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22/12/2017 | FRANCE | N°16NT02735

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 22 décembre 2017, 16NT02735


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Vasselay a demandé au tribunal administratif d'Orléans, premièrement, de condamner solidairement les sociétés Abac Ingéniérie et Agaura à lui verser la somme de 57 000 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis en raison des désordres affectant le système de chauffage et de ventilation du centre socio-culturel avec intérêts au taux légal courant à compter de la date d'introduction de la requête et capitalisation, deuxièmement, de condamner la société Entreprise Bernard Elvi

n à lui verser la somme de 21 880,58 euros en réparation des préjudices qu'elle a ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Vasselay a demandé au tribunal administratif d'Orléans, premièrement, de condamner solidairement les sociétés Abac Ingéniérie et Agaura à lui verser la somme de 57 000 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis en raison des désordres affectant le système de chauffage et de ventilation du centre socio-culturel avec intérêts au taux légal courant à compter de la date d'introduction de la requête et capitalisation, deuxièmement, de condamner la société Entreprise Bernard Elvin à lui verser la somme de 21 880,58 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis en raison des désordres affectant le parquet de la grande salle du centre socio-culturel avec intérêts au taux légal courant à compter de la date d'introduction de la requête et capitalisation, troisièmement, de condamner solidairement les sociétés Abac Ingéniérie et Agaura à lui verser la somme 8 429,40 euros correspondant aux frais d'expertise judiciaire et la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-l du code de justice administrative et, quatrièmement, de condamner la société Entreprise Bernard El vin à lui verser la somme 8 429,40 euros correspondant aux frais d'expertise judiciaire et la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-l du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1503722 du 16 juin 2016, le tribunal administratif d'Orléans a, par un article 1er, condamné solidairement les sociétés Abac Ingénierie, Agaura et Entreprises Bernard Elvin à lui verser la somme de 10 393,20 euros, augmentée de l'intérêt légal, par un article 2, mis à la charge définitive et solidaire les frais d'honoraires et d'expertise à hauteur de 4 214,70 euros en ce qui concerne les sociétés Abac Ingénierie et Agaura et de 4 214,70 euros en ce qui concerne la société Entreprises Bernard Elvin, par un article 3, mis solidairement à la charge des mêmes sociétés le versement d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative, par un article 4, mis à la charge des sociétés Abac Ingénierie et Agaura, le versement à la société Grandes Cuisines du Centre la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, par un article 5, constaté un non-lieu à statuer sur les conclusions en appel en garantie formées réciproquement par la société Grandes Cuisines du Centre et les sociétés Abac Ingénierie et Agaura en ce qu'elles concernent le désordre affectant le système de chauffage et de ventilation du centre socio-culturel, par un article 6, condamné la société Agaura à garantir la société Entreprises Bernard Elvin à hauteur de 30 % et la société Entreprises Bernard Elvin à garantir les sociétés Agaura et Abac Ingénierie à hauteur de 70 % en ce qui concerne le désordre affectant le parquet du centre socio-culturel, et par un article 7, a rejeté le surplus des conclusions de la requête de la commune de Vasselay et les conclusions présentées par les sociétés Agaura, Abc Ingénierie et Entreprises Bernard Elvin présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 3 août 2016 et le 28 novembre 2017, la commune de Vasselay, représentée par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler les articles 1, 2 et 7 de ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 16 juin 2016 ;

2°) de condamner solidairement les sociétés Abac Ingénierie et Agaura au paiement d'une somme de 57 000 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis en raison des désordres affectant le système de chauffage et de ventilation du centre socio-culturel avec intérêts au taux légal courant à compter de la date d'introduction de la requête et capitalisation ;

3°) de les condamner au paiement des frais d'expertise à hauteur de la somme de 4 214,70 euros ;

4°) de mettre à la charge de ces deux sociétés le versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune de Vasselay soutient que :

- la responsabilité décennale des sociétés Abac Ingéniérie et Agaura est engagée s'agissant des désordres affectant le chauffage du centre socio-culturel ; selon le rapport d'expertise, ce désordre caractérisé par une surconsommation d'énergie et par l'impossibilité de régler le chauffage de façon indépendante dans chaque salle est imputable à un vice de conception ; il rend impropre à sa destination l'ouvrage au regard de la finalité assignée portant sur l'économie d'énergie ;

- le montant des préjudices tenant à la réparation des désordres et à la compensation des dépenses indues d'exploitation correspond à la somme de 57 000 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 octobre 2016, le groupement constitué de la société Abac Ingénierie et de la société Agaura, représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) à titre principal de rejeter la requête ;

