l'arrêté d'ouverture d'enquête, lesquels correspondent aux articles R. 11-3 à R. 11-4 du code de l'expropriation alors applicables, qui réglementaient les seules enquêtes publiques de droit commun, et ceux de l'arrêté déclaratif d'utilité publique du 21 juin 2010, qui font mention des articles R. 14-1 à R 11-14-15 du même code, applicables aux seules enquêtes publiques environnementales ;

9. Considérant, d'autre part, que la circonstance que la commune de Saulnières ait joint au dossier d'enquête publique conjointe une étude d'impact, alors que cette dernière pièce n'était pas rendue obligatoire par la réglementation, n'a pas été source de confusion pour le public, mais a au contraire contribué à une meilleure information des personnes intéressées ;

10. Considérant, en cinquième lieu, que si MeH..., agissant pour les consortsA..., soutient que ces derniers n'ont pu faire valoir leurs droits à l'occasion de l'enquête publique conjointe organisée en février 2010, la requérante ne démontre ni même ne soutient que l'arrêté portant ouverture de l'enquête publique conjointe n'aurait pas fait l'objet des formalités de publicité rendues obligatoires par les dispositions prévues à l'article R. 11-20 du code de l'expropriation, dans le but d'assurer l'information de la population ;

S'agissant de la composition du dossier de l'enquête publique conjointe :

11. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 11-3 du code de l'expropriation alors en vigueur : " L'expropriant adresse au préfet pour être soumis à l'enquête un dossier qui comprend obligatoirement : (...) I.- Lorsque la déclaration d'utilité publique est demandée en vue de la réalisation de travaux ou d'ouvrages : 6° L'étude d'impact définie à l'article R. 122-3 du code de l'environnement, lorsque les ouvrages ou travaux n'en sont pas dispensés ou, s'il y a lieu, la notice exigée en vertu de l'article R. 122-9 du même code " ;

12. Considérant, d'une part, qu'il résulte de ces dispositions que l'étude d'impact environnementale n'est pas exigible pour l'ensemble des enquêtes publiques préalables à une déclaration d'utilité publique, mais seulement pour les opérations tendant à la réalisation de travaux ou d'ouvrages expressément soumises à une telle étude ; qu'il résulte des dispositions du tableau annexé à l'article R. 123-1 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable à la présente espèce, qu'étaient notamment dispensés d'étude d'impact les lotissements prévus dans les communes dotées d'un plan local d'urbanisme ou d'un plan d'occupation des sols ; qu'à la date d'ouverture de l'enquête publique la commune de Saulnières disposait d'un plan d'occupation des sols, approuvé le 30 juin 1992 ; qu'ainsi, alors qu'au demeurant la requérante ne démontre ni même ne soutient que l'opération envisagée était soumise à une telle étude, il résulte des pièces du dossier que les travaux et constructions envisagés dans le cadre du projet poursuivi par la commune étaient dispensés d'étude d'impact ; que, dans ces conditions, si un document intitulé "étude d'impact" figurait au dossier soumis à l'enquête publique, le moyen tiré de ce que ledit document aurait été insuffisant au regard des prescriptions de l'article R. 122-3 du code de l'environnement alors en vigueur est inopérant ;

13. Considérant, d'autre part, que dès lors que Me H...ne démontre pas qu'une étude d'impact était rendue obligatoire au cas particulier, elle n'est en tout état de cause pas fondée à invoquer l'éventuelle absence de ce document à l'occasion des débats qui ont précédé l'adoption de la délibération du 28 avril 2009 par laquelle le conseil municipal a sollicité du préfet d'Ille-et-Vilaine l'organisation d'une enquête publique conjointe ;

14. Considérant, en second lieu, que si Me H...critique le dossier d'enquête pour ne pas comporter, relativement, d'une part, aux caractéristiques des ouvrages les plus importants et, d'autre part, à l'appréciation sommaire des dépenses, les précisions nécessaires au regard de la composition du dossier telle qu'elle était prévue par les dispositions alors en vigueur de l'article R. 11-3 du code de l'expropriation, elle se borne à reprendre en appel, sans la préciser ni l'assortir de justifications nouvelles, l'argumentation développée devant les premiers juges, lesquels y ont suffisamment et justement répondu ; qu'il y a lieu, dès lors, d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif ;

S'agissant de la compatibilité de l'opération envisagée avec les dispositions locales d'urbanisme :

15. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le plan d'occupation de commune de Saulnières, dont les dispositions ne permettaient pas la réalisation du projet urbain en cause, a fait l'objet, après une enquête publique organisée du 1er février au 4 mars 2016, d'une modification, approuvée par délibération du conseil municipal du 8 avril 2010 ; que la déclaration d'utilité publique prise par le préfet d'Ille-et-Vilaine le 21 juin 2010 était dès lors, à cette dernière date, compatible avec les prescriptions du plan d'occupation des sols ainsi modifié ; que la requérante n'est par suite pas fondée à soutenir que cet arrêté déclaratif d'utilité publique serait intervenu en méconnaissance des dispositions de l'article L. 123-16 du code de l'urbanisme, selon lesquelles, dans leur rédaction alors en vigueur " La déclaration d'utilité publique (...) d'une opération qui n'est pas compatible avec les dispositions d'un plan local d'urbanisme ne peut intervenir que si a) L'enquête publique concernant cette opération a porté à la fois sur l'utilité publique ou l'intérêt général de l'opération et sur la mise en compatibilité du plan qui en est la conséquence " ;

S'agissant de l'utilité publique de l'opération :

