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10/07/2017 | FRANCE | N°16NT01087

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 10 juillet 2017, 16NT01087


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 1er août 2013 par laquelle la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours formé contre le refus opposé à sa demande de visa de court séjour.

Par un jugement n° 1307539 du 2 février 2016, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 30 mars et 31 mai 2016, M. B... A..., re

présenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 2 février 2016 ;

2°) d'a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 1er août 2013 par laquelle la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours formé contre le refus opposé à sa demande de visa de court séjour.

Par un jugement n° 1307539 du 2 février 2016, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 30 mars et 31 mai 2016, M. B... A..., représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 2 février 2016 ;

2°) d'annuler la décision du consul adjoint de France à Brazzaville du 4 juin 2013 et la décision du 1er août 2013 de la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France ;

3°) d'enjoindre au consul général de France de lui délivrer le visa sollicité dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M.A... soutient que :

- la décision de refus des autorités consulaires a été prise par une autorité incompétente ;

- la décision de refus des autorités consulaires n'était pas suffisamment motivée ;

- la décision de la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France est insuffisamment motivée en droit ;

- le motif justifiant la décision de refus tiré de l'insuffisance des moyens pour la durée du séjour et du retour n'est pas fondé ;

- l'appréciation de ses moyens de subsistance est entachée d'une erreur de fait ;

- il justifiait d'un niveau de liquidités suffisant sur ses différents comptes bancaires pour la durée de son séjour et avait déjà réglé son billet d'avion aller-retour ;

- il dispose dans son pays de revenus significatifs provenant notamment de la location de plusieurs biens immobiliers dont il est propriétaire ;

- la décision attaquée est entachée d'un détournement de pouvoir ;

- la décision attaquée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision attaquée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 14 avril, 2 juin et 12 septembre 2016, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Le ministre fait valoir qu'aucun des moyens d'annulation n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement (C.E.) n° 562/2006 du 15 mars 2006 ;

- le règlement (C.E.) n° 810/2009 du 13 juillet 2009 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des concluions à l'audience.

Le rapport de M. Mony a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.A..., ressortissant de la République du Congo, relève appel du jugement en date du 2 février 2016 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 31 juillet 2013 par laquelle la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France a confirmé le rejet de sa demande de visa de court séjour ;

Sur les conclusions en annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article D. 211-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Une commission placée auprès du ministre des affaires étrangères et du ministre chargé de l'immigration est chargée d'examiner les recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France prises par les autorités diplomatiques ou consulaires. La saisine de cette commission est un préalable obligatoire à l'exercice d'un recours contentieux, à peine d'irrecevabilité de ce dernier " ; qu'il résulte de ces dispositions que la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France du 31 juillet 2013 s'est substituée à la décision des autorités consulaires françaises à Brazzaville intervenue le 4 juin précédent ; qu'il en résulte que les conclusions de la requête de M.A..., comme l'a déjà relevé le tribunal administratif, doivent être regardées comme exclusivement dirigées contre la décision de la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France du 31 juillet 2013 ;

3. Considérant que la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France du 31 juillet 2013 est motivée par les circonstances tirées de ce que le dossier de demande de visa présenté pour M. A...était incomplet, de l'insuffisance des ressources du requérant pour faire face à ses dépenses lors de son séjour et du risque de détournement de l'objet du visa à des fins migratoires ;

4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 5 du règlement (C.E.) n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 : " Pour un séjour n'excédant pas trois mois, les conditions d'entrée pour les ressortissants de pays tiers sont les suivantes : (...) c) justifier l'objet et les conditions du séjour envisagé, et disposer des moyens de subsistance suffisants, tant pour la durée du séjour envisagé que pour le retour dans le pays d'origine ou le transit vers un pays tiers dans lequel leur admission est garantie, ou être en mesure d'acquérir légalement ces moyens (...) " ;

5. Considérant que si la légalité d'une décision s'apprécie à la date à laquelle elle a été prise, il appartient au juge de tenir compte des justifications apportées devant lui, dès lors qu'elles attestent de faits antérieurs à la décision critiquée, même si ces éléments n'ont pas été portés à la connaissance de l'administration avant qu'elle se prononce ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A...a produit lors du débat contentieux des documents bancaires qui établissent que, à la date du 31 décembre 2015, le solde de son compte sur livret ouvert en France était de 22 000 euros ; que ces documents établissent également la stabilité de sa situation matérielle, démontrée par les contrats de location des différents logements dont il est propriétaire dans son pays, établis pour l'un le 14 octobre 2014 et pour l'autre le 29 juin 2015; que son compte courant ouvert en France présentait, en avril 2013, un solde créditeur dépassant légèrement 5 000 euros ; qu'il suit de là qu'en se fondant sur l'insuffisance des ressources de M. A...pour justifier la décision de refus d'octroi du visa sollicité, la Commission de recours contre les décisions de refus de visa a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation ;

7. Considérant, par ailleurs, que M.A..., qui a séjourné en France de 1976 à 1986 en qualité d'agent comptable du consulat de la République du Congo à Paris, est aujourd'hui retraité dans son pays, où il y dispose, comme indiqué au point précédent, de ressources personnelles suffisantes ; qu'il s'est rendu antérieurement à plusieurs reprises en France avec son épouse pour y rendre visite à sa famille proche de nationalité française en regagnant à chaque fois son pays au terme de ces visites ; qu'il n'est pas sérieusement contesté par l'administration que MmeA..., son épouse, quoique titulaire d'un titre de séjour délivré par les autorités françaises valable jusqu'au 21 décembre 2019, auquel elle a d'ailleurs aujourd'hui renoncé, vit à ses côtés en République du Congo ; que, dès lors, le ministre n'établit pas le risque qu'il allègue de détournement du visa de court séjour sollicité à des fins migratoires ; qu'ainsi, en se fondant sur ce motif pour confirmer le refus de l'administration consulaire, la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France a également commis une erreur d'appréciation ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions en injonction :

9. Considérant que, eu égard aux motifs qui le fondent, le présent arrêt implique qu'il soit enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer à M. A...un visa de court séjour dans un délai de trente jours à compter de sa notification ;

Sur les conclusions en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 2 février 2016 et la décision de la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France du 31 juillet 2013 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer à M. A...un visa de court séjour dans un délai de un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. A...une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4: Le présent jugement sera notifié à M. B... A...et au ministre d'Etat, ministre de l'Intérieur.

Délibéré après l'audience du 21 juin 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Francfort, président assesseur,

- M. Mony, premier conseiller.

Lu en audience publique le 10 juillet 2017.

Le rapporteur,

A. MONY

Le président,

H. LENOIRLe greffier,

F. PERSEHAYE

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'Intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision

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N°16NT01087


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 16NT01087
Date de la décision : 10/07/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: M. Arnaud MONY
Rapporteur public ?: M. DURUP de BALEINE
Avocat(s) : DAVID-ESPOSITO

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-07-10;16nt01087 ?
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