2°) à titre subsidiaire de condamner la société Grandes Cuisines du Centre à les garantir à hauteur de 50 % de toute condamnation qui serait prononcée à leur encontre ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Vasselay une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- les moyens soulevés par la commune de Vasselay ne sont pas fondés ;

- à titre subsidiaire, elles sont fondées à appeler en garantie la société Grandes Cuisines du Centre sur le fondement de la responsabilité délictuelle dès lors qu'elle était seule responsable de la phase d'exécution du marché et n'a pas fourni toutes les pièces attendues.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 décembre 2016, la société Grandes Cuisines du Centre, représentée par Me C...demande à la cour :

1°) à titre principal de rejeter la requête ;

2°) à titre subsidiaire de condamner les sociétés Abac Ingénierie et Agaura à la garantir intégralement de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Vasselay, des sociétés Abac Ingénierie et Agaura une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens soulevés par la commune de Vasselay ne sont pas fondés ;

- l'appel en garantie des sociétés Abac Ingénierie et Agaura n'est pas fondé, en l'absence de faute ;

- à titre subsidiaire, elle est fondée à appeler en garantie ces sociétés sur le fondement de la responsabilité délictuelle dès lors qu'elles sont seules responsables du vice de conception du système de chauffage et de ventilation.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Allio-Rousseau,

- les conclusions de M. Bréchot, rapporteur public,

- et les observations de MeE..., représentant la commune de Vasselay, celles de MeA..., représentant les sociétés Abac Ingénierie et Agaura et celles de MeB..., représentant la société Grandes Cuisines du Centre.

1. Considérant que la commune de Vasselay (Cher) a décidé en 2005, la création d'un nouveau centre socio-culturel ; que le projet a porté sur la réalisation d'un pôle accueil, d'un pôle office, d'un pôle sanitaire et d'un pôle culturel ; que la commune a confié, par acte d'engagement signé le 24 mars 2006, la maîtrise d'oeuvre complète à un groupement solidaire constitué de la SCP Gauchery-Radigue aux droits desquels vient la société Agaura, mandataire du groupement, du groupe Abac Ingénièrie et de la Sarl Deba Environnement ; que la commune a lancé un appel d'offres pour la réalisation des travaux répartis en 17 lots ; que le lot n° 13 " Chauffage-ventilation-climatisation" a été confié à la société Grandes Cuisines du Centre "Berry-Froid" par contrat d'engagement signé le 4 septembre 2007 ; que ce lot a été réceptionné sans réserves le 12 janvier 2009, avec effet au 22 octobre 2008 ; que la commune de Vasselay a informé le groupement maître d'oeuvre le 20 mars 2009 de désordres affectant le système de chauffage et de ventilation et du délitement significatif du parquet ; qu'un expert judiciaire, désigné à la fin de l'année 2009, a remis son rapport le 8 avril 2015 ; que la commune de Vasselay a demandé au tribunal administratif d'Orléans de condamner les constructeurs pour ces deux catégories de désordres affectant, d'une part, le système de chauffage et de ventilation du centre socio-culturel, d'autre part, le parquet du centre socio-culturel ; que par son jugement du 16 juin 2016, le tribunal administratif d'Orléans a partiellement fait droit à la demande de la commune de Vasselay en ce qui concerne les désordres affectant le parquet du centre socio-culturel mais a rejeté le surplus de cette demande en ce qui concerne ceux affectant le système de chauffage et de ventilation ; que la commune de Vasselay relève appel de ce jugement et en demande la réformation en ce qui concerne les articles 1, 2 et 7 en tant qu'ils rejettent toute condamnation des sociétés Abac Ingénierie et Agaura au titre des désordres affectant le système de ventilation et de chauffage ; que le groupement de maitrise d'oeuvre et la société Grandes Cuisines du Centre, par la voie de l'appel provoqué, présentent des conclusions d'appels en garantie croisés ;

Sur l'appel principal :

2. Considérant qu'il résulte des principes qui régissent la garantie décennale des constructeurs que des désordres apparus dans le délai d'épreuve de dix ans, de nature à compromettre la solidité de l'ouvrage ou à le rendre impropre à sa destination dans un délai prévisible, engagent leur responsabilité, même s'ils ne se sont pas révélés dans toute leur étendue avant l'expiration du délai de dix ans ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert judiciaire que la commune a indiqué avoir constaté depuis le début de l'année 2009 des désordres consistant en une surconsommation d'énergie liée à la climatisation, un manque de confort de la climatisation de la petite salle du centre socio-culturel et le caractère bruyant de la soufflerie installée dans la grande salle ;

