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12/07/2017 | FRANCE | N°16NT01149

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 12 juillet 2017, 16NT01149


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...E...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 31 mars 2014 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté le recours administratif préalable obligatoire formé contre la décision du 21 octobre 2013 par laquelle le préfet de police de Paris a rejeté sa demande de naturalisation.

Par un jugement n° 1406058 du 5 février 2016, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complé

mentaire, enregistrés le 4 avril 2016 et le 21 juin 2017, M. B...E..., représenté par MeC..., de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...E...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 31 mars 2014 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté le recours administratif préalable obligatoire formé contre la décision du 21 octobre 2013 par laquelle le préfet de police de Paris a rejeté sa demande de naturalisation.

Par un jugement n° 1406058 du 5 février 2016, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 4 avril 2016 et le 21 juin 2017, M. B...E..., représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 5 février 2016 ;

2°) d'annuler la décision du ministre de l'intérieur du 31 mars 2014 ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui accorder la nationalité française ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier faute pour les premiers juges de ne pas avoir répondu à un moyen qui n'était pas inopérant tiré de l'erreur de droit dont est entachée la décision du ministre de l'intérieur en fondant sa décision sur son manque de loyalisme ;

- la décision contestée du ministre de l'intérieur est irrégulière pour être insuffisamment motivée en ce qui concerne le motif tiré de son manque de loyalisme en méconnaissance des dispositions de l'article 27 du code civil ;

- elle est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation en tant qu'elle retient son manque de loyalisme alors qu'il est parfaitement intégré dans la société française et qu'il ne peut lui être fait grief d'un lien d'allégeance avec son pays du fait de son travail ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 mai 2016, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. E...ne sont pas fondés et s'en rapporte, à titre subsidiaire, pour le surplus, à ses écritures déposées en première instance.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le décret n° 93-1362 du 30 décembre modifié ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. A...'hirondel a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M. B...E..., ressortissant russe, relève appel du jugement du 5 février 2016 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du ministre de l'intérieur du 31 mars 2014 portant rejet de sa demande de naturalisation ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que le jugement attaqué énonce, en son point 2, que sur le fondement des dispositions des articles 21-15 et 27 du code civil et de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993, il appartient au ministre de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la naturalisation à l'étranger qui la sollicite et que, dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte les renseignements défavorables recueillis sur le comportement du postulant ainsi que les renseignements de tous ordres recueillis sur son loyalisme ; que par suite, les premiers juges ont implicitement mais nécessairement écarté le moyen tiré de l'erreur de droit en ce que le ministre aurait examiné le loyalisme du postulant alors que ce dernier aurait déposé un dossier complet de demande de naturalisation comprenant notamment un extrait de son casier judiciaire duquel il ressortait qu'il n'avait fait l'objet d'aucune des condamnations visées à l'article 21-27 du code civil ; que M. E...n'est, par suite, pas fondé à soutenir que le tribunal aurait omis de statuer sur ce moyen ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 21-15 du code civil : " L'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger " ; que l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 susvisé dispose que " (...) Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions. Ce délai une fois expiré ou ces conditions réalisées, il appartient au postulant, s'il le juge opportun, de formuler une nouvelle demande. " ; qu'en vertu de ces dispositions, il appartient au ministre de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la nationalité française à l'étranger qui la sollicite ; que, dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte les renseignements défavorables recueillis sur le comportement du postulant ;

4. Considérant que pour rejeter la demande de naturalisation de M.E..., le ministre chargé des naturalisations s'est fondé sur les circonstances que le loyalisme du postulant envers la France et ses institutions n'est pas avéré, que ses ressources propres proviennent de l'étranger et qu'il a conservé des liens très forts avec sa culture d'origine ;

5. Considérant que M. E...soutient qu'il est parfaitement intégré dans la société française où il vit depuis vingt ans et a le centre de ses intérêts après y avoir créé une entreprise et acheté son premier bien immobilier et que ses deux enfants ont la nationalité française et étudient en France ;

6. Considérant toutefois qu'il ressort des pièces du dossier, que M. E...a exercé, de 1986 à 1990, les fonctions d'ingénieur dans la région de Moscou à l'Institut de recherches scientifiques de l'aviation civile puis au centre informatique du comité d'Etat de l'Union soviétique pour le tourisme étranger ; qu'il a quitté ce poste pour prendre un congé sabbatique afin de rejoindre, en 1991, son épouse en poste depuis 1987 à l'Organisation des Nations Unies pour l'Education, la Science et la Culture (U.N.E.S.C.O.) à Paris ; que, s'il a été chef d'entreprise de 1995 à 2005 en France, l'objet de sa société était l'organisation de stages professionnels de cadres de la Russie et des républiques de l'ex-URSS ; qu'il a été recruté, à compter de 2006, par le Centre de Russie pour la science et la culture en qualité de responsable des projets scientifiques et techniques, plus précisément en tant que technicien en sécurité de bâtiment et en audiovisuel ; que, selon les attestations produites par son employeur et les déclarations du requérant, ce centre est une représentation de l'Etat russe à l'étranger et les requérant est rémunéré selon " les règles intérieures administratives diplomatiques russes en espèce comme employé de l'Etat pour ce type de représentation russe à l'étranger. (...) Ses revenus sont fiscalisés en Russie. " ; que M. E... n'a déclaré en France aucun revenu au titre de l'impôt sur le revenu des années 2010 et 2011 ; qu'il est admis à séjourner en France sous couvert d'un titre de séjour spécial en qualité d'époux d'une opératrice oeuvrant à l'U.N.E.S.C.O. ; que, dans ces conditions, le ministre a pu, sans entacher sa décision d'erreur de droit, ni d'erreur manifeste d'appréciation retenir, pour rejeter la demande formée par M. E..., les motifs tirés de la nature de ses ressources qui proviennent de l'étranger et des liens très forts qu'il a gardés avec sa culture d'origine qui ne sont pas, en l'espèce, compatibles avec l'allégeance française alors même que les postes occupés au Centre de Russie pour la science et la culture ne sont pas réservés aux seuls russes, que l'objet du centre est de rapprocher les différentes cultures et que l'intéressé a postulé à son emploi pour des raisons d'opportunité compte tenu des difficultés pour un étranger de trouver un emploi ;

7. Considérant, enfin, qu'il ressort des pièces du dossier que le ministre aurait pris la même décision s'il s'était fondé sur ces motifs qui sont à eux seuls suffisants ; que, par suite, le requérant ne saurait utilement faire valoir que le motif tiré du défaut de loyalisme serait insuffisamment motivé et entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. E...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort, que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. E...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...E...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 27 juin 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- Mme Gélard, premier conseiller,

- M. A...'hirondel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 juillet 2017.

Le rapporteur,

M. D...Le président,

A. PEREZ

Le greffier,

K. BOURON

La République mande et ordonne au ministre d'Etat , ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

1

2

N° 16NT01149


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 16NT01149
Date de la décision : 12/07/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Michel LHIRONDEL
Rapporteur public ?: Mme PILTANT
Avocat(s) : FLEURY

Origine de la décision
Date de l'import : 22/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-07-12;16nt01149 ?
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