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17/03/2017 | FRANCE | N°15NT02064

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 17 mars 2017, 15NT02064


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'organisation de producteurs des pêcheurs artisans de l'île de Noirmoutier (OPPAN) et M. D...B...ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 6 septembre 2012 par laquelle le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie a refusé de modifier les antériorités de pêche de sole et de baudroie des navires Corto Maltese II et Mare Liberum pour les années 2001, 2002 et 2003.

Par un jugement n° 1210538 du 5 juin 2015, le tribunal administratif de Nantes a

rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'organisation de producteurs des pêcheurs artisans de l'île de Noirmoutier (OPPAN) et M. D...B...ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 6 septembre 2012 par laquelle le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie a refusé de modifier les antériorités de pêche de sole et de baudroie des navires Corto Maltese II et Mare Liberum pour les années 2001, 2002 et 2003.

Par un jugement n° 1210538 du 5 juin 2015, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 9 juillet 2015 et le 7 juillet 2016, l'organisation de producteurs des pêcheurs artisans de l'île de Noirmoutier (OPPAN) et M. D... B..., représentés par Me A..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 5 juin 2015 ;

2°) d'annuler la décision du 6 septembre 2012 par laquelle le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie a refusé de prendre en compte les antériorités de pêche de sole et de baudroie des navires Corto Maltese II et Mare Liberum pour les années 2001, 2002 et 2003 telles qu'avancées par eux ;

3°) d'enjoindre à la direction des pêches maritime et de l'aquaculture de reconnaître les antériorités réelles du navire Mare Liberum, à savoir, pour la sole, 32 440 kg pour 2001, 55 215 kg pour 2002 et 31 680 kg pour 2003 et, pour la baudroie, 3 615 kg pour 2001, 20 590 kg pour 2002 et 51 530 kg pour 2003 ;

4°) d'enjoindre à la direction des pêches maritime et de l'aquaculture de reconnaître les antériorités réelles du navire Corto Maltese II, à savoir, pour la sole, 48 510 kg pour 2001, 65 680 kg pour 2002 et 33 690 kg pour 2003 et, pour la baudroie, 45 kg pour 2001, 11 610 kg pour 2002 et 25 160 kg pour 2003 ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- ils agissent chacun dans cette affaire pour la défense de leurs intérêts propres et ont qualité pour le faire ;

- la décision du 6 septembre 2012 leur fait grief dès lors qu'elle a un impact sur le volume de sous-quotas que l'administration leur a attribués ;

- il résulte de l'arrêté du 18 juillet 1990 relatif à l'obligation de déclaration statistique en matière de produits de la pêche maritime que les journaux de bord sont un support reconnu par l'administration pour la déclaration des informations de pêche et qu'ils constituent donc un élément de preuve recevable pour établir les antériorités de pêche de chaque navire ;

- l'administration comme les juges de première instance ne peuvent rejeter les éléments qu'ils ont produits à l'appui de leur demande au motif qu'ils ne comportent pas d'indications sur les zones de pêche, alors que ces journaux de bord mentionnent systématiquement cette information ;

- contrairement à ce qui est indiqué dans la décision contestée du 6 septembre 2012, les éléments transmis à l'appui de la demande permettent d'identifier les stocks sur lesquels porte la contestation, et notamment les zones de pêche concernées ;

- les éléments produits montrent la concordance existant entre les journaux de bord, les feuille de vente recueillies auprès de la criée de Noirmoutier et les statistiques relevées par l'OPPAN ;

- l'administration ne peut refuser de tenir compte des journaux de bord produits au motif qu'il n'est pas établi qu'ils lui auraient été transmis dans le délai de 48h prévu par la réglementation, alors qu'il lui appartient d'assurer la collecte des données de capture dans ce délai ;

- l'administration ne peut refuser de tenir compte des notes de vente à la criée, qui figurent parmi les données pouvant être utilisées pour corriger les antériorités, au motif qu'elles ne mentionnent pas les zones de pêche, alors que cette information n'est pas obligatoire.

