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04/05/2017 | FRANCE | N°15NT01723

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 04 mai 2017, 15NT01723


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... C... a demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la réduction de la cotisation d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2012.

Par un jugement n° 1303956 du 19 mars 2015, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 3 juin et 21 octobre 2015 et le 24 juin 2016, M. A...C..., représenté par MeE..., demande à la cour :

1°) d'annu

ler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 19 mars 2015 ;

2°) de prononcer la réduction de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... C... a demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la réduction de la cotisation d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2012.

Par un jugement n° 1303956 du 19 mars 2015, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 3 juin et 21 octobre 2015 et le 24 juin 2016, M. A...C..., représenté par MeE..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 19 mars 2015 ;

2°) de prononcer la réduction de l'imposition contestée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les premiers juges ont estimé à tort qu'il ne remplissait pas les conditions d'exonération de la plus-value, qu'il a réalisée lors de la cession en 2012 des parts qu'il détenait dans la SARL Les Cars Louis LeC..., prévues par le paragraphe 143 de l'instruction BOI 5-C-1-07 et reprises aux paragraphes 250 et 260 de la documentation administrative BOI-RPPM-PVBMI-20-20-20-40 du 12 septembre 2012 ;

- dans la proposition de rectification du 11 juillet 2014 et par un courrier du 13 octobre 2014 abandonnant le redressement, l'administration a formellement pris position et admis que les conditions d'exonération prévues par l'article 150-0 D ter du code général des impôts sont remplies ;

- toutes les actions ont été cédées en même temps par l'ensemble des actionnaires ;

- la décision de rejet de la réclamation ne précise pas le motif pour lequel l'administration n'a pas appliqué les règles énoncées dans ses propres commentaires ;

- la non-application du régime d'exonération aux cinquante actions provenant de la liquidation de la communauté de biens consécutive au décès de son épouse constituerait une discrimination au sens de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, tous les autres actionnaires ayant bénéficié du régime d'exonération ;

- le bénéfice de l'exonération ne peut lui être refusé dans le cadre de la liquidation de la succession de son épouse alors qu'il lui aurait été accordé en sa qualité d'usufruitier de l'indivision A...C... ;

- l'administration a appliqué à tous ses enfants la documentation administrative dont il se prévaut ;

- sa déclaration rectificative était nécessairement fondée sur cette documentation.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 5 octobre 2015 et les 9 et 30 juin 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les moyens invoqués ne sont pas fondés ;

- le litige ne résultant pas d'un rehaussement de l'imposition primitive et le requérant n'ayant pas fait application du commentaire administratif de la loi dont il se prévaut dans sa déclaration, la garantie résultant des articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales n'est pas invocable.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Aubert,

- les conclusions de M. Jouno, rapporteur public ;

- les observations de MeE..., représentant M. A...C....

1. Considérant que, par une déclaration rectificative du 13 septembre 2013 portant sur l'impôt sur le revenu dû au titre de l'année 2012, M. A...C...a demandé l'application à la cession de cinquante parts qu'il détenait dans la société à responsabilité limitée (SARL) Les Cars Le C...de l'abattement prévu par l'article 150-0 D ter du code général des impôts ; que l'administration ayant refusé de faire droit à cette demande, il a saisi le tribunal administratif de Rennes ; qu'il relève appel du jugement du 19 mars 2015 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande tendant à la réduction de la cotisation primitive d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2012 ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Considérant que la circonstance que la décision du 26 septembre 2013 refusant de faire droit à la demande de M. A...C...tendant à la rectification du revenu imposable qu'il avait initialement déclaré ne précise pas les motifs pour lesquels le service a refusé de faire application de l'instruction administrative sur laquelle cette demande aurait été implicitement fondée est sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 150-0 D ter du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : " I. - L'abattement prévu à l'article 150-0 D bis s'applique dans les mêmes conditions (...) aux gains nets réalisés lors de la cession à titre onéreux d'actions, de parts ou de droits démembrés portant sur ces actions ou parts, acquis ou souscrits avant le 1er janvier 2006, si les conditions suivantes sont remplies : / 1° La cession porte sur l'intégralité des actions, parts ou droits détenus par le cédant dans la société dont les titres ou droits sont cédés ou sur plus de 50 % des droits de vote ou, en cas de la seule détention de l'usufruit, sur plus de 50 % des droits dans les bénéfices sociaux de cette société ; / 2° Le cédant doit : / a) Avoir exercé au sein de la société dont les titres ou droits sont cédés, de manière continue pendant les cinq années précédant la cession et dans les conditions prévues au 1° de l'article 885 O bis, l'une des fonctions mentionnées à ce même 1° (...) / b) Avoir détenu directement ou par personne interposée ou par l'intermédiaire de son conjoint ou de leurs ascendants ou descendants ou de leurs frères et soeurs, de manière continue pendant les cinq années précédant la cession, au moins 25 % des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux de la société dont les titres ou droits sont cédés ; / c) Cesser toute fonction dans la société dont les titres ou droits sont cédés et faire valoir ses droits à la retraite dans les deux années suivant ou précédant la cession (...) " ;