4. Considérant, d'une part, que le cahier des clauses techniques particulières du lot n°13 " chauffage-ventilation-climatisation " précise en son article 13.2 que la grande salle du centre socio-culturel et la salle de réunion sont chauffées en période hivernale et rafraichies en période estivale par un système thermo dynamique du type " pompe à chaleur " air-air réversible ; qu'il indique en outre que compte tenu des possibilités d'occupation de la grande salle, qui est modulable en formule 1/3-2/3, il est mis en place deux systèmes de traitement d'air indépendants permettant l'ambiance " confort " à une ou deux zones occupées ; que le système de chauffage et de traitement de l'air pur de la salle de réunion est le même que celui utilisé pour chauffer la grande salle aménagée en format 1/3 ; qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise judiciaire que ce couplage, qui n'était interdit par aucun document de la consultation ou du marché, a eu pour conséquence un accroissement de la consommation d'énergie, difficilement quantifiable en l'absence de compteurs électriques individualisés ; que la responsabilité du dysfonctionnement de l'installation de chauffage et de la surconsommation électrique, qui sont liés à un vice de conception, est imputable exclusivement au groupement de maîtrise d'oeuvre dès lors que ce système a été imposé à la société installatrice ; que toutefois si le programme d'opération, qui est une pièce constitutive du marché en application de l'article

2-A du cahier des clauses particulières du marché de maitrise d'oeuvre, indique que le maître d'ouvrage a défini comme objectif du projet la maîtrise des consommations énergétiques, et en conséquence formulé une exigence de niveau "très performant" en ce qui concerne le profil environnemental du bâtiment sans en fixer cependant un chiffrage précis, il résulte de l'instruction que les défectuosités énergétiques affectant le système de chauffage, dont il n'est pas établi qu'il ne respecte pas les normes environnementales imposées dans le contrat, résultent de l'utilisation effective du centre socio-culturel dès lors que la salle de réunion a été deux fois plus occupée que la grande salle au cours de l'année 2009 ; que, par suite, ces dysfonctionnements ne sont pas de nature à engager la responsabilité décennale des constructeurs dès lors qu'elles n'affectent pas la solidité de l'ouvrage et ne compromettent ni sa conservation ni son utilisation ;

5. Considérant, d'autre part, que les nuisances sonores de la soufflerie ne sont pas établies ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de Vasselay n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à la condamnation solidaire des sociétés Abac Ingénierie et Agaura au titre des désordres affectant le système de chauffage et de ventilation du centre socio-culturel ;

Sur les conclusions d'appel provoqué présentées par les intimés :

7. Considérant que le présent arrêt n'aggrave la situation d'aucune partie ayant la qualité d'intimé ; que par suite, leurs conclusions d'appel provoqué, au demeurant présentées seulement à titre subsidiaire, sont irrecevables ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge des sociétés Abac Ingénierie et Agaura et de la société Grandes Cuisines du Centre, qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, le versement d'une somme en application de ces dispositions ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la commune de Vasselay le versement d'une somme globale de 750 euros au profit des sociétés Abac Ingénierie et Agaura et de 750 euros au profit de la société Grandes Cuisines du Centre au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Vasselay est rejetée.

Article 2 : Les conclusions d'appel provoqué présentées par les autres parties sont rejetées.

Article 3 : La commune de Vasselay versera une somme globale de 750 euros aux sociétés Abac Ingénierie et Agaura et de 750 euros à la société Grandes Cuisines du Centre au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Vasselay, à la société Abac Ingénierie, à la société Agaura et à la société Grandes Cuisines du Centre.

Délibéré après l'audience du 5 décembre 2017, à laquelle siégeaient :

- Mme Phémolant, présidente de la cour,

- Mme Tiger-Winterhalter, présidente-assesseure,

- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 22 décembre 2017.

Le rapporteur,

M-P. Allio-RousseauLa présidente de la cour,

B. Phémolant

Le greffier,

V. Desbouillons

La République mande et ordonne au préfet du Cher en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16NT02735


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 16NT02735
Date de la décision : 22/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. PHEMOLANT
Rapporteur ?: Mme Marie-Paule ALLIO-ROUSSEAU
Rapporteur public ?: M. BRECHOT
Avocat(s) : SCP COTTEREAU MEUNIER BARDON ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 09/01/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-12-22;16nt02735 ?
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