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21/09/2018 | FRANCE | N°17NT00859

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 21 septembre 2018, 17NT00859


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Benet a demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner solidairement, ou l'un à défaut de l'autre, la société Enduits Pro, la société Niortaise de construction, prises en la personne de la SELARL Romain Rabusseau, mandataire liquidateur, et la SARL Benoit Groleau-Thibault Pochon, ainsi que leurs assureurs, la Mutuelle des architectes français (MAF), la société Axa et la société Mutuelle d'assurance bâtiment et travaux publics (SMABTP), à lui verser la somme de 37 600 euros TTC

en réparation des désordres affectant les façades ouest et sud des tribunes ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Benet a demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner solidairement, ou l'un à défaut de l'autre, la société Enduits Pro, la société Niortaise de construction, prises en la personne de la SELARL Romain Rabusseau, mandataire liquidateur, et la SARL Benoit Groleau-Thibault Pochon, ainsi que leurs assureurs, la Mutuelle des architectes français (MAF), la société Axa et la société Mutuelle d'assurance bâtiment et travaux publics (SMABTP), à lui verser la somme de 37 600 euros TTC en réparation des désordres affectant les façades ouest et sud des tribunes du stade municipal, la somme de 10 000 euros à titre " de dommages et intérêts " ainsi que la somme de 5 594,25 euros au titre des frais d'expertise amiable et judiciaire.

Par un jugement n° 1406610 du 11 janvier 2017 le tribunal administratif de Nantes a condamné solidairement le cabinet Groleau-Thibault et Pochon et la société Niortaise de construction, prise en la personne de la SELARL Romain Rabusseau, à verser à la commune de Benet la somme de 40 814, 25 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis du fait des désordres affectant les façades sud et ouest de son stade municipal ainsi que la somme de 2 380,24 euros au titre des dépens.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 9 mars 2017 et le 23 janvier 2018, la SARL Groleau-Thibault et Pochon, représentée par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 11 janvier 2017 ;

2°) de rejeter la demande de la commune de Benet ;

3°) à titre subsidiaire, de condamner la société Niortaise de construction, prise en la personne de la SELARL Romain Rabusseau mandataire liquidateur, ainsi que la société ATES à la garantir des condamnations prononcées à son encontre ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Benet ou de tout autre défaillant la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les travaux ayant fait l'objet de réserves à la réception, la responsabilité contractuelle du maître d'oeuvre est susceptible d'être engagée mais ce dernier n'est tenu qu'à une obligation de moyens alors que le constructeur est tenu à une obligation de résultat ;

- les malfaçons constatées sont imputables à la société Enduit Pro qui a réalisé les enduits et aucune faute ne peut être reprochée au maître d'oeuvre dans l'exercice de sa mission de direction du chantier ;

- la commune ne démontre pas l'existence d'une faute du maître d'oeuvre dans la conduite de ses missions ; le suivi du chantier a été rigoureux ;

- si des condamnations devaient être prononcées à son encontre, la société Niortaise de construction et la société ATES devraient être condamnées à la garantir en totalité.

Par deux mémoires, enregistrés les 10 août 2017 et 25 janvier 2018, la société ATES, représentée par MeG..., conclut au rejet de la requête, au rejet de toutes les demandes présentées contre la société ATES, à ce que soit mise à la charge de la société Groleau-Thibault et Pochon la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et à la condamnation de la société Groleau-Thibault et Pochon aux entiers dépens.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable dès lors que l'action engagée par la commune de Benet concernait uniquement les façades sud et ouest et qu'aucune action n'a été engagée par la commune pour le mur est ;

- aucun appel en garantie à l'encontre de la société ATES n'a été formulé en 1ère instance.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 décembre 2017, la commune de Benet, représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge solidaire de la société Groleau-Thibault et Pochon et de la société Niortaise de construction le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la responsabilité contractuelle des sociétés Enduits Pro et Niortaise de construction est engagée ;

- la responsabilité contractuelle de la société Groleau-Thibault et Pochon, titulaire d'une mission complète de maîtrise d'oeuvre, est engagée.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code des marchés publics ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Tiger-Winterhalter, rapporteure ;

- les conclusions de M. Bréchot, rapporteur public,

- et les observations de MeD..., représentant la société Groleau Thibault et Pochon, de MeE...'h représentant la société ATES et MeB..., représentant la commune de Benet.