Par un mémoire en défense enregistré le 1er juin 2016, le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- l'OPPAN a introduit devant le tribunal administratif une demande pour le compte de M. B... mais ne produit pas de mandat en ce sens ;

- le courrier du 6 septembre 2012 n'est pas une décision faisant grief dès lors que l'établissement de l'antériorité des navires n'est qu'un élément préparatoire à la décision de répartition des quotas et n'induit pas un droit à revendiquer des quotas ;

- les autres moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 2 mai 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 3 juin 2016 en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative.

Par ordonnance du 1er juin 2016, la clôture d'instruction a été reportée au 13 juillet 2016 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement (CEE) n°2847/93 du conseil du 12 octobre 1993 instituant un régime de contrôle applicable à la politique commune de la pêche ;

- le règlement (CE) n°2371/2002 du conseil du 20 décembre 2002 relatif à la conservation et à l'exploitation durable des ressources halieutiques dans le cadre de la politique commune de la pêche ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le décret n° 90-94 du 25 janvier 1990 pris pour l'application de l'article 3 du décret du 9 janvier 1852 modifié fixant les conditions générales d'exercice de la pêche maritime dans les eaux soumises à la réglementation communautaire de conservation et de gestion ;

- l'arrêté du 26 décembre 2006 établissant les modalités de répartition et de gestion collective des possibilités de pêche des navires français immatriculés dans la Communauté européenne ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Le Bris,

- les conclusions de M. Giraud, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., représentant l'OPPAN et M.B....

1. Considérant que l'organisation des producteurs pêcheurs de l'île de Noirmoutier (OPPAN) et M.B..., propriétaire des navires Corto Maltese II et Mare Liberum, ont demandé le 17 février 2012 à la direction des pêches maritimes de corriger les antériorités retenues par l'administration pour ces deux navires en vue de l'attribution de quotas de pêche pour la sole et la baudroie ; que, par un courrier du 6 septembre 2012, le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie a refusé de procéder à cette modification ; que l'OPPAN et M. B...relèvent appel du jugement du 5 juin 2015 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cette décision et à ce qu'il soit enjoint au ministre de modifier les antériorités des deux navires en fonction des informations figurant dans leurs journaux de bord ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 20 du règlement n° 2371/2002 du Conseil du 20 décembre 2002 relatif à la conservation et à l'exploitation durable des ressources halieutiques dans le cadre de la politique commune de la pêche : " 1. Le Conseil, statuant à la majorité qualifiée sur proposition de la Commission, arrête les limitations de capture et/ou de l'effort de pêche, la répartition des possibilités de pêche entre les États membres, ainsi que les mesures associées à ces limitations. Les possibilités de pêche sont réparties entre les Etats membres de manière à assurer à chaque État membre une stabilité relative des activités de pêche pour chaque stock ou pêcherie. (...) / 3. Chaque Etat membre décide, pour les navires battant son pavillon, de la méthode d'attribution des possibilités de pêche allouées à cet Etat membre, conformément au droit communautaire. (...)" ; qu'aux termes de l'article 6 du règlement n°2847/93 du Conseil du 12 octobre 1993 instituant un régime de contrôle applicable à la politique commune de la pêche: " Les capitaines des navires de pêche communautaires pêchant des espèces d'un stock ou groupe de stocks tiennent un journal de bord indiquant notamment les quantités de chaque espèce capturées et stockées à bord, la date et le lieu (rectangle statistique CIEM) de ces captures, ainsi que le type d'engin utilisé (...). " ; qu'aux termes de l'article 8 du même règlement : " Le capitaine de tout navire de pêche communautaire d'une longueur hors tout égale ou supérieure à 10 mètres, ou son mandataire, transmet, après chaque sortie et dans les 48 heures suivant le débarquement, une déclaration aux autorités compétentes de l'Etat membre où a eu lieu le débarquement. Le capitaine est responsable de l'exactitude de la déclaration, qui indique au moins les quantités débarquées de chaque espèce visée à l'article 6 paragraphe 2 et la zone où elles ont été capturées (...) "

