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09/11/2018 | FRANCE | N°18NT01352

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 09 novembre 2018, 18NT01352


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G...I...C...et Mme D...B...ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 26 mai 2016 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté leur recours formé contre la décision du 20 janvier 2016 par laquelle le consul général de France à Dacca (Bangladesh) a refusé de délivrer à Mme B...un visa de long séjour pour établissement familial.

Par un jugement n° 1606035 du 7 février 2018, le tribunal administratif de

Nantes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G...I...C...et Mme D...B...ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 26 mai 2016 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté leur recours formé contre la décision du 20 janvier 2016 par laquelle le consul général de France à Dacca (Bangladesh) a refusé de délivrer à Mme B...un visa de long séjour pour établissement familial.

Par un jugement n° 1606035 du 7 février 2018, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 4 avril 2018, M. G...I...C...et Mme D...B..., représentés par MeE..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 7 février 2018 ;

2°) d'annuler la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France du 26 mai 2016 ;

3°) d'enjoindre, sous astreinte, à l'administration de délivrer le visa sollicité ou de réexaminer la demande de Mme D...B...dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

­ les premiers juges n'ont pas examiné le moyen tiré de ce que la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a été prise en violation des dispositions de l'article 47 du code civil ;

­ la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France est insuffisamment motivée ;

­ la commission n'a pas procédé à un examen sérieux de la demande de visa dont elle était saisie ;

­ la décision contestée a été prise en méconnaissance des dispositions de l'article L. 721-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que M. G... I...C...a obtenu le statut de réfugié et qu'ils produisent le certificat de mariage délivré par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides attestant de leur mariage ;

­ elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation en ce qui concerne le certificat de naissance de Mme D...B..., la différence de numéros d'identification entre les pièces produites, la non-prise en compte de l'enquête de voisinage et la possession d'état ;

­ elle viole les dispositions de l'article 47 du code civil dès lors que l'administration n'était pas compétente pour remettre en cause l'authenticité des actes d'état civil bangladais ;

­ les dispositions du 8ème alinéa de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues dès lors que l'administration ne pouvait s'opposer à une demande de visa longue durée en qualité de conjointe de réfugié statutaire qu'en cas de menace à l'ordre public ;

­ la décision contestée viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il est établi que Mme D...B...a la qualité de conjointe d'un réfugié statutaire.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu

­ la convention du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés ;

­ la directive 2003/86 CE du 22 septembre 2003 ;

­ le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

­ le code civil ;

­ le code de procédure civile ;

­ la loi n° 2015-925 du 29 juillet 2015 ;

­ le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

­ le rapport de M. A...'hirondel

­ et les observations de MeF..., substituant MeE..., représentant M. C...et MmeB....

Considérant ce qui suit :

1. M. G...I...C...et Mme D...B...relèvent appel du jugement du tribunal administratif de Nantes du 7 février 2018 qui a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision du 26 mai 2016 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté leur recours formé contre la décision du 20 janvier 2016 par laquelle le consul général de France à Dacca (Bangladesh) a refusé de délivrer à Mme B...un visa de long séjour pour établissement familial.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article L. 721-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'office est habilité à délivrer, après enquête s'il y a lieu, aux réfugiés et bénéficiaires de la protection subsidiaire les pièces nécessaires pour leur permettre soit d'exécuter les divers actes de la vie civile, soit de faire appliquer les dispositions de la législation interne ou des accords internationaux qui intéressent leur protection, notamment les pièces tenant lieu d'actes d'état civil. / Le directeur général de l'office authentifie les actes et documents qui lui sont soumis. Les actes et documents qu'il établit ont la valeur d'actes authentiques. / Ces diverses pièces suppléent à l'absence d'actes et de documents délivrés dans le pays d'origine (...) ". Aux termes du II de l'article L. 752-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de la loi du 29 juillet 2015: " (...) / La réunification familiale n'est pas soumise à des conditions de durée préalable de séjour régulier, de ressources ou de logement. / Les membres de la famille d'un réfugié ou d'un bénéficiaire de la protection subsidiaire sollicitent, pour entrer en France, un visa d'entrée pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois auprès des autorités diplomatiques et consulaires, qui statuent sur cette demande dans les meilleurs délais. / Pour l'application du troisième alinéa du présent II, ils produisent les actes de l'état civil justifiant de leur identité et des liens familiaux avec le réfugié ou le bénéficiaire de la protection subsidiaire. En l'absence d'acte de l'état civil ou en cas de doute sur leur authenticité, les éléments de possession d'état définis à l'article 311-1 du code civil et les documents établis ou authentifiés par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, sur le fondement de l'article L. 721-3 du présent code, peuvent permettre de justifier de la situation de famille et de l'identité des demandeurs. Les éléments de possession d'état font foi jusqu'à preuve du contraire. Les documents établis par l'office font foi jusqu'à inscription de faux. (...) ".

