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12/05/2017 | FRANCE | N°15NT02796

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 12 mai 2017, 15NT02796


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 1er mars 2012 par lequel le maire de la commune de Cérans-Foulletourte l'a exclu temporairement de ses fonctions pour une durée de deux mois et d'enjoindre à cette autorité d'effacer de son dossier administratif toute trace de la sanction disciplinaire.

Par un jugement n° 1205176 du 15 juillet 2015, le tribunal administratif de Nantes a annulé cet arrêté et enjoint au maire de Cérans-Foulletourte de procéder à la sup

pression, dans le dossier individuel de M.A..., de tout élément relatif à la sanct...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 1er mars 2012 par lequel le maire de la commune de Cérans-Foulletourte l'a exclu temporairement de ses fonctions pour une durée de deux mois et d'enjoindre à cette autorité d'effacer de son dossier administratif toute trace de la sanction disciplinaire.

Par un jugement n° 1205176 du 15 juillet 2015, le tribunal administratif de Nantes a annulé cet arrêté et enjoint au maire de Cérans-Foulletourte de procéder à la suppression, dans le dossier individuel de M.A..., de tout élément relatif à la sanction disciplinaire en cause et de réexaminer la situation de celui-ci.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 10 septembre 2015 la commune de Cérans-Foulletourte, représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 15 juillet 2015 ;

2°) de rejeter la demande de M. C...A...tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er mars 2012 ;

3°) de mettre à la charge de M. C...A...le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté contesté est suffisamment motivé quant aux deux séries de motifs justifiant la sanction disciplinaire ; aucun texte ne lui faisait obligation d'y joindre le rapport disciplinaire ;

- la procédure disciplinaire suivie a été régulière ;

- les faits sont matériellement établis ;

- la sanction est proportionnée aux fautes commises.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 février 2016 M. C...A..., représenté par Me E..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de la commune de Cérans-Foulletourte le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens invoqués par la commune de Cérans-Foulletourte ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 28 février 2017 la clôture d'instruction a été fixée au 28 mars 2017 à 12h00 en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

- le décret n° 89-677 du 18 septembre 1989 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires territoriaux ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Gauthier,

- les conclusions de M. Giraud, rapporteur public,

- les observations de Me B..., représentant la commune de Cérans-Foulletourte, et celles de MeE..., représentant M.A....

1. Considérant que M.A..., adjoint technique de 1ère classe exerçant les fonctions de cuisinier en chef au sein du service de la restauration scolaire de la commune de Cérans-Foulletourte (Sarthe), a été suspendu de ses fonctions à compter du 19 septembre 2011 par un arrêté du 16 septembre 2011 du maire de la commune ; que, par un courrier du 3 novembre 2011, le maire a informé l'intéressé qu'il engageait une procédure disciplinaire à son encontre et qu'il proposerait sa révocation ; qu'en sa séance du 20 décembre 2011, le conseil de discipline a émis un avis proposant de sanctionner M. A...d'une exclusion temporaire de fonctions pour une durée de deux mois ; que, par un arrêté du 1er mars 2012, le maire de la commune de Cérans-Foulletourte a exclu temporairement M. A...de ses fonctions pour une durée de deux mois ; que la commune relève appel du jugement du 15 juillet 2015 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé cette sanction et a enjoint au maire de la commune de procéder à la suppression, dans le dossier individuel de M.A..., de tout élément relatif à la sanction disciplinaire en cause et de réexaminer la situation de celui-ci ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 alors en vigueur : " (...) doivent être motivées les décisions qui : (...) infligent une sanction (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter les considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté contesté, qui vise les lois du 13 juillet 1983 et du 26 janvier 1984 ainsi que le décret du 18 septembre 1989 et énonce les faits reprochés à M.A..., à savoir " son manque de rigueur dans l'exécution quotidienne des tâches qui lui sont confiées ", " sa désinvolture dans l'application des règles d'hygiène et de sécurité dans un établissement recevant du public ", " les dysfonctionnements et les répercussions au niveau du service que ses problèmes d'addictions récurrents entrainent, avec notamment les faits du 12 septembre 2011, où il a accompli son service en état d'ébriété ", " les conséquences de son comportement sur ses collègues ", " ses propos irrespectueux et agressifs vis-à-vis des élus ", " les risques que son comportement fait courir sur la santé des rationnaires du restaurant scolaire " et, enfin, reproche à l'agent " de ne pas avoir tenu compte ni de l'avertissement écrit, ni des rappels à l'ordre oraux qui lui ont été faits ", comporte une motivation en droit et en fait suffisante pour permettre à M. A...d'en connaître les fondements et d'être en mesure de les contester ; que s'il indique par ailleurs que l'ensemble des manquements reprochés " sont détaillés dans le rapport disciplinaire du 20 septembre 2011 annexé au présent arrêté, et dont le maire s'approprie le contenu ", la circonstance que ce rapport n'a pas été joint est, en l'espèce et dès lors que la motivation de l'acte contesté se suffit en soi, sans incidence sur la légalité de cet acte ; qu'il est au surplus établi que l'agent s'est vu communiquer ce rapport par un courrier du 3 novembre 2011 notifié par pli recommandé avec accusé de réception ; qu'ainsi M. A...disposait, à la date de la notification de la sanction, de tous les éléments nécessaires pour discuter utilement les fautes qui lui étaient reprochées, ce qu'il a d'ailleurs fait par un mémoire produit avant la réunion du conseil de discipline ; que c'est, par suite, à tort que le tribunal administratif de Nantes a annulé l'arrêté litigieux au motif qu'il ne respectait pas les prescriptions de l'article 3 précité de la loi du 11 juillet 1979 ;

4. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A...devant le tribunal administratif de Nantes ;

5. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 19 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Le pouvoir disciplinaire appartient à l'autorité investie du pouvoir de nomination. / Le fonctionnaire à l'encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée a droit à la communication de l'intégralité de son dossier individuel et de tous les documents annexes et à l'assistance de défenseurs de son choix. L'administration doit informer le fonctionnaire de son droit à communication du dossier. Aucune sanction disciplinaire autre que celles classées dans le premier groupe par les dispositions statutaires relatives aux fonctions publiques de l'Etat, territoriale et hospitalière ne peut être prononcée sans consultation préalable d'un organisme siégeant en conseil de discipline dans lequel le personnel est représenté (...) " ; qu'aux termes de l'article 4 du décret du 18 septembre 1989 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires territoriaux : " L'autorité investie du pouvoir disciplinaire informe par écrit l'intéressé de la procédure disciplinaire engagée contre lui, lui précise les faits qui lui sont reprochés et lui indique qu'il a le droit d'obtenir la communication intégrale de son dossier individuel au siège de l'autorité territoriale et la possibilité de se faire assister par un ou plusieurs conseils de son choix. "

6. Considérant que si M. A...soutient qu'il n'a pas reçu d'information écrite de l'engagement de la procédure disciplinaire et que le conseil de discipline n'a pas émis d'avis, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé a été informé de l'engagement d'une procédure disciplinaire par le courrier du 3 novembre 2011 et que le conseil de discipline a siégé et émis un avis relatif à sa situation le 20 décembre 2011 ;

7. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, et en particulier du rapport disciplinaire, que, le 13 octobre 2009, l'agent a été vu, dans le cadre du repas des aînés ruraux, dans un état d'imprégnation alcoolique qui a été par ailleurs constaté à plusieurs reprises et a valu à l'agent un premier avertissement par un courrier du 30 décembre 2010, que le lundi 12 septembre 2011 au matin, il a été constaté que la porte de la chambre froide était entrouverte, avec de la glace formée sur le chambranle de la porte et que M. A...n'en a pas moins fait servir le lundi midi aux enfants des glaces qui n'avaient pas été conservées à la température adéquate ; que, le 15 septembre 2011 à 13h10, le maire a été prévenu par un agent de la cantine que M.A..., qui est en contact avec les élèves et qui venait de faire un stage relatif à la sécurité sanitaire des denrées alimentaires quelques jours plus tôt, se trouvait en état d'ivresse ; que le rapport disciplinaire mentionne également parmi les manquements reprochés que M. A..., qui en qualité de chef de cuisine a la responsabilité des aliments, se refuse à en assurer la traçabilité, que le respect des règles élémentaires d'hygiène et de sécurité n'est pas assuré, que l'absence de rangement méthodique aboutit à la péremption de denrées qui doivent alors être détruites et que l'imprégnation alcoolique récurrente de l'agent le conduit à tenir des propos irrespectueux et agressifs ; que le conseil de discipline a retenu que l'état d'ébriété du 12 septembre 2011, les propos irrespectueux répétés à l'égard des élus et les manquements dans le respect de l'hygiène en cuisine constituaient des fautes professionnelles ; que ces faits sont corroborés par les témoignages produits par la commune ; qu'ainsi, alors que l'agent n'a produit aucun élément de nature à les infirmer, ces faits doivent être regardés comme établis et de nature à justifier une sanction disciplinaire ;

8. Considérant, enfin, que M.A..., né en 1962, responsable de la restauration scolaire et qui avait déjà été sanctionné d'un avertissement, ne pouvait ignorer les conséquences de ses agissements ; que les faits reprochés sont répétés et potentiellement graves pour la sécurité des enfants qui fréquentent le service de restauration scolaire ; que, dans ces conditions, le maire de la commune de Cérans-Foulletourte, en décidant l'exclusion temporaire de fonctions du requérant pour une durée de deux mois, a pris une sanction proportionnée à la faute commise ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Cérans-Foulletourte est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé l'arrêté de son maire du 1er mars 2012 prononçant une exclusion temporaire de fonctions de deux mois à l'encontre de M.A... ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Cérans-Foulletourte, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M.A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de M.A... le versement à la commune de Cérans-Foulletourte de la somme de 800 euros au titre des mêmes frais ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1205176 du 15 juillet 2015 du tribunal administratif de Nantes est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M.A... devant le tribunal administratif de Nantes et les conclusions présentées par lui devant la cour sont rejetées.

Article 3 : M. A...versera la somme de 800 euros à la commune de Cérans-Foulletourte au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Cérans-Foulletourte et à M. C...A....

Délibéré après l'audience du 27 avril 2017, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, président de chambre,

- M. Gauthier, premier conseiller,

- Mme Le Bris, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 mai 2017.

Le rapporteur,

E. GauthierLe président,

I. Perrot

Le greffier,

M. D...

La République mande et ordonne au ministre de la fonction publique en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 15NT02796


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 15NT02796
Date de la décision : 12/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: M. Eric GAUTHIER
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : SCPA LALANNE GODARD HERON BOUTARD SIMON VILLEMONT

Origine de la décision
Date de l'import : 30/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-05-12;15nt02796 ?
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