Considérant ce qui suit :

1. La commune de Benet a fait procéder, en 2009, à des travaux d'extension des tribunes et des vestiaires de son stade de football. Elle a confié la maîtrise d'oeuvre de l'opération à un groupement composé de la société Groleau-Thibault et Pochon, cabinet d'architectes, et du cabinet ATES, bureau d'études structure. L'exécution des travaux a été confiée à la société Niortaise de construction tandis que la société Enduits pro s'est vu confier la sous-traitance de la réalisation des enduits. Au cours de la réalisation du chantier, des fissures ont été constatées sur les enduits des façades des tribunes. La réception des travaux a été prononcée le 25 février 2010, avec des réserves concernant notamment les enduits et la maçonnerie en briques des murs en façades ouest et sud de l'extension, ainsi que des ravalements non réalisés. Après une première expertise amiable, le président du tribunal administratif de Nantes, à la demande de la commune de Benet, a désigné M. C... en qualité d'expert judiciaire. Ce dernier a remis son rapport le 27 juin 2013. La commune de Benet a ensuite saisi le tribunal administratif de Nantes d'une demande tendant à la condamnation solidaire, ou l'un à défaut de l'autre, de la société Enduits Pro et de la société Niortaise de construction, prise en la personne de la SELARL Rabusseau, ès qualités de mandataire liquidateur, ainsi que de la société Groleau-Thibault et Pochon, et de leurs assureurs, la MAF, la société Axa et la SMABTP, à lui verser la somme de 37 600 euros TTC en réparation des désordres affectant les façades ouest et sud des tribunes du stade municipal, la somme de 10 000 euros au titre du préjudice de jouissance, ainsi que la somme de 5 594,25 euros au titre des frais d'expertise amiable et judiciaire. Par un jugement du 11 janvier 2017 le tribunal administratif de Nantes a condamné solidairement la société Groleau-Thibault et Pochon et la société Niortaise de construction, prise en la personne de la SELARL Rabusseau, à verser à la commune de Benet la somme de 40 814,25 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis du fait des désordres affectant les façades sud et ouest de son stade municipal ainsi que la somme de 2 380,24 euros au titre des dépens. La société Groleau-Thibault et Pochon relève appel de ce jugement.

Sur la responsabilité contractuelle :

2. La société Groleau-Thibaut et Pochon ne conteste pas que la réception des travaux de réalisation d'une extension des tribunes et des vestiaires du stade de football de la commune de Benet a été prononcée avec des réserves concernant les enduits et la maçonnerie en briques des murs en façades ouest et sud de l'extension. Par suite, le maître d'ouvrage pouvait rechercher la responsabilité contractuelle du maître d'oeuvre et de la société qui a exécuté les travaux pour obtenir la réparation des désordres qui affectent ces murs.

3. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise déposé par M. C...le 27 juin 2013, ainsi que des rapports d'expertise amiable des 30 novembre 2009 et 21 juin 2010 que les désordres affectant les ouvrages des façades ouest et sud des tribunes du stade municipal consistent en une fissuration en étoile de l'enduit dont la cause réside dans la mise en oeuvre le 15 juillet 2009 de la première couche d'enduit qui n'a pas adhéré à la brique, ce qui a nécessité son enlèvement qui a fragilisé la brique eu égard à la méthode retenue. Par ailleurs, la première couche d'enduit était d'une épaisseur de 4 à 6 mm seulement alors que la seconde couche était beaucoup plus épaisse avec 13 à 20 mm, ce qui n'est pas conforme au DTU 20.1 qui préconise une première passe d'au moins 7 mm et un équilibre entre les deux couches.

