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15/09/2017 | FRANCE | N°16NT00526

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 15 septembre 2017, 16NT00526


Vu la procédure suivante :

Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés les 15 février et 21 septembre 2016 et 22 août 2017, la commune de Loudéac et la communauté intercommunale pour le développement de la région et des agglomérations de Loudéac (Cideral), représentées par MeC..., demandent à la cour :

1°) d'annuler l'avis favorable émis le 8 octobre 2015 par la commission nationale d'aménagement commercial au projet présenté par la société par actions simplifiée (SAS) Loudelac en vue de l'extension d'un ensemble commercial de 7 563,75 m²

de surface de vente situé 73 boulevard de Penthièvre à Loudéac par la création d'un...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés les 15 février et 21 septembre 2016 et 22 août 2017, la commune de Loudéac et la communauté intercommunale pour le développement de la région et des agglomérations de Loudéac (Cideral), représentées par MeC..., demandent à la cour :

1°) d'annuler l'avis favorable émis le 8 octobre 2015 par la commission nationale d'aménagement commercial au projet présenté par la société par actions simplifiée (SAS) Loudelac en vue de l'extension d'un ensemble commercial de 7 563,75 m² de surface de vente situé 73 boulevard de Penthièvre à Loudéac par la création d'un espace " hygiène, beauté, bien-être " de 150 m² ;

2°) de mettre à la charge de la commission nationale d'aménagement commercial le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- leur requête n'est pas tardive ;

- l'avis de la commission nationale d'aménagement commercial ne saurait être considéré comme un acte préparatoire insusceptible de recours dès lors que la demande de permis de construire déposée en mairie le 22 mai 2015 ne comportait pas de demande d'autorisation d'exploitation commerciale et que la société s'est volontairement soumise à l'ancien régime sous l'empire duquel la commission rendait une décision faisant grief ;

- la demande d'autorisation était irrecevable dès lors que contrairement à ce que prévoit l'article L. 752-21 du code de commerce la société a présenté deux fois le même projet sans tenir compte des motivations de la décision du 18 décembre 2013 de la commission nationale d'aménagement commercial ;

- l'avis litigieux a été rendu au terme d'une procédure irrégulière dès lors que la commission était composée de 8 personnes au lieu des 12 exigées par l'article L. 751-5 du code de commerce ;

- les membres de la commission n'ont pas été convoqués dans les formes prévues à l'article R. 752-35 du code de commerce ;

- le dossier de demande ne comportait pas l'ensemble des pièces exigées par l'article R. 752-6 du code de commerce ;

- l'avis contesté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que contrairement à ce que prévoient les dispositions combinées des articles L. 750-1 et L. 752-6 du code de commerce le projet aura un impact négatif sur la vie urbaine et rurale.

Un mémoire de production de pièces a été présenté le 17 février 2016 par la commission nationale d'aménagement commercial.

Par des mémoires, enregistrés les 5 juillet 2016 et 25 et 28 août 2017, la SAS Loudelac, représentée par MeD..., conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint à la commune de reprendre l'instruction de sa demande en vue de la délivrance du permis sollicité et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la commune de Loudéac et de la Cideral au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable dès lors qu'elle a été déposée au-delà du délai de deux mois prévu à l'alinéa 1er de l'article R. 421-1 du code de justice administrative ;

- la requête est dirigée à tort contre l'avis de la commission nationale d'aménagement commercial ;

- les moyens soulevés par la commune de Loudéac ne sont, en tout état de cause, pas fondés.

Les parties ont été informées par une lettre du 21 août 2017 que la cour était susceptible de retenir le moyen d'ordre public soulevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions de la requête dirigée contre l'avis favorable de la commission nationale d'aménagement commercial du 8 octobre 2015, qui ne constitue qu'un acte à caractère préparatoire insusceptible de recours pour excès de pouvoir.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Gélard,

- les conclusions de Mme Piltant, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., substituant MeC..., représentant la commune de Loudéac et la communauté intercommunale pour le développement de la région et de l'agglomération de Loudéac, et de MeD..., représentant la société Loudelac.

1. Considérant que le 8 octobre 2015, la commission nationale d'aménagement commercial a émis un avis favorable au projet présenté le 26 mai 2015 par la société par actions simplifiée (SAS) Loudelac en vue de l'extension d'un ensemble commercial de 7 563,75 m² situé 73 boulevard de Penthièvre à Loudéac, par la création d'un espace " hygiène, beauté, bien-être " de 150 m², portant la surface de vente de l'ensemble commercial à 7 713,75 m² ; que la commune de Loudéac et la communauté intercommunale pour le développement de la région et des agglomérations de Loudéac (Cideral), qui n'ont pas délivré le permis de construire sollicité le 22 mai 2015 par la société pour ce projet, demandent l'annulation de cet avis ;

Sur les fins de non-recevoir opposées par la société Loudelac :

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet est soumis à autorisation d'exploitation commerciale au sens de l'article L. 752-1 du code de commerce, le permis de construire tient lieu d'autorisation dès lors que la demande de permis a fait l'objet d'un avis favorable de la commission départementale d'aménagement commercial ou, le cas échéant, de la Commission nationale d'aménagement commercial.(...)/ A peine d'irrecevabilité, la saisine de la commission nationale par les personnes mentionnées à l'article L. 752-17 du même code est un préalable obligatoire au recours contentieux dirigé contre la décision de l'autorité administrative compétente pour délivrer le permis de construire. " ; qu'aux termes de l'article L. 752-17 du code de commerce : " I.-Conformément à l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme, le demandeur, le représentant de l'Etat dans le département, tout membre de la commission départementale d'aménagement commercial, tout professionnel dont l'activité, exercée dans les limites de la zone de chalandise définie pour chaque projet, est susceptible d'être affectée par le projet ou toute association les représentant peuvent, dans le délai d'un mois, introduire un recours devant la Commission nationale d'aménagement commercial contre l'avis de la commission départementale d'aménagement commercial. / La Commission nationale d'aménagement commercial émet un avis sur la conformité du projet aux critères énoncés à l'article L. 752-6 du présent code, qui se substitue à celui de la commission départementale. En l'absence d'avis exprès de la commission nationale dans le délai de quatre mois à compter de sa saisine, l'avis de la commission départementale d'aménagement commercial est réputé confirmé. / A peine d'irrecevabilité, la saisine de la commission nationale par les personnes mentionnées au premier alinéa du présent I est un préalable obligatoire au recours contentieux dirigé contre la décision de l'autorité administrative compétente pour délivrer le permis de construire. Le maire de la commune d'implantation du projet et le représentant de l'Etat dans le département ne sont pas tenus d'exercer ce recours préalable (...)" ; qu'il résulte de ces dispositions que lorsque l'avis de la commission nationale d'aménagement commercial est favorable, le permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale ne peut être refusé sur le fondement des dispositions de l'article L. 752-1 et suivants du code de commerce ; que dans ces conditions, l'autorité compétente pour délivrer le permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale est recevable à solliciter devant le juge de l'excès de pouvoir l'annulation de l'avis rendu par la commission nationale d'aménagement commercial qui présente à son égard un caractère décisoire ; qu'il suit de là, que la fin de non-recevoir opposée sur ce point par la société Loudelac doit être écartée ;

3. Considérant, d'autre part, qu'il n'est pas contesté que la commune de Loudéac a reçu l'avis de la commission nationale d'aménagement commercial le 15 décembre 2015 ; que par suite, la société Loudelac n'est pas fondée à soutenir que la requête, enregistrée le 15 février 2016, serait tardive ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 752-21 du code de commerce : " Un pétitionnaire dont le projet a été rejeté pour un motif de fond par la Commission nationale d'aménagement commercial ne peut déposer une nouvelle demande d'autorisation sur un même terrain, à moins d'avoir pris en compte les motivations de la décision ou de l'avis de la commission nationale. " ; que le 9 juillet 2013, la SAS Loudelac a présenté un premier projet en vue de l'implantation d'une parapharmacie attenante au centre Leclerc qu'elle exploite à Loudéac ; que ce projet a fait l'objet de décisions défavorables tant de la commission départementale d'aménagement commercial que de la commission nationale d'aménagement commercial, les 6 septembre 2013 et 18 décembre 2013 ; que ces instances ont notamment estimé que le projet aurait pour effet de détourner les consommateurs du centre-ville ; que le 26 mai 2015, la même société a présenté un nouveau projet, lequel a fait l'objet d'un avis défavorable de la commission départementale d'aménagement commercial mais d'un avis favorable de la commission nationale d'aménagement commercial ; que si la société Loudelac soutient ce second projet s'insère dans un programme global de modernisation et de restructuration de l'équipement commercial destiné à rendre plus attractif ce centre commercial, les plans produits au dossier montrent que l'espace " hygiène, beauté, bien-être " de 150 m², auquel s'ajoutera une nouvelle cafétéria de 216 m², remplacera l'ancienne cafétéria de 110 m² auquel devait s'adjoindre en 2013 un nouvel espace destiné à la parapharmacie de 150 m² à l'angle du magasin existant ; que ces deux projets présentent des similarités importantes qui attestent que la société n'a pas tenu compte des motifs ayant amené la commission nationale d'aménagement commercial à refuser son premier projet ; que par suite, la commune de Loudéac et la communauté intercommunale pour le développement de la région et des agglomérations de Loudéac sont fondées à soutenir que l'avis litigieux a été émis en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 752-21 du code de commerce ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que la commune de Loudéac et la communauté intercommunale pour le développement de la région et des agglomérations de Loudéac sont fondées à demander l'annulation de l'avis rendu le 8 octobre 2015 par la commission nationale d'aménagement commercial ;

Sur les conclusions à fin d'injonction présentées par la SAS Loudelac :

6. Considérant que le présent arrêt, qui annule l'avis émis le 8 octobre 2015 par la commission nationale d'aménagement commercial, fait obstacle à ce que le maire de Loudéac accorde le permis de construire sollicitée par la SAS Loudelac ; que par suite, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions à fin d'injonction présentées par cette société tendant à ce que le maire reprenne l'instruction de sa demande en vue de la délivrance du permis sollicité ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Loudéac et de la Cideral, qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à la SAS Loudelac, de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commission nationale d'aménagement commercial le versement à la commune de Loudéac et à la Cideral d'une somme globale de 1 500 euros au titre des mêmes frais ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'avis rendu le 8 octobre 2015 par la commission nationale d'aménagement commercial est annulé.

Article 2 : Les conclusions de la SAS Loudelac sont rejetées.

Article 3 : La commission nationale d'aménagement commercial versera à la commune de Loudéac et à la communauté intercommunale pour le développement de la région et des agglomérations de Loudéac la somme globale de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Loudéac, à la communauté intercommunale pour le développement de la région et des agglomérations de Loudéac, à la commission nationale d'aménagement commercial et à la SAS Loudelac.

Délibéré après l'audience du 29 août 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- Mme Gélard, premier conseiller,

- M.A...'hirondel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 septembre 2017.

Le rapporteur,

V. GELARDLe président,

A. PEREZ

Le greffier,

S. BOYERE

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16NT00526


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 16NT00526
Date de la décision : 15/09/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Actes législatifs et administratifs - Différentes catégories d'actes - Actes administratifs - notion - Actes à caractère de décision - Actes présentant ce caractère.

Commerce - industrie - intervention économique de la puissance publique - Réglementation des activités économiques - Activités soumises à réglementation - Aménagement commercial - Procédure - Commission nationale d`aménagement commercial.


Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: Mme Valérie GELARD
Rapporteur public ?: Mme PILTANT
Avocat(s) : SCP GUILLOTIN POILVET AUFFRET

Origine de la décision
Date de l'import : 26/09/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-09-15;16nt00526 ?
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