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24/11/2017 | FRANCE | N°16NT02882

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 24 novembre 2017, 16NT02882


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Ageri-Apem a demandé au tribunal administratif d'Orléans de condamner la commune de Maintenon à lui payer la somme de 36 627,23 euros et une indemnité de résiliation en réparation des préjudices résultant de la résiliation du marché de travaux conclu le 29 mars 2012 avec la société Kes, aux droits de laquelle elle vient, ayant pour objet la mise en place d'un ascenseur dans les locaux de la crèche familiale en cours de construction rue Collin d'Harleville et de mettre à la charge de la co

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Ageri-Apem a demandé au tribunal administratif d'Orléans de condamner la commune de Maintenon à lui payer la somme de 36 627,23 euros et une indemnité de résiliation en réparation des préjudices résultant de la résiliation du marché de travaux conclu le 29 mars 2012 avec la société Kes, aux droits de laquelle elle vient, ayant pour objet la mise en place d'un ascenseur dans les locaux de la crèche familiale en cours de construction rue Collin d'Harleville et de mettre à la charge de la commune de Maintenon la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1600066 du 16 juin 2016, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté la demande de la société Ageri-Apem, l'a condamnée à verser à la commune de Maintenon la somme de 1 458,13 euros en remboursement des frais d'enlèvement des éléments d'ascenseur entreposés sur le site du chantier de construction, lui a enjoint d'enlever les éléments d'ascenseur lui appartenant entreposés dans les locaux des services techniques de la commune de Maintenon, dans le délai d'un mois suivant la notification du présent jugement et sous astreinte de 50 euros par jour de retard, et a mis à sa charge le versement d'une somme de 1 000 euros au profit de la commune de Maintenon en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 19 août 2016 et le 18 juillet 2017, la société Ageri-Apem, représentée par la SELARL d'avocats E. Boccalini et G. Migaud, demande à la cour dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 16 juin 2016 ;

2°) de condamner la commune de Maintenon à lui payer la somme de 27 053,56 euros au titre des dépenses engagées, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date de la notification de la requête, et la somme de 9 573,67 euros au titre du manque à gagner du fait de la résiliation du marché de travaux conclu le 29 mars 2012 avec la société Kes, aux droits de laquelle elle vient, ayant pour objet la mise en place d'un ascenseur dans les locaux de la crèche familiale en cours de construction rue Collin d'Harleville ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Maintenon une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la résiliation du marché est abusive et arbitraire et ne repose sur aucun motif d'intérêt général ;

- en conséquence elle a droit à être indemnisée au titre des dépenses engagées à hauteur de 27 053,56 euros et à la réparation du préjudice subi du fait de la résiliation abusive du marché de travaux portant sur le lot n°10 à hauteur du gain manqué évalué à la somme de 9 573,67 euros.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 10 novembre 2016 et le 3 août 2017, la commune de Maintenon, représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête et demande en outre que la société Ageri-Apem soit condamnée à lui verser la somme de 1 458,13 euros en remboursement des frais d'enlèvement des éléments d'ascenseur entreposés sur le site du chantier de construction et à procéder au retrait de ces éléments stockés dans le local des services techniques de la commune dans le délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard et qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de la société Ageri-Apem au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande de première instance présentée par la société Ageri-Apem devant le tribunal administratif d'Orléans était irrecevable en raison de sa tardiveté ; la décision de résiliation n'a pas été contestée dans un délai de deux mois ;

- la société Ageri-Apem n'ayant pas exécuté l'injonction prononcée en première instance, il convient de la condamner à nouveau ;

- les autres moyens soulevés par la société Ageri-Apem ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- l'arrêté du 8 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Allio-Rousseau,

- et les conclusions de M. Bréchot, rapporteur public.