3. Les dispositions précitées de l'article L. 752-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont, dès lors que la loi du 29 juillet 2015 n'a, en ce qui concerne leur entrée en vigueur, prévu ni délai particulier, ni disposition transitoire, devenues applicables le 31 juillet 2015, lendemain de leur publication au Journal officiel, à toute situation non juridiquement constituée au nombre desquelles figurent les instances en cours concernant les refus de visas sollicités sur le fondement du respect du principe de l'unité familiale du réfugié ou du protégé subsidiaire tel qu'issu des stipulations de la convention du 28 juillet 1951. Il en résulte que, à compter de cette date, les documents établis par le directeur de l'office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) en application des dispositions de l'article L. 721-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, font foi, quelle qu'ait été la date de leur délivrance, tant que n'a pas été mise en oeuvre par l'administration la procédure d'inscription de faux prévue aux articles 303 à 316 du code de procédure civile et en cours d'instance à l'article R. 633-1 du code de justice administrative.

4. Il ressort des pièces du dossier que M. G...I...C..., qui est de nationalité bangladaise, a obtenu le statut de réfugié par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 16 novembre 2012. Les requérants produisent le certificat que le directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a établi le 22 janvier 2014, conformément aux dispositions de l'article L. 721-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et qui atteste de leur mariage le 15 août 2009 à Moulvibazar (Bangladesh). En l'absence de mise en oeuvre par le ministre de la procédure d'inscription de faux, ce document fait foi en ce qui concerne l'existence du lien matrimonial unissant M. G... I...C...et Mme D...B.... Par suite, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation en refusant de délivrer un visa de long séjour à Mme B...au motif que le lien familial allégué n'était pas établi.

5. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la régularité du jugement attaqué, ni les autres moyens de la requête, que M. C...et MmeB... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par ce jugement, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

6. Le présent arrêt, eu égard à ses motifs, et sous réserve d'un changement dans les circonstances de droit ou de fait, implique la délivrance à Mme D...B..., du visa de long séjour sollicité. Il y a lieu, par suite, d'enjoindre au ministre de délivrer à l'intéressée le visa sollicité dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Sur les frais liés au litige :

7. Pour l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. G...I...C...et Mme D...B...et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 7 février 2018 et la décision de la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France du 26 mai 2016 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer à Mme D...B..., sous réserve d'un changement dans les circonstances de droit ou de fait, un visa de long séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. G...I...C...et à Mme D...B...la somme globale de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent jugement sera notifié à M. G...I...C..., à Mme D...B...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 23 octobre 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président,

- Mme Brisson, président-assesseur,

- M. A...'hirondel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 9 novembre 2018.

Le rapporteur,

M. H...Le président,

A. PEREZ

Le greffier,

A. BRISSET

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18NT01352


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT01352
Date de la décision : 09/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Michel LHIRONDEL
Rapporteur public ?: M. DERLANGE
Avocat(s) : TAELMAN

Origine de la décision
Date de l'import : 13/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-11-09;18nt01352 ?
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