4. Considérant que, par un acte du 21 décembre 2012, la totalité des parts constituant la SARL Les Cars Le C...a été cédée par M. A...C..., ses quatre enfants et l'indivision constituée entre ces derniers et leur père à la suite du décès de l'épouse du requérant, en raison du départ à la retraite de l'un de ses enfants, M. B...A...C..., qui détenait alors trois cents parts dans la société ; qu'il est constant que le requérant, qui était alors âgé de quatre-vingt-neuf ans, n'avait pas exercé une activité au sein de la société pendant les cinq années ayant précédé la cession et qu'il n'a pas fait valoir ses droits à la retraite dans les deux années suivant ou précédant cette cession ; que, dès lors et ainsi qu'il l'admet, il ne peut bénéficier, sur le fondement de l'article 150-0 D ter du code général des impôts, de l'exonération de la plus-value de cession d'un montant de 107 450 euros qu'il a réalisée ;

5. Considérant qu'ayant été imposé conformément à la loi fiscale, M. A...C...ne se prévaut pas utilement de la méconnaissance du principe d'égalité des contribuables devant les charges publiques qui résulterait, selon lui, d'une part, de l'application de l'abattement prévu par l'article 150-0 D ter du code général des impôts aux autres cessions de parts réalisées le même jour et, d'autre part, de l'application d'un régime fiscal différent à la cession des cinquante parts pour laquelle il demande le bénéfice de l'abattement et à la cession de cinquante autres parts provenant de l'indivision constituée entre lui-même et ses enfants ;

6. Considérant que si M. A...C... invoque la méconnaissance de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il ne se prévaut d'aucun droit ou liberté reconnu par la convention à la jouissance desquels l'imposition dont la décharge est demandée porterait atteinte de manière discriminatoire ;

En ce qui concerne l'interprétation administrative de la loi fiscale :

7. Considérant qu'aux termes du second alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées (...), elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente (...) " ; que, pour pouvoir utilement contester une imposition primitive en se fondant sur cette disposition, le contribuable doit faire application, avant la date limite qui lui est impartie pour déposer sa déclaration, d'une interprétation que l'administration avait fait connaître et n'avait pas rapportée à cette date ;

8. Considérant qu'il est constant que M. A...C...s'est fondé sur les paragraphes 250 et 260 de la documentation administrative BOI-RPPM-PVBMI-20-20-20-40 du 12 septembre 2012 dans sa déclaration rectificative du 13 septembre 2013 tendant à l'application de l'abattement prévu par l'article 150-0 D ter du code général des impôts ; que sa déclaration rectificative a ainsi été déposée après l'expiration du délai de déclaration des revenus imposables à l'impôt sur le revenu au titre de l'année 2012, fixée au 7 juin 2013 pour les contribuables du département du Finistère ayant opté pour l'envoi d'une déclaration dématérialisée ; qu'il suit de là que la position exprimée par le service dans ces commentaires n'est pas utilement invoquée ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales : " La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable : / 1° lorsque l'administration a pris formellement position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal (...) " ; que selon le premier alinéa de l'article L. 80 A du même livre : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. " ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions qu'un contribuable n'est en droit de contester, sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, que le rehaussement d'une imposition antérieure ;

10. Considérant qu'en soutenant, d'une part, que l'administration a accordé le bénéfice de l'exonération prévue par l'article 150-0 D ter du code général des impôts à son fils Joël Le C...en abandonnant, dans une réponse aux observations du contribuable du 13 octobre 2014, le chef de redressement résultant de l'imposition de la plus-value de cession réalisée par celui-ci et, d'autre part, que les cessions de parts de la SARL Les Cars Le C...autres que la sienne ont toutes bénéficié de cette exonération, M. A...C...doit être regardé comme se prévalant, sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, de prises de position formelles de l'administration sur l'appréciation d'une situation de fait ; qu'en l'absence de rehaussement de la cotisation primitive à l'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2012, de telles prises de position ne sont pas, en tout état de cause, utilement invoquées ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...C...n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que M. A...C...demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A...C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...A...C...et au ministre de l'économie et des finances.

Délibéré après l'audience du 6 avril 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- Mme Aubert, président-assesseur,

- M. Delesalle, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 4 mai 2017.

Le rapporteur,

S. AubertLe président,

F. Bataille

Le greffier,

C. Croiger

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15NT01723 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 15NT01723
Date de la décision : 04/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: Mme Sylvie AUBERT
Rapporteur public ?: M. JOUNO
Avocat(s) : CABINET FIDAL (BREST)

Origine de la décision
Date de l'import : 16/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-05-04;15nt01723 ?
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