16. Considérant qu'il appartient au juge, lorsqu'il doit se prononcer sur le caractère d'utilité publique d'une opération nécessitant l'expropriation d'immeubles ou de droits réels immobiliers, de contrôler successivement qu'elle répond à une finalité d'intérêt général, que l'expropriant n'était pas en mesure de réaliser l'opération dans des conditions équivalentes sans recourir à l'expropriation, notamment en utilisant des biens se trouvant dans son patrimoine et, enfin, que les atteintes à la propriété privée, le coût financier et, le cas échéant, les inconvénients d'ordre social ou économique que comporte l'opération ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente ;

17. Considérant, d'une part, que la conduite d'une opération d'aménagement urbain telle que celle en litige, visant au développement d'une nouvelle offre d'habitat dans le cadre d'un lotissement, jumelée à une intervention sur les friches artisanales dans le but de prévoir de nouveaux espaces publics et l'extension de l'école, est au nombre des opérations pour la réalisation desquelles l'expropriation pour cause d'utilité publique peut être légalement autorisée alors même que l'initiative privée ne serait pas défaillante ; que d'ailleurs, si la requérante invoque la volonté de la société Terrain Services, à laquelle elle a consenti une promesse de vente, de réaliser le lotissement prévu sur la parcelle de MmeE..., il ne résulte en tout état de cause pas des pièces du dossier que cette société aurait conduit l'opération dans des conditions identiques à celles souhaitées par la commune, laquelle avait au demeurant concédé la réalisation de cet aménagement à une société tierce dès le 16 avril 2007, selon les procédures d'aménagement prévues par le code de l'urbanisme ;

18. Considérant, d'autre part, que Me H...ne démontre pas que les coûts liés à l'opération, évalués à 1 300 000 euros, auraient été sous-estimés ou excessifs eu égard à l'utilité publique du projet ; qu'elle ne justifie pas davantage que les atteintes portées à la propriété privée, qu'elle ne détaille pas, ôteraient au projet son caractère d'utilité publique ;

19. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à exciper, au soutien de ses conclusions dirigées contre l'arrêté de cessibilité du 13 décembre 2012, de l'illégalité de l'arrêté déclaratif d'utilité publique du 21 juin 2010 ;

En ce qui concerne les moyens dirigés directement contre l'arrêté de cessibilité du 13 décembre 2012 :

20. Considérant qu'aux termes de l'article R.11-30 du code de l'expropriation : "Lorsque dans une commune tous les propriétaires sont connus dès le début de la procédure, le préfet peut, pour cette commune, dispenser l'expropriant du dépôt du dossier à la mairie et de la publicité collective prévue à l'article R. 11-20./ Dans ce cas, un extrait du plan parcellaire est joint à la notification prévue à l'article R. 11-22 et les intéressés sont invités à faire connaître directement leurs observations au commissaire enquêteur ..." ;

21. Considérant, d'une part, que Me H...soutient que la procédure simplifiée décrite par ces dispositions ne pouvait être mise en oeuvre à l'occasion de l'enquête complémentaire de cessibilité, à défaut pour la commune de Saulnières d'avoir précisément identifié les propriétaires de la parcelle cadastrée ZK n°6, les héritiers de cette propriété n'étant pas connus ;

22. Considérant, ainsi qu'il a été dit au point 4, que malgré son décès survenu en 2005 Mme E...apparaissait au regard de la publicité foncière comme la seule propriétaire de la parcelle ZK 6, unique propriété visée par cette enquête complémentaire de cessibilité ; qu'ainsi la commune de Saulnières se trouvait dans le cas, visé par les dispositions précitées, où elle pouvait solliciter l'organisation d'une enquête de cessibilité sous la forme simplifiée, tout en faisant apparaître Mme E...épouse A...comme propriétaire de la parcelle ;

23. Considérant, d'autre part, que Me H...soutient que les consorts A...n'ont pu faire valoir leurs droits à l'occasion de l'enquête complémentaire de cessibilité de juillet 2012 ; qu'il résulte toutefois du rapport du commissaire-enquêteur que les héritiers présomptifs de Mme E...se sont vus notifier l'entier dossier de cessibilité dans les formes prévues par les dispositions précitées de l'article R. 11-30 du code de l'expropriation ; que la circonstance que ces notifications n'aient pas abouti, ainsi qu'il résulte également du rapport du commissaire enquêteur, n'est pas de nature à établir que la commune de Saulnières n'aurait pas satisfait aux obligations qui lui incombaient en la matière ; qu'au surplus il résulte des pièces du dossier que les héritiers présomptifs de Mme E...ont participé à l'enquête simplifiée en faisant valoir auprès du commissaire enquêteur, par l'intermédiaire du mandataire de la succession, qu'ils avaient signé une promesse de vente concernant le bien en cause ;

24. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme H...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, lequel est suffisamment motivé, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

25. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Saulnières, qui n'a pas dans la présente instance la qualité de partie perdante, la somme que demande Me H...au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Me H...es-qualité le versement à la commune de Saulnières d'une somme de 1 500 euros au même titre ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de MeH..., mandataire de la succession de M. et Mme G...A..., est rejetée.

Article 2 : MeH..., es-qualité, versera à la commune de Saulnières une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Me H..., à la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité, au ministre de l'intérieur et à la commune de Saulnières.

Délibéré après l'audience du 16 décembre 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Francfort, président-assesseur,

- M. Mony, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 9 janvier 2017.

Le rapporteur,

J. FRANCFORTLe président,

H. LENOIR

Le greffier,

C. GOY

2

N° 15NT02119


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 15NT02119
Date de la décision : 09/01/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: M. Jérôme FRANCFORT
Rapporteur public ?: M. DURUP de BALEINE
Avocat(s) : CHARBONNEL

Origine de la décision
Date de l'import : 26/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-01-09;15nt02119 ?
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