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26/12/2018 | FRANCE | N°18NT01243

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 26 décembre 2018, 18NT01243


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...B...a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 21 août 2017 par lequel la préfète d'Eure-et-Loir lui a refusé le titre de séjour sollicité, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de renvoi en cas d'exécution forcée de sa décision.

Par un jugement n° 1703266 du 5 décembre 2017, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des

mémoires enregistrés les 21 mars, 2 mai et 18 juillet 2018, Mme B..., représentée par MeA..., demande ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...B...a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 21 août 2017 par lequel la préfète d'Eure-et-Loir lui a refusé le titre de séjour sollicité, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de renvoi en cas d'exécution forcée de sa décision.

Par un jugement n° 1703266 du 5 décembre 2017, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 21 mars, 2 mai et 18 juillet 2018, Mme B..., représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Orléans du 5 décembre 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté de la préfète d'Eure-et-Loir du 21 août 2017.

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 5 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions conjuguées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991

Elle soutient que :

- la décision est entachée de défaut de motivation dès lors que l'avis du médecin de l'agence régionale de santé n'est ni joint ni incorporé à l'arrêté préfectoral ;

- le Stilnox et le Norset ne sont pas disponibles au Congo et le préfet ne pouvait donc lui refuser la délivrance d'un titre de séjour au titre de L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- sa pathologie est liée aux évènements subis dans son pays et elle ne peut être soignée au Congo, pour cette raison ;

- un titre de séjour aurait dû lui être délivré sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision d'éloignement méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Par des mémoires en défense enregistrés les 25 avril et 14 mai 2018, le préfet d'Eure-et-Loir conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par Mme B...ne sont pas fondés et que la requête est tardive.

Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 12 février 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique modifiée ;

- le décret n°91-1266 du 19 décembre 1991 relatif à l'aide juridique modifié ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Giraud a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C...B..., ressortissante congolaise (République démocratique du Congo), née le 27 juillet 1971, est selon ses déclarations entrée irrégulièrement sur le territoire national le 2 novembre 2012. Elle a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile le 14 décembre 2012 mais sa demande en vue de se voir reconnaître la qualité de réfugié a été rejetée par une décision de l'Office français pour la protection des réfugiés et apatrides du 29 octobre 2013, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 27 mars 2014. Le préfet d'Eure-et-Loir a pris à son encontre, le 28 juillet 2014, un arrêté lui refusant le titre de séjour sollicité, assorti d'une obligation de quitter le territoire français. Mme B...qui indique ne jamais avoir été destinataire de cet arrêté a déposé auprès des services de la préfecture d'Eure-et-Loir, le 2 avril 2015, une demande de titre de séjour en qualité d'étranger malade laquelle lui a été refusée par un arrêté du 22 juin 2015. Cet arrêté a été annulé par le tribunal d'Orléans par un jugement du 3 novembre 2015. En exécution de ce jugement, le préfet d'Eure-et-Loir a délivré une carte de séjour portant la mention vie privée et familiale à la requérante en raison de son état de santé. Cette dernière a sollicité du préfet d'Eure-et- du 21 août 2017 le renouvellement de sa demande. Mme B...relève appel du jugement du tribunal administratif d'Orléans ayant rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur les conclusions à fin d'annulation et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le préfet :

2. En premier lieu, la requérante affirme que l'arrêté contesté, fondé sur un avis du médecin de l'agence régionale de santé, non joint ni incorporé dans le corps dudit arrêté, est insuffisamment motivé. Toutefois, il ressort des termes de la décision portant refus de séjour qu'elle mentionne la nature de l'avis rendu par le médecin de l'agence régionale de santé, et en reprend explicitement les termes, le préfet s'en étant ainsi approprié les motifs. Alors qu'il ne résulte d'aucun texte que l'avis du médecin de l'agence régionale de santé doit être joint à la décision contestée, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit (...)11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police (...) ".

4. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle.

5. La partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé allant dans le sens de ses dires doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.

6. Il ressort des pièces du dossier que dans son avis du 30 janvier 2017, dont le préfet s'est approprié les termes, le médecin de l'agence régionale de santé a précisé que l'état de santé de Mme B...nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'il existe un traitement approprié dans son pays d'origine vers lequel elle peut voyager sans risque. Mme B...qui indique et justifie souffrir de troubles psychiatriques sévères liés à des traumatismes subis dans son pays d'origine, fait valoir que le traitement nécessité par son état, au demeurant inchangé depuis 2014, n'est pas disponible dans son pays d'origine, notamment s'agissant des médicaments Stilnox et Norset, et produit à l'appui de ses allégations plusieurs ordonnances et certificats médicaux, l'un d'entre eux daté du 21 juin 2017, mentionnant la nature du traitement suivi et la liste des médicaments prescrits. Toutefois, le préfet a produit un nouvel avis du médecin de l'agence régionale de santé daté du 17 octobre 2017 indiquant que les molécules composant le traitement prescrit à l'intéressée peuvent faire l'objet d'une substitution au sein de la même famille médicamenteuse et précisant pour chacune d'entre elles la molécule substituable, lesdites molécules figurant sur une liste des médicaments essentiels en République démocratique du Congo établie en 2010 dont il n'est pas soutenu qu'elle ne serait plus à jour. Ainsi, le moyen tiré de ce que le préfet d'Eure-et-Loir aurait méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

7. En troisième lieu, MmeB..., qui ne justifie d'aucunes considérations humanitaires ou motifs exceptionnels au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'est pas fondée à invoquer le bénéfice de ces dispositions.

8. En quatrième lieu, Mme B...soutient souffrir de troubles psychiatriques sévères liés à des traumatismes subis dans son pays d'origine. Cependant, alors que sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français pour la protection des réfugiés et apatrides du 29 octobre 2013, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 27 mars 2014, elle n'apporte pas d'éléments qui permettraient de justifier qu'elle serait exposée à des traitements inhumains ou dégradants en cas de retour en République démocratique du Congo. Elle n'est par suite pas fondé à soutenir que la décision fixant son pays de renvoi serait contraire aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

9. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Sur les conclusions tendant à l'application des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que le conseil de Mme B...demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera adressée pour information au préfet d'Eure-et-Loir.

Délibéré après l'audience du 11 décembre 2018, où siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- Mme Brisson, président-assesseur,

- M. Giraud, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 décembre 2018.

Le rapporteur,

T. GIRAUD Le président,

A. PEREZ

Le greffier,

A. BRISSET

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18NT01243


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT01243
Date de la décision : 26/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Thomas GIRAUD
Rapporteur public ?: M. DERLANGE
Avocat(s) : BLIN

Origine de la décision
Date de l'import : 15/01/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-12-26;18nt01243 ?
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