1. Considérant que, par un acte d'engagement du 29 mars 2012, la commune de Maintenon a confié à la société Kes, aux droits de laquelle vient la société Ageri-Apem, un marché de travaux portant sur la réalisation du lot n°10, consistant en la mise en place d'un ascenseur dans les locaux de la crèche familiale en cours de construction rue Collin d'Harleville ; qu'après l'envoi le 17 mars 2014 d'une mise en demeure à l'entreprise de se conformer à ses obligations contractuelles, la commune de Maintenon a résilié ce marché par décision du 2 avril 2014 ; que la société Ageri-Apem relève appel du jugement du 16 juin 2016 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Maintenon à lui payer la somme de 36 627,33 euros au titre des dépenses engagées et une somme en réparation du préjudice subi du fait de la résiliation du marché qu'elle estime abusive ;

Sur les conclusions indemnitaires :

2. Considérant que l'entrepreneur ne peut solliciter, au titre de ses relations contractuelles avec l'administration, l'indemnisation du préjudice qu'il a subi du fait de la résiliation du marché qui lui avait été attribué que si la décision de résiliation était injustifiée ;

3. Considérant, en premier lieu, que la résiliation du marché ayant été prononcée pour faute du titulaire, la société requérante n'est pas fondée à invoquer l'absence d'un motif d'intérêt général pour demander le versement de la somme de 36 627,23 euros correspondant au montant de son marché ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'à les supposer établies, les irrégularités entachant selon la société Ageri-Apem la décision de résiliation du 2 avril 2014, tirées de l'absence de la mise en demeure prévue à l'article 48.1 et du défaut de respect de la procédure de constat contradictoire du manquement avec avis du maître d'oeuvre prévue par le c) de l'article 46.3.1 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de travaux (CCAG travaux) seraient en tout état de cause dépourvues d'incidence sur son éventuel droit à indemnisation ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 46.3.1 du CCAG travaux : " Le représentant du pouvoir adjudicateur peut résilier le marché pour faute du titulaire dans les cas suivants : / (...) c) Le titulaire, dans les conditions prévues à l'article 48, ne s'est pas acquitté de ses obligations dans les délais contractuels, après que le manquement a fait l'objet d'une constatation contradictoire et d'un avis du maître d'oeuvre, et si le titulaire n'a pas été autorisé par ordre de service à reprendre l'exécution des travaux ; dans ce cas, la résiliation du marché décidée peut être soit simple, soit aux frais et risques du titulaire et, dans ce dernier cas, les dispositions des articles 48.4 à 48.7 s'appliquent (...) " ; qu'aux termes de l'article 46.3.2 du même cahier : " Sauf dans les cas prévus aux g, i, k et l du 46.3.1 ci-dessus, une mise en demeure, assortie d'un délai d'exécution, doit avoir été préalablement notifiée au titulaire et être restée infructueuse. (...) " ; qu'aux termes de son article 48.1 : " A l'exception des cas prévus aux articles 15.2.2, 15.4 et 47.2, lorsque le titulaire ne se conforme pas aux dispositions du marché ou aux ordres de service, le représentant du pouvoir adjudicateur le met en demeure d'y satisfaire, dans un délai déterminé, par une décision qui lui est notifiée par écrit. (...) 48.2. Si le titulaire n'a pas déféré à la mise en demeure, la poursuite des travaux peut être ordonnée, à ses frais et risques, ou la résiliation du marché peut être décidée. " ;

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les travaux d'installation de l'ascenseur au sein de la crèche municipale devaient être achevés, selon l'ordre de service n°2, le 15 novembre 2013 ; qu'il ressort du compte-rendu de chantier n°41 du 28 octobre 2013, transmis aux entreprises par le maître d'oeuvre, que l'entreprise Kes puis Ageri-Apem a été avertie qu'elle pouvait intervenir sur le site pour la réalisation des travaux à compter du 16 octobre 2013 ; que l'entreprise s'est abstenue de reprendre contact avec le maître d'oeuvre et n'a pas été représentée aux multiples réunions de chantiers organisées entre le 30 octobre 2013 et le 19 mars 2014 ; qu'elle a informé le 8 janvier 2014 le maitre d'oeuvre de ce qu'il fallait prévoir, pour la pose de la cabine de l'ascenseur, des travaux portant sur la pose d'une ventilation haute en gaine, et d'une ventilation haute et basse pour le local de machinerie ; que l'agence Coste Architecture, maître d'oeuvre, compte tenu de ses nouvelles demandes, lui a adressée le 5 février 2014 une mise en demeure de fournir sous huit jours le plan de gaine implanté en coupe verticale, en coupe horizontale et en plan sur les trois paliers dans le bâtiment concerné, le plan d'aménagement du local machinerie, la localisation précise avec les dimensions des différentes sorties à prévoir ainsi qu'un dossier d'exécution (EXE) complet pour validation ; qu'en l'absence de réponse de la part de la société Ageri-Apem, la commune de Maintenon lui a adressé le 17 mars 2014 une mise en demeure de produire les mêmes éléments puis, cette mise en demeure étant restée infructueuse, a procédé à la résiliation du marché de travaux le 2 avril 2014 aux motifs de l'absence de la société Ageri-Apem aux réunions de chantiers entre le 30 octobre 2013 et le 19 mars 2014 et de l'absence de réponse aux différents échanges téléphoniques ou courriers adressés sur cette période ainsi qu'aux deux mises en demeure ;