Sur le partage de responsabilité et les appels en garantie :

4. La responsabilité des désordres décrits au point 3 incombe pour une large part à la société Niortaise de construction, en charge de la pose de l'enduit. Il résulte en effet de l'instruction que cette société ne surveillait même pas l'avancement des travaux d'enduisage confiés à l'entreprise Enduits Pro alors qu'il lui incombait de répondre de son sous-traitant. Contrairement à ce que fait valoir la requérante, cette responsabilité incombe également, dans une moindre mesure, à la société Groleau-Thibault et Pochon, chargée en sa qualité de maître d'oeuvre de la direction et du suivi de l'exécution des travaux en application des articles 6.2.7 et 23 du cahier des clauses administratives particulières du marché de maîtrise d'oeuvre conclu avec la commune de Benet le 5 octobre 2006. Le fait que la société Niortaise de construction devait répondre de son sous-traitant n'exonérait pas l'architecte de son obligation d'exercer, de son côté, la coordination des travaux de reprise des enduits et la surveillance du chantier qui lui incombaient comme maître d'oeuvre, et qui ne se limitaient pas à la rédaction de comptes-rendus de réunions de chantier. Dès lors il y a lieu de confirmer le partage de responsabilité, à hauteur respective de 80 % et 20 %, retenu par le tribunal administratif de Nantes ainsi que la condamnation de la société Niortaise de construction, prise en la personne de la SELARL Romain Rabusseau mandataire liquidateur, à garantir la société Groleau-Thibault et Pochon à hauteur de 80%.

5. En outre, si la société Groleau-Thibault et Pochon reproche à la société ATES, bureau d'études techniques structure, membre du groupement de maîtrise d'oeuvre, de n'avoir transmis aucun document au cours des opérations d'expertise permettant à l'expert judiciaire de vérifier la conformité de la structure en façade est de l'extension, cette demande était sans lien direct avec les désordres dont il est demandé réparation dans le cadre du présent litige, affectant les façades sud et ouest de l'extension des tribunes du stade municipal, la circonstance que la société ATES fût membre du groupement de maîtrise d'oeuvre, non solidaire, étant à cet égard sans incidence. Par voie de conséquence, ainsi que l'ont retenu les premiers juges, l'appel en garantie formé par la société Groleau-Thibault et Pochon à l'encontre du cabinet ATES ne peut, par suite, qu'être rejeté.

Sur le montant de l'indemnité :

6. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise judiciaire remis le 27 juin 2013 que le montant des travaux de reprise des désordres affectant les façades ouest et sud des tribunes du stade municipal correspond au coût du bardage des murs sinistrés. Il a été évalué par l'expert à la somme de 37 600 euros TTC, somme que la requérante ne conteste pas.

7. La société Groleau-Thibault et Pochon fait valoir qu'elle n'a pas à supporter la charge des frais d'expertise amiable réalisée par le cabinet Cristalis à hauteur de 3 214,25 euros TTC. Toutefois, ces expertises ayant été utiles à la constatation des désordres, à la détermination de leurs causes et à l'évaluation du préjudice subi par la commune, cette dernière est fondée à obtenir le remboursement des frais qu'elle justifie avoir engagés à ce titre.

Sur les dépens :

8. Comme l'ont jugé les premiers juges, les frais de l'expertise judiciaire, taxés et liquidés à la somme de 2 380,24 euros par une ordonnance du président du tribunal administratif du 12 août 2013, doivent être mis à la charge solidaire de la SARL d'architectes Grosleau-Thibault Pochon et de la société Niortaise de construction prise en la personne de la SELARL Romain Rabusseau, mandataire liquidateur.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Benet, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la société Groleau-Thibault et Pochon au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Groleau-Thibault et Pochon la somme de 1 500 euros chacune au profit de la commune de Benet et de la société ATES au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société Groleau-Thibault et Pochon est rejetée.

Article 2 : La société Groleau-Thibault et Pochon versera à la commune de Benet et à la société ATES la somme de 1 500 euros chacune en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Groleau-Thibault et Pochon, à la société ATES, à la commune de Benet et à la SELARL Rabusseau ès qualités de mandataire liquidateur de la société Niortaise de construction.

Copie en sera adressée, pour information, à la MAF, la société Axa et la SMABTP

Délibéré après l'audience du 4 septembre 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Tiger-Winterhalter, présidente-assesseure,

- MmeF..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 21 septembre 2018.

La rapporteure,

N. TIGER-WINTERHALTERLe président,

L. LAINÉ

La greffière,

V. DESBOUILLONS

La République mande et ordonne au préfet de la Vendée en qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N°17NT00859 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 17NT00859
Date de la décision : 21/09/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: Mme Nathalie TIGER-WINTERHALTER
Rapporteur public ?: M. BRECHOT
Avocat(s) : VEYRIER

Origine de la décision
Date de l'import : 25/09/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-09-21;17nt00859 ?
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