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 14 du décret du 25 janvier 1990 fixant les conditions générales d'exercice de la pêche maritime dans les eaux soumises à la réglementation communautaire de conservation et de gestion, dans sa rédaction applicable : " Le ministre chargé des pêches maritimes peut, par arrêté, fixer des quotas de captures par espèces ou groupes d'espèces dans les eaux intérieures et dans les eaux territoriales. Lorsque les autorités communautaires allouent un plafond d'effort de pêche pour la capture d'un quota ou d'un ensemble de quotas, le ministre chargé des pêches maritimes peut procéder à la répartition de ce plafond entre les allocataires des sous-quotas. Dans ce cas, il procède à cette répartition en tenant compte des antériorités des producteurs, des orientations du marché et des équilibres économiques." ; que l'article 5 de l'arrêté du 26 décembre 2006 établissant les modalités de répartition et de gestion collective des possibilités de pêche des navires français immatriculés dans la Communauté européenne, intitulé " antériorité des producteurs ", précise que : " - la référence de captures d'un producteur est calculée pour chacun des navires du producteur. Elle est égale, pour une année donnée, à la somme des valeurs des débarquements de ses navires, mesurée en kilogrammes et attestée par les déclarations de débarquement. Ces déclarations peuvent être corrigées à la suite de vérifications administratives en les comparant avec les notes de vente, les données issues du réseau intercriées, et les données de suivi par satellite des positions du ou des navires ; " ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et qu'il n'est pas sérieusement contesté que les antériorités des navires Corto Maltese II et Mare Liberum pour la pêche de la sole et de la baudroie ont été établies sur la base des déclarations de débarquement collectées et exploitées par l'administration au cours de la période allant de 2001 à 2003 ; qu'en vertu des dispositions rappelées aux points 2 et 3 les capitaines de ces deux navires pour cette période étaient responsables de l'exactitude de ces déclarations ; qu'il résulte également de ces dispositions que, si l'administration dispose de la faculté de corriger le contenu des déclarations de débarquement en les comparant, notamment avec les notes de vente, tel n'est pas le cas des propriétaires de navires qui ne peuvent pas, a posteriori, invoquer le caractère erroné des chiffres portés dans les déclarations de débarquement établies par le capitaine du navire en se référant à un contenu des journaux de bord des navires qui serait différent, aux notes de vente en criée ou aux données statistiques fournies par les organisations de producteurs ; que si les requérants produisent devant le juge des copies des journaux de bord du Corto Maltese II et du Mare Liberum dont ils soutiennent qu'elles correspondent au déclarations de débarquement qui auraient été déposées dans les délais prescrits au cours des années 2001 à 2003 et qui feraient apparaître des quantités de pêches supérieures à celles retenues par l'administration, ces documents, communiqués 8 ans après l'attribution des quotas de pêche et sur lesquels la partie réservée à la déclaration de débarquement n'est pas renseignée, ne permettent pas à eux seuls d'établir que l'administration n'aurait pas, à l'époque, procédé correctement à la collecte des déclarations de débarquement et se serait fondée sur des faits matériellement inexacts pour déterminer les antériorités de pêche des deux navires concernés ; que, par suite, l'administration, qui est elle-même soumise aux règles communautaires précédemment énoncées, a pu à bon droit refuser de se fonder sur les éléments fournis par les requérants pour modifier les antériorités faisant l'objet du litige ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non recevoir soulevées par le ministre, que l'OPPAN et M. B...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Considérant que le présent arrêt, qui rejette la requête de l'OPPAN et de M.B..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que par suite, les conclusions des intéressés tendant à ce qu'il soit enjoint à la direction des pêches maritimes et de l'aquaculture de modifier les antériorités définies pour les navires Corto Maltese II et Mare Liberum doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à l'OPPAN et à M. B...de la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête présentée par l'OPPAN et par M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'organisation de producteurs des pêcheurs de l'île de Noirmoutier, à M. D...B..., au ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat et au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.

Délibéré après l'audience du 2 mars 2017, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, président de chambre,

- M. Coiffet, président assesseur,

- Mme Le Bris, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 mars 2017.

Le rapporteur,

Mme Le Bris

Le président,

I. Perrot

Le greffier,

M. C...

La République mande et ordonne au ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°15NT02064


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 15NT02064
Date de la décision : 17/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: Mme Isabelle LE BRIS
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : SELARL JURICA

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-03-17;15nt02064 ?
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