7. Considérant, d'une part, que la société Ageri-Apem ne peut pas sérieusement soutenir qu'elle n'a pas été destinataire de l'ordre de service n°2 fixant la date d'achèvement des travaux au 15 novembre 2013, dès lors qu'il résulte de l'instruction que ce document a été contresigné lors de son émission par le représentant de la société Kes aux droits de laquelle elle vient suite à une opération de fusion-absorption ; que cet ordre de service est mentionné dans le compte-rendu de chantier du 12 juin 2013, de sorte qu'à la date à laquelle le transfert du marché de la société Kes à la société requérante a eu lieu, soit le 15 juillet 2013, la date d'exécution des travaux était nécessairement connue de la société requérante ;

8. Considérant, d'autre part, que la société Ageri-Apem, qui ne s'est présentée à aucune réunion de chantier entre le 30 octobre 2013 et 19 mars 2014, n'a fait connaître au maitre d'oeuvre les obstacles techniques empêchant selon elle son intervention qu'à compter du 8 janvier 2014 ; qu'elle allègue sans l'établir que les plans de validation ont été modifiés par le maître d'ouvrage postérieurement à la conclusion du marché ; qu'aucun des documents qu'elle produit ne fait état de travaux de réservation prévus et mal exécutés par le maître d'ouvrage ; qu'il est constant que la demande formulée le 8 janvier 2014 de pose d'une ventilation haute en gaine est contraire aux échanges que la société Ageri-Apem a eu avec la société en charge du gros oeuvre et des réseaux ; que la pose d'une ventilation haute et basse pour le local machinerie n'a pas été prévue dans le marché initial ; que, malgré l'envoi de deux mises en demeure en ce sens, la société Ageri-Apem ne justifie pas avoir effectivement établi un dossier complet EXE faisant état des modifications techniques demandées ;

9. Considérant que, dans ces conditions, les manquements de la société Ageri-Apem à ses obligations contractuelles doivent être regardés comme établis et de nature à justifier la résiliation du marché ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de Maintenon, que la société Ageri-Apem n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

11. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation du jugement du 16 juin 2016 du tribunal administratif d'Orléans présentées par la société Ageri-Apem, n'implique aucune mesure d'exécution autre que celles prononcées par le jugement dont il est relevé appel et confirmé par le présent arrêt ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Maintenon, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme sollicitée par la société Ageri-Apem au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche et dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Ageri-Apem la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune de Maintenon et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Ageri-Apem est rejetée.

Article 2 : La société Ageri-Apem versera la somme de 1 500 euros à la commune de Maintenon au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions à fin d'injonction présentées par la commune de Maintenon sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Orona Ile de France, venant aux droits de la société Ageri-Apem, et à la commune de Maintenon.

Délibéré après l'audience du 7 novembre 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Tiger-Winterhalter, présidente-assesseure,

- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 novembre 2017.

Le rapporteur,

M-P. Allio-RousseauLe président,

L. Lainé

Le greffier,

V. Desbouillons

La République mande et ordonne au préfet d'Eure-et-Loir en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16NT02882


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 16NT02882
Date de la décision : 24/11/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: Mme Marie-Paule ALLIO-ROUSSEAU
Rapporteur public ?: M. BRECHOT
Avocat(s) : SCP MERCIER PIERRAT RIVIERE-DUPUY VANNIER

Origine de la décision
Date de l'import : 05/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-11-24;16nt